Palmarès des exécutions de 1871 à 1977


FRANCE 1871-1977

Code couleurs :

– Rouge : exécutions capitales par guillotine, suite à une condamnation à mort prononcée par une cour d’assises.
– Orange : exécutions capitales par guillotine, suite à une condamnation à mort prononcée par un tribunal militaire.
– Gris : exécutions capitales par guillotine, suite à une condamnation à mort prononcée par un tribunal d’Etat/Section spéciale.
– Violet : exécutions capitales par fusillade, suite à une condamnation à mort prononcée par une cour d’assises.
– Bleu : exécutions capitales par fusillade, suite à une condamnation à mort prononcée par un tribunal militaire.

Date Heure Lieu Nom Crime Exécution Condamnation 06 février 1871 Lundi,
8h25, 8h27, 8h29, 8h31 Hautefaye
Dordogne Pierre « Piarrouty » Léonard, Pierre « Arnaud » Buisson, François Mazière et François « Sillou » Chambord Léonard, 53 ans, chiffonnier ; Buisson, 33 ans, agriculteur ; Mazière, 29 ans, agriculteur ; Chambord, 33 ans, maréchal-ferrant. Le 16 août 1870, en état d’ébriété avancée, les paysans ultra-bonapartistes du village d’Hautefaye agressent le châtelain Alain de Moneys, 34 ans, en l’accusant à tort d’être un agent des Prussiens. Ils le torturent horriblement, le battent avec outils et bâtons, et finissent par le brûler vif sur la place du village. En raison du siège de Paris, Heidenreich, bourreau de France, ne peut se déplacer : c’est l’exécuteur de Bordeaux, Charles-Louis Desmorest, qui se charge du supplice, assisté par le bourreau de Limoges. Les condamnés sont informés du rejet de la grâce le 5 février vers 15h. Seul Chambord comprend directement la nouvelle et se charge de l’expliquer à ses complices, avant de s’évanouir, tandis que les trois autres pleurent. Chambort refuse toute nourriture, Mazière et Buisson optent pour un chabrol et Piarrouty un verre de fine. Entendent la messe de Monseigneur Dabert, pleurent durant l’office. Nourris de soupe et d’eau-de-vie jusqu’à provoquer une certaine ivresse, sont transférés à partir de 20 heures. Arrivent à 5h40 à Hautefaye, et sont conduits chez M.Antony, à quarante mètres de l’échafaud. Libérés de la camisole, Piarrouty demande à nouveau à manger : on lui sert du pain, du lard et du vin. Quand on demande leurs dernières déclarations, Piarrouty répond : « Je ne dois rien à personne. Mon fils unique est mort au champ d’honneur comme remplaçant d’un capon. La France lui doit le souvenir. » Les trois autres se contentent d’évoquer des dettes à payer et des legs à donner, non sans manifester d’amers remords. Après avoir trinqué et bu du café, sont confiés aux aides-exécuteurs. Piarrouty engueule l’aide qui lui coupe le col de la chemise, et également quand on le ligote. Tous embrassent le crucifix avant d’être basculés. 21 décembre 1870 13 mars 1871 Lundi,
6h30 Mont-de-Marsan
Landes Jean Sabathé 44 ans. Tua à coups de hache Bernard Carrère, sa femme Marie Boignières, et blessa grièvement la bonne Marie Dumas, 15 ans le 28 octobre 1870 à Pouydesseaux. Réveillé à 4h30. Pleure un peu en entrant dans la chapelle, entend la messe avec recueillement, communie. Demande une tasse de café et une cigarette. Pâle mais sans faiblesse, arrivé place de la Tannerie, il embrasse le crucifix, lève les yeux aux ciel et se livre aux bourreaux. 03 février 1871 21 juillet 1871 Vendredi,
4h45 Nantes
Loire-Inférieure Charles L’Hospitalier 56 ans, marin. Condamné plusieurs fois pour vols par les tribunaux maritimes, ainsi qu’à trois ans de prison pour attentat à la pudeur, et cinq ans de travaux forcés à Cayenne pour vols qualifiés. Revenu du bagne fin 1870. Commet entre janvier et février 1871 plusieurs attentats à la pudeur sur des enfants. Dans la nuit du 26 au 27 février 1871, à Saint-Nazaire, route de Guérande, tue dans sa maison isolée (un cabaret) la veuve Provost, 70 ans, qu’il viole et étrangle avant de voler son argent. Exécution effectuée par Louis Deibler, exécuteur de Rennes, assisté par Heidenreich, exécuteur de France, avec la guillotine locale. Réveillé à 2 heures. Dit qu’il s’y attendait depuis plusieurs jours. Après la toilette, on préfère le conduire en fourgon au lieu d’exécution, la place Viarmes, plutôt que de l’y conduire à pied tant on craint qu’il ne tombe de faiblesse. S’évanouit en gravissant les marches de l’échafaud. Sur la bascule, sort de son état d’inconscience, résiste. Heidenreich est couvert de sang. 13 juin 1871 28 août 1871 Lundi,
5h Chaumont
Haute-Marne Michel-Auguste Bourgund 34 ans, manouvrier. A Sommancourt, tue à coups de couteau dans la nuit du 20 au 21 mars 1871 M.Formel, maire octogénaire du village, et Léonie Paymal, sa domestique de 21 ans, pour les voler. Heidenreich vient de Paris sans bois de justice : c’est Aimé Etienne, adjoint-exécuteur de Dijon, qui lui apporte la guillotine locale, laquelle sera ramenée à Paris après l’exécution. Réveillé à 3 heures du matin, prostré. Entend la messe sans réagir et se confie aux exécuteurs tout aussi docilement. Conduit boulevard de l’Est près de Clamart, devant la porte du cimetière, il s’agenouille devant la guillotine, récite une prière et embrasse le crucifix avant de grimper les marches et d’être basculé. Sa tête roule sur le plancher. Dernier exécuté sur un échafaud. 29 juillet 1871 13 novembre 1871 Lundi,
7h Le Mans
Sarthe René Perrier 42 ans, tisserand. Le 06 avril 1871, à Chahaignes, assassine Jean Boucher, 59 ans, cultivateur. Il avait été engagé par Mme Boucher pour ce crime contre deux tonneaux de vin. Exécuté place de l’Hôpital. Couché sur la bascule, parvient à retirer la tête de la lunette et pousse des hurlements de peur. Après une minute de lutte, l’exécution peut enfin avoir lieu. Première exécution capitale effectuée avec la nouvelle « Berger », sans échafaud. 07 septembre 1871 30 janvier 1872 Mardi,
8h Saint-Bonnet-de-Salers
Cantal Antoine Ondet 48 ans, cultivateur. Avec ses cinq fils, se fait une spécialité de voler les maisons avant d’y mettre le feu. Incendie le 1er septembre 1870 à Boussac la grange de M.Riom. Le 18 septembre, toujours à Boussac, met le feu à la maison de la ferme Courboulès. Le 16 octobre, met le feu à la maison de la veuve Bachellerie. Le 18 mars 1871, fait flamber la maison et la grange de la Veuve Simon, à Tronchy. Le 21 mai 1871, en mettant le feu à la ferme de la Veuve Lacombe, incendient également les maisons Borne et Valeix-Lafarge. Ondet, au passage, étrangle la veuve Lacombe. La femme Ondet est condamnée à perpétuité, leurs fils LOuis et François à sept ans, et Jacques à six ans. Le cousin Jacques Blanié est condamné à huit ans de réclusion et Françoise Veyrières à cinq ans. Transféré en diligence de Saint-Flour à Saint-Bonnet pendant la nuit : passe la durée du voyage (70 km) à gémir et à prier en pleurant : « Pardonnez-moi, mon Dieu ! Mon Dieu, ayez pitié de moi ! » Arrive à 7h45. Se montre calme et résigné les dernières minutes de sa vie. Exécuté sur la place principale du village. Les bourreaux doivent séjourner dans le fourgon, aucune auberge du coin n’acceptant de les loger. 9 novembre 1871 19 février 1872 Lundi,
6h56, 6h58, 7h Chartres
Eure-et-Loir Louis Guénard, Eugène Quillou, Jean-François Prouste Guénard, 29 ans, charretier. Quillou, 36 ans, cultivateur. Proust, 46 ans, cultivateur. Gardes nationaux en 1870. Dans la nuit du 19 au 20 septembre 1870, à La Vieuville, commune d’Alluye, étranglent et étouffent les vieux et riches époux Chesneau et volent 4500 francs en billets et en pièces d’or, et cherchent à mettre la responsabilité du crime sur le dos des Prussiens. Arrêtés, ils bénéficient d’un non-lieu en décembre. Le 5 février 1871, dans son ivresse, Quillou commet la maladresse d’avouer son crime, et ce après avoir réglé de nombreuses dettes personnelles. Réveillés à 5h. Guénard crie : « On va donc nous couper le cou ! » Quillou, mort de peur, plante ses dents dans la couverture. Proust manque s’évanouir, puis gémit : » Je vous en prie, M. le directeur, ne me quittez pas ! » En guise d’aumônier, l’évêque de Chartres lui-même est présent. Pendant la toilette, Proust, refusant encore d’admettre ce qui se passe, gémit : « Il ne faut pas qu’il y ait de sens commun en France pour me guillotiner. Je ne suis pas un assassin. Je n’ai été criminel qu’une fois. Et encore, je n’ai fait qu’assister au crime sans y prendre part. » Après la toilette, il veut embrasser le gardien-chef et le directeur, et l’exécuteur Heidenreich montre des signes d’impatience. Exécutés place Porte Morard. 29 décembre 1871 27 février 1872 Mardi,
6h55 Saint-Mihiel
Meuse Armand Lahaye et Catherine Gerbeaux, épouse Namin 22 ans, 27 ans. Dans la nuit du 31 juillet au 1er août 1871, à Harville, tuent à coups de marteau et de hachette M. Lacaille, 65 ans, et sa fille Clotilde pour voler 40 francs.

NB : le 15 janvier 1883, la cour d’assises de la Meuse condamne à perpetuité Auguste Namin, 19 ans, le fils de Catherine Gerbeaux. Déjà condamné deux fois pour vols et abus de confiance, libéré de la prison de Bar-le-Duc le 21 janvier 1882, le lendemain, blesse gravement à coups de poing dans le visage Louise Mathieu, 7 ans : il s’était introduit dans la bergerie Mathieu, au lieu-dit « La Grange aux Champs », près de Ligny, afin de cambrioler la maison mais avait été surpris par l’enfant.

Réveillés à 6h15. Lahaye est surpris, mais comprend vite, avant même qu’on ne le lui annonce : « Tout est donc réglé ? Le moment est venu ? » Il passe pantalon et gilet, et demande s’il est nécessaire d’enfiler sa blouse. Catherine était réveillée aussi. Elle éclate en sanglots, mais dit : « Je suis prête. Je sais que j’ai mérité la mort. Seulement, on aurait dû me prévenir hier pour que je puisse encore recommander mon âme à Dieu ! » Au greffe, les amants et complices s’embrassèrent une dernière fois en se demandant mutuellement pardon de s’être accusés l’un l’autre. 11 janvier 1872 05 mars 1872 Mardi,
7h Marquise
Pas-de-Calais François-Joseph Lemettre 26 ans, surnommé « Le Troppmann du Nord ». En 1864, met le feu à la grange de la ferme d’Onglevert à Audresselles, puis à la ferme Framery. Agresse le 19 septembre 1869 Philippe Pruvost, brasseur, 19 ans, pour le voler et le laisse pour mort. Au cours de la même année 1869, étrangle, vole et viole trois gars de son âge : Adolphe Cugny, 22 ans, Eugène Foucart, 19 ans, retrouvés morts en pleine rue, et Félicien Malfoy, 26 ans, dont il jette le corps dans un puits de la ville. La nuit de Noël 1869, pendant la messe de minuit, pille le presbytère et vole argenterie et monnaie. Extrait de la prison de St-Omer le 04 mars à 23 heures et transporté en voiture jusqu’à Marquise où il arrive à 5 heures du matin. Au lieu de procéder à la toilette à la mairie, comme initialement prévu, les officiels profitent de la générosité d’un bourgeois qui réside place du Marché-aux-Bestiaux, lieu d’exécution. Dans un salon privé, devant un bon feu, Lemettre se réchauffe et boit une tasse de café noir. Très calme, ferme, ne proteste pas une seule fois, sauf quand on découpe son col : « Une chemise toute neuve ! Quel dommage ! ». L’abbé Fanet, aumônier de St-Omer, l’exhorte à se repentir, ce qu’il fait. Entre 5.000 et 12.000 personnes présentes. Trois quarts d’heure avant le supplice, une tribune installée par un profiteur s’écroule sous le poids des spectateurs : six ou sept personnes se blessent, ce qui ne les empêche pas de se re-installer sur la tribune sitôt celle-ci remontée. 03 janvier 1872 11 mars 1872 Lundi,
6h Versailles
Seine-et-Oise Gustave Brûlé 32 ans, sabotier. Tua à Vernoy, ferme des Guérins, dans la nuit du 9 août 1870 le sieur Griffaud à coups de tiers-point et tenta d’assassiner son fils Ernest pour voler une boîte de jetons et de cartes à jouer. Condamné dans l’Yonne, arrêt cassé en octobre 1871, recondamné à Melun, arrêt cassé de nouveau le 08 décembre, recondamné à Versailles. Son frère cadet Benoni, son complice, condamné à perpétuité, ne s’était pas pourvu en cassation. Réveillé à 4h30. « Ah, c’est pour aujourd’hui ? Je m’y attendais. D’ailleurs, je l’ai bien mérité. Combien de temps ai-je encore à vivre ? » « Jusqu’à six heures », répond le prêtre. « Eh bien, je suis content de mourir. » Il écrit au président Thiers pour demander de la clémence envers son frère. Il boit un verre de vin, puis entend la messe. Après la toilette, avant de monter dans le fourgon, remercie les gardiens et le directeur de la prison. Au Pont-Colbert, il se montre satisfait que ce soit la fin. En descendant, il dit : « Messieurs, je vous dirai que je suis coupable et que j’ai mérité la mort. Mais c’est ma maîtresse, Mme Griffaud, qui m’a poussé au crime. Quant à mon frère, il n’a rien fait, et j’ai écrit à son Excellence M. Thiers pour qu’il fasse descendre sa clémence sur lui. » Puis l’aumônier Folley l’embrasse et il est poussé sur la bascule. août 1871, 18 novembre 1871, 26 janvier 1872. 04 avril 1872 Jeudi,
5h Troyes
Aube Léon-Constant Bourgogne 19 ans. Sur les conseils de sa mère, tua pour les voler sa tante, la veuve Bourgogne (7 coups de couteau), sa cousine Mme Verrot (23 coups) et l’enfant de celle-ci, Emile, agé de 7 ans (7 coups), le 05 janvier 1872 à Nogent-sur-Aube. Il épargna le père de la veuve Bourgogne, le vieux Jacques Paret, endormi et sourd comme un pot. Sa mère et instigatrice du crime, Caroline-Jeanne Bourgogne-Kurtz, 49 ans, est condamnée à perpétuité. Réveillé à 4h30. Se doutait qu’il ne serait pas gracié. En apprenant la nouvelle, se met à trembler comme une feuille. « C’est donc fini ! » gémit-il. Pendant la toilette, pris de faiblesse, demande un verre de vin, qu’il n’avale qu’avec peine. Désire écrire à sa mère, détenue à la centrale d’Auberive, mais n’y parvient pas : l’aumônier promet de lui transmettre ses dernières paroles. Pendant le trajet vers la place Saint-Jacques, ne cesse de parler de sa mère. Arrivé au pied de la guillotine, dressée près du mur du couvent de Saint-Martin, a un mouvement de recul qu’il refrène vite et meurt courageusement. 6.000 personnes présentes. Suite au décès de Jean-François Heidenreich, le 27 mars, exécution accomplie par Nicolas Roch, premier adjoint, à la veille de sa titularisation officielle en tant que chef. 22 février 1872 09 avril 1872 Mardi,
5h10 Melun
Seine-et-Marne Auguste-Isaïe Ducorbier 26 ans, cultivateur à Rebaix. Fit assassiner à coups de hache le 21 novembre 1871 son épouse Marie Fallet, enceinte de cinq mois, par un ouvrier agricole Bertin, 34 ans, pour 2.000 francs. Condamné le même jour que Ducorbier à la réclusion perpétuelle, Bertin se pendit le soir-même. Réveillé à 4h50. Réveillé en sursaut, pâlit terriblement : « Mon Dieu ! Mon Dieu ! Est-ce possible ? » A la demande de l’aumônier, se résigne. Toilette sans histoires : demande un verre d’eau-de-vie qu’il avale d’un trait. Demande des nouvelles de sa vieille mère malade, et s’inquiète pour ses deux enfants en bas âge que son exécution va laisser orphelins : « Mes pauvres enfants ! Que vont-ils devenir ? » Arrivé devant la porte du cimetière, route de Meaux, lieu d’exécution, il est rapidement basculé, mais en l’absence des bourreaux, quelqu’un avait retiré le levier de commande, et Nicolas Roch passa une bonne minute à le chercher avant de pouvoir accomplir son office. 1.000 personnes présentes. 12 février 1872 13 avril 1872 Samedi,
4h50 Mézières
Ardennes Jean-Baptiste Auguste Loth et Félicité Lombin, épouse Loth 31 ans, maréchal-ferrant et 55 ans, sans profession. Couple sans domicile. Après l’avoir rencontré dans un cabaret de Reims, conçurent le plan de tuer M.Leroi, messager de Reims à Rethel pour le voler. S’embusquèrent dans la soirée du 23 septembre 1871 au carrefour d’Isles-sur-Suippe et quand Leroy arriva dans sa voiture, Loth lui sauta dessus, le frappa à coups de couteau et traîna le mourant vers le fossé. Sur le conseil de sa femme, lui scie le cou avec son couteau. Butin bien maigre : uniquement le contenu de ses poches, soit 300 francs à peine. Félicité réveillée la première à 4h. Pleure à chaudes larmes : « Je meurs innocente, ce qui m’a perdue, ce sont les mauvaises compagnies ! » Loth, lui, est calme et résigné. La toilette est effectuée dans le vestibule. Pris d’un tremblement, Loth doit boire un verre de liqueur pour se donner du courage. Roch lui demande : « Est-ce que je vous fais mal ? C’est une simple formalité. » L’abbé Millard lui demande de faire preuve de courage. Félicité s’asseoit tranquillement pour la toilette. Proteste quand on lui retire son bonnet, mais Roch promet de le lui rendre et lui pose sur les genoux. A sa demande également, il garde une mèche de cheveux de côté pour qu’elle soit remise à sa famille. Avant de monter dans le fourgon, à l’initiative de l’aumônier, les époux s’embrassent et se pardonnent : « Quel malheur ! » gémit Félicité. A l’arrivée place des exécutions, route de Rethel, la femme passe la première avec calme. Son mari assiste à toute la scène, impassible, avant d’être décapité à son tour. 22 février 1872 19 avril 1872 Vendredi,
5h Dijon
Côte-d’Or Pierre-Jean Rouette 26 ans, journalier à Chevigny-sous-Bèze. Etrangla le 18 septembre 1871, la veuve Magnien à Noiron-sous-Bèze (sa mort passe pour une attaque d’apoplexie), le 7 novembre 1871, la veuve Cornot, également à Noiron, dans les deux cas pour les voler. Arrêté après la seconde victime, il avouera également le premier crime. Déjà réveillé à l’arrivée des officiels, à 4h. Entend avec résignation l’abbé Tamine l’exhorter au courage. Refuse de prendre la moindre nourriture d’une voix faible, et perd peu à peu tout son courage. Se trouve mal en voyant la guillotine, dressée sur la place de la prison, les aides sont obligés de le soutenir, et c’est presque mort qu’il est poussé sur la bascule. Foule immense. 21 février 1872 22 avril 1872 Lundi,
5h05 Aix
Bouches-du-Rhône Joseph Tourres 45 ans, cultivateur. Assassina sa femme Marie-Madeleine Marin dans la nuit de Noël 1871 à Orgon en lui fracassant le crâne avec un rouleau de bois puis en lui plantant une fourche dans le visage. Avait volé 200 francs pour détourner les soupçons. Réveillé à 3h15. Aucune surprise, mais pose la question : « Ai-je deux ou trois jours pour me préparer ? » On lui répond deux heures. Il sourit, et dit « Je suis prêt. » Refuse toute nourriture mis à part un peu de chocolat. Va à la chapelle, entend la messe du père du Clot, puis reçoit la visite de son frère à qui il remet des lettres. Il ne tremble qu’au moment de la toilette, qui a lieu dans l’antichambre de la prison. A 5h30, il sort de la maison d’arrêt et parcourt les 25 mètres qui le séparent de la guillotine à pied, après avoir embrassé le crucifix une dernière fois. 27 février 1872 17 juin 1872 Lundi,
4h59 Paris Jean-Baptiste Moreux 33 ans. Dans la nuit du 20 au 21 janvier 1872, étrangla chez elle, rue Cambronne, la prostituée Zoé Garnier, dite « Frisette » pour la voler. Fut pris car il força sa femme à porter les bijoux de sa victime. Réveillé à 4h. Comprend ce qui l’attend sans qu’on le lui dise. On enlève la camisole et on lui laisse passer ses vêtements. Ecoute le prêtre avec attention et recueillement. Remis à M.Roch délié, le bourreau s’en étonne. Quand il veut l’attacher, le colosse Moreux dit : « Non, non, ne m’attachez pas, je vous en prie, je ne peux point me sauver, ne craignez rien, mais ne m’attachez pas. » Roch ne peut accepter, mais promet de laisser assez de mou dans les attaches. Arrivé devant la machine, regarde le couteau et dit : « Ah, le voilà donc, cet ignoble instrument, ce fatal cou… » On ne lui laisse pas le temps d’achever, le couperet s’abat. 400 personnes présentes au plus. 13 mai 1872 06 juillet 1872 Samedi,
5h Caen
Calvados Charles-Manuel « Jean » Mancel 49 ans, tailleur de pierres. Père violent. Tua sa fille, Marie-Aline, 17 ans, le 14 mars 1872 à Louvigny à coups de couteau dans la poitrine parce qu’elle refusait de se livrer à ses désirs incestueux. En voyant la machine, dressée place du Marché à deux pas des devantures des maraîchers, Mancel hurle : « Je meurs innocent ! C’est une injustice ! Vengeance !  » Puis il manque s’évanouir, et c’est à demi-conscient qu’il est conduit sur la bascule. 12.000 personnes présentes. 14 mai 1872 27 juillet 1872 Samedi,
4h Toulouse
Haute-Garonne Francisco Beltran-Trem 38 ans, sans profession. Egorgea, avec deux complices, Jean-Baptiste Salles pour le voler dans la nuit du 11 au 12 mars 1872 dans le quartier d’En Jacca, à Colomiers. Réveillé à 3 heures. Aucune émotion. Accepte les secours de la religion. Au greffe, avisant un enfant (celui d’un gardien ?) il lui dit : « Tu diras un pater et un Ave pour moi. Je pardonne à tout le monde. » Mange un peu, boit du café. A 3h45, le fourgon quitte la prison, direction le Port-Garaud. Pendant le trajet, l’abbé Pelletan l’exhorte au courage. Seul signe de peur : de légères contractions du visage. Silence absolu durant l’exécution : 9.000/10.000 personnes présentes, dont pas mal de femmes. 21 mai 1872 29 juillet 1872 Lundi,
4h35, 4h40 Marseille
Bouches-du-Rhône Isaac Sitbon et Raphaël Toledano 20 ans, commerçant et 21 ans, courtier, Tunisiens, Juifs. Etranglent, poignardent et découpent à la scie Angelo Grego, commerçant tunisien, pour lui voler 50.000 francs le 16 janvier 1872 chez lui, rue Montgrand à Marseille. Ils se débarrassent ensuite des morceaux du cadavre en le jetant à la mer. Leur exécution était prévue le 20, mais Roch, malade, ne put quitter Paris que cinq jours plus tard, ce qui inversa l’ordre d’exécution Marseille/Toulouse. Prévenus (accidentellement) par la venue du rabbin Lion le samedi matin à la prison d’Aix-en-Provence où ils sont incarcérés. Avertis de la nouvelle officiellement dans la nuit de dimanche à lundi,
très abattus. On leur propose de prendre quelque chose avant de prendre la voiture pour Marseille. Sitbon refuse, Toledano veut bien du cognac. Demandent si le rabbin Vidal est présent : en le voyant, pleurent et lui prennent la main. Saluent leurs gardiens avant de partir, à 1 heure du matin. 1.500 personnes assistent au départ de la prison aixoise. Tout au long de la route, les condamnés parlent avec le rabbin Vidal, demandent où ils vont mourir, comment on va les inhumer, et donnent leurs dernières volontés. Parfois, discutent entre eux en tunisien. En passant au village du Pin, Sitbon demande de quoi écrire, mais les cahots sont trop forts, alors il demande s’il lui sera possible d’écrire une fois à Marseille. Toledano boit plusieurs verres d’eau mêlée de cognac, et fume trois pipes. A 3h45, le fourgon stoppe devant le 1, rue Pontevès, lieu de la toilette. Toledano demande de l’eau pour se gargariser. Les deux écrivent quelques mots avant qu’on ne les attache. M.Roch leur demande, en les liant, s’il ne leur fait pas mal, puis leur promet que tout ira bien s’ils se montrent fermes et tranquilles. En voyant le fourgon des bourreaux – qu’ils n’emprunteront pas -, les condamnés se demandent s’il ne s’agit pas de la nouvelle guillotine elle-même ! Quand le fourgon cellulaire repart en direction de la place Saint-Lazare, tout leur courage disparaît, et leurs dernières paroles sont pleines d’amertume : Toledano se plaint de mourir à 21 ans, Sitbon espère qu’il fera encore sombre et qu’il n’y ait pas beaucoup de monde pour le voir mourir. Sitbon est exécuté le premier ; Toledano tente de résister en vain aux aides. 24 mai 1872 31 juillet 1872 Mercredi,
4h20 Lyon
Rhône Barthélémy Bernard 26 ans, cultivateur à Ampuis. Ayant fait un fils à Benoîte Paret, sa maîtresse, 20 ans, fille de cafetier, il promet de l’épouser, de reconnaître le petit et de quitter la ville. Le 8 octobre 1871, elle s’en va avec son petit : leurs corps sont retrouvés percés de coups de couteau le lendemain au milieu d’un champ, et sans qu’on ait volé ni ses bijoux ni son argent. Réveillé à 2h45. Devient livide. Conduit à la chapelle pour la messe et les secours de la religion. Confié à 3h45 aux aides pour la toilette. Prostré : reconnaît qu’il est un très grand coupable. Le fourgon va jusqu’au cours Charlemagne, près de l’Hippodrome, lieu d’exécution. Sur place, Bernard s’agenouille, reçoit la bénédiction d’un prêtre, l’embrasse avant d’être poussé sur la bascule. 4.000 personnes présentes environ. 01 juin 1872 03 août 1872 Samedi,
5h15 Arras
Pas-de-Calais Jean-Baptiste Joseph Courcol 56 ans, cultivateur à Ecoust-Saint-Mein. Tua son épouse Flore Angélique Coupé, 51 ans, dans son lit à coups de hache dans la nuit du 25 au 26 avril 1872 et épargna son fils Camille, 13 ans, qui dormait à côté. Ce dernier le dénonça. Au réveil, à 3h12, mort de peur, tremblant et atterré, il n’a absolument aucune conscience de ce qui se passe : n’arrive pas à se lever. Quand on lui enlève la camisole, perd ses dernières forces. On doit le soutenir tout au long de la matinée. Au pied de l’échafaud, place du Marché, on doit le pousser sur la bascule et il gémit : « Mon Dieu ! Mon Dieu ! » Entre 8.000 et 10.000 personnes assistent à son exécution. Pas de supplice à Arras à 1848. 17 juin 1872 16 août 1872 Vendredi,
5h03 Amiens
Somme Théophile-Hyacinthe Cauchy 22 ans, valet de charrue, tua à coups de marteau le 21 février 1872 à Bayonvilliers ses patrons, les Debros, vieux et impotents, ainsi que leur chien qui avait voulu les défendre. Son complice, Boitel, est condamné à 15 ans de travaux forcés. Meurt repentant. Avoue qu’il est coupable, pleure à chaudes larmes. Pendant la toilette, se sent mal. En descendant du fourgon, n’est plus qu’une loque qu’il faut soulever pour l’exécuter. Entre 5.000 et 6.000 personnes présentes. 07 juillet 1872 01 octobre 1872 Mardi,
6h Aix
Bouches-du-Rhône Luigi « Le Bachin » Garbarino et Antonio « Le Bochou » Galetto 33 ans et 20 ans, terrassiers, Italiens, chefs de la « bande de la Taille ». Tuent le 15 mai 1871 à Mallemort M.Martin, gardien du pont de la Durance. Le 19 août 1871, près de la Bastidonne, poignardent un certain Oscar Loneux pour lui voler une montre, des vêtements, son portefeuille. Dans la nuit du 2 au 3 septembre 1871, massacrent (égorgement à coups de couteau) André Garnier, Véronique Garnier, leur fille Euphrasie, épouse Sube, et leur nièce Rosa Granier à la ferme de l’Eve, à Lurs (Basses-Alpes). Le 25 octobre 1871, entre le château d’Albertas et l’auberge de la Moumine, brisent la tête d’Elzéard Sautel, 44 ans, messager à Apt, pour le dévaliser. Enfin, le 4 novembre 1871, à Meyrargues, assassinent Marie Julien, veuve Lambot, 76 ans. Seulement, l’un de leurs complices, Jacques Ribetto a acheté les biens de la victime en viager et se trouve donc le suspect parfait. Arrêté, dénonce ses complices. Angèle Arèse est condamnée à perpétuité. Francesco Bellora et Pasquale Montegazzo sont condamnés à vingt ans, Giuseppe Trinchieri à dix ans de réclusion. Giuseppe Montalbetti à cinq ans. Réveillés à 2 heures. L’aumônier Du Clôt et le père Garnier, supérieur des Oblats, leur prodiguent les secours de la religion. Se montrent calmes, obéissants. Admis membres de la confrérie des Pénitents bleus (moines qui, à Aix, s’occupent de l’inhumation des condamnés à mort). Nicolas Roch se présente à 5h30. Conduits entre les deux grilles de la prison pour la toilette, refusent toute nourriture à part un verre de rhum pour l’un, un verre de cognac pour l’autre. Galetto dit : « J’aime mieux mourir à présent, car plus tard, je commettrais encore quelques crimes. » En voyant la machine, les deux condamnés frémissent. Après avoir parcouru les 25 pas qui les séparent de la guillotine, s’embrassent mutuellement et embrassent les prêtres. Garbarino se tourne vers le public et dit d’une voix assez ferme : « Je meurs calme et en bon chrétien, j’offre ma vie pour la gloire de Dieu et l’expiation de mes pêchés. » Il est le premier à mourir. Galetto ne voit rien : le père Garnier le force à tourner le dos à la guillotine. « Non, non, cela ne fait rien. » Avant d’être basculé à son tour, il tente de parler : « Je ne veux dire qu’un mot… C’est une triste chose que la vie… Quand je suis venu en France, j’avais perdu la foi… Je remercie l’aumônier qui me l’a rendue… Maintenant, je meurs content ! » Mais à la dernière seconde, il gémit : « Je n’ai que 20 ans ! » Se débat quand on le saisit, et on doit tirer avec force sa tête dans la lunette. 3.000 personnes présentes. 17 juillet 1872 18 décembre 1872 Mercredi,
7h01 Paris Alphonse-Eugène Joly 24 ans, dix-neuf condamnations préalables. Condamné en juin 1872 à perpétuité pour attaque nocturne à main armée et vol route de Bagnolet. Au dépôt de la Roquette, en attente de partir au bagne pour y purger sa peine, tenta de tuer le gardien Havener le 23 juin 1872 à coups de bâton ferré. Grand sang-froid quand, à 6h30, on vient lui annoncer la nouvelle. Déjà réveillé. Résigné. Au greffe, boit un café et un verre d’eau-de-vie et recommande son épouse à l’abbé Crozes. Peu de monde présent à son exécution : une centaine de personnes au plus. 29 octobre 1872 06 janvier 1873 Lundi,
7h30 Besançon
Doubs Jean-Pierre Piégelin Contrebandier, déserteur. En compagnie de cinq autres contrebandiers, en franchissant la frontière franco-suisse à Etraches, dans la nuit du 26 au 27 juin 1872, tue à coups de couteau et de bâton le douanier Favre-Merceret et bât comme plâtre quatre autres douaniers. Ses complices écoperont de peines allant de dix-huit mois de prison à vingt ans de travaux forcés. Exécuté place de Chamars. Courageux, résigné. Les victimes de Pigelin viennent assister à sa mort. 07 novembre 1872 10 janvier 1873 Vendredi,
7h10 Reims
Marne Pierre-Auguste Garel 26 ans. Boucher. Le 12 août 1872 dans un champ de Reims, après avoir eu des relations sexuelles avec elle, tue la prostituée Sidonie Cauchy, l’assomme à coups de pierre, la décapite avec une serpette et l’éventre. Accueille le greffier en disant « Je vous attendais depuis quelques jours déjà. » Il remet une pièce de cinq francs à chacun de ses co-détenus (les « moutons »). Devant l’échafaud, parle à l’aumônier et donne une caresse à un chien qui a réussi à se faufiler jusque là. Refuse que les aides le poussent, va seul sur la bascule. 15 novembre 1872 14 janvier 1873 Mardi,
7h30 Rennes
Ille-et-Vilaine Christian-Ernest Lemarchand 32 ans, aide mécanicien sur bateau. Orphelin très jeune, le 13 janvier 1872 à Rennes, étrangla sa tante et bienfaitrice Angélique Pinel, institutrice, parce qu’elle refusait de lui donner de l’argent, pour lui voler deux obligations de l’Ouest et deux obligations de la Société immobilière. Sa précipitation à revendre les obligations dès février causa sa perte. En reconnaissant, derrière les officiels venus le réveiller, les bourreaux, pousse un hurlement de terreur. Prostré, se reprend, avoue son crime et reste en compagnie de l’aumônier. Après la toilette, se montre résigné. Descend avec calme du fourgon, et marche sans faiblesse vers la bascule. Grande foule présente. 19 novembre 1872 14 février 1873 Vendredi,
6h15 Lyon
Rhône Jean-Louis Vulliard et Claude Perret 41 ans, cocher, limonadier et 39 ans, corroyeur. Tuèrent dans la nuit du 27 au 28 mai 1872 à Monplaisir le vieux M.Patricot, commissionnaire à Vaise. Ils le plièrent en deux pour l’enfermer dans un sac et le jeter le long de la voix ferrée Lyon-Genève. Limonadier, Vulliard était en procès pour une affaire de détournement de gaz : Patricot, en tant que témoin, devait comparaître le matin-même au tribunal correctionnel, et en plus, Vulliard lui devait de l’argent. Un troisième complice, Nuet, fut condamné à perpétuité. Sans faiblesse au réveil. Vulliard, après avoir parlé à l’aumônier, tombe dans un état d’accablement total. Se confessent, communient, mais refusent de faire des dernières déclatations et également de se réconcilier l’un l’autre. Le chemin jusqu’à l’allée des Trois-Tunnels (cours Charlemagne) est long et à cause de la gelée, le fourgon ne peut rouler qu’au pas, ce qui fait que l’exécution est légèrement retardé. Vulliard descend le premier. On le porte jusqu’à la bascule. Plus courageux, Perret va sans faiblesse. 3000 spectateurs environ : l’un d’eux arrive à se faufiler assez près pour humecter son mouchoir de sang. 21 décembre 1872 25 mars 1873 Mardi,
6h Laon
Aisne Augustin Guyard PARRICIDE. 35 ans, vigneron. Assassina sa mère, Louise Catherine Sonnette, veuve Guyard, 56 ans, vigneronne, qu’il déteste, le 7 avril 1871 à Brasles, à coups de bâton ferré. Sa jeune nièce, Julie, témoin de la scène, le dénonça en octobre 1872. Pendant qu’on le prépare avec la tenue des parricides, il dit « Faites votre service et ne craignez rien, je ne bougerai pas. » Il demande à laisser ses vêtements aux nécessiteux, et veut faire don à la chapelle de la prison d’un Christ. Avant d’arriver au champ Saint-Martin, il dit « Je demande à Dieu de ne pas aller en enfer en arrivant. » 12 février 1873 29 mars 1873 Samedi,
6h Riom
Puy-de-Dôme François-Jacques Hébrard 26 ans, journalier à Chirat. Sur la route de Montferrand, abattit de deux coups de fusil son voisin Marien Courson au soir du 10 janvier 1873 pour lui voler sa sacoche contenant 591 francs. Hébrard avait une dette de 20 francs à règler à Courson, et refusait de le faire. Réveillé à 5h. Se confesse, entend la messe. Résigné, mais quelques signes de faiblesse. Quand le fourgon arrive place de la prison, la foule pousse quelques cris rapidement tus. Exécution sans histoire : 5.000 personnes présentes. 14 février 1873 09 avril 1873 Mercredi,
5h55 Melun
Seine-et-Marne Jean-Napoléon Sévin PARRICIDE, 20 ans, manouvrier. Le 25 décembre 1872, à Villiers-sous-Grez, tente de tuer son père Jean Sévin en lui tirant un coup de fusil dans la tête, puis en le frappant à coups de crosse de fusil et de serpe. Au réveil, à 5h, à la maison centrale de Melun, pris d’un léger tremblement nerveux. Calme durant la toilette. Pendant le trajet, parle à l’aumônier : « C’est toujours au même endroit que se font les exécutions. Il y a un an, on y a exécuté Ducorbier. Je me rappelle la pénible impression que j’ai éprouvée, parce que j’y assistais… » Arrivé devant le cimetière, en tenue de parricide, repris de ce tremblement en voyant le couperet. Les aumôniers, les pères Dégout et Desliens, lui donnent l’absolution. Il les embrasse, ainsi que deux gardiens présents. Un des aides s’avance : Sévin recule avec horreur, croyant que l’adjoint voulait être embrassé à son tour. M.Roch le prend par le bras. « Allons, mon ami. » « C’est affreux, j’ai juste vingt ans aujourd’hui ! Mon père m’a pardonné ! Oh, monsieur, ne me faites pas de mal! » Le greffier lit l’arrêt de condamnation avant qu’on ne le bascule. 20 février 1873 15 avril 1873 Mardi,
5h Angers
Maine-et-Loire François-Adrien « Isidore » Gautier 22 ans, cocher au château de M. de la Poèze à Broc. Pris en amitié par M.Auguste Bruère, cordonnier et facteur auxiliaire de Broc, il le remercia en devenant l’amant de sa femme, née Marie-Madeleine Hérissé, 26 ans. Informé par lettre anonyme de son cocufiage, Bruère interdit à Gautier de remettre les pieds chez lui, et qu’il ne pardonnerait cette tromperie que s’il quittait le pays. Les amants décidèrent de tuer l’époux gênant. A cinq reprises, les tentatives de guet-apens échouèrent. La sixième, le 23 septembre 1872, réussit : en rentrant de chez son père, sur la route de Chalounes à Broc, Bruère fut tué de cinq balles de revolver et six coups de couteau de boucher. Les deux amants sont condamnés à mort, et Marie graciée. Entrée des officiels à 4h : ne dort pas. Comprend aussitôt ce pourquoi on le réveille. Se confesse, annonce qu’il se montre résigné, puis demande ce qu’il va advenir de sa maîtresse. Informé de la grâce, répond : « Elle était bien coupable, car sans elle, je ne serais pas ici. Ce n’est qu’un instant terrible à passer, j’aime autant mon sort que le sien, je lui pardonne. » Au greffe, prend du café noir et s’entretient avec l’abbé Papin. En quittant la prison, embrasse les deux gardiens chargés de sa surveillance. Le condamné est dans un état de prostration tel qu’on doit le porter du fourgon jusqu’à la guillotine, dressée sur le pâtis Saint-Nicolas, à 3 kilomètres de la prison. 1000 personnes sont venues assister au supplice. Un soldat chargé du service d’ordre s’évanouit. 14 février 1873 19 avril 1873 Samedi,
5h Nantes
Loire-Inférieure Ignatio Yturmendi 24 ans. Poignarde à seize reprises le commandant carliste José Asla à Nantes le 21 décembre 1873 avec la complicité de San Vicente Lauriano et de Salvador Bilbao. Ses compagnons sont respectivement condamnés à perpétuité et à dix ans de travaux forcés. A son réveil, dit « Je me doutais bien que c’était pour aujourd’hui, c’est le 41e jour depuis ma condamnation ». Calme pendant la messe, perd tout contrôle de lui quand on l’autorise à voir son ami Bilbao, dont il a fait involontairement son complice, et demande à faire des révélations au procureur sur la responsabilité réelle du dernier complice, Lauriano, le vrai instigateur du crime. Après cela, se calme, boit double dose de rhum et de café et part à la mort en priant en silence. 08 mars 1873 24 avril 1873 Jeudi,
4h50 Lyon
Rhône Antoine Vachot 22 ans le jour de sa mort, commensal à Belleville. Le 19 décembre 1872, assassine à coups de canne le tailleur Léonard Vitte, au hameau de Bussy, commune de Saint-Georges-de-Reucins pour le voler. Une pipe en bois oubliée sur la table le trahit. Aucune réaction à la nouvelle. S’entretient avec l’aumônier, se confesse, entend la messe et se repent. « Triste anniversaire pour moi, monsieur l’abbé. » Toilette sans histoire. Foule bruyante sur le cours Charlemagne qui fait enfin silence quand le fourgon arrive. Exécution rapide. 1er mars 1873 24 mai 1873 Samedi,
5h Paris Antoine Couturier 60 ans, ancien employé des Pompes Funèbres, marchand de vin boulevard de Vaugirard. En état d’ébriété, tua sa femme d’un coup de hache le 11 décembre 1872 parce qu’elle avait osé lui répondre. Réveillé à 4h. Comprend aussitôt la chose en voyant l’abbé Croze. « Je me tiendrai bien, allez, monsieur l’Aumônier. Je ne suis pas de ceux qui planchent. » L’aumônier tente de lui cacher le couteau, mais le condamné est plus grand que lui. En voyant le couperet, fait un bond en arrière avant de se reprendre et d’embrasser le crucifix. 17 avril 1873 27 mai 1873 Mardi,
5h Châlon-sur-Saône
Saône-et-Loire Philippe Rissler 52 ans, marchand ambulant. Cambriole les époux Poulin, aubergistes à Sancé, dans la nuit du 11 au 12 novembre 1872 pour voler quatre porte-monnaie. Surpris par les époux, les abat à coups de revolver avant d’être maîtrisé, assommé à coups de sabot par les grands fils du couple. Son complice Gurtner parvient à fuir, mais est arrêté dès le lendemain. Au premier jour du procès, Rissler tente de se suicider en se coupant le bras avec un couteau, mais il est désarmé à temps. Rissler déjà condamné à 20 ans de travaux forcés pour vol, Gurtner a déjà connu plusieurs condamnations pour vol en Suisse. Ce dernier n’est « que » condamné à perpétuité. Réveillé à 4h30. Dix minutes plus tard, arrive au greffe pour signer le registre d’écrou. La toilette a lieu sous le préau. Pâle et tremblant, n’ayant plus vraiment conscience de ce qui se passe, accepte de boire un verre d’eau-de-vie. N’a plus de forces : on doit le faire monter dans le fourgon. Arrivé place du Marché, en voyant la guillotine, tressaille violemment. 08 avril 1873 26 juillet 1873 Samedi,
4h59 Laon
Aisne Jean-Baptiste Ferrari 25 ans. Dans la nuit du 14 au 15 novembre 1871, assassine à coups de masse les époux Demeiller, aubergistes à Landouzy-la-Ville. La petite Marie Rousselle, 8 ans, fille d’une de ses complices et présente lors du double crime, les trahira le 24 février 1872. Ses complices Pierrot et Marloi sont condamnés à perpétuité, et Valpoël à 15 ans de travaux forcés. Debout à l’instant-même où la porte s’ouvre, il dit « Vous voilà, monsieur le Directeur ? Tant mieux, je souffrais trop. Ainsi, depuis si longtemps que j’attendais ce jour, le voici donc enfin arrivé. Il était temps que cela finisse. » Il demande un café, assiste à la messe avant de confier à l’abbé Degoix une médaille à remettre à sa mère, pour qu’elle fasse dire une messe pour lui. Au greffe, il remercie le directeur, le gardien-chef, embrasse les gardiens et les détenus présents, avant de monter dans le fourgon. Arrivé au lieu d’exécution, champ Saint-Martin, parle à l’oreille de l’aumônier. La légende veut qu’il lui aurait dit les derniers éléments qui faisaient défaut à l’enquête. 17 mai 1873 05 août 1873 Mardi,
5h Lyon
Rhône Jules-Joseph Seringer PARRICIDE. 27 ans, marin. Dans la nuit du 28 au 29 janvier 1873, au 20, rue Meunier à Villeurbanne, tua à coups de couteau sa mère Hortense Posty, son beau-père Louis Guérin, 68 ans, ancien receveur de navigation, et sa demi-soeur Esther, 21 ans. A l’annonce, à 4h30, dit : « Je n’ai pas peur de la mort, mon innocence me soutiendra. » Parle une dizaine de minutes avec l’aumônier, puis entend la messe à la chapelle. Pendant la toilette, durant laquelle on le met en tenue de parricide, ne cesse d’écouter le prêtre. Conduit cours Charlemagne. Descend sans faiblesse, simple mouvement de recul sur la bascule. 04 juin 1873 06 août 1873 Mercredi,
4h Montbrison
Loire Charles Jean-Baptiste Houbre 29 ans, originaire de Nancy. Libéré de prison pour vol, sans le sou, sans travail (personne ne voulant embaucher un voleur), assassine à coups de couteau dans la nuit du 22 au 23 février 1873 au bois d’Avaize, à Rive-de-Gier, le nommé Jean Laurent pour lui dérober son livret d’ouvirer. Réveil à 4h. Croyait en sa commutation : accablé. Entend la messe et est « toiletté » dans un état de faiblesse. Transpire, ne peut pas parler, ne pousse que des paroles inarticulées… Boit un peu de café qu’il vomit aussitôt. Arrivé place du marché, s’agenouille pour recevoir la bénédiction du prêtre. 19 juin 1873 11 octobre 1873 Samedi,
6h Châteaudun
Eure-et-Loir Jean-Pierre Hulans 34 ans, voiturier, repris de justice. Assassine d’un coup de bâton le 24 juin 1873 sur le bord d’une route à La Fringale M. Gallou pour lui voler sa montre et environ 30 francs. Transféré de Chartres à Châteaudun dans la nuit du 10 au 11 sous prétexte d’un complément d’enquête. A la prison locale, où il arrive à 2h30, on lui sert un bon repas, arrosé de vin et de café. Croyant toujours la version des gardiens, Hulans repousse deux prêtres de Chartres venus l’assister. Enfin, un greffier vient lui lire l’arrêt de mort. « Quand est-ce que je vais mourir ? » « Ce matin. » Hulans gémit le nom de sa femme et celui de ses enfants. Pendant la toilette, il essaie de se débattre et insulte juges, bourreaux et policiers. En sortant de la prison, il écume, s’adressant aux aides-exécuteurs : « Vous tremblez, vous avez plus peur que moi ! » Place de Champdé, où se trouve l’échafaud, il crie : « Eh bien, le voilà, votre Hulans ! » Puis il refuse une dernière fois l’aide des aumôniers, et il est promptement basculé. 28 août 1873 15 octobre 1873 Mercredi,
6h Carcassonne
Aude Antonin Pradal 30 ans, commis boucher. A Port-la-Nouvelle, tua sa nièce Marguerite, 4 ans, à coups de couteau de boucher le 13 mai 1873, pour se venger de son frère qui venait de le licencier pour vol. En apprenant la nouvelle, entre dans une colère telle qu’on est obligé de l’attacher et de le baîllonner solidement. Insensible jusqu’à son arrivée devant l’échafaud, pris d’une faiblesse en arrivant devant la guillotine. 3/4.000 personnes présentes à l’exécution, qui se déroule allées d’Iéna (champ de foire). 19 août 1873 11 décembre 1873 Jeudi,
8h Varennes-sur-Allier
Allier Blaise Rondepierre 30 ans, cultivateur à Saint-Gérand-le-Puy. A Boucé, tue à coups de hache dans la nuit du 17 au 18 février 1872 les époux séxagénaires Crozat pour les voler. Le 15 juin 1873, à Saint-Gérand, il abat Gilberte Rambert, une septuagénaire, d’une cartouche en plein visage. Réveillé à la prison de Moulins à 2 heures. S’habille puis est revêtu de la camisole de force avant de partir en fourgon. Embrasse ses gardiens. Arrivé à Varennes à 4h, incarcéré dans une cellule de la gendarmerie. Demande à boire et on lui donne un peu de bouillon. Se décide enfin à écouter le prêtre qui l’accompagne et prie pendant les dernières heures se sa vie. Recommande sa femme et ses trois enfants avant de laisser le bourreau s’occuper de la toilette. Exécuté au nouveau Champ de foire. Foule composée des habitants de toute la région. 31 octobre 1873 15 janvier 1874 Jeudi,
7h Tulle
Corrèze Pierre Taurisson 39 ans, cultivateur. Le 28 juillet 1873, sortant de la prison centrale d’Eysses où il vient de purger cinq ans pour vol, à quatre kilomètres de Cahors, il égorge, éventre et viole la petite Marie Sastres, 9 ans, et vole son parapluie et ses bottines. Le 11 août, à Noailles, volant un sac de blé chez le fermier Serres, il est surpris par la petite Marguerite Conche, bergère de dix ans, qui menace de le dénoncer. Il l’égorge et l’éventre de six coups de couteau. Réveillé à 5h30. Se met à pleurer et à hurler de peur. On comprend quelques mots : « Je suis malheureux… Plaignez-moi ! Ma pauvre mère mourra de chagrin ! Quel déshonneur pour ma famille ! Mon Dieu, on va me tuer ! » Mis en présence de M.Roch et des aides, pris d’un tremblement de colère terrible à tel point qu’il en fait craquer les barreaux de sa chaise. La toilette n’est pas facile. Le fourgon est conduit au Champ-de-Mars, tandis que Taurisson gémit encore : « Plaignez-moi ! C’est bien malheureux pour ma famille, ayez pitié ! » Poussé sur la bascule par Nicolas Roch. Un jet de sang éclabousse un aide. 06 décembre 1873 08 avril 1874 Mercredi,
7h Bayonne
Basses-Pyrénées Damian Carillo-Gestal 38 ans, cordonnier, Espagnol. Assassina Frédéric Rausch le 20 octobre 1872 sur les allées marines de Bayonne. Son complice, Balbino Banuelos, condamné à mort avec lui, fut grâcié. Transféré le 7 avril au soir de Pau à Bayonne, en compagnie de l’aumônier de Pau, l’abbé Philippon.5.000 personnes présentes sur les Glacis, lieu d’exécution (pas d’exécution à Bayonne depuis un siècle au moins). Carillo montre courage et fermeté jusqu’au bout. 09 février 1874 10 avril 1874 Vendredi,
5h30 Poitiers
Vienne Jean Marsault 63 ans, cultivateur à Frontenay. Ayant cédé à son fils et à sa bru ses biens en viager, le fermier est pris d’une hargne à leur encontre. Le 18 octobre 1873, à la suite d’une dispute, abat d’un coup de fusil sa belle-fille Marie alors qu’elle cherche à se réfugier chez ses voisins et cousins, les Guillon. Louis Guillon, touché en pleine poitrine, agonisera une semaine durant. Marsault va ensuite dans le champ de son fils et tombe sur le père de sa bru, Pierre Rondeau, en train de labourer. Il le blesse sans le tuer. Marsault est arrêté alors qu’il demande à une ferme voisine de la poudre et des munitions pour son arme. Réveillé à 4h30 : en raison de son âge, s’attendait à la grâce, atterré devant la nouvelle. Assiste à la messe. Pendant la toilette, au greffe, demande à boire : accepte une tasse de café noir. Après l’avoir bue, se met à pleurer, se jette dans les bras de son confesseur et se repend de ses crimes. Exécuté au Pont-Guillon, place Sainte-Anne. Cris de la foule vite calmés quand le condamné apparaît. Aides et gendarmes doivent forcer le vieil homme à quitter le fourgon, car le condamné résiste et demande qu’on lui laisse la vie sauve. 27 février 1874 21 avril 1874 Mardi,
5h07, 5h10 Toulouse
Haute-Garonne Philippe
« Eugène Mitron »
Le Vaineur
et
Pierre Lasserre 28 ans, domestique et 42 ans, charpentier. Tuèrent d’un coup de hachette dans la tête, le 16 octobre 1873, Adolphe Fouant, baron de la Tombelle, 55 ans, patron de Le Vaineur, dans son manoir d’Ampouillac, à Cintegabelle, et incendièrent le château. Un mètre de menuisier, appartenant à Lasserre, mit la police sur la piste. Le Vaineur est réveillé le premier à 2h30. Dort bien : en apprenant la nouvelle, dit : « Ah, tant mieux ! Il y a cinq minutes que je pensais qu’il faudrait en finir bientôt ! » Se laisse déferrer, demande à manger, et mange un peu de saucisson arrosé de vin. Lasserre, éveillé cinq minutes plus tard, se met à trembler nerveusement, à gémir et à crier. Ne peut répondre aux questions des magistrats, ni à celles des aumôniers. Pendant qu’on lui enlève la camisole de force, il geint : « Je suis innocent, je n’ai rien fait ! Mon Dieu ! Seigneur ! » Il refuse toute nourriture. Au greffe, les complices se retrouvent. Le Vaineur dit : « Eh bien ! Vois si celui que tu as sauvé viendra te tirer d’içi : nous l’avons fait, il nous faut le payer ! » Après la toilette, montent dans le fourgon jusqu’au Port-Garaud. « Mitron » descend le premier : calme, embrasse le crucifix, l’abbé Pelletan et aussi Nicolas Roch le bourreau ! Se laisse basculer sans une plainte. Quand on saisit Lasserre, il se met à crier : « Mon Dieu Seigneur ! Mon Dieu Seigneur ! » Il est basculé mais une erreur d’un aide fait que la corde n’a pas été détachée du couperet : la lame se bloque à mi-hauteur de la machine. Il faut alors remonter le couperet, ce qui prend une dizaine de secondes, tandis que Lasserre gémit et tremble plus fort encore. 05 mars 1874 30 juin 1874 Mardi,
5h Pibrac
Haute-Garonne Antoine Céseriat 40 ans, terrassier sur la ligne ferroviaire Toulouse-Auch. Tue à coups de bâton ferré Joseph Baillet, 56 ans, marchand-colporteur, et Marie Coste, épouse Battier, 46 ans, le 08 décembre 1873 à leur domicile de Pibrac pour les voler, et incendie leur maison pour dissimuler son crime. Affirme qu’il savait que cela arriverait, mais pas ce matin-là. Il demande à manger une soupe à l’oignon, une omelette, de la saucisse et du vin. Après son repas, il s’emporte contre un juge qui lui demande des précisions sur son crime (notamment l’endroit où il a dissimulé l’argent dérobé) et dit qu’il est innocent. Il arrive à 4 heures 30 à Pibrac, est toiletté dans la mairie, boit un dernier verre de vin et dit qu’il veut mourir. Arrivé sur le terrain du Jonca, lieu d’exécution, au bord du ruisseau « Le Courbet », il regarde tranquillement la machine avant de basculer. 16 mai 1874 15 septembre 1874 Mardi,
6h Vesoul
Haute-Saône Jean-François Poisse Ouvrier mineur. Le 1er juillet 1874, dans les bois de la Vendue, entre Valay et Venère, abat d’un coup de fusil en pleine poitrine Isidore Lambert, facteur de Valay, pour lui voler son portefeuille contenant 300 francs. Il se montre digne. « Sur les champs de bataille, j’ai su affronter la mort. Je saurai bien la recevoir en expiation de mon crime ! » Manifeste un repentir depuis sa condamnation, et assure à l’aumônier qu’il est prêt. Il entend la messe, puis est conduit au greffe pour la toilette. Arrivé sur la place du Champ-de-Foire, lieu des exécutions, Poisse s’agenouille pour recevoir une ultime bénédiction. Saisis par l’image, dans le public, quelques spectateurs font de même. Sitôt relevé, Poisse est dirigé sur la bascule. 07 août 1874 28 septembre 1874 Lundi,
5h30 Chartres
Eure-et-Loir Sylvain-Louis Poirier 31 ans, journalier. Au soir du 30 octobre 1871, au Gault (Loir-et-Cher), il tue à coups de hache la veuve Lecomte et sa voisine, Mme Riolet. Le 8 janvier 1874, dans une auberge de Brou, il tue à coups de bûche la tenancière, Mme Bézard, 69 ans. Le 25 mai 1874, à la Bazoche-Gouët, il tue à coups de marteau la fille de ses voisins, Rose Travers, 14 ans, et blesse grièvement le frère aîné, Désiré Travers, 16 ans, l’handicapant à vie. Informé du rejet de la grâce, Poirier gémit : « Vous auriez pu me le dire hier ! C’est donc fini ! Ah, mes pauvres enfants ! Que vont-ils devenir ? » Conduit à la chapelle par deux prêtres, il entend la messe, pleure devant une statue de la Vierge, puis au greffe, il boit une tasse de thé arrosé de cognac. Il demande qu’on donne à son épouse une médaille et une mèche de ses cheveux. La demande est acceptée, ce qui le calme grandement. Après vingt minutes de trajet, le fourgon arrive porte Morard. Poirier descend seul, et se met à genoux. « Mon fils, demandez pardon à Dieu ! » « Oui, répond-il, j’ai bien besoin qu’il me pardonne, lui si bon, si innocent, et moi si grand coupable. » Il récite un Notre père et un Je vous salue Marie avant d’être relevé par les aides. Porte Morard, sur la bascule, il pousse un dernier cri : « Mes enfants ! Mes enfants ! » 27 août 1874 03 octobre 1874 Samedi,
6h Nîmes
Gard Joseph-Marie Mariani 24 ans, marin, détenu à la centrale de Nîmes. Le 27 juillet 1874, tua de deux coups de tranchet un co-détenu, François-Joseph Becquart, employé comptable au greffe de la maison centrale de Nîmes, avec son complice Léopold Reguidel, 30 ans, charpentier, car Becquart aurait colporté des rumeurs d’homosexualité sur Mariani. Tous deux furent condamnés à mort, mais le second fut grâcié. Accueille la nouvelle par « C’est bien, je suis prêt ! » S’enquiert du sort de son complice et confie qu’il aurait plaisir à le savoir gracié. Demande à Roch qu’on lui mette son chapelet entre les mains, et désire ne pas être attaché. Roch ne peut évidemment accepter, mais reconnaît le courage du condamné. Devant l’échafaud, embrasse le crucifix de l’aumônier. 24 août 1874 13 octobre 1874 Mardi,
5h45, 6h Paris Pierre-Désiré Moreau

Charles Boudas

Moreau, 32 ans, herboriste à Saint-Denis, empoisonna ses deux épouses, Félicité-Hortense Aubry, décédée le 18 août 1873 et Adélaïde-Louise Lagneau, défunte le 28 mai 1874.

Boudas, 49 ans, tailleur de pierres, assomme d’un coup de marteau le brocanteur Antoine Faath rue Audran à Paris le 02 décembre 1873, puis l’égorge d’un coup de rasoir pour lui voler 1.500 francs.

Réveillés à 4h45. Moreau est le premier. « Ah, alors, mon pourvoi ? Cependant, je l’affirme encore, je suis innocent ! » Se montre très calme. On le laisse avec l’abbé Legros le temps qu’on aille voir le second condamné. Boudas, lui, était déjà réveillé. Grogne et jure « Que mon sang retombe sur vos têtes ! » à plusieurs reprises. Puis il demande : « J’ai froid, donnez-moi mes chaussettes. » On lui fait remarquer que c’est inutile. « Pardon, donnez-les-moi quand même ! » Puis se calme et reste avec l’abbé Croze. Moreau sort le premier. Va fermement à l’échafaud, et arrivé à proximité de la machine, il clame : « Messieurs, je meurs innocent. » Boudas arrive par la suite, portant un chapeau de feutre (!) et arborant un rictus effrayant. L’abbé Croze lui tend le crucifix à baiser. Boudas tente d’aller de droite à gauche, mais pas en avant. Se débat sur la bascule pour ne pas passer la tête dans la lunette. Le couperet lui coupe la tête au niveau de la mâchoire. 10 septembre 1874, 12 septembre 1874 20 octobre 1874 Mardi,
6h25 Châlon-sur-Sâone
Saône-et-Loire André Goulfert 43 ans, manoeuvre, cinq condamnations préalables. A Palinges, dans la nuit du 17 au 18 décembre 1873, étrangle le charretier Pierre Lécuelle et lui vole ses 600 francs d’économies. Arrêté à Alger où il s’était réfugié. Réveil à 5h. Ne s’y attendait pas, faiblesse. On lui fait boire plusieurs cordiaux pour le ramener à lui. Demande à rester debout pendant la toilette. Arrivé place Ronde, en voyant la guillotine, perd tout courage, manque s’évanouir, livide et dégoulinant de sueur. S’effondre à genoux pour la bénédiction. 05 septembre 1874 14 décembre 1874 Lundi,
7h30 Moulins
Allier Joseph-Hippolyte Caillot 44 ans. Le 04 avril 1874, rue des Pêcheurs, à Moulins, tua sa femme et sa belle-soeur avec une hachette. Pluie et neige. Réveillé à 6 heures. Apprend la nouvelle avec résignation. Parle à l’aumônier. Très calme, est conduit en fourgon place des Foires, et n’a aucune réaction de peur face à l’échafaud. 31 octobre 1874 02 février 1875 Mardi,
7h05 Nîmes
Gard « François Terrier » Assassine en l’assommant à coups de pierre Henri Fournier, colporteur, près d’Aigues-Mortes en mai 1874. Ne donnera jamais sa véritable identité. Se réveille en disant : « Je savais que c’était pour aujourd’hui, j’ai eu une prémonition que le 2 février me serait fatal, vous auriez dû me réveiller plus tôt ». Pieux, entend la messe et rédige une lettre : « C’est en indien. C’est pour que si un jour on me cherche, on sache au moins où je suis passé. Je suis créole et je vais mourir en vrai créole, sans appréhension, en méprisant la mort. » 21 novembre 1874 31 mars 1875 Mercredi,
5h54 Paris Pierre Bacquet 40 ans, manouvrier. Egorge d’un coup de couteau Charles Edouard Roscher, 61 ans, au 51, rue Hauteville le 29 décembre 1874 pour lui voler 300 francs. Réveillé à 5h30. S’habille. Parle avec l’abbé Crozes. Au terme de leur entretien, pleure et gémit à plusieurs reprises : « Mon Dieu ! Pardonnez-moi ! » 25 février 1875 15 avril 1875 Jeudi,
5h25 Cambrai
Nord Léon-Pierre Ruffin 26 ans, journalier. Dans l’après-midi du 9 décembre 1874, au 9, rue Saint-Georges à Cambrai, étrangle avec une corde Mme Demarest, septuagénaire, pour la voler. L’assassin, aperçu par une servante en train d’entrer dans la maison, est retrouvé dans le grenier, caché dans une caisse. Le mercredi à 20h15, quitte la prison de Douai et prend le train pour Cambrai, où il arrive à 21h30. Dans sa cellule de la prison locale, ne touche pas à son repas et s’endort. Réveillé à 3h, courageux. Parle avec l’abbé Fournet, avant d’être conduit au greffe. Boit du bouillon et un verre de vin. Arrivé sur la place d’Armes, pâle, s’agenouille pour la bénédiction. 23 février 1875 22 juin 1875 Mardi,
4h58 Epinal
Vosges Nicolas Labanvoye 60 ans, braconnier. En janvier 1875 à Moriville, assassine la vieille Mme Prévôt pour voler 7 francs. Condamné dans les Vosges, arrêt cassé le 01 avril, rejugé à Nancy. Quand on lui annonce la nouvelle, il répond : » Bien, je vous remercie. Mais je meurs innocent, en pardonnant à tous ceux qui ont déposé contre moi. » Après la messe, conduit dans un couloir voisin de la chapelle pour la toilette : demande juste qu’on garde une mèche de cheveux à remettre à quelqu’un – seul l’aumônier saura à qui. Exécuté au rond-point de l’esplanade. Pluie violente. 06 mars 1875, 08 mai 1875 10 juillet 1875 Samedi,
4h Beaucaire
Gard Françisco Sancho y Carreta 33 ans. A Beaucaire en décembre 1874, tenta de tuer en la poignardant sa belle-soeur, Mme Marie Sancho, avec la complicité de Joseph Vaqué, pour la voler. Marie, enceinte de plusieurs mois, perdit son enfant dans l’attaque. Vaqué est condamné aux travaux forcés à perpétuité. Transporté en train de Nîmes à Beaucaire, prie sans arrêt et demande que sa veuve ne soit pas informé de sa fin. Demande à ce qu’on lui bande les yeux. Ses derniers mots sont une prière pour son frère et sa belle-soeur, « Filléta de méu cor, pardonau me ». 20 mai 1875 13 juillet 1875 Mardi,
4h45 Toulouse
Haute-Garonne François « Besse » « Abadie » Rieubernet 28 ans, vannier. Plusieurs fois condamné pour vols, auteur de plusieurs cambriolages au nord de Toulouse en 1874. Tente d’assassiner M.Bordes à Bruguières le 13 novembre 1874 pour le dévaliser. Tue à coups de couteau Eugène Pins, 24 ans, épicier, et blesse gravement de deux coups de couteau Pétronille Ricaud, veuve Pins, à Aucamville le 01 février 1875. Mac-Mahon avait l’intention de le grâcier, mais peu de jours avant qu’il ne prenne sa décision définitive, Rieubernet tentait d’étrangler un gardien, ce qui le condamna pour de bon. Le Port-Garaud, lieu habituel des exécutions, doit être déblayé suite aux très graves inondations de la Garonne survenues quelques semaines plus tôt. Au réveil, devient absolument prostré et muet. Entend la messe, communie. Toilette sans histoire. Arrivé au Port-Garaud, escorté par l’abbé Pelletan, tient à peine sur ses jambes. Embrasse le crucifix avant d’être basculé. 19 mai 1875 02 août 1875 Lundi,
5h30 Bordeaux
Gironde Jean Fradon PARRICIDE. 37 ans, cultivateur à Cubnezais. Avait tenté d’abattre sa mère à 16 ans. Tua à coups de fusil sa femme, Marie Nivet, 31 ans, qu’il martyrisait depuis des années, et tenta de tuer sa mère le 9 mars 1875. Réveillé à 4h, dormait bien. Jusqu’alors insensible, se met à pleurer en apprenant la nouvelle et accepte volontiers les secours de la religion. Communie, montre du repentir. Au greffe, passe la tenue des parricides. Arrivé devant la machine, place du Repos (devant le cimetière de la Chartreuse), tête haute, pas de cynisme apparent. Après la lecture de l’arrêt par le greffier, basculé. 18 juin 1875 07 septembre 1875 Mardi,
6h Evreux
Eure Achille Jodon 22 ans, caporal fourrier au 87e régiment de ligne, tue le caissier Florence au Havre le 30 novembre 1874 de quatre balles de revolver tirées à bout portant, dont deux dans la tête, pour fracturer le coffre de son patron agent de change et voler 8.000 francs. Condamné en première instance par les assises de Seine-Inférieure, puis par celles de l’Eure, mais exécuté en tant que militaire. Très courageux. Accompagné par l’aumônier de l’hôpital militaire jusqu’au bout. Fusillé sur le terrain de la cible, à un kilomètre de la ville. 12 mai 1875, 29 juillet 1875 15 novembre 1875 Lundi,
6h30 Nancy
Meurthe-et-Moselle François Chaussy 45 ans, berger à Briey. Satyre assassin de Jean-François Pierson, 7 ans, fils de fermier à Lantéfontaine-Immonville, le 24 mai 1875. Condamné dans la Meurthe-et-Moselle, arrêt cassé le 26 août, recondamné dans la Meuse. Réveillé à 5h par le directeur de la prison. Incrédule, ne parvient à réaliser qu’en présence de l’abbé Didelot. Parle un peu avec le prêtre, manifeste son repentir. A la fin de la toilette, prie le directeur de donner l’argent qu’il possède aux pauvres. Pleure un peu en mintant le fourgon. Dix minutes de trajet entre la prison et le rond-point du Champ-de-Mars. Exécuté sans histoire, 10.000 personnes présentes. 06 août 1875, 21 octobre 1875 09 décembre 1875 Jeudi,
6h50 Draguignan
Var Jean-Honoré Allongue 39 ans. Le 11 avril 1875, à Saint-Paul-en-Forêt, assassine à coups de hache la veuve Geneviève Lantoin, son ancienne patronne. Le 19 avril, mutile et tente d’assassiner Benoît Lantoin, le fils aveugle de sa victime, qu’il avait hypocritement hébergé chez lui. Après son arrestation, on attribue à Allongue deux crimes supplémentaires. Il y a d’abord la mort de son beau-père, le fossoyeur François Bianqui, le 21 novembre 1871. Ensuite, le 15 juin 1873, il jette sa propre fille Françoise, 5 ans, dans le puits en l’absence de son épouse. L’enfant survécut, mais on ne prêta pas foi à ses accusations. Espérait sa grâce. Effondré par la nouvelle, gémit et pleure en provençal des mots pour sa femme et sa fille : « Pauro fremo ! Pauro pitchouno ! » Entend la messe en larmes, refuse toute nourriture et laisse les exécuteurs procéder à sa toilette sans résister. Place du Champ-de-Mars, son arrivée provoque un silence absolu. Après avoir reçu le baiser de pAix-en-Provence, il est poussé sur la machine. Une foule immense est présente car les bourreaux, hasards des transports postaux, sont arrivés à Draguignan un jour avant que l’ordre d’exécution ne parvienne aux autorités locales, ce qui a repoussé la date d’exécution du 8 au 9 décembre. 20 octobre 1875 31 décembre 1875 Vendredi,
7h10 Nancy
Meurthe-et-Moselle Jean-Baptiste « Emile » Greveis 20 ans. Le 10 octobre 1875, assomma à coups de bouteille son ancienne patronne, la veuve Mangin, à Maxéville, avant de la tuer à coups de hache. Réveillé à 5h, sommeil agité. Pris d’un tremblement nerveux à la nouvelle. Entendit la messe de l’abbé Didelot, ce qui le réconforta. Pâle, mais sans faiblesse durant la toilette. Arrivé sur le Champ de Mars, très peu de monde. Pas besoin d’être soutenu pour aller du fourgon à la bascule. Pousse un hurlement quand on le pousse en avant. 12 novembre 1875 04 janvier 1876 Mardi,
7h05 Le Bourg
Lot Sophie Gautié, épouse Bouyon 44 ans. Le 22 juin 1875, son fils aîné, M.Colomb, meurt de tuberculose, et deux heures plus tard, la petite Elisa, sa fille, meurt à son tour dans les bras de sa grand-mère. L’autopsie permet de découvrir qu’on lui a enfoncé trois aiguilles (deux à repriser, une à tricoter) dans le corps, et l’aiguille à tricoter, brisée en deux, a perforé le coeur. Soupçonnée du meurtre d’Elisa, on réalise qu’aucun des sept autres enfants qu’elle a eu n’a dépassé son premier anniversaire ; l’autopsie du petit dernier, décédé le 15 avril à l’âge de 38 jours, permet de découvrir quatre aiguilles dans le corps ! Quitte Cahors à 22 heures le lundi en compagnie de l’aumônier Constès et de l’abbé Roche. Avant de partir, salue les gardiens, et dit en grimpant dans le voiture : « Moun Diou, pourtan ! Moun Diou, pourtan ! » Prie tout au long des 60 kilomètres qui séparent Cahors du Bourg. A Saint-Martin-de-Vers, demande un verre de vin qui lui est donné. Arrivé aux portes du village, le procureur de Figeac lui lit l’arrêt de mort et lui explique qu’elle va être exécutée. « Je le savais, Monsieur. Je suis résignée. » Ne veut pas faire de dernière déclaration : « Je n’ai plus rien à dire. Mon silence n’engage pas davantage ma conscience, je garde tout pour moi. » La toilette a lieu dans la maison de l’instituteur : « Vous n’avez pas besoin de m’attacher, je ne veux pas me sauver ». Ne cesse de prier, demande qu’on lui mette son chapelet entre les mains, et un voile blanc sur la tête. Conduite à pied devant la guillotine, montée devant sa propre maison, elle embrasse le crucifix et se laisse basculer sans résister, mais en poussant un dernier cri la tête dans la lunette. 2.000 personnes présentes environ. 17 novembre 1875 08 janvier 1876 Samedi,
7h05 Rennes
Ille-et-Vilaine Joseph Riaud 47 ans, ancien boucher, journalier et violoniste. Bat à mort à coups de pieds et de manche de fléau sa troisième femme, Marie-Josèphe Chesnais, le 2 août 1875 à Bains-de-Bretagne, en l’accusant d’adultère. soupçonné du meurtre des deux précédentes, Marie Noël en 1860 et Perrine Riaud en 1861. Réveillé à 4h15. Son compagnon de cellule est déjà debout. Le directeur lui demande : « Vous dormez donc ? » « Oui. » Encore ensommeillé, ne comprend qu’à la seconde explication. S’habille. Dans la salle du gardien, boit un verre de vin. Entend deux messes. Se confesse, communie. Après cela, mange un morceau de pain qu’il ne parvient pas à achever, boit un second verre de vin et une tasse de café. « Ma foi, mon compagnon m’avait dit en rigolant, on te coupera la tête demain. C’est que ça y est quand même ! » Il évoque son existence de ménétrier, indique l’endroit où il a caché 60 francs afin que son fils de quatre ans achète, une fois grand, un violon. Recommande son enfant à l’assistance et subit avec courage sa peine. 13 novembre 1875 15 juin 1876 Jeudi,
5h Valence
Drôme André Courbis 67 ans, cultivateur à Saint-Paul-les-Romans. Mari violent envers son épouse, Marie Courrier, veuve Girier, sexagénaire qu’il avait épousée en 1873. Les sévices qu’il lui infligeait nombreux : enfermée dans l’étable aux porcs, ou devant passer la nuit dans un arbre en plein hiver, tout en étant battue quotidiennement. Condamné en décembre 1874 à un an de prison par le tribunal correctionnel, incarcéré à Valence. A sa libération, installé à Châteauneuf-l’Isère. Sa femme est retrouvée assassinée au matin du 24 janvier 1876. S’il dispose d’un alibi, on apprend vite que Courbis a recruté deux jeunes hommes récemment libérés de prison, Marcelin Gellas et Auguste Chazeau pour tuer son épouse à sa place. Les complices furent condamnés à perpétuité. Réveillé à 4h30. Répond « La justice des hommes m’a condamné, mais j’espère en celle de Dieu. » Après avoir fait preuve d’une importante ferveur religieuse durant la messe, sombre dans l’abattement. Ne prononce plus un seul mot. Au greffe, prend un bol de bouillon. Au sortir du fourgon, place Saint-Félix, est embrassé par l’aumônier. En voyant la machine, est pris de faiblesse et on doit le porter. Environ 4.000 personnes présentes. 03 mai 1876 03 juillet 1876 Lundi,
5h45 Bordeaux
Gironde Jean-Baptiste Pascal 23 ans. Egorge à Lormont, dans le bois du Rouquet, Baptiste Méry, serrurier, le 29 octobre 1875, pour le voler. Attiré dans un piège par la maîtresse de Pascal, Juliette Garnier. Juliette et un autre complice, Bouchau dit « le Manchot », sont condamnés à perpétuité. Reçoit la nouvelle sans émotion. Entend la messe, puis salue les personnes présentes : « Bonjour, messieurs. » Arrivé place du Repos, son regard se trouble en voyant l’échafaud. Embrasse l’aumônier et le bourreau avant d’être basculé. 25.000 personnes présentes. 13 mai 1876 12 août 1876 Samedi,
5h22 Paris Toussaint-Léon Gervais 47 ans, chiffonnier. Dans la nuit du 03 au 04 novembre 1875, à Colombes, brise la nuque et enterre vive sa compagne, Ursule Lutz, pour s’approprier sa maison, son argent et ses meubles. Au réveil, dit : « Ce n’est pas possible. C’est un crime que va commettre la société ! » Il parle quinze minutes au prêtre, lui remet 7f50 à donner à l’un de ses fils, puis se plaint au greffe : « Si j’avais fait le crime, je comprendrais, mais ne l’ayant pas fait, c’est triste. » Nicolas Roch l’incite à boire un peu d’eau de vie, Gervais refuse puis accepte, mais un aide le presse et il proteste : « Eh, attendez donc, il faut que ça coule. » Puis, à M.Jacob, chef de la Sûreté, il dit : « Si j’étais coupable, si j’avais fait le crime… » Puis après un adieu aux gardiens, il va vers la porte, tête baissée, et la relève face à la guillotine et dit « Ah, voilà… » 12 juillet 1876 02 septembre 1876 Samedi,
5h Perpignan
Pyrénées-Orientales Roldan Moralès Segundo 23 ans, jardinier, déserteur de l’armée espagnole. Assomme à coups de pioche l’abbé Blanquet, directeur du séminaire de Prades, dont il était l’employé, le 05 avril 1876, et l’enterre dans le jardin encore vivant. Réveillé à 3 heures. Il faut le secouer pour qu’il ouvre les yeux. Impassible à l’annonce, se met à trembler en apprenant qu’on va le guillotiner et pas le garrotter. Puis se remet, se confesse, entend la messe, et au greffe, boit un verre de cognac. Au pied de l’échafaud, embrasse l’aumônier. 11 juillet 1876 18 septembre 1876 Lundi,
5h55 Blois
Loir-et-Cher Maxime Marin 43 ans. Etouffe le 13 janvier 1876 à Cinais sa femme, Marie-Louise, née Vazereau, et fait croire qu’elle est morte de maladie. Le 20 février, il tue son beau-père Pierre Vazereau en le battant à coups de sabot et en l’étouffant. Il comptait hériter plus rapidement de ses proches. Condamné à Tours, puis à Blois. Réveillé à 4 heures, Marin ne réagit pas. Il demande s’il doit enfiler son caleçon, puis reste muet. Après la messe et la communion, à la question du juge, il répond : « Non, je n’ai rien à ajouter à ce que j’ai dit à l’audience. Je suis innocent. » Il boit une tasse de café, un verre de cognac, puis grimpe dans le fourgon qui se dirige vers le Champ de Foire. 500 personnes sont présentes. Marin reste digne. Les soldats chargés de maintenir la foule à distance ne peuvent s’empêcher de regarder l’exécution. 08 juin 1876, 14 août 1876 14 décembre 1876 Jeudi,
7h Nice
Alpes-Maritimes Marius Turcan 24 ans, cultivateur. Le 20 août 1876 à Bouyon, attira dans un guet-apens M.Ghetti, mari de sa maîtresse, Joséphine Tardet. Il l’assomma d’un coup de crosse de fusil, avant de lui ouvrir le ventre d’un coup d’échalas et de l’égorger. Première venue de la guillotine depuis 1793. Réveillé à 4h. Mécontent, râle : « C’est bien pénible de mourir pour une putain ! S’il y avait un dieu, il ne permettrait pas qu’on me tue ainsi. Après tout, c’est lui qui m’a donné la vie, lui seul peut me la reprendre ! » Comme le gardien le pousse à compatir pour sa complice qui va finir ses jours en prison, il continue : « Oui, mais elle au moins, elle vivra ! Non, ce jugement est trop injuste ! Quand mon père va apprendre ce qui m’est arrivé, il en mourra sur le champ. Je vais écrire au procureur de la République. » Se plaint de sa condamnation jusqu’à la toilette, puis se laisse faire. Exécuté au lieu-dit « Lou Mountet », devant la Poissonnerie, descend du fourgon avec brusquerie et se laisse exécuter sans accorder un regard à la foule. Pluie violente. 31 octobre 1876 23 décembre 1876 Samedi,
7h Douai
Nord Charles-Louis Yden 38 ans, cultivateur. A Borre, dans la nuit du 8 au 9 novembre 1875, tua sa femme – plus âgée que lui – et faisant passer sa mort pour un infarctus, hérita de ses biens d’une valeur de 10.000 francs. Il désira se remarier et fit la cour à Mlle Pauline Oudoire, qui le repoussa. Le 2 avril 1876, la grange de la veuve Oudoire ainsi que plusieurs dépendances prirent feu. Yden fut suspecté mais jamais ouvertement accusé tant il faisait peur. Enfin, au sortir de la messe du dimanche 6 août 1876, Yden tira deux coups de fusil sur Pauline, la touchant légèrement, et alla se constituer prisonnier. Aux gendarmes, il avoua le meurtre de son épouse, étouffée dans le but d’hériter de sa fortune. Réveillé à 4h. Impassible. « J’ai mérité la mort. Je ne crains pas le supplice. » Le père jésuite Houvenaïghel et le vicaire Fournet l’assistent. Au greffe, prend une tasse de café, un verre de rhum et fume une dernière pipe. Exécution sans histoires place Saint-Vaast. 18 novembre 1876 27 décembre 1876 Mercredi,
7h Toulouse
Haute-Garonne Julien Ducaux 36 ans, journalier. Le 26 septembre 1876, à Villeneuve-les-Cugnaux, frappe à coups de bêche et de pioche son épouse Guillaumette Maurat, 32 ans (morte le 1er octobre), sa belle-soeur Marie Naurat, 28 ans (morte le 8 octobre), et Victoire Anglade, épouse Lacroix, leur voisine, 42 ans (morte le 29 septembre). Sa belle-soeur allait se marier et emporter avec elle, hors de la maison Ducaux où elle demeurait jusqu’alors, ses meubles et ses biens ! Ne dort pas quand les officiels entrent à 5h30. Comprend aussitôt, un peu pâle. Le directeur lui conseille de tourner son espoir vers Dieu, Ducaux acquiesce. Frémit durant le déferrement. Le gardien-chef Rougé lui demande s’il veut prendre quelque chose, comme du café : « Je n’ai besoin de rien. Donnez plutôt à quelqu’un qui puisse en profiter. » Il continue : « Vous donnerez au boulanger de Villeneuve-les-Cugnaux 16f70 pour fourniture de pain. Vous ferez également rendre le pétrin que j’ai emprunté à une de mes voisines. Vous laisserez mes effets au condamné qui m’a servi durant ma détention. » Va à la chapelle entendre la messe. Au parloir, subit la toilette, se met à sourire. Le procureur lui demandant s’il a une ultime déclaration : « C’est malheureux. On pardonne aux assassins qui tuent pour voler. On grâcie les bandits de grand chemin, tandis que moi, on m’exécute. On a été inflexible avec moi qui n’ai pas volé. Du reste, je ne suis pas coupable, car j’avais, à maintes reprises, prévenu l’autorité. » Grimpe dans le fourgon. Au Port-Garaud, fixe la machine avec hébétement. Le prêtre dit à la foule : « Le condamné se recommande à vos prières, dites un Pater et un Ave Maria. » Ducaux embrasse le crucifix. Tente de bouger quand sa tête se place dans la lunette, en vain. 17 novembre 1876 24 mars 1877 Samedi,
5h30 Saint-Mihiel
Meuse Charles-Emile Moulut 20 ans. Le 17 novembre 1876, à Erine-Saint-Dizier, tua la veuve Ragouget, aubergiste de 65 ans, à coups de bâton. Son frère cadet, Eugène, 18 ans, son complice, fut aussi condamné à mort, puis grâcié. Réveillé à 4 heures. Reste muet en apprenant la nouvelle. S’habille, mais refuse de mettre des sabots et garde des chaussons aux pieds. Refuse alcool, nourriture et tabac. Ne pose aucune question sur le sort de son frère, demeure impassible et monte seul dans le fourgon qui le conduit place de la Buanderie. Descend seul, embrasse l’aumônier puis est poussé sur la bascule. 10 janvier 1877 26 avril 1877 Jeudi,
4h30 Paris Baptiste-Joseph Billoir 57 ans, ancien militaire. Le 2 novembre 1876, tue d’un coup de pied Jeanne Le Manach, sa maîtresse, chez elle, 51, rue des Trois-Frères, et dépece le cadavre dès le lendemain pour aller le jeter dans la Seine, où il est retrouvé. Avait joué aux cartes avec les gardiens jusqu’à une heure du matin. Réveillé à 4h10, dormait profondément. A la nouvelle, ne dit rien, joint les mains et demeure immobile. « Billoir, il faut vous lever » insiste le directeur Beauquesne. « Ah, pardon. » Se laisse habiller d’un tricot préalablement échancré au cou. Parle dix minutes à l’aumônier. Conduit au greffe, prend un verre de vin qu’il ingurgite machinalement. Rasé de frais, pâle, paraissant un vieillard, sort de la prison. Embrassé par l’abbé Crozes, baise le crucifix et dit : « Au revoir, mon père ! » puis est poussé sous le couperet. 15 mars 1877 12 mai 1877 Samedi,
4h30 Tarbes
Hautes-Pyrénées Francisco Badel 30 ans. Le 25 novembre 1875, Badel, son frère Valentino et Marie-Jeanne Viau, la maîtresse de Francisco, se rendent chez les Campistrous à Montaussé. Ils sont accueillis par Louise, fille de la maison, qui a connu Francisco et Marie-Jeanne en prison. Les trois arrivants poignardent et étranglent Louise, puis Philippe, son père octogénaire. Malgré sa peur, il ne laisse pas le temps au procureur de parler et il s’adresse à l’aumônier Clare : « Ah, merci, je serai ferme. » Il refuse de se chausser, arguant que « Jésus-Christ est allé nu-pieds au Calvaire, et il était innocent. » En quittant la cellule, il dit « Adieu mes amis, au revoir dans l’éternité ! Priez pour moi ! » Il dit des prières pendant tout le trajet, et fait un baiser au crucifix avant de se laisser emporter. 12 mars 1877 21 juin 1877 Jeudi,
3h06 Versailles
Seine-et-Oise Ange-Valentin Roux 19 ans, sans profession, repris de justice. Le 9 décembre 1876, étrangle et égorge la veuve Tartarin, 77 ans, cabaretière à Argenteuil, pour lui voler 32 francs 50. Ses complices, Alexandre Déon et Georges-Désiré Lamoureux, 20 ans tous les deux, sont aussi condamnés à mort, mais sont graciés. Réveillé à 2h30. Très calme. Devant la guillotine, sa chemise découpée se déchire tout à fait, et c’est torse nu qu’on le bascule. Un jet de sang vient tremper la jambe de pantalon d’un employé de l’octroi présent au Pont-Colbert. 2.000 personnes présentes. 07 mai 1877 23 juin 1877 Samedi,
3h45 Angers
Maine-et-Loire Auguste Changeur 22 ans, cordonnier. Condamné à 15 mois de prison à Blois, incarcéré à la centrale de Fontevrault, en août 1876, assassine un gardien en cherchant à s’évader. Condamné à perpétuité, attend son départ pour l’île de Ré (et la Nouvelle-Calédonie) à la maison d’arrêt d’Angers. Le 24 avril 1877, assassine le gardien-chef Brion pendant sa tournée d’inspection nocturne. Refuse les secours de la religion, puis les accepte sur les conseils du procureur : se confesse, entend la messe et communie. Exécuté place des prisons. 15 mai 1877 28 juin 1877 Jeudi,
3h55 Douai
Nord Léonard Aublin 37 ans, voleur multirécidiviste, a déjà passé au total 17 ans derrière les barreaux. Tua dans la nuit du 25 au 26 juin 1876 M. François Meurant, 65 ans, percepteur à Sivry et sa bonne Rosalie Broguez, 69 ans, respectivement de 19 et 18 coups de couteau. Butin du vol : le portefeuille du percepteur, son coffre-fort cadenassé n’ayant pu être ouvert. L’un de ses complices, Vital Bernard, se suicide en prison. Pierre-Aimable Crochon est condamné à perpétuité. Réveillé à 1 heure du matin, accueille le directeur en lui disant « Je vous attendais, monsieur ». Reçoit les secours de la religion de la part du doyen de Saint-Jacques et l’aumônier de la prison, qui doivent même le soutenir au sortir de la prison, place Saint-Vaast. 19 mai 1877 17 août 1877 Vendredi,
4h45 Marseille
Bouches-du-Rhône Léon-Paul Vitalis 24 ans, bouquiniste. Tua le 19 mars 1877 Mme Marie Salat, veuve Boyer, propriétaire d’une crémerie et d’une mercerie, avec la complicité de Marie Boyer, 17 ans, fille de la victime et maîtresse de Vitalis. Dépeca le cadavre et alla le dissimuler au Cap Pinède. Réveillé à la prison d’Aix à 23 heures le 16. On lui fait croire que c’est pour attendre le verdict présidentiel qu’on le conduit à Marseille. Solidement attaché, grimpe dans le fourgon avec le père Garnier. Arrive à la prison Chave à 3h45. En route, le père Garnier lui fait comprendre la réalité de ce voyage, ce qui fait qu’il n’est pas surpris quand on lui annonce officiellement la nouvelle. A la chapelle, le père Bessac, aumônier de la prison de Marseille, célèbre la messe. Vitalis demandait à pouvoir la servir lui-même, mais on refuse, car il eut fallu le détacher. Très recueilli. Revêtu de la tenue de parricide, vu qu’il est complice d’un parricide. En quittant la prison, refuse de prendre un verre de vin. Au pied de l’échafaud, place Sébastopol, se met à genoux. L’huissier lit la sentence de mort, le père Garnier lui donne l’absolution. 05 juillet 1877 11 septembre 1877 Mardi,
5h13 Paris Jean-Pierre Welker 21 ans, employé aux abattoirs. Pédophile récidiviste. Satyre assassin d’une fillette de 8 ans, Joséphine Eckérlé, violée et étranglée avec sa corde à sauter rue Nationale, le 1er juin 1877. Réveillé à 4h40. Stupéfait, ne comprend pas. Pleure, à demi inerte : doit être transporté hors de sa cellule. Si faible qu’il ne peut boire le verre d’alcool. Devant la machine, baisse la tête comme un pantin de chiffon, semble n’avoir plus conscience de rien. 13 août 1877 13 septembre 1877 Jeudi,
6h20 Laon
Aisne Jean-Sylvestre Frison 53 ans, assassina sa fille Sylvie, 27 ans, à coups de marteau le 15 juin 1877 à Beaumont-sur-Beine. Alcoolique au dernier degré, battait régulièrement son épouse et sa fille. « Je m’y attendais. J’avais bien dit hier soir que ce serait pour aujourd’hui. » Il entend la messe, et avant de quitter la chapelle de la prison, grogne : « Ma pauvre Sylvie, c’est ma femme qui est la cause de tout cela. » Au greffe, il dit aux aides : « J’aimerais mieux que vous ne m’attachiez pas, je ne pourrai pas marcher. Je vous promets d’y aller franchement. » Il se laisse faire, refuse nourriture mais boit un verre de Bordeaux. A l’aumônier, il demande « Vous allez écrire à M. le curé de Beaumont pour qu’il dise un ave pour moi. » Arrivé au champ Saint-Martin, il se jette dans les bras de l’aumônier, puis se laisse emmener par les aides. 11 août 1877 25 octobre 1877 Jeudi,
6h28 Paris Antoine-Joseph Albert 25 ans, Belge, déserteur de l’armée. Etrangle et tue à coups de poings Mme Lepelletier, sa logeuse, le 24 août 1876 à la Tour Malakoff (Vanves, actuellement Malakoff), avant de la jeter dans le puits voisin. Sa complice et maîtresse, Hortense Lavoitte, épouse Louet, 28 ans, est condamnée à perpétuité. Réveillé à 6h05. « Bien, courage. J’avais bien dormi pour ma dernière nuit. » Se demande si son teint est pâle, on lui ment à ce propos. « Si je ne suis pas pâle, c’est que j’ai la conscience nette au moment de paraître devant l’Eternel. J’ai été franc pour me livrer à la justice, et je serai aussi franc pour mourir. Maintenant, il n’y a plus de pitié pour moi en ce monde, je n’en implore que dans l’autre. Peut-être y’en aura-t-il ? » Promet à l’abbé Crozes qu’il sera courageux, puis demande à serrer la main de M.Jacob, chef de la Sûreté. « Je suis heureux, c’est le plus brave des citoyens. » Pendant qu’on lui lie les poignets, un aide demande s’il lui fait mal. « Non. D’ailleurs,il faut que je souffre beaucoup pour expier le mal que j’ai fait aux autres. » Mais comme l’aide tire un peu fort sur la corde, il crie. « Vous me faites mal, derrière ! » Pendant la toilette, l’abbé Crozes lui relit la lettre écrite pour sa famille. Albert s’adresse aux gens présents : « Hommes, vous me pardonnez, n’est-ce pas ? Moi, je pardonne à ceux qui m’ont fait du mal. Maintenant, allons-y. » Devant l’échafaud, perd son calme en regardant le couperet. « Pardon, Seigneur ! Mon Dieu, pardonne-moi ! » Laisse à son avocat, Me Laviolette, une lettre dans laquelle il dit avouer la vraie identité des assassins de Malakoff, mais qui en fait est une plaisanterie : « Arrêtez l’exécuteur Roch. C’est l’homme qui me déplaît le plus au monde. » 27 septembre 1877 05 janvier 1878 Samedi,
7h30 Melun
Seine-et-Marne Luigi Teofilo Corsinesco 23 ans, Piémontais. Condamné à six ans de réclusion pour avoir porté des coups de couteau à un garde de Paris lors d’une rixe dans un bal populaire. Incarcéré à la centrale de Melun. Prisonnier rétif et violent, s’éprend d’un certain Lebigot, surnommé « la reine des brosses » – il travaille à l’atelier de fabrication des brosses-. Violemment jaloux, poignarda à trois reprises Robin, un rival qui tournait trop autour de son « gosse », le 12 juillet 1877. Montage de la guillotine très difficile : temps absolument glacial quai de Courtille, à l’entrée de la centrale, sur les bords de la Seine. Cinquante détenus sont placés de part et d’autre de la machine pour assister à l’exécution. A sept heures, les officiels entrent dans la cellule. Corsinesco ne dort pas, il est assis sur un tabouret, au fond de la cellule. Le docteur Saillard lui annonce la nouvelle et le prie de faire preuve de courage : « Du courage ? Mais j’en ai. » Puis après lecture de l’arrêt, il dit : « Je reconnais bien avoir mérité mon sort, mais pourtant, bien sûr, je n’avais pas prémédité. » Au poste des gardiens, il parle avec l’abbé Boutroy. S’approche du poêle, se réchauffe, embrasse le crucifix et faisant tomber au passage son béret sur le sol, il le ramasse et le pose sur l’une des couchettes des matons. On lui propose de prendre de la nourriture : « Je n’ai besoin de rien. J’ai du courage, mais voyez-vous, ce qui m’emmerde, c’est d’être condamné sur le témoignage de gens qui ne valent pas mieux que moi. Si encore, c’étaient d’honnêtes gens, ça me ferait moins de peine. » M.Roch lui demande d’enlever sa veste, puis la toilette a lieu. Quand la porte s’ouvre, un commandement retentit : « Bérets bas ! » et les prisonniers se découvrent. En passant devant eux, Corsinesco se met à sourire bizarrement : il a reconnu au premier rang Lebigot ! Après avoir été embrassé par l’aumônier, il est basculé. Trop en avant, on doit le repositionner sur la bascule avant de faire tomber le couperet. A cet instant, Bigot s’évanouit, et on voit du sang jaillir du panier. 30 novembre 1877 22 février 1878 Vendredi,
6h Aix
Bouches-du-Rhône Jean-Marie Siméan 66 ans, cultivateur à Septèmes-les-Vallons. Le 22 juillet 1877, étrangle et étouffe la soeur de sa femme, Thérèse Jacquet, une quadragénaire qui vivait avec lui depuis qu’elle était devenue veuve, après qu’elle se soit rendue compte qu’il lui avait volé 5.600 francs. Ensuite, il étrangle sa nièce Amélie, la fille de Thérèse, âgée de 10 ans, qui a assisté à toute la scène. Au réveil, à 4h, n’est pas directement informé de son sort : on lui dit qu’on va le transférer, et qu’avant, il va entendre la messe. Malgré des allusions répétées du procureur et du gardien, son esprit fruste ne peut comprendre. Ce n’est qu’après la messe que le gardien-chef se décide à lui révéler la vérité. Il se met alors dans une très grande colère. « Moi qui n’aurais pas fait de mal à une mouche ! » On lui demande de se calmer : « Ah oui, pardonner ? Ma belle-soeur me fait périr, et c’est elle qui avance ma mort. » Il accuse la terre entière de ses malheurs, en particulier sa belle-soeur et les jurés, avant de se rassérener. Au greffe, demande un verre de rhum, parle de ses rhumatismes, ses opinions politiques. Il évoque avec tendresse son épouse, et demande en vain un notaire pour rédiger son testament (un condamné à mort est déchu de tous ses droits civils). Confié à M. Roch et ses aides, le bourreau lui dit : « Allons, ayons du courage, ce ne sera rien. » Va, impassible, à l’échafaud : lève les yeux vers le ciel, puis les rebaisse et se laisse aller sur la bascule. 08 janvier 1878 18 mars 1878 Lundi,
6h12 Evreux
Eure Emmanuel-Modeste Louchard PARRICIDE. 27 ans, berger. Pour une histoire d’argent, dans la nuit du 16 au 17 mars 1877 à Goupillères, assomma sa mère, la veuve Louchard, née Julienne-Agathe Guillotin, à coups de marteau, la découpa à coups de serpe, jeta les tronçons dans une marnière voisine et fit cuire sa tête dans un four pour la rendre méconnaissable. Réveillé à 5h. Déjà réveillé, ayant souffert d’insomnie et de violentes douleurs à la tête qui avaient obligé le docteur à se déplacer. « Je le savais. » S’entretient avec l’abbé Douin. Au greffe, refuse le café et l’eau-de-vie qu’on lui propose, et ne désire qu’un peu d’eau sucrée. Revêtu du costume des parricides. Le fourgon s’arrête à cent mètres de la guillotine, place du Bel-Ebat. Allure ridicule : petit, gros, avec une tête énorme que le voile ne parvient pas à couvrir entièrement. Quand on lui enlève le voile, il regarde, fasciné et horrifié, le cercueil posé sur le sol dans lequel on le mettra bientôt. Au moment où l’huissier finit de lire l’arrêt, les aides le poussent. Un temps de flottement pour bien positionner le corps sur la bascule – Louchard n’a presque pas de cou – et le couperet tombe. Mais le cadavre, à cause d’une position courbée sur la machine, tombe assis dans le panier, et des jets de sang jaillissent en fontaine au vu de tous. 28 janvier 1878 11 juin 1878 Mardi,
4h Laval
Mayenne Louis-Léon Boucher 21 ans. Domestique sous un faux nom (Blanchard) chez les Houssin, une famille de meuniers du Bas-Coudray, à Sainte-Isle, viole et égorge la fille de ses patrons, Henriette, âgée de 11 ans, le 2 février 1878. Arrêté, il est identifié comme étant un rédiciviste, auteur de plusieurs viols commis sur mineures. Réveillé par l’abbé Foucault, Boucher dit : « J’ai causé une peine extrême à mon vieux père par mon inconduite. Hé bien, je veux au moins qu’il ait la consolation d’apprendre que je suis mort en bon chrétien. » Après la confession et la messe, il salue ses gardiens et est conduit au greffe pour la toilette. Dans le fourgon, il prie pour se donner du courage. Arrivé place de Hercé, il ne voit pas la guillotine : le bourreau Roch fait obstacle exprès pour ne pas qu’il soit pris de panique. 10 avril 1878 13 juillet 1878 Samedi,
4h30 Lyon
Rhône Pierre-Jean Laurent 32 ans. Entre le 06 et le 09 décembre 1877, tue à coups de hache Pierre Villecourt, 63 ans, propriétaire à Brullioles pour le voler. Réveillé à 3h. Assis sur son lit, ne semble pas comprendre. Sueurs froides sur le visage, les gardiens doivent l’habiller. Refuse la nourriture mais prend un verre de vin. Toilette rapide et sans histoire. Arrivé cours Charlemagne, lève les yeux et regarde en face le couperet, avant de reculer de peur. Mouvement rapidement maîtrisé par les aides. M.Roch reçoit un jet de sang en plein visage qu’il essuie avec son mouchoir… uniquement après avoir fait le tour de la machine pour voir si tout est en ordre. Peu de monde présent. 25 mai 1878 18 juillet 1878 Jeudi,
4h Morlaix
Finistère Yves-François Denis 33 ans, cultivateur à Kervigaoué (Finistère). Le 15 décembre 1877, tua à coups de piquet de charette sa tante et bienfaitrice, la vieille Jeanne Leroux, qui lui avait vendu ses biens en viager. Dans une mauvaise situation financière, Denis ne pouvait lui payer les 300 francs qu’il lui devait. Condamné dans le Finistère, arrêt cassé puis re-condamné dans le Morbihan. Ses complices, François-Marie Larhantec et François Simon, ses domestiques et complices (contre 15 francs et un peu d’eau-de-vie), sont condamnés respectivement à 20 et 10 ans de travaux forcés. Transféré de Vannes à Morlaix le mercredi 17 à 10 heures par train. Arrivé à 18h35, il est incarcéré à la prison locale et s’endort comme une masse. Réveillé à 3 heures, il faut le secouer pour qu’il ouvre les yeux. En arrivant place Saint-Nicolas, il s’adresse aux quelques 5.000 personnes présentes : « J’ai tué, je mérite mon sort. Que Dieu me reçoive dans sa sainte miséricorde ! » Embrassé par les aumôniers de Vannes et de Morlaix, il se laisse emporter par les aides. 03 avril 1878, 06 juin 1878 07 septembre 1878 Samedi,
5h30, 5h35 Paris Aimé Barré et Paul Lebiez Barré, 25 ans, ancien clerc de notaire, homme d’affaires en faillite. Lebiez, 25 ans, étudiant en médecine. Le 23 mars 1878, attirent dans un piège au 61, rue d’Hauteville, Mme Berthe Liberre-Limouse, dite la « mère Gillet », laitière en affaires avec Barré, la croyant très riche. Assommée à coups de marteau par Barré, poignardée de six coups de scalpel en plein coeur par Lebiez. Après l’avoir volée, dépeçent le corps, dont ils expédient une partie au Mans dans une malle, puis abandonnent les membres découpés dans une chambre d’hôtel, rue Poliveau. La maîtresse de Barré, Léontine Lepin, est condamnée à trois ans de prison pour recel. Réveillés à 4h50. Barré est le premier, ne dort pas. Pâle, il ne dit pas un mot. Lebiez, qui dormait, se réveille très facilement et dit : « C’est bien. » Séparés jusqu’au bout. A la toilette, boivent chacun un verre d’eau de vie. Barré sort le premier. Défaille en voyant la machine. On doit le soutenir. Embrasse l’aumônier. Mauvaise synchronisation des aides : le « photographe » reçoit un jet de sang dans le visage. Lebiez arrive à son tour. Cherche du regard le spectateur qui crie : « Bravo, Lebiez ! » puis prononce ses derniers mots : « Adieu, messieurs. » Le fourgon contenant les corps va pour partir quand M.Roch hurle de s’arrêter : la tête de Lebiez a été oubliée dans la bassine ! Nouveauté : le couperet est dissimulé par une plaque de bois au sommet de la machine pour éviter aux condamnés de le voir avant de mourir – la nouveauté ne servira que cette fois et lors de l’exécution suivante. 31 juillet 1878 18 décembre 1878 Mercredi,
7h25 Alençon
Orne Aimé Ernest Mautin 28 ans, ouvrier charpentier et maçon. Viole, le 10 juin 1878 à Moulicent, Louise-Désirée Gautier, épouse Renard, 21 ans, puis la frappe à coups de bouteille, de couteau et de faucille, l’éventrant et la défigurant, avant de s’acharner sur la petite Augustine, trois ans, qui survit. Mme Renard a le temps de le dénoncer, avant de mourir, deux jours plus tard. Réveillé à six heures. Dit « Je m’y attendais. » Se confesse, entend la messe. Au greffe, boit un verre de vin chaud. Laisse les aides faire sa « toilette » sans broncher, et monte dans le fourgon avec l’aumônier. Arrivé au Champ-du-Roi, embrasse le prêtre. Dernière exécution effectuée par Nicolas Roch. 26 octobre 1878 19 mai 1879 Lundi,
5h Agen
Lot-et-Garonne Pierre Laprade PARRICIDE, 20 ans, cultivateur. Le 10 novembre 1878, à Allemans-du-Dropt, tua son père Jean-François, 43 ans, carrier, sa mère Elisabeth Chaumès, 38 ans, sa grand-mère Marie Teyssier, Veuve Laprade, 83 ans, à coups de serpe. Réveillé à 4h. « Je suis innocent, je mourrai innocent. » Au procureur qui lui demande s’il n’a pas d’aveux à faire, répond : »Non, je meurs innocent. » Entend la messe, puis au greffe, demande du café et du cognac qu’on lui donne. Mais quand vient l’heure de la toilette, refuse de s’asseoir à la demande de Louis Deibler, le nouvel exécuteur en chef. « Je veux y aller comme ça. » « Allons, allons, ne faites pas le méchant, nous ne voulons pas vous faire souffrir. » « Moi, je veux souffrir, je n’ai fait de mal à personne et vous me faites souffrir injustement. » Avec l’aide des gardiens, les adjoints parviennent à le faire s’asseoir, mais il résiste et donne de violents coups de pied. Au final, la lutte dure près d’une demi-heure et huit personnes sont nécessaires pour le maîtriser jusqu’à ce que Deibler lui tape la tête contre le sol. « Qu’avez-vous fait ? » « Je l’ai sonné. », répond le bourreau. C’est agenouillé qu’on le toilette tant bien que mal, et on lui laisse la camisole de force, dont on découpe le col, on le met pieds nus et on lui passe le voile noir sur la tête, mais on s’abstient de lui mettre la longue chemise blanche. Continue à se dire innocent. Dit qu’il marchera jusqu’au fourgon. La voiture s’arrête place du Pin, à vingt mètres de la machine. L’arrêt de condamnation est lu. Laprade embrasse le crucifix et dit à nouveau : « Je suis innocent ». La décapitation se fait au niveau des maxillaires et de l’occiput. 06 mars 1879 10 septembre 1879 Mercredi,
5h Saint-Rambert
Loire Jean Chambes PARRICIDE. 39 ans, maçon à St-Etienne. Etrangla à Saint-Rambert courant janvier 1879 son père Antoine, 74 ans, pour hériter de sa maison et de ses meubles. Il dissimula le cadavre sous l’évier pendant deux mois, vivant dans la maison en compagnie du corps putréfié et prétendant que le vieil homme étant parti en voyage. Réveillé à la prison de Montbrison à 1h, se lève et dit d’une petite voix (affligée depuis toujours d’un bégaiement prononcé) : « Ah, c’est pour ce matin. Eh bien, tant pis. » S’habille, discute avec l’aumônier, puis grimpe dans un omnibus réquisitionné exprès. Au bout de deux heures et demie de voyage, arrive à Saint-Rambert. A la caserne de gendarmerie, mange un poulet rôti, boit deux verres de vin et fume deux cigarettes. Marche de la gendarmerie à la prairie où la guillotine est dressée, très fermement. L’aumônier voit son surplis aspergé de gouttelettes de sang. 21 juin 1879 13 novembre 1879 Jeudi,
7h Beauvais
Oise Théotime Prunier 23 ans, charretier à Try-la-Ville. Le dimanche 27 juillet 1879, voulait violer la fille de son employeur, meunier, mais en l’absence de celle-ci, rabattit ses désirs sur la belle-mère de ce dernier, Mme Jobin. L’assomma à coups de bûche, viola le cadavre, puis la jeta dans la rivière, puis repêcha le corps une demi-heure plus tard pour le violer de nouveau. Réveillé à 5h avec deux autres condamnés à mort – Martin et Isnard – pour assister à une messe spéciale. Au terme de celle-ci, on annonce à Prunier que la fin est proche. Muet, mais sans soutien, descend au greffe. Demande à serrer la main au gardien-chef et le remercie pour ses bons traitements. Se tourne vers une religieuse présente : « Et vous aussi, ma bonne mère, laissez-moi vous remercier. » Accepte de prendre un verre de rhum, tremble de froid quand on lui lie les mains et demande qu’on le rapproche du poêle, ce qu’on accepte. Se plaint un peu car les liens lui font mal aux épaules. Avant de grimper dans le fourgon, tire quelques bouffées de cigarette, puis la rejette car il ne peut pas bien fumer avec les mains attachées. Arrivé place du Franc-Marché, regarde la foule et le couperet à plusieurs reprises – le couteau avec une horreur non dissimulée – puis se laisse basculer. 12 septembre 1879 19 janvier 1880 Lundi,
7h Paris Victor Prévost 43 ans, ancien Cent-Gardes, gardien de la paix. Arrêté pour avoir, le 10 septembre 1879, assassiné chez lui (22, rue de l’Evangile) à coups de boule de tender Alexandre Lenoble, courtier en bijouterie, 38 ans, afin de lui voler pour 6.000 francs de bijoux. Il découpa le cadavre en morceaux et tenta de les faire disparaître dans les bouches d’égoût du quartier, mais il fut remarqué en pleine action. En outre, l’enquête montre que trois ans plus tôt, Prévost a étranglé sa maîtresse Adèle Blondin le 27 février 1876, découpé son cadavre et jeté le tout dans les égouts, sauf la tête, enterrée près de la porte de la Chapelle. Mobile : lui voler les 1.500 francs qu’elle conservait toujours sur elle. Réveillé, et debout, s’affaisse sur son lit en entendant la nouvelle. Puis il se reprend et dit « Je serai brave, mais cette administration de la Préfecture que j’ai tant compromise, je tiens à lui demander humblement pardon. » M. Macé, chef de la Sûreté, lui donne quelques paroles de pardon et de courage. Quand les aides s’emparent de lui, Prévost dit « C’est inutile de m’attacher, je ne me défendrai pas. » M.Macé lui demandant s’il a des aveux de dernières minutes, il répond : »Aucun, monsieur, ce sont les deux seules fautes que j’aie commises. » Il refuse alcool, cigarette et nourriture. Arrivé devant la guillotine, après avoir embrassé l’abbé Crozes, il demande à Deibler : « Est-ce long ? » Le bourreau répond : « Non, courage. » « J’en aurai », dit le condamné avant d’être poussé en avant. 08 décembre 1879 07 septembre 1880 Mardi,
5h30 Paris Louis Ménesclou 19 ans, ancien mousse. Viole et étrangle la petite fille de ses voisins, Louise Deu, 4 ans, le 15 avril 1880 au 155, rue de Grenelle. Découpe le corps en 35 morceaux et fait brûler certains tronçons dans son poêle. Avant de se coucher, vers 1 heure du matin, en voyant l’orage qui tombait sur Paris, il dit « Allons, ce ne sera pas encore pour cette nuit, il fait trop mauvais temps, je vais dormir. » Réveillé à 5h05, alors qu’il ronfle, il faut le secouer quatre fois pour qu’il ouvre les yeux. Il répond « Ah ! Bon ! » au directeur de la prison. On lui demande à deux reprises de se vêtir, avant qu’on ne prenne l’initiative de le faire à sa place. A sa dernière volonté, il demande du vin, et boit deux verres avec une grande difficulté. Se met une main en guise de cornet acoustique pour entendre ce qu’on lui dit. S’entretient 10 minutes avec l’aumônier. Devant la bascule, à l’aumônier qui l’embrasse, il demande « Embrassez bien pour moi mon père. » Quelqu’un dans la foule pousse un cri. 30 juillet 1880 16 septembre 1880 Jeudi,
5h30 Angoulême
Charente Jules-Isaac Huort PARRICIDE, 23 ans, garçon coiffeur. Attaque sa grand-mère, la veuve Laversanne, 74 ans, au soir du 27 février 1880 à Cognac en tentant de lui arracher la langue à mains nues afin de la voler. La vieille dame meurt le lendemain matin. Le directeur lui demande : « Dormez-vous, Huort ? » « Non, monsieur, je ne dors pas. » Informé des rejets de ses pourvois, Huort s’asseoit et regarde les gens comme s’il ne comprenait rien. ON lui donne ses vêtements civils, il parle avec l’abbé Renoud. Au greffe, il boit un peu d’eau-de-vie, croque un biscuit et fume une cigarette avant de boire quelques gorgées de vin. Il remercie gardiens et directeur pour leurs bons soins, puis est remis aux bourreaux qui le mettent en tenue de parricide. Conduit place du Champ-de-Foire, il est soutenu par l’abbé Renoud. On lui lit l’arrêt de mort, puis les aides s’en emparent. 15 juin 1880 31 mars 1882 Vendredi,
6h Versailles
Seine-et-Oise Pierre Lantz PARRICIDE. 34 ans. Tua dans la nuit du 15 au 16 décembre 1880 son père septuagénaire, à Lixheim (Meurthe), à coups de pied et de poing et en lui cognant la tête sur le plancher. Après, il abusa du corps du vieil homme. Temps de pluie. Au réveil, saisi d’effroi à la nouvelle. Pendant qu’on lui enlève sa camisole, le pasteur lui parle. Lantz annonce : « Je suis prêt. » Au greffe, refuse rhum et cognac qu’on lui propose. Il demande pardon au gardien-chef pour avoir été un détenu désagréable et emporté. Il est mis en tenue de parricide. Le fourgon s’arrête à 25 mètres de la guillotine, au Pont-Colbert. Le pasteur prie l’huissier de s’abstenir de lire l’arrêt de mort et demande à Lantz s’il en donne acte. Durée de l’exécution : une minute environ sur la bascule. 10 septembre 1881 29 juin 1882 Jeudi,
4h55 Laon
Aisne Joseph-Frédéric Soissons PARRICIDE. 40 ans, briquetier à Marly, canton de Guise. Ivrogne, à force de violences, en 1881, fit fuir sa femme ainsi que leurs trois enfants. Demanda à sa mère, la veuve Soissons de s’installer chez lui. Inquiète pour lui, la vieille dame ne cessait de lui conseiller d’arrêter la boisson, et il la battait comme plâtre régulièrement. Craignant de la voir partir – ainsi que ses économies, environ 1.000 francs -, le 24 novembre 1881, tua sa mère à coups de pelle à feu et la piétina avec ses sabots, puis mit le feu à sa propre maison pour faire disparaître les traces. Au réveil, se met à pleurer, car croyait en sa grâce : « Quel malheur ! Quel malheur ! Il n’y a donc pas moyen d’avoir pitié de moi ! » Après la messe de l’abbé Degoix, toilette où il revêt l’habit de parricide. Soutenu jusqu’au fourgon. Arrivé sur le champ Saint-Martin, le véhicule s’arrête à vingt mètres de la machine. Lecture de l’arrêt, puis exécution très rapide. 10 février 1882 03 juillet 1882 Lundi,
5h Bordeaux
Gironde Philippe Pierre Martinet 35 ans. Assassine dans la nuit du 9 au 10 avril 1881 son oncle Mathias Martinet, 72 ans, aux Maingauds, près de Sainte-Foy-la-Grande, en lui aspergeant le visage d’acide sulfurique pendant qu’il dort, puis le frappe à coups de fourche, de couteau, de serpe, de piques à brochettes et d’un gros clou. La mère Martinet, soeur de la victime, 70 ans, et les voisins, les époux Large, sont jugés pour complicité. En apprenant la nouvelle, pris d’un tremblement nerveux. Ecoute la messe, se confesse et communie. Donne à l’aumônier un papier destiné au Parquet. Arrivé place du Repos, pris de faiblesse, doit être porté jusqu’à la machine. A peine 50 spectateurs. 12 février 1882 28 août 1882 Lundi,
4h30 Le Puy
Haute-Loire Pierre Mallet 36 ans, vagabond. Tua à coups de marteau le 03 janvier 1882 l’abbé Rivet, curé de Saint-Arçons-sur-Allier, pour le voler. L’intention de dévaliser un presbytère en tête, Mallet avait déjà, quelque temps plus tôt, tenté d’entraîner dans un piège le père Garraud, curé de Sainte-Marie des Chazes, mais ce dernier s’était méfié de lui et l’avait fait reculer, une arme à la main. Ne dort pas quand les officiels entrent dans sa cellule, à 3h. Tremble nerveusement. Ecoute l’aumônier avec patience. En sortant de prison, embrasse et remercie tous les gardiens. Pâle, prostré, son dernier geste est d’embrasser l’aumônier, le gardien-chef et les aides avant d’être couché sur la bascule de la guillotine, dressée place du Foirail. 27 juin 1882 22 septembre 1882 Vendredi,
5h40 La Roche-sur-Yon
Vendée Jules-Pierre « Armand » Barbier 33 ans, ouvrier agricole. Tua à Saint-Vincent-Sterlanges, le 17 février 1882, son patron M.Durand et sa fille Mme Guibot, et blessa grièvement Mme Durand et une fillette, Cécile Bernier Surpris par la nouvelle, s’agenouille sur son lit et joint les mains en criant « Oh mon Dieu ! ». Puis se calme, s’habille. Aux questions du procureur, il répond que le désespoir l’ont conduit à ce geste. Il parle avec l’aumônier, demande à écrire une lettre à sa famille, ce qui lui est accordé. Boit un verre de rhum, fume une cigarette. Avant d’être remis aux exécuteurs, il dit au procureur Degors : « Je suis un soldat, je n’ai jamais été mauvais soldat. Dans un instant, je serai là-bas. Si je m’échappais ou qu’on me manquât, je vous promets que je ne vous manquerais pas. » Arrivé à l’entrée du cimetière, où la guillotine est montée, il la regarde avant de se laisser basculer. 28 juillet 1882 17 septembre 1883 Lundi,
6h02 Reims
Marne Edouard Hotz 29 ans, ouvrier agricole. Licencié pour vol, tua son ancien patron, Ferdinand Morlot, d’un coup de croc à paille dans la tête, le 23 mai 1883 à Blaise-sous-Arzilière, et déroba 2.000 francs et une paire de bottes. Réveillé à 4h30. Un gardien le prie de descendre au greffe, bureau du gardien-chef, sous prétexte que le procureur veut le voir. Il s’habille sans comprendre et arrivé au greffe, il est informé du rejet de sa grâce : demande « Comment, ce n’est pas la grâce qui est venue ? » avant de pousser un cri rauque et de s’évanouir. Relevé, il refuse de prendre alcool ou nourriture. On le laisse avec l’abbé Lejeune, puis on lui fait rêvetir ses habits civils. Conduit à la chapelle, on veut le faire communier, mais il refuse. Durant la messe, il demande à un gardien : « A quelle heure me coupe-t-on le cou ? » Deibler arrive à 5h30, et encourage Hotz à bien mourir. Livide et inerte, Holtz n’est plus que l’ombre de lui-même. Après vingt minutes de trajet en fourgon, arrive porte Dieu-Lumière. Des cris sont poussés dans la foule : « La voiture ! Reculez la voiture ! » Descendu et largement soutenu par les aides, a un mouvement d’épouvante en découvrant la guillotine. 21 juillet 1883 01 octobre 1883 Lundi,
6h20 Versailles
Seine-et-Oise Louis Houy 55 ans, ouvrier terrassier. Tue d’une balle de revolver dans la tête chacune Cécile Ursule Matrenghem, veuve Deslandres, 73 ans, rentière, et Anne Touzet, épouse Carré, 59 ans, bonne de la première victime, à Dourdan le 09 avril 1883, pour les voler. Les corps sont retrouvés le 20 avril. Son complice Henri Soullier est condamné à quinze ans de travaux forcés, Capelle, receleur, à cinq ans de prison. Réveillé à 4h30, cellule n°4 : « Ah, c’est pour aujourd’hui. C’est bien. » Avait toujours manifesté l’envie de voir la fin proche. Refuse de prendre quelque nourriture, boit un verre de cognac et envoie l’aumônier Charvet sur les roses : « Allez-vous-en, je n’ai pas besoin de vous. » Demande de quoi écrire et fait deux lettres, l’une à son frère, pour lui reprocher de ne pas l’avoir plus aidé et lui demander de donner ses biens au premier pauvre qui passe. La seconde lettre est pour le président de la République et dit en substance : « Dix-huit cadavres se trouvent dans un souterrain au coin de la rue des Fourneaux, près de la porte de Versailles. » Il signe ce message : « Celui qui meurt ne ment pas ! » Offre une paire de chaussettes et ses lunettes à un gardien. Toilette rapide, Houy courageux, ne dit pas un mot mais n’a pas un instant de faiblesse. Au Pont-Colbert, il regarde la guillotine de haut en bas, repousse l’aumônier qui veut l’embrasser, puis à un des aides, dit : « Desserez la courroie, adieu ! » Maladresse flagrante de Deibler, qui met plus d’une minute à lui mettre le cou dans la lunette – quand bien même le condamné ne se débat pas – et lui frappe involontairement trois fois le front contre le bois, ce qui fait crier Houy de douleur. Présence remarquée – et contestée – d’un père de famille qui a amené son fils de dix ans assister à l’exécution : l’enfant est horrifié. 26 juillet 1883 12 octobre 1883 Vendredi,
5h30 Lyon
Rhône Benoît-Marie Gonnachon PARRICIDE, 29 ans, domestique. Le 07 février 1883, à St-Igny-de-Vers, attire dans un guet-apens et tue son père Jean-Marie, 55 ans, à coups de hache, afin d’en hériter l’argent que celui-ci lui refusait depuis trop longtemps. Son complice Chalandon est condamné à perpétuité. Réveillé à 4h05. Dort : Louis Deibler (?) lui tape sur l’épaule pour le réveiller. Ouvre les yeux, se met à pleurer et demande ce qu’on vient lui annoncer. Quand le gardien-chef Pernin le luit dit, il sombre dans un état d’abattement total. Descend du fourgon anéanti, courbé en deux, revêtu de la tenue des parricides. 5.000 personnes présentes place Sainte-Blandine. 13 août 1883 12 avril 1884 Samedi,
5h Douai
Nord Henri Masquelin PARRICIDE, 30 ans, cabaretier. Ivrogne, eut des relations incestueuses avec sa mère, Appoline Joséphine Duthoit, veuve Masquelin, 60 ans, tenancière d’estaminet à La Madeleine-lès-Lille, en la menaçant. La frappait souvent devant témoins. Le 07 novembre 1883, finit par l’assassiner à coups de manche à balai et de hache, avant de lui arracher la langue et de lui enfoncer un encrier en plomb dans la gorge. Déjà réveillé par la foule installée place Saint-Vaast, joue aux cartes avec un co-détenu. A l’annonce, ne répond pas. Entend la messe, communie. Pendant la toilette, demeure anéanti. Apparaît aux marches de la prison, à demi-inerte, vêtu du costume des parricides, soutenu par les aides. Devant la bascule, on le fait s’agenouiller le temps que l’huissier lui lise la sentence. 15 février 1884 30 avril 1884 Mercredi,
4h48 Paris X… dit
« Michel Campi » 35 ans environ, vrai nom inconnu. Le 10 août 1883, assassine à coups de marteau chez lui, rue du Regard à Paris, l’ancien avocat Ducros de Sixt, tenta de tuer également la vieille soeur de ce dernier. Jamais aucune explication ne fut donnée à ce crime. Réveillé à 3h30. Réveillé par le directeur de la prison. Il demande l’heure qu’il est, puis s’habille. Il se nettoie sommairement la figure, boit un verre de vin blanc, et prie qu’on donne les 4f50 qui lui restent aux pauvres. Campi reste 5 minutes avec l’abbé Moreau. Après, il subit la toilette, et souhaite qu’on « ne s’occupe pas de moi après ma mort », sous entendant qu’il ne veut pas d’autopsie. Il demande s’il y a des journalistes, et les critiquent : « Ah, ils m’ont été fatals, ceux-là, s’ils avaient moins parlé de moi, on ne me guillotinerait pas ce matin. » Refuse de discuter avec un magistrat pour lui donner des précisions de dernière minute. « Merci, j’en ai assez. » Une veste de prisonnier sur les épaules, il quitte la prison et remarque : « Il ne fait pas froid. » Puis en voyant la guillotine : « Ah, ce n’est que ça ? » Il accepte la bise de l’aumônier puis se laisse basculer. 21 mars 1884 16 août 1884 Samedi,
4h Montbrison
Loire Paul Berthaud PARRICIDE, 25 ans, agent d’affaires. Tua le 06 juillet 1883, M. Eugène Moretton, 88 ans, son grand-père, et sa bonne, Catherine Variclier, à Feurs. Après une courte défaillance, Berthaud se reprend et fait preuve de fermeté. Prend un verre de rhum et serre la main aux gardiens, avant de leur demander merci pour leurs bons soins. S’entretient avec l’abbé durant la toilette, durant laquelle on le met en tenue de parricide. Devant la machine, place Saint-Jean, il embrasse le prêtre à plusieurs reprises. 28 juin 1884 18 août 1884 Lundi,
4h Tulle
Corrèze Pierre Gironde PARRICIDE, 33 ans, fermier. Craignant d’être expulsé de la maison paternelle, le 09 août 1883, tue son père Jean, cultivateur à Champeau, commune de Brivezac, de trente coups de hache et de couteau, et le jette dans une mare voisine pour faire croire à un suicide. Au procès du 9 décembre 1883 à Tulle, son frère cadet Martin, 28 ans, cité comme témoin, révèle que Pierre lui a fait porter le coup de grâce sous la menace, ce qui provoque le renvoi de l’affaire à une session ultérieure. Au terme du second procès, Martin est acquitté. A l’entrée des autorités, à 2 heures, déjà réveillé par l’orage. Calmement, répond : « C’est bien malheureux… je suis bien innocent. » Ne verse pas une larme. S’entretient avec l’aumônier, va à la chapelle soutenu par un gardien pour entendre la messe. De retour en cellule, boit du café et du cognac. Pendant la toilette, murmure en patois. Exécuté place du Champ-de-Mars. Va à l’échafaud avec résignation. Mal basculé, doit être replacé dans la lunette. Foule importante. 13 juin 1884 29 octobre 1884 Mercredi,
7h Rouen
Seine-Inférieure Jules-Marie Adeline PARRICIDE, 20 ans, soldat au 74e de ligne. Bat à mort et étrangle son grand-père, M.Biette, le 10 juin 1884 à Touques (Calvados) pour lui voler quelques centaines de francs. 25 juin 1884 09 décembre 1884 Mardi,
7h35 Saint-Pierre-lès-Calais
Pas-de-Calais Antoine Anglicus 38 ans, cordonnier, Belge. Abusait de sa fille Maria, 18 ans, couturière, depuis plusieurs années. Celle-ci s’enfuit au printemps 1884, et travaille à Saint-Pierre dans une usine de tulle. Le 12 juin, son père la retrouve, veut la forcer à regagner la maison familiale et la tua d’un coup de couteau de boucher dans le coeur comme elle refusait. Réveillé à la prison de Saint-Omer à 4 heures. Croyant être gracié, la nouvelle lui donne un choc terrible qui le fait défaillir. A cinq heures, prend le train de Calais entouré de quatre gendarmes et de l’aumônier, sans dire un mot, abattu. Toiletté dans une salle d’attente de la gare de Calais. Semble devenu fou, demande au procureur : « Je veux mes outils, ils m’appartiennent. » Exécuté devant la mairie, environ 5.000 personnes présentes. 13 septembre 1884 19 janvier 1885 Lundi,
7h Dijon
Côte-d’Or Pierre Marquis 32 ans, rémouleur. Tue de trois coups de revolver au sortir de la messe à Arceau le 31 août 1884 le juge Tripart et son fils. Tripart l’avait condamné à cinq ans de réclusion, 9 ans avant pour tentative de meurtre dans le Doubs. Réveillé à 6 heures. Dort bien. Répond : « Je n’ai rien à dire. » A l’aumônier, précise : « Je n’ai aucun regret, j’aurais pu me tuer, on aurait ri de moi, j’ai préféré me venger. » Au greffe, boit tranquillement café et cognac. Quand on découpe son col, il grogne : « Encore une chemise de perdue pour l’administration ! » Arrivé devant la bascule, il clame : « Pauvre société ! Que ma mort te serve d’exemple, et t’épargne les malheurs qui t’attendent ! » 15 novembre 1884 22 janvier 1885 Jeudi,
7h23 Bayeux
Calvados Jules Lamoureux PARRICIDE. 30 ans, journalier. A Cormotain, en septembre 1884, étrangle avec sa cravate sa mère, 60 ans, et lui frappe sur la tête avec un pavé puis tente de tuer son père qui venait au secours de son épouse avant de s’enfuir avec leur argent. Avait déjà tenté d’empoisonner ses parents à l’essence de térébenthine pour obtenir leur héritage plus rapidement. Quitte la prison de Caen à 2 heures du matin, prend le train qui arrive à 5h30. Pendant la toilette, refuse obstinément de dire où il a caché l’argent. Impassible jusqu’au bout. Exécuté place St-Patrice devant 2.000 personnes. 22 novembre 1884 17 avril 1885 Vendredi,
5h15 Riom
Puy-de-Dôme Pierre Biton 25 ans, portefaix. Pour le voler, étrangla avec un mouchoir l’aubergiste Chossière, à Sauviat, dans la nuit du 11 au 12 septembre 1884. Ses trois complices, Bernard, Molle et Jarles furent condamnés à perpétuité. Pris d’un tremblement nerveux au réveil. S’habille, parle avec l’aumônier, boit un verre de cognac et fume une cigarette. Quand les ciseaux découpent sa chemise, il crie : « Que voulez-vous me faire ? » Deibler répond : « Taisez-vous, mon ami, nous ne voulons pas vous faire de mal. » Devant la prison, embrasse le crucifix tout en regardant la machine. Va d’un pas ferme vers la bascule. 25 février 1885 24 avril 1885 Vendredi,
4h45 Paris Adolphe Tiburce Gamahut 25 ans, ancien moine, devenu lutteur de foire. Avec quatre complices, égorge et assomme à coups de bouteille Mme veuve Ballerich, au 145, rue de Grenelle, le 27 novembre 1884 pour voler deux francs cinquante. Réveillé à 4h10. Mal dormi à cause d’un violent mal de dents. Hagard, ne comprend pas. On lui répète la sentence, il murmure : « Que la volonté de Dieu soit faite. » Prie avec l’abbé Faure. Refuse sans parler un verre de cognac, passe ses vêtements. Va assurément au greffe : toilette sommaire, car sa tête et son visage sont rasés. Quand on lui demande s’il a une dernière déclaration à faire, il sourit tristement sans dire un mot. Ses yeux luisent de peur devant la machine, et il embrasse l’aumônier. Son corps tombe dans le panier les jambes repliées. 11 mars 1885 21 mai 1885 Jeudi,
4h Douai
Nord Alphonse Lepot 20 ans, tua à Lille la Veuve Boulanger pour la voler, le 19 septembre 1884 en plein jour. Condamné à mort avec son complice Linez, lequel est gracié. A son réveil, se mit à crier : »Je ne veux pas mourir, je n’ai rien fait pour cela ! Foutez-moi la paix ! Je suis le moins coupable, et c’est moi qu’on guillotine ! » Puis il se calma et écrivit une lettre à sa mère. Attaché solidement par les aides qui craignaient une réaction brutale de sa part, la chose s’avéra inutile. Il marche d’un pas ferme et regarde le couperet à plusieurs reprises. Pluie torrentielle. La section se fait un peu trop bas et touche les épaules. 22 mars 1885 02 juillet 1885 Jeudi,
4h Troyes
Aube Joseph Gagnier, dit « Gagny » « L’assassin de la Gloire-Dieu », 55 ans, déjà acquitté par les assises dans une affaire de meurtre sur un garde-chasse en 1878 : le 21 janvier 1885, tua Adérit Delahache et sa mère, ainsi que la servant Célestine Beauvallet, avec l’aide de son complice Aimé Arnoult, condamné à perpétuité. Réveillé par le gardien-chef. Se lève tranquillement. Dit au juge d’instruction : « Je ne suis pas allé à la Gloire-Dieu, et je n’ai ni tué ni volé. » Demeure parfaitement impassible à part cela. Arrivé place de la Tour, il regarde la machine avant d’être basculé. 17 mai 1885 18 juillet 1885 Samedi,
4h15 Caen
Calvados Jacques Heurtevent 36 ans, repris de justice. Tua dans la nuit du 20 au 21 janvier 1885, avec Pierre Monsallier, 59 ans, la veuve Pilon, 79 ans, à Saint-Aubin-sur-Algot pour lui voler de l’argent et des volailles. Tous deux furent condamnés à mort, et Monsallier grâcié. Quand, au réveil, apprend la nouvelle de la bouche du procureur, se met à hurler qu’il est innocent. Pendant la messe, continue à protester à grands cris, et se calme durant la toilette. Refuse toute nourriture. Arrivé sur les fossés Saint-Julien, garde la tête baissée, et se met à trembler en voyant non loin de la guillotine le cercueil qui lui est destiné. Hurle : « Je suis innocent, je suis innocent, que mon sang retombe sur le jury ! » Résiste aux bourreaux sur la bascule en coinçant sa tête contre l’un des montants. Au bout de quelques secondes, on arrive enfin à le placer correctement pour refermer la lunette. 08 mai 1885 27 juillet 1885 Lundi,
4h57 Bordeaux
Gironde Pierre Forgeaud Recueilli par son oncle Jean Forgeaud et sa femme, les tue chez eux, rue des Boissières à Angoulême en avril 1883 avec la complicité de leur bonne, Marie-Catherine Marionneau, sa maîtresse, pour leur voler titres de rente, bijoux et argent. Le crime est découvert le 20. Après le crime, se réfugient en Italie et sont extradés. Première condamnation dans la Charente, arrêt cassé le 17 avril, seconde condamnation en Gironde. Au réveil, à 4h, répond au procureur : « Du courage ? J’en aurai. Il y a longtemps que j’attendais la nouvelle. Je suis honteux de l’infâmie qui retombera sur ma famille. Je regrette de n’avoir pas poignardé Marguerite. » Assure avoir commis son crime sans préméditation. Débarrassé de la camisole, entend la messe, communie. Au greffe, boit un verre de café noir et a les cheveux coupés (il les portait très longs). Place du Repos, descend le premier du fourgon et en murmurant des prières, il va de lui-même à la guillotine. Environ 10.000 personnes présentes. 06 mars 1885, 24 mai 1885 10 août 1885 Lundi,
5h, 5h13 Paris Paul Gaspard

Charles Marchandon

Gaspard, 22 ans. Dans la nuit du 21 au 22 février 1885, assassine de 42 coups de ciseaux le père Delaunay, 74 ans, menuisier, 70, rue d’Angoulême, pour le voler. Son complice Mayer, 21 ans, condamné à mort lui aussi, est gracié.

Marchandon, 22 ans, valet, plusieurs fois condamné pour vol. Tua à coups de couteau à découper Mme Cornet, 60 ans, rue de Sèze, dans la nuit du 15 au 16 avril 1885. Sa victime, épouse d’un riche fileteur, l’avait engagé la veille comme domestique.

Gaspard est réveillé le premier. « C’est bien triste, mais je m’y attendais. Est-ce que Mayer est exécuté lui aussi ? » Face à la réponse négative, il ne répond rien. Demande à écrire à sa mère, ce qui lui est refusé, puis il est ligoté. Marchandon demande lui aussi à écrire à sa mère : refusé également. Va tête baissée vers la guillotine et n’a qu’un mouvement de recul devant la guillotine. 20 juin 1885, 27 juin 1885 12 août 1885 Mercredi,
5h Saint-Omer
Pas-de-Calais Louis Pain 22 ans. Tua pour la voler, le 8 mars 1885, avec son frère Octave (19 ans) la veuve Mollet, cabaretière à Saint-Folquin. Les deux frères sont condamnés à mort, mais Octave est gracié. Espérait sa grâce, s’occupait d’un chaton en cellule. Quand on l’informe, il répond « Bien, monsieur ! » En guise de dernières volontés, demande qu’on donne ses vêtements à sa femme. Il rassure ses gardiens : « Soyez tranquilles, j’aurai du courage. » Pendant la toilette, demande au greffier de lui donner une cigarette, et il fume, mains attachées. Place du Marché-aux-Bestiaux, il descend du fourgon avec fermeté et se laisse saisir par les bourreaux. Il fallut dix minutes pour refermer le cercueil, trop petit pour le corps, et la mise en bière fut accompagnée par de longues gerbes de sang… jusqu’à ce qu’une des planches latérales cède, laissant voir le corps. 11 juin 1885 28 septembre 1885 Lundi,
6h Riom
Puy-de-Dôme Jean Trincard PARRICIDE, 32 ans, cultivateur. Etrangla – plus précisément la serra contre lui pour l’étouffer – sa mère, Gabrielle Boisson, 58 ans, pour la voler le 12 mai 1885 à Vertaizon. Au réveil, après un moment d’abattement, demande à Dieu pardon pour ses crimes. Parle à l’aumônier, et au greffe, boit un cordial en attendant les bourreaux. Il est mis en tenue de parricide. Devant la machine, embrasse l’aumônier. 8000 personnes présentes. 05 août 1885 02 février 1886 Mardi,
7h10 Caen
Calvados Benoît Jeton 44 ans, ouvrier agricole. Dans la nuit du 13 au 14 juillet 1885, à Bonneville-la-Louvet, assassine à coups de pelle et de pioche Gabriel Coulomier, compagnon de beuverie, pour lui voler 100 francs et quelques habits. Il fait le coup avec un complice, Joachim Legal, qui sera lui aussi condamné à mort et grâcié. Réveillé à 6h08. « Je sais pourquoi l’on me demande. Je m’y attendais, j’ai mérité mon sort et je ne me plains pas. » Après l’entretien avec l’aumônier, ému, il prie. Au greffe, il n’accepte de boire qu’un peu de bouillon, en expliquant que « la fièvre commence à me gagner. » Puis, voyant l’eau-de-vie sur la table, il dit : « Hélas ! Voilà tout ce qui a fait le malheur de ma vie jusqu’au dernier moment. Si je n’avais pas bu, je n’en serais pas là. C’est pourquoi je dis aux jeunes gens : ne buvez pas ! Ah, maudite boisson ! » Pendant la toilette, demande aux aides de ne pas le lier trop fort. Regrette de ne pas avoir communié. Conduit promenade des Fossés-Saint-Julien, informé par Deibler : « Nous sommes en avance. Si vous avez encore quelque chose à dire, nous avons encore quelques minutes, vous pouvez en profiter. » « Non, répond le condamné, maintenant. Le plus tôt sera le mieux. » Il embrasse l’aumônier et se laisse emporter. 13 novembre 1885 05 février 1886 Vendredi,
7h Mézières
Ardennes Nicolas-Théodule Gurnot 32 ans, braconnier. Tua le 5 août 1885 dans les bois d’Autry l’encaisseur de Grandpré, M.Tarnoux, d’un coup de fusil, pour voler l’argent qu’il transportait. Refusa de signer son pourvoi. Pleure à son réveil, à 5h15, reprochant à la justice de ne pas être égale pour tous. Refuse les secours de la religion, ainsi que toute nourriture : « Pourquoi faire, puisqu’on va me couper la tête ? ». Au greffe, accepte malgré tout un peu de cognac. Pousse un cri rauque quand on lui met la tête dans la lunette. Exécution place Saint-Jullien. 2.000 personnes présentes. 13 novembre 1885 29 mars 1886 Lundi,
5h30 Vesoul
Haute-Saône Francesco Picenardi 23 ans, ouvrier terrassier, Italien. Hébergé par les époux Martin, couple d’aubergistes sexagénaires de Corre, qui le considéraient comme faisant partie de la famille. Pour les voler, Picenardi les attaque à coups de serpe pendant qu’ils dorment le 5 septembre 1885 : le père Martin est presque décapité, la mère Martin survit miraculeusement aux 18 blessures reçues. Réveillé à 4h55. Peu troublé, répond juste : « Ah! » Affirme à nouveau ne pas avoir commis le crime pour l’argent, mais seulement à cause de son état d’ébriété. S’entretient cinq minutes avec l’abbé Mougeot. Trempe ses lèvres dans une tasse de café noir, et refuse de la boire. Attaché par les aides et chargé dans le fourgon, reste ferme, sans défaillir. Descend sur le champ de foire, derrière la halle aux grains, lieu de l’exécution. Embrassé par l’abbé. Un aide lui retire sa blouse et son chapeau avant de le basculer. 04 février 1886 02 avril 1886 Vendredi,
5h30 Laon
Aisne Cyprien-Augustin Gatteaux 42 ans, manoeuvre. Dans la nuit du 12 au 13 novembre 1885, étrangle et poignarde la veuve Florence Mathieu, 61 ans, dans sa maison de Beaurieux, avec la complicité de son beau-frère Eugène Lepage, qui sera condamné à perpétuité. A son réveil, gémit : « Malheur ! C’est fini ! » Pleure et se roule sur son lit avant de se calmer. Il boit un verre de cognac, puis discute avec l’abbé Degoix. Avoue un dernier vol. Pendant la messe, est pris d’une nouvelle crise de nerfs. Au bureau du gardien-chef, mange une brioche, boit un verre de vin blanc et une tasse de café. Avant de monter dans le fourgon, il dit : « Il faut que je me résigne. Je sais qu’il n’y a pas de résistance à faire. » Devant la machine, il embrasse la photo de sa famille et dit : « Je vais voir s’il y a un Bon Dieu au ciel… » Poussé sur la bascule, il crie : « Arrêtez ! » Anecdote : l’huissier Laurent ingurgite un litre de vin blanc pour se donner le courage de participer à l’exécution ce matin-là. 10 février 1886 08 avril 1886 Jeudi,
5h30 Paris Florent Koënig 20 ans, chaudronnier. Le 12 juillet 1885, sur le Champ-de-Mars, en compagnie de trois autres souteneurs comme lui, Forget, Huillot et Bouillon, tua le débardeur Courtin pour lui voler deux francs (!) et tente de tuer l’opticien Kuntz. Koenig et Forget furent condamnés à mort, les deux autres à la réclusion perpétuelle. Réveillé à 4h45. Fond en larmes. Refuse toute nourriture. Discute avec l’abbé Faure, pleure sans arrêt jusqu’au pied de l’échafaud, devant lequel il crie : « Je suis innocent ! Quand je vous dis que je suis innocent ! » Sur la bascule, se tord à tel point que les bourreaux doivent les remettre dans la bonne position. Il crie : « Oh ma mère ! » quand le couperet tombe. 10 février 1886 09 juin 1886 Mercredi,
4h Versailles
Seine-et-Oise Léon Jean, dit « Tapage » 26 ans. Défonce à coups de pieu le 10 octobre 1880 à Brasseuil le crâne d’une nonagénaire, la veuve Mallèvre, pour la voler. Le 12 avril 1881, face au manque de preuves et à des défauts d’instruction, il est acquitté. Le 18 août 1885, à Vert, il assomme avec un chevalet à scier le bois un vieillard, M.Pigis, pour le voler, en compagnie de Louis Reder. Tous deux furent condamnés à mort, et Reder grâcié. Soulagé par la nouvelle, dit en avoir assez d’attendre au choix la guillotine ou le bagne. Dans une dernière lettre à sa mère, la prie de lui pardonner tout le mal qu’il lui a fait, et dit que sa dernière pensée sera pour elle. Sur un autre papier, il écrit : » Puisque le moment fatal est arrivé, je vais avec courage à l’échafaud. » Il boit paisiblement un cognac, se confesse, puis se laisse saisir par les aides. Dans le fourgon, il fume une cigarette. Arrivé au Pont-Colbert, il dit à la foule :  » Messieurs, que mon exécution serve d’exemple à tous les jeunes gens de mon âge ! » Un aide maladroit, en récupérant sa tête dans la bassine, la laisse tomber et rouler au sol sur un bon mètre. Un adolescent de 15 ans, Pierre-Henri Junin, s’évanouira et deviendra fou après avoir assisté à l’exécution. Il sera interné après qu’on l’ait retrouvé endormi au bord d’un chemin auprès de la dépouille d’un chien qu’il a décapité… 12 avril 1886 04 octobre 1886 Lundi,
6h, 6h10 Paris Joseph « Pas de chance » Frey et Pierre Rivière 26 ans, couvreur et 30 ans, journalier. Etranglèrent Louise Henriette Largeot, veuve Deshayes, 42 ans, hôtelière, le 26 mars 1886, 94 boulevard de Charonne, pour la voler. A 5 heures, Rivière est déjà réveillé et presque habillé. « Ah ah, c’est pour aujourd’hui… Je m’en doutais. L’autre y passe-t-il aussi ? » Comme on répond vaguement, il insiste en vain. « C’est tout de même malheureux ! Je sais bien que je ne suis pas innocent. Mais enfin, l’auteur de ce crime-là, c’est l’autre ! » Il n’a plus envie de partir : « Non, non, cela n’est pas possible. Si seulement j’étais l’auteur du crime, vous verriez un peu si j’irais avec courage ! » L’abbé Collomb vient le calmer. « N’ayez pas peur, je ne faiblis pas. » Puis c’est sans soutien qu’il va au greffe pour la toilette. « M. Grévy n’est vraiment pas clément, mais je suis content que l’autre y passe. » Puis, alors qu’on lui lie les chevilles : « Salaud de Frey ! Si je te tenais, va ! Je me doutais que j’allais mourir, mais vraiment, quatre-vingt-dix jours d’attente, c’est trop long ! » L’abbé veut le réconforter, il le chasse : « Laissez, je ne crois plus à rien, je ne crois plus en Dieu, laissez-moi tranquille ! » Il boit un verre d’eau-de-vie mélangée à du sirop de cassis, puis quitte le greffe en grognant : « Faut-il que j’ai rencontré Frey ce jour-là ! » Et devant l’échafaud, il crie : « Vous direz au père Grévy que c’est un assassin ! » Frey, lui, dormait profondément. Aux encouragement de l’abbé Faure : « Oh, ca ne fait rien du tout, ne vous occupez pas de moi. » Il s’habille seul, et dit : « Eh ben, ca y est, c’est tout ! » Souriant, calme, il n’est pas plus ouvert aux secours de la religion que son complice : « Oh, vous savez, M. l’aumônier, laissez-moi tranquille, ne me parlez pas de votre bon Dieu, c’est inutile ! » Il va à la mort courageusement. 09 juillet 1886 11 novembre 1886 Jeudi,
7h02 Saintes
Charente-Inférieure Théophile-Emile Furet Cultivateur. A la Font des Hérauds (Charente-Maritime), étrangle Jeanne Bénassit, veuve Sébillaud, 86 ans, pour lui voler 5000 francs dans la nuit du 24 au 25 mars 1886 et s’enfuit quand on le soupçonne. Puis, au Mas d’Anglade, près de Perpignan, abat d’une balle dans la tête le 16 avril au petit jour un certain Bertrand, et camoufla le crime, laissant des indices compromettants pour laisser croire à la police que Bernard était l’assassin de la Veuve, et qu’il s’était suicidé, pris de remords. Arrêté le 18 avril à Bordeaux. Première exécution à Saintes depuis 1844. Pluie violente. Réveillé à 5h45. Reproche au gardien : « Pourquoi ne m’avez-vous pas prévenu hier ? ». Confessé et béni par le vicaire de St-Palais, mais ne peut communier, ayant fait la demande trop tardivement. Soutenu par les aides et le confesseur, conduit au greffe : s’évanouit dans le couloir et s’effondre contre le mur, se blassant à la tempe. C’est couché sur le sol du fourgon qu’il est conduit au pré le Roy, lieu d’exécution. Tremble en voyant la machine. 2500 personnes présentes. 14 août 1886 11 janvier 1887 Mardi,
7h20 Carpentras
Vaucluse Théophile Ginoux 22 ans. Satyre assassin de la petite Rose Roux, 9 ans, le 17 avril 1886 au hameau des Saffres, à Carpentras. Ginoux est stupéfait. « Mais je n’ai pas signé mon rejet ! » Après quoi, il prend sur lui et en s’habillant, dit : « Je ne crains pas la mort, elle ne me fait pas peur, je sais que je l’ai bien méritée. » Il se roule une cigarette, boit un cognac, et parle à l’aumônier. Il demande à fumer de nouveau, le gardien-chef lui propose un cigare qu’il refuse, et accepte une seconde cigarette qu’on lui prépare. Après un deuxième verre de cognac, il est préparé et conduit au fourgon. Place de l’Hôpital, l’aumônier l’embrasse et l’exhorte au pardon. Ginoux répond en haussant les épaules et va de lui-même vers la bascule. En entendant le bruit du couperet, sa mère, une prostituée présente à la terrasse d’un café voisin, pousse un cri et s’évanouit. 30 octobre 1886 24 janvier 1887 Lundi,
7h30, 7h35 Romorantin
Loir-et-Cher Georgette et Sylvain Thomas PARRICIDES. 25 et 30 ans, journaliers. L’accusant de sorcellerie pour mettre sur son dos tous leurs malheurs, les époux Thomas arrosent de pétrole la Veuve Marie Lebon, mère de Georgette, avant de la faire brûler vive, le 29 juillet 1886 dans leur ferme de Selles-Saint-Denis. Alexandre et Alexis Lebon, frères de Georgette et complices, sont condamnés à perpétuité. Transférés le 23 janvier de Blois à Romorantin, les époux ne se doutent quasiment de rien. Au réveil, Thomas reste muet, et refuse d’abord d’entendre le prêtre, avant de se raviser. Georgette, elle, croyant en sa grâce jusqu’au bout, se met à hurler et à pleurer. Après la messe, qu’ils entendent chacun de leur côté, les époux restent séparés même pendant la toilette. Impassible, Sylvain dédaigne alcool, nourriture et cigarette : « Oh, ce n’est pas la peine ! Allez, ce serait du bien perdu. » Georgette gémit sur le sort de ses enfants, et quand on lui coupe les cheveux, elle demande que ceux-ci soient donnés à ses fils et à sa fille. Revêtus des vêtements des parricides, le couple gagne le fourgon. Sylvain monte sans histoires, mais Georgette refuse de marcher, et il faut la porter. Arrivés sur la place d’Armes, à trente mètres de la guillotine, on fait descendre la femme la première. Une fois de plus, elle se débat, crie, pleure. Un aide la prend dans ses bras. Dans l’agitation, sa chemise découpée se déchire et laisse voir sa poitrine. Elle crie jusqu’à la chute du couperet. Sylvain meurt sans dire un mot. 24 novembre 1886 15 juin 1887 Mercredi,
4h Amiens
Somme François-Marc-Désiré Gaussuin PARRICIDE. 40 ans. Tua sa mère le 16 décembre 1886 à Rouy-le-Petit pour lui voler ses économies Meurt courageusement. 8.000 personnes présentes, place du Marché-aux-Chevaux. 27 avril 1887 31 août 1887 Mercredi,
5h Paris Enrico Giacomo Pranzini Tue avenue Montaigne, le 17 mars 1887, sa maîtresse, la demi-mondaine Régine de Montille, la bonne, Annette Grémeret et sa fillette Marie Grémeret, 9 ans, pour les voler. Devant la machine, dit au bourreau de le laisser, puis demande le crucifix au prêtre, l’embrassant avant d’être basculé. 13 juillet 1887 08 octobre 1887 Samedi,
5h30, 5h32 Aix
Bouches-du-Rhône Francisco Esposito et Michele Tegami Espagnol et Italien. Condamnés pour arrestations à main armée, chefs d’une bande de malfaiteurs qui dévalisaient les passants, le soir, dans les rues de Marseille, les frappant en cas de résistance. Tegami tua sur le coup un ouvrier attardé, et Esposito frappa d’une coup de pistolet un négociant qui se rendait à la gare. Au cours des débats, ils ne cessèrent de nier, et ce jusqu’à la fin. Réveillés à 5h. Comprennent immédiatement ce qui se passe dès l’entrée des officiels. Protestent violemment : « On va tuer deux innocents ! » Menottés par les gardiens et habillés, ils sont conduits au greffe, suivis par l’aumônier son crucifix à la main. Ligotés, toilettés, pâlissent devant la guillotine. Tegami part le premier tandis que son complice laisse libre court à sa colère. Tegami résiste quand on le pousse sur la bascule. Esposito est plus calme. 13 août 1887 18 novembre 1887 Vendredi,
7h Châteauroux
Indre Hippolyte Paviot 50 ans, botteleur. A Cluis, le 9 juin 1887, assassine chez lui à coups de masse Jacques Richer, un riche propriétaire de 85 ans, et son domestique Jacques Thavereau et vole 12.000 francs. La bonne, la veuve Marie Brisse, survécut à ses blessures et put le dénoncer. Réveillé à 6 heures, il gémit « Mon Dieu ! Mon Dieu ! Faut-y ? Faut-y ? ». Il se met à pleurer quand le procureur lui demande d’avouer une bonne fois pour toutes s’il est bien l’auteur du crime. Messe de l’abbé Saliquet. Au greffe, pendant la toilette, Supplie : « Ah, mes bons mondes, mes chers petits frères, laissez-moi mourir dans mon lit. » Le directeur lui propose un cordial de vin, qu’il refuse, préférant un verre de cognac. « Donnez m’en une petite goutte. » On lui tend un verre à demi-plein, dont il n’avale qu’une petite partie. Soupirant, gémissant à Me Guillard-Mesnard, « Ce n’est pas moi, je n’ai rien fait », conduit place du palais de justice, il tremble violemment en voyant la guillotine. Premère exécution dans le département depuis 1851. 10 septembre 1887 23 décembre 1887 Vendredi,
7h30 Laon
Aisne Gaston Pollet PARRICIDE. Ouvrier agricole, 26 ans, assassina Mme Gillot, sa grand-mère à coups de bûche pour la voler, à Pont-Saint-Mard au soir du 18 septembre 1887. Il vole 25 francs et jette le corps dans le puits. Hausse les épaules devant le rejet de sa grâce, assiste à la messe. IL fume une cigarette, boit un verre de rhum. Pendant la toilette, revêtu de la tenue des parricides, il se met à pleurer. L’abbé Ply tente de le réconforter. « Courage, vous serez pardonné là-haut ». Pollet répond : « Oh, ils vont me pardonner… Eux, ils vont me faire mon affaire. » Couché sur la bascule, il a le temps de répondre à Deibler qui l’incite au courage : « J’en ai. » 1500 personnes présentes. 10 novembre 1887 31 mars 1888 Samedi,
5h30 Evreux
Eure Paul Métayer 25 ans, délinquant, ancien pensionnaire de maison de correction. Tua à coups de gourdin le 13 novembre 1887 le vieux Adrien Laîné à Aubevoye pour le dévaliser. Au réveil, pousse des hurlements d’effroi, appelle sa mère. Pendant près d’un quart d’heure, il se débat, crie, pleure et court le long des murs de sa cellule. Les gardiens le déferrent et l’habillent, non sans mal. Au greffe, après avoir demandé du cognac et un cigare, Métayer continue de hurler. Arrivé avenue de Caen, en descendant du fourgon, il demande à la foule de ne pas faire comme lui, avant d’embrasser le prêtre et d’être poussé sur la guillotine. Temps : pluie. 23 janvier 1888 02 juin 1888 Samedi,
3h55 Quimper
Finistère Paul Faine 39 ans, garçon meunier. Etrangle puis viole Marie-Anne Gloanec, 14 ans, le 19 novembre 1887, jeune soeur de son ancien patron Alain, meunier à Ergué-Armel, et part en volant 12 francs. Faine avait été licencié un mois auparavant pour son attitude violente et ses comportements gênants envers l’adolescente. Avait violé une fermière en 1882 et commis un attentat à la pudeur en 1886 sur un garçonnet de 8 ans. Réveillé avant même l’arrivée des officiels. Déclara s’attendre à être exécuté, et reconnut mériter sa punition. Fume deux cigarettes, et boit une tasse de café arrosé d’eau-de-vie. Demande à aller au supplice à pied, mais la place du Marché-aux-Bestiaux est à 800 mètres de la prison, et le fourgon est donc requis. En voyant l’échafaud, Faine est pris de panique et manque s’évanouir. Se laisse basculer sans résister. Long moment entre le moment où le condamné est couché et la chute du couperet. Environ 8000 personnes présentes. 15 avril 1888 05 septembre 1888 Mercredi,
5h45 Sartène
Corse Saverio Rocchini Tue, lors d’une « vendetta », l’assassin de son père, Simon Taffani, le 10 septembre 1883. Il n’a que 19 ans. Puis, il prend à la fois le maquis et le goût du sang. Il abat une jeune bergère de 15 ans, Jeannette Melanini, qui se refusait à lui. Lors des recherches entreprises contre lui, il abat deux policiers. Puis il commence une carrière de « chauffeur » avec une petite bande. Il fut surnommé « La Bête ». Au réveil, ne comprend pas l’arrêt de condamnation en français car il ne parle presque exclusivement que le corse. Quand on lui explique, il pâlit, verse quelques larmes et demande à faire des révélations : avoue le crime de Jeannette Melanini, et sa participation dans la mort des frères Cartucci, mais nie quelques autres accusations. Après cela, se met à genoux et supplie qu’on le laisse vivre encore un peu, qu’on envoie un télégramme au président de la République pour bénéficier d’un sursis. « Perdono ! Perdono ! La vita ! » pleure-t-il. L’aumônier le relève et le console, il se confesse, puis dit « J’y vais » après avoir embrassé le crucifix. En guise de panier, sur la place centrale du village, a été mis un cercueil. Quand Rocchini apparaît, une voix de femme crie « Grazia ! » Il s’agenouille, demande pardon à Dieu et aux hommes, se relève, embrasse le crucifix de nouveau puis est poussé. Un aide lâche la tête au moment de la mettre dans le cercueil. 10 juin 1888 10 septembre 1888 Lundi,
5h45 Paris Edouard Schumacher 22 ans, soldat en permission, étrangle pour la voler le 2 mars 1888, rue Descartes à Paris, Mme Vignon, 79 ans, mère de son ancien employeur. Dit qu’il fera preuve de courage. Prie avec le pasteur, boit un verre de cognac. Au moment où les aides vont le mettre sur la bascule, le pasteur s’interpose pour demander à Schumacher s’il regrette son crime. L’homme d’église fait tant durer la scène que les spectateurs lui crient « Assez ! » 11 juillet 1888 31 octobre 1888 Mercredi,
6h20 Paris Charles Mathelin 39 ans, puisatier. Tua pour le voler son ami Eugène Oudin, 60 ans, surveillant du balayage de Paris, dont on retrouve le corps pendu dans un bois d’Esbly (Seine-et-Marne) le 10 mars 1888 – deux jours après la mort. Face au manque de zèle de la justice locale, l’affaire est retirée au parquet de Meaux et jugée à Paris. Réveillé à 6h10. En entendant le bruit de la porte qu’on déverrouille, il se dresse assis sur son lit, et promet qu’il aura du courage. L’abbé Faure tire de sa soutane une fiasque de cognac, et Mathelin en boit une gorgée. En supplément, le prêtre lui propose son aide, qu’il accepte d’un simple : « Comme vous voudrez ! » Calme et pâle, il va vers l’échafaud sans esclandre et sans public – 200 personnes à peine. 08 septembre 1888 03 novembre 1888 Samedi,
7h Beauvais
Oise Prosper Lavisse 23 ans. Tua dans la nuit du 23 au 24 juillet 1888 la veuve Favrel à Bailleval pour la voler. Il s’introduisit chez elle par la cheminée et la tua à coups de pierre. Quand les officiels entrent dans sa cellule, à 5h30, il est réveillé depuis 30 minutes. Devient pâle et transpire. Reste en uniforme pénitentiaire. S’entretient dix minutes avec l’abbé Claverie. Quitte sa cellule du premier étage pour la toilette, au rez-de-chaussée. Pendant qu’on l’attache, il pleure en silence. L’aûmonier lui fait boire une tasse de café au rhum. Cinq minutes plus tard, descend du fourgon place du Franc-Marché. Embrassé par l’abbé à deux reprises avant d’être basculé. 28 septembre 1888 20 décembre 1888 Jeudi,
7h10 Besançon
Doubs Paul-Albert Cordelier 24 ans. Tua le 15 janvier 1888 M.Edouard Maitrot pour le voler, près de Montbéliard. Réveillé à 5h30. Cordelier fronce les sourcils, et se met à trembler, frissons qui ne le quitteront pas jusqu’à la fin. Se confesse, entend la messe, et assis dans un fauteuil, boit une tasse de café et commence à fumer une cigarette qu’il ne termine pas. Reprend courage pendant le trajet qui le conduit à la promenade Chamars, au rond-point du pont du Canal. Descend seul du fourgon et va presque sans aide vers la guillotine. Peu de monde présent. 04 novembre 1888 24 décembre 1888 Lundi,
7h14 Blois
Loir-et-Cher Claude-Antoine Lyautey 42 ans, piqueur de meules. Le 19 août 1888 aux Montils, blesse de 36 coups de couteau émoussé la femme du meunier Henri Cosson, Angèle, 23 ans et enceinte, avant de la jeter dans le Beuvron où elle se noie. Sorti le 15 juillet précédent de la centrale d’Eysses où il venait de purger 5 ans pour vol. Il nie tout au long du procès, avant de se raviser et d’avouer juste après la plaidoirie de son avocat : il avait eu envie d’elle, elle avait refusé. Il n’abusa cependant pas d’elle, ni avant ni après sa mort. Quitte sa veste et s’asseoit lui-même sur le tabouret pour la toilette. Parfaitement maître de lui, arrivé sur la Grande-Pièce, il joue les curieux auprès du bourreau en voyant la guillotine : « Je peux bien voir l’instrument puisque c’est sur moi qu’il doit opérer. Comment fonctionne-t-il ? Ce grand panier, là, c’est le corps, et là, devant, c’est pour la tête ? » Sur un signe de Deibler, les aides poussent Lyautey sur la bascule. 23 novembre 1888 28 décembre 1888 Vendredi,
7h30 Paris Luis Federico Stanislas « Prado di Mendoza » Linska y Castillon 34 ans, chef d’une bande de malfrats de la région bordelaise. Egorgea sa maîtresse Marie Aguétant pour la voler le 14 janvier 1886. Réveillé à 7h18. « Ah ? C’est égal, mon avocat aurait du me prévenir, j’avais des dispositions à prendre. » Il s’habille, et refuse le cordial du prêtre, arguant que ce dernier a l’air d’en avoir plus besoin que lui. Déchire des papiers, jure qu’il est innocent sur « la tête de son enfant ». Puis, il s’emporte contre l’aumônier : « Vous, laissez-moi, entendez-vous ? Je ne crois pas à votre bon Dieu. S’il existait, il m’aurait tiré de là. » Au greffe, il demande qu’on lui laisse des entraves longues pour arriver à marcher, puis demande que son corps ne soit pas livré à la Faculté. Envoie encore sur les roses le prêtre, mais accepte de se laisser embrasser. Aucune déclaration finale. Crie « Ah ! » en voyant la guillotine, et se lamente de ne pas marcher librement comme il le souhaitait. 14 novembre 1888 22 mai 1889 Mercredi,
4h20 Paris Fulgence-Benjamin Géomay 21 ans, caporal au 87e régiment, assassine à coups de marteau la veuve Marguerite Roux, marchande de vins, le 14 janvier 1889, 234, boulevard Saint-Germain, pour lui voler à peine 200 francs. Réveil à 4h10. Promet d’avoir du courage. Fait jurer aux gens présents que son corps ne sera pas remis à la Faculté de Médecine. En sortant, il s’adresse à ses gardiens : « Je vous remercie tous, Messieurs. » 26 mars 1889 10 août 1889 Samedi,
5h Beauvais
Oise Hippolyte Hoyos 45 ans, fils de riches fermiers belges ayant dépensé sa fortune. Tue de plusieurs coups de couteau et défigure le 2 novembre 1888 le nommé Louis Baron à Chantilly sur un pont surplombant la ligne Paris-Beauvais et jette le cadavre sur la voie ferrée. Mobile : se faire passer pour mort et prendre l’identité de sa victime, qui lui ressemblait beaucoup ! Pendant qu’on fait reculer les spectateurs, un des soldats se trouve mal et il faut lui donner un verre d’alcool pour le remonter. Au réveil, saisit son pantalon. Pas de surprise : avait demandé à son avocat de le prévenir, et la veille au soir, ce dernier lui avait laissé entendre que ce serait bientôt la fin. Dit n’avoir aucune déclaration, et s’inquiète du sort de ses enfants. Quand le commissaire Gossin lui dit qu’il s’occupera d’eux, il répond : « Ah, merci ! Je mourrai satisfait. Vraiment, je n’ai pas mérité cette sentence-là, mais je suis résigné. » Il s’habille, boit un petit godet de rhum. L’abbé Claverie lui dit qu’il ira bientôt au ciel : « Je l’espère », répond le condamné. « Vous repentez-vous ? » « Oui, je me repens de ce que j’ai fait de mal dans ma vie. » Arrivé sur le champ de foire à deux pas de la fête foraine qui s’y trouve, Hoyos fait un signe à Deibler pour signaler que le bouton de son pantalon est défait, et qu’il veut être rajusté avant de mourir. Il avise dun capitaine de gendarmerie : « Ah, voilà un officier que je connais, je l’ai vu à Senlis. » Puis il embrasse son avocat, le prêtre, et va à l’échafaud. Malgré un cou très court et gros, pas de souci. 15 juin 1889 17 août 1889 Samedi,
4h50, 5h Paris Giuseppe Quinto Alorto et Jean-Baptiste Désiré Sellier 26 et 30 ans. Le 19 mars 1889, lors d’un cambriolage au 10 bis, rue Poussin à Paris, poignardent le jardinier Jules Bourdon, 29 ans, qui résidait sur place en tant que gardien. Leur complice Charles Mécrant, condamné à mort avec eux, est gracié. Le dernier complice, Pierre Catelain, est condamné à vingt ans de bagne. Alorto est réveillé le premier à 4h45…. Sellier gémit : « On m’a lié les haricots ! » Devant la bascule, il embrasse l’aumônier et lui dit « Bonne chance ! » 29 juin 1889 17 décembre 1889 Mardi,
7h15 Amiens
Somme Jean Laflèche Tua, le 20 mai 1889, ses patrons à la ferme aux Boeufs, canton de Combles, un couple de vieillards avec une serpe pour leur voler 6 francs. Réveillé à 6h30 par son compagnon de cellule à l’arrivée des magistrats. Après un moment de panique, il se calme et demande qu’on donne son pantalon à son co-détenu. Communie et entend la messe de l’abbé Corblet. Prend deux tasses de café au greffe, et dit aux aides pendant la toilette : « Ce n’est pas la peine de m’attacher, je vous suivrai. » Meurt courageusement, place du Marché-aux-Chevaux, devant 8.000 personnes. 25 octobre 1889 19 décembre 1889 Jeudi,
7h15 Paris Georges Kaps Tua le 02 décembre 1884, à 14 ans, Vinçard, vieux pédophile dont il était l’amant. En 1889, il entraîne dans ses nuits folles une jeune fille, Louise Direux, à laquelle il parle, un soir d’ivresse du crime. Inquiet à l’idée qu’elle puisse le dénoncer, il attendit qu’elle dorme pour lui tirer une balle dans la tête en mars 1889. Réveillé plusieurs fois au cours de la nuit, pensait que ce n’était « pas pour aujourd’hui. » A l’entrée des autorités à 6h55, il dit qu’il fera son possible pour avoir du courage. L’aumônier lui donne un gobelet de liqueur, et Kaps lui demande d’embrasser sa mère et son frère pour lui. Pendant la toilette, manifeste l’impatience d’en finir. Boit encore un peu d’alcool. Soutenu par les aides et l’aumônier, il accepte d’embrasser ce dernier, mais pas le crucifix. Corps remis à la Faculté. 29 octobre 1889 21 décembre 1889 Samedi,
7h15 Périgueux
Dordogne Lavoix « Julien » Jardry 21 ans, domestique. Tua au fusil de chasse le 18 août 1889 le vieux M. Gaillard à Busserolles, ainsi que sa servante Françoise Desplat pour voler 560 francs. Réveillé à 7 heures. Assis sur son lit, discute avec ses co-détenus. Ne parvient pas à y croire et se met à pleurer et à crier. Malgré les suppliques de l’aumônier, ne cesse de pousser des cris affreux et de gémir. Pendant la toilette, on lui fait boire un verre de rhum. Descend avec difficulté les marches qui conduisent au vestibule. En voyant la guillotine, dressée à l’entrée de la prison, il recule et ses hurlements redoublent d’intensité. 30 octobre 1889 23 janvier 1890 Jeudi,
7h20 Nancy
Meurthe-et-Moselle Jean Dauga 40 ans, né à Larée, près de Cazaubon (Gers), employé en imprimerie. Soupçonné d’avoir, le 3 octobre 1869 tué d’un coup de trident le garçon meunier Jean Dutruc, son ami, au moulin de Larée. Gendarme dans les Vosges après son service militaire : profite d’une permission pour revenir dans le Gers en avril 1881. Le 13 avril 1881, à un kilomètre de Larée, fracasse la tête de la veuve Courrèges à coups de marteau. Acquitté pour les deux crimes par les assises du Gers le 28 octobre 1881. Devient imprimeur à son retour dans les Vosges. Tue le 27 avril 1887 à Golbey (Vosges) les époux Pernod, le crâne fracassé à coups de marteau et la gorge tranchée au rasoir. Tue de la même façon les époux Martin, buralistes, le 15 mars 1888 à Saint-Nabord. Toujours de la même manière, à Pont-à-Mousson, massacre les époux Sulzer, drapiers le 18 décembre 1888, Mme Ferry le 05 février 1889 et la veuve François le 07 février 1889, pour les voler. Réveillé à 6h55. Sursaute, mais devient calme. « Très bien, la justice va m’assassiner. Mes enfants sauront que leur père est innocent. » Se lève seul. S’habille, fume une cigarette, écrit une lettre à sa femme, la cachette, la remet au directeur de la prison. Boit un peu de café noir arrosé de rhum, et fume une cigarette. Se confesse, reçoit l’absolution et la communion. Exécution sans histoire devant la prison : presque personne n’y assiste, les gens (près de 2.000 personnes) étant allés à tort devant le cimetère du Sud. 02 décembre 1889 03 février 1890 Lundi,
7h10 Albi
Tarn Justin Durand 24 ans. Le 09 mai 1889 à Albi, poignarde le Dr. Cassan, ancien maire d’Albi et médecin en chef de l’asile psychiatrique, dont il était le domestique. Au réveil, gémit : « Ma pauvre mère ! » et fond en larmes avant de rajouter : « Mais alors, c’est pour tout de suite ? Ce n’est pas possible ! Un garçon de mon âge, c’est bien malheureux ! Ayez pitié de moi ! » Il continue à geindre sur son jeune âge avant d’accuser la veuve Cassan, bru du docteur, dont il avait affirmé qu’elle était sa maîtresse et complice. Il s’évanouit presque. Il refuse par deux fois de boire du rhum, et s’entretient avec l’aumônier. En quittant sa cellule, il manque tomber une fois de plus. Au grefe, il proteste quand on l’attache, et demande à écrire quand on va lui couper les cheveux, mais quand le procureur lui demande s’il a d’ultimes déclarations à faire, il ne sait que balbutier des phrases sans queue ni tête. Quand Deibler le soulève, Durand lui demande s’il pourra parler au public. Le bourreau lui dit « Courage » à l’oreille. En arrivant devant la machine, place du Castelviel, Durand pousse un cri rauque et se jette en arrière, mais il est vite repoussé en avant. 17 novembre 1889 08 mars 1890 Samedi,
6h25, 6h28 Paris Albert « La Sardine » Jeantroux et Henri Ribot 17 et 21 ans. Tuèrent la Veuve Kuhn, 75 ans, concierge au 86, rue Bonaparte, le 15 juillet 1889, pour voler l’argent de sa rente…qu’elle ne devait toucher que le lendemain. Jeantroux est réveillé à 6 heures. « Oh, oui, j’aurai du courage, puisqu’il le faut. Ne craignez rien. » Au greffe, pleure un peu, mais se calme après quelques paroles du prêtre et une gorgée de liqueur. Ribot est réveillé ensuite, après une mauvaise nuit. Pas de surprise de sa part. Spasmes nerveux. Refuse le rhum en disant qu’il est calme, et accepte de converser avec l’aumônier. Jeantroux souhaite voir Ribot, on lui dit qu’il va le suivre. Après deux verres de rhum de plus, ne pouvant fumer faute de temps, il réclame un dernier service : « Vous direz à Ribot que je lui dis adieu. » Meurt avec courage. Ribot, conduit pour la toilette dans une autre salle, proteste quand on refuse de le laisser voir son complice : « C’est la dernière chose que je demande, on peut bien me l’accorder. » Comme on l’attache, il proteste encore : « Ce n’est pas la peine de vous y mettre à 36, je ne veux pas me sauver. » puis trouve que les entraves de ses jambes sont trop haut placées. Le visage contracté d’horreur, il va à l’échafaud frissonnant. 08 janvier 1890 05 mai 1890 Lundi,
5h Blois
Loir-et-Cher Charles-Lucien Aubert 27 ans, batteur en grange. Dans la nuit du 18 au 19 novembre 1889, au bois de Lancé, entre Gombergean et Saint-Amand, tue le domestique de ferme Abraham Benoît, 56 ans, de plusieurs coups d’échalas sur la tête et de cinq coups de couteau dans le cou pour lui voler quelques francs. S’attendait à sa grâce. Pris au dépourvu par la nouvelle, reste muet. Après la messe, passe ses vêtements civils et au « chauffoir », boit un bol de café, un peu de vin, du rhum, et mange un casse-croûte de jambon et de pain. Quand on lui demande s’il désire son rhum avant ou après le café, il répond « Oh, avant ou après, c’est bien la même chose. » Attaché aux chevilles, il constate : « Avec ça, je ne pourrai pas aller bien loin. » Sur la Grande-Pièce, plusieurs milliers de curieux attendent. Des échelles, sur lesquelles certains sont grimpés, s’ecroulent sous le poids. Aubert, pâle mais ferme, embrasse le prêtre et le crucifix. 27 février 1890 01 juillet 1890 Mardi,
4h30 Paris Jean Vodable 37 ans. Tue et viole la petite Alexandrine Malfillâtre, 12 ans, fille de sa maîtresse Pauline, le 29 novembre 1889 rue Basfroi. Vodable ne dort pas quand les officiels arrivent, il joue aux cartes avec ses gardiens. Il dit qu’il s’en doutait, et qu’il aura du courage. Au greffe, après voir demandé qu’on ne donne pas son corps aux médecins, il crie quand on lui lie les mains : « Ne serrez donc pas si fort. » Il meurt avec calme. 09 mai 1890 01 septembre 1890 Lundi,
5h Epinal
Vosges Jacques Constant 33 ans, manouvrier. Tua le 8 décembre 1889 à coups de bâton M Gouand Mansuy, 72 ans, à Mi-Mandray, pour lui voler 12 francs. Calme au réveil. Au juge d’instruction qui lui demande s’il a des révélations à faire, il répond : « J’ai dit tout ce que j’avais à dire. Si j’avais fait quelque chose, je l’aurais dit. » Reste avec l’aumônier Metzger, demande la communion. Boit un verre de rhum, se met à trembler jusqu’au dernier moment. Tente de résister en voyant la machine, on doit bien le pousser en avant pour le placer dans la lunette. 2.000 curieux place du Palais-de-Justice, où se trouve la prison : la guillotine est dressée entre la maison d’arrêt et l’église (place de l’Atre), à dix mètres de la porte d’entrée. 21 juin 1890 04 septembre 1890 Jeudi,
5h15 Montreuil-sur-Mer
Pas-de-Calais Louis Savary Journalier à Verton. Tua Mlle Coppin ou Coquin à Berck (ce qu’il nie) et la veuve Verger, 75 ans (qu’il avoue), à Rang-du-Fliers, le 09 mars 1890, de trois coups de couteau dans la gorge et la poitrine. Sa complice, Geneviève Garson, 39 ans, accusée de recel, est condamnée à six ans de prison. Réveillé à 4h10, doit être secoué à deux reprises pour ouvrir les yeux. « Bravo ! » dit-il ironiquement. Demande en vain à voir sa femme et son enfant. L’aumônier parle avec lui, le confesse, le fait communier. Durant la messe, semble ailleurs, et se frotte le front machinalement. Pendant la toilette, prend une chique de tabac et un verre de genièvre. Aucune révélation : affirme avoir dit toute la vérité. Monte dans le fourgon. Arrivé place de la Halle, frissonne en voyant la guillotine, et dit aux aides de le laisser tranquille. Embrasse le crucifix, l’aumônier, veut embrasser les aides. Ceux-ci le poussent sur la bascule. Pousse un cri et mord Louis Deibler à la main gauche. Pas d’exécution à Montreuil depuis une soixantaine d’années. 04 juillet 1890 03 février 1891 Mardi,
7h25 Paris Michel Eyraud 48 ans, homme d’affaires louche. Assassin de l’huissier Toussaint Gouffé, le 26 juillet 1889, qu’il attira dans un piège avec l’aide de sa complice Gabrielle Bompard. La victime fut pendue, et son corps transporté en train dans une malle retrouvée un mois plus tard à Millery (Rhône). Première exécution française d’Anatole Deibler. Déjà réveillé à 7h10, presque habillé, assis sur son lit. Avait remarqué changement dans l’heure de tournée des gardiens. Achève de s’habiller en civil. L’abbé Faure lui propose liqueur (cognac ou alcool de Raspail à l’angélique), qu’il refuse. « Non, je ne veux rien, je n’ai besoin de rien, cet alcool me ferait mal ! » A son avocat qui lui demande s’il a quelque chose à confier à ses proches, il répond : « Voyez-les, et dites à ma fille Reine qu’elle soit heureuse. » Va fermement au greffe, repousse le prêtre à nouveau et quand on coupe le col de sa chemise, s’en prend au ministre de l’Intérieur : « Constans doit être content de ce qui m’arrive. Maintenant, il ne lui reste plus qu’à décorer Gabrielle, la coquine ! » Il insulte Gabrielle, puis demande qu’on ne donne pas son corps à la Faculté. Ligoté étroitement – l’homme est robuste -, il s’en plaint aux aides. « Vous me faites mal ! Ne serrez pas ainsi, je marcherai carrément, allez ! » Repousse encore l’abbé Faure de telle façon que le directeur de la prison est obligé d’intervenir pour écarter l’abbé Faure. Devant la bascule, l’abbé opiniâtre veut s’approcher de nouveau : regard furieux d’Eyraud qui le dispense de tenter quoi que ce soit. Sur la bascule, crie : « Constans est un assassin, il est plus assassin que moi ! Constans est…  » Le couperet interrompt la phrase. 20 décembre 1890 28 février 1891 Samedi,
7h Besançon
Doubs Joseph-Auguste Clémençon 36 ans, Suisse, conducteur de bestiaux, voleur récidiviste. Sur la route à Vercel, assassina à coups de bâton, pour lui voler 250 francs, le maquignon Célestin Mercier, 55 ans, le 12 octobre 1890. Réveillé à 6h20. Peu surpris par la nouvelle. Demande à entendre la messe de l’abbé Desvignes. Au greffe, accepte un verre de cognac et prétend n’avoir aucune dernière révélation à faire. Exécuté devant la porte de la prison. 07 janvier 1891 18 avril 1891 Samedi,
4h48 Troyes
Aube Ferdinand Robin 33 ans, tua avec son frère Octave les époux Baillet à Eaux-Puiseaux, le 03 janvier 1891. Tous deux furent condamnés à mort, Octave gracié. Les deux frères, dormant dans la même cellule, sont réveillés en même temps. Octave est conduit dans une autre pièce, tandis qu’on annonce la nouvelle à Ferdinand. Il pleure. « Ma pauvre femme, mes pauvres enfants ! J’aurais bien voulu vous revoir ! Pauvre diable ! Pauvre malheureux ! Je m’en doutais bien. Si l’on m’avait donc tué le premier jour, je serais débarrassé ! » Puis il refuse le verre d’eau-de-vie : « Je vous remercie beaucoup, Messieurs, ça me ferait mal. » Pleure tout au long de la toilette, on doit le hisser dans le fourgon. En voyant la guillotine place de la Tour, se jette en arrière et se débat jusqu’à la chute du couperet. Corps inhumé au cimetière. 08 février 1891 02 mai 1891 Samedi,
5h03 Blois
Loir-et-Cher Denis Rebours 26 ans, domestique d’auberge. A Bouffry dans la nuit du 10 au 11 novembre 1890, tua à coups de serpe son oncle Louis Rebours, sa tante, Marie Rebours, née Chevalier, et sa cousine infirme, Marie-Louise, 31 ans. L’assassin avait besoin d’argent pour se marier quatre jours plus tard. L’annonce lui arrache de grands cris d’horreur. Il refuse d’entendre la messe. Au greffe, mange pain, galantine, boit un verre de vin et une tasse de café, puis fait un discours : « Messieurs, je demande bien pardon de ce que j’ai fait. J’ai pas mérité la guillotine, car si je l’ai fait, c’est le mauvais sang qui m’y a poussé. J’aurais mérité la guillotine si je l’avais fait par mauvaiseté, c’est bien malheureux et bien triste pour ma famille, pas pour moi qui serai bientôt hors de ma misère, car je pense que je serai plus heureux qu’avant. » Quand on le ligote, il dit : « C’est pas la peine, j’aurais bien marché. » Arrivé à la Grande-Pièce, où se trouvent 4.000 personnes, il dit : « Oui, je l’ai mérité, faut que j’y aille, j’y vas ! Oui, je l’ai mérité ! » Sur la bascule, fait plusieurs mouvements de côté, et le couteau lui coupe le cou en biais. 03 mars 1891 09 mai 1891 Samedi,
4h30 Chambéry
Savoie Gian-Maria Spaggiari 29 ans, Italien, détenu à la centrale d’Albertville. Tue à Annecy d’un coup de couteau en pleine poitrine Jules Gauthey, 17 ans, qui lui avait lancé des injures racistes le 02 décembre 1888. Condamné à 5 ans de prison pour ce meurtre par les assises de Haute-Savoie le 16 janvier 1889. Assassine d’un coup de tranchet de cordonnier dans la poitrine le nommé Chanut, un autre détenu de la centrale, qu’il avait pris en grippe sans raison, le 22 décembre 1890. Réveillé à 3h10. Stupéfait par la nouvelle, demande cigarettes et anisette, et fait mine de mordre le gardien qui vient le servir. Au procureur, donne une lettre destinée au vice-consul d’Italie, dans laquelle il dénonce les mauvais traitements que lui a infligé l’un de ses gardes. Il boit quatre verres d’anisette. La messe dure vingt minutes. Au sortir de la chapelle, agresse un gardien : « Qu’est-ce que tu fais là, salaud ? ». Pendant la toilette, se débat et donne un coup de poing sur le nez du gardien Curtet. On doit le faire tomber par terre pour le hisser dans le fourgon. Durant le trajet, insulte tout le monde, et hurle : « Sale nation de Français ! » Arrivé au lieu d’exécution – le Verney, une promenade située au bord de la rivière la Leysse -, il regarde les soldats, puis la guillotine, et demande à parler au moins un quart d’heure. On ne lui en laisse pas le temps. Cigare éteint aux lèvres, il est basculé. Un jet de sang touche quelques spectateurs trop près. 19 février 1891 13 mai 1891 Mercredi,
4h40 Arras
Pas-de-Calais Pierre Merger 30 ans, journalier au chômage. Etrangle à Halloy le 15 janvier 1891 une vieille cabaretière, la veuve Berthaud, 65 ans, pour la voler. Au réveil, semble ne pas avoir compris, puis répond « Bien, monsieur. » Aucune déclaration, accepte d’entendre la messe, puis boit un peu de cognac. S’interroge, un peu mécontent : « Vous n’allez pas me tuer ici, au moins ? » Reprend courage pendant la messe, et n’accepte de se confier qu’à l’aumônier, à qui il demande que sa mère fasse dire des messes pour lui. Au greffe, boit un nouveau cordial et remercie le gardien. Après la toilette, est couvert d’une veste noire et coiffé d’un chapeau gris. Exécution sans histoires place du Marché-aux-Chevaux. 20 mars 1891 03 juin 1891 Mercredi,
4h Evreux
Eure François Firoteau 40 ans. Vagabond et voleur, libéré de la centrale de Beaulieu le 12 décembre 1890. Quatre jours plus tard, en compagnie d’un ex-co-détenu, Vatinel, 25 ans, entre le 16 décembre 1890 à Breteuil-sur-Iton chez M. François Chauvin, ancien conseiller municipal, qu’ils battent à mort à coups de bâton, puis tentent de tuer sa bonne, la veuve Buisson, 64 ans, de la même manière, afin de les voler. Vatinel est condamné à perpétuité. Réveillé à 3h15, ne s’était couché qu’à 2h, ayant passé la soirée à lire. Pousse un cri d’épouvante et pâlit, mais recouvre son courage. Entend la messe, se confesse, passe ses vêtements civils et donne aux gardiens son tabac et ses cigares, puis 80 francs pour les prisonniers sans le sou. Se peigne la barbe, et boit un verre de calvados. Déclare : » Vous verrez, je suis un homme. J’ai commis un crime, il est juste que j’expie. Je serai courageux jusqu’au bout. » Pendant la toilette, boit un verre de vin, et se plaint qu’on lie ses poignets trop serrés. Dit adieu aux gardiens en montant dans le fourgon. Calme, arrivé au Bel-Ebat, lieu d’exécution, a l’intention de parler, mais comprend qu’il n’a pas le temps. Se place lui-même sur la bascule et crie « Adieu la France ! ». 17 avril 1891 11 juillet 1891 Samedi,
4h Nancy
Meurthe-et-Moselle Eugène Meunier 35 ans, douanier à Landres. Veuf depuis juin 1890 avec deux fils à charge de 8 et 2 ans, manifeste le désir d’épouser Mlle Maria Hixtel, d’Amermont. Mme Hixtel mère s’oppose à l’union. Le 30 août 1890, à Xivry-Circourt, il tue à coups de hachette le curé Lalance, 79 ans, et sa servante Sophie Pelletier, 55 ans, et incendie le presbytère. Cependant, le crime laisse des traces, notamment des fractures au niveau des crânes et l’absence d’une bourse de pièces d’or que le prêtre conservait en permanence sur lui. Faisant face à des refus répétés, Meunier incendie l’écurie des Hixtel le 2 octobre 1890, puis dans sa folie, pour se rendre plus « libre », étouffe avec un édredon le 6 octobre son propre fils, Julien, 8 ans. A nouveau débouté dans sa demande en mariage, le 16 octobre, il blesse gravement d’un coup de fusil dans le bras le capitaine Hixtel, frère aîné de Maria. Réveillé à 3h40. Demande à voir ses co-détenus et les embrasse. Dit avoir compris dès la veille que tout serait bientôt fini. Accepte de boire du café, et dit qu’il sera courageux, même s’il est innocent du crime de Xivry. Fume. Se confesse, communie. « Je serait prêt quand vous voudrez. J’aurais bien aimé revoir ma famille, mais mes parents ne sont pas riches, ils n’ont pu venir sans doute. » Boit un verre de marc. « Je ne suis pas un criminel, allez… J’ai commis une faute pour cette demoiselle Jactel. Si elle ne m’avait pas promis le mariage, je ne serais pas ici. Un mois après, je devais épouser une autre femme… Pour l’amour d’une fille, laisser mourir son sang ! Oh ! » Refuse d’être pris en photo, et se laisse toiletter. « Ce n’était pas la peine de me donner une chemise neuve qui va être déchirée ». Il assure à nouveau qu’il sera courageux : « Un bon soldat ne craint pas la mort, un bon Français n’a pas peur de mourir. D’ailleurs, tout le monde est condamné à mourir. » Refuse une ultime cigarette, puis sort de la prison, devant laquelle une foule l’attend. Un léger soubresaut quand il est « enfourné ». 23 mai 1891 27 juillet 1891 Lundi,
4h28, 4h30 Paris Gustave « Titi » Doré
et
Adolphe
« La Redingue »
Berland
18 et 19 ans. Membres d’une bande de quatre jeunes voyous d’Asnières. Le 12 janvier 1891, tuèrent la veuve Meusnier-Dessaigne, 80 ans, rentière à Courbevoie, pour la dévaliser. Ils tentent de lui arracher la langue, lui plantent un forêt dans la tempe, dansent sur son corps. N’ayant trouvé que 23 francs 15, Berland, pris de folie, lui réduit le visage en bouillie avec un bibelot – un coquillage à pointes. La bande mange un morceau sur place, puis s’en va se créer un alibi en se rendant au théâtre. Doré avait connu la victime : ancien garçon boucher, il lui livrait de la viande, et la vieille dame l’avait pris en sympathie. Les complices, Louis Deville, 17 ans, et Victor Chotin, 16 ans, sont respectivement condamnés à perpétuité et à vingt ans de travaux forcés. « Cerveau » de la bande, la veuve Berland, née Virginie Baron, 45 ans, mère d’Adolphe, est condamnée à mort et grâciée. Réveillé à 4h10, Doré dort profondément. « Bien », répond-il au directeur Beauquesne. Il enfile son pantalon, met sa veste sur ses épaules, et ne fait aucune déclaration. Il s’entretient un peu avec l’abbé Faure, puis au greffe, pendant la toilette, il se tourne vers le gardien-chef et dit : « Remerciez bien les gardiens pour moi. » De la sortie de la prison, à la bascule, Doré fixe le sol pour ne pas voir la machine. L’abbé Faure embrasse le condamné qui est poussé. Berland n’est pas plus surpris. Il refuse le verre de cognac que lui propose l’abbé Valette : « Pas maintenant, je veux d’abord m’habiller. » Une fois vêtu, il absorbe la fiole d’alcool, et s’enquiert du sort de sa mère. La nouvelle de sa commutation lui arrache un simple : « Ah. Et Doré ? » « Il sera exécuté en même temps que vous », répond le directeur de la prison. Berland parle avec le prêtre, puis se livre aux exécuteurs. Pâle mais ferme, il va à l’échafaud presque avec précipitation. 13 juin 1891 13 août 1891 Jeudi,
5h, 5h03 Avesnes-sur-Helpe
Nord Louis-Isidore Jeulin
et
Alfred-Léonard Demeaux 32 et 30 ans, journaliers. Chefs des « Ecumeurs de Cartignies. », onze malfaiteurs auteurs de quarante attaques à main armée dans la région d’Avesnes. Tuent de six coups de barre de fer à Esquéhéries Mme Rosine Lemaire, épouse Godin, 70 ans, pour lui voler 6.000 francs dans la nuit du 14 au 15 février 1890. Philomène David, épouse Lemaire, qui indiqué le crime d’Esquéhéries, est condamnée à perpétuité. Jean-Baptiste Joly, 38 ans, et Jules Pillot, 48 ans, sont condamnés à vingt ans de travaux forcés, Irène Pillot, épouse Demeaux, 27 ans, à huit ans de prison, Elvire Matton, épouse Jeulin, 23 ans, à six ans de prison, et Marie Matton, épouse Joly, 32 ans, à cinq ans de réclusion. Jeulin réveillé le premier à 4h30, pris d’un tremblement nerveux, s’évanouit. Après avoir respiré des sels, il accepte un cognac et une cigarette, puis se confesse à l’abbé Lesigne. Demeaux révéillé par les bruits de la foule à l’extérieur, n’a pas fermé l’oeil de la nuit, malgré les gardiens qui ont affirmé que ce vacarme était causé par un grave incendie. Déclare « Je suis prêt » aux magistrats. Se confesse, et rejoint son camarade au greffe. Ils s’embrassent. Jeulin part le premier place du palais de Justice, distante de vingt mètres de la prison. Porté par les aides, livide. Demeaux très pâle aussi, mais ferme. Ultime réaction de recul devant la machine, vite reprimé. Un jet de sang salit les vêtements de Deibler et d’officiers présents. 8.000 personnes présentes, beaucoup d’applaudissments – pas d’exécution à Avesnes depuis 1817. 06 juin 1891 28 août 1891 Vendredi,
5h12 Douai
Nord François-Onésime « Emile » Baillet 26 ans, ouvrier boucher, tueur récidiviste – cinq victimes certifiées. Le 24 juillet 1888, dix jours après avoir quitté la prison de Loos où il venait d’être emprisonné pour vol pendant deux ans, il étrangle Mlle Coppin, sage-femme à Berck pour la voler. Dans la nuit du 21 au 22 août 1888, à Fouquières-les-Béthune, il tue à coups de serpe le curé Devilly. Après un nouveau séjour en prison, libéré en septembre 1890, il étrangle dans son lit, à Ronchin, le 23 septembre, la vieille Mlle Dellevoye. Le 11 novembre suivant, il attaque le presbytère d’Ascq, armé d’une bouteille. Il blesse gravement le père Dillies et brise le crâne de sa bonne, Rosine Maréscaux. Le 28 décembre 1890, il cambriole le presbytère de Merlimont et tue la vieille mère du curé, la veuve Cauwel, en lui mettant la tête dans la cheminée. Chaque crime s’accompagne de vol d’argent, de bijoux ou de nourriture – parfois, le tueur prend le temps de se restaurer sur place ! Le complice des trois derniers crimes, Louis Dutilleul, est condamné à perpétuité. « Je m’y attendais. Je vais mourir, pourtant Dutilleul est aussi coupable que moi. » Il s’habille, et arrête d’un geste l’abbé Havez, aumônier de la prison, et le vicaire Carissimo. « Laissez-moi tranquille, si Dieu existait, il aurait arrêté mon bras au moment où je commettais mes crimes. » Au greffe, il remercie l’avocat. « Eh bien, je mourrai avec courage, et vous verrez si je suis brave. » Il dit encore qu’il sera courageux et qu’il est donc inutile de l’attacher. « Au moins, ne me piquez pas… Je croyais qu’on rasait les condamnés ? » Comme sa remarque ne trouve aucun écho, il dit : « Il n’y a donc personne ici qui rigole ? » puis il compte les minutes le séparant du départ… En quittant la prison, il clame : « Voilà vingt-deux pas que je fais pour aller mourir. Je vais mourir, je l’ai mérité, mais Dutilleul est aussi coupable. Allons ! » Difficulté des aides à le tenir sur la bascule. Corps remis aux médecins de la Faculté de Lille. 07 juillet 1891 20 octobre 1891 Mardi,
6h30 Bordeaux
Gironde Géraud « Paul » Aurusse Tua à Saint-Magne le 20 mai 1891 les époux Barde et leur oncle Bregnet – dont il avait été le domestique -, puis mit le feu à la maison. Enfermé dans un dortoir avec 11 co-détenus. Réveil à 5h. Aucune émotion. Répond oui ou non aux questions posées. Se confesse, entend la messe, pleure un peu. Au greffe, prend un petit déjeuner, arrosé d’un carafon de rhum et terminé par trois cigarettes. Quand un gardien lui en propose une quatrième, sourit : « Je n’aurai pas le temps de la fumer. » Place du Repos, on parvient difficilement à le positionner dans la lunette. Corps fourni à la faculté de médecine. 10 août 1891 12 mars 1892 Samedi,
6h05 Le Mans
Sarthe Magloire Emonet PARRICIDE, 27 ans, cultivateur. Le 26 janvier 1891 à Valennes, égorge à coups de couteau M.Jauneau, 84 ans, et son épouse Victoire, 82 ans, ses grands-parents par alliance, avec la complicité de la veuve Chaillou, 50 ans, sa tante, fille des victimes, elle aussi condamnée à mort mais graciée. Couché tard : a joué à la manille jusqu’à 1 heure du matin. Le bruit des gens à l’extérieur ne dérangea pas son sommeil. Se réveille tranquillement, boit trois tasses de café, respire une prise de tabac, et fume trois cigares, dont un qu’il ne finit pas et qu’il jette. Au greffe, revêt la tenue parricide. Accompagné par l’abbé Maloiseau jusqu’à la guillotine, dressée place de l’Ancien-Hôpital, à 100 mètres de la prison, et va à la mort assez fermement. 12 décembre 1891 15 mars 1892 Mardi,
6h09 Aix
Bouches-du-Rhône Etienne Cournou Conducteur de tramway. Assassin au vallon de l’Oriol, à Marseille, de sa domestique Anna Faure, 23 ans, le 06 mai 1891 sur laquelle il avait souscrit une assurance-vie et fait passer la mort pour une noyade accidentelle. Sa maîtresse Eugénie Jareb, épouse Clémencet, 25 ans, est condamnée à quinze ans de travaux forcés. Réveillé à 4h30 par le gardien-chef. Livide, stupéfait, mais essaie de garder son calme. « Mon pourvoi est rejeté et mon recours en grâce aussi alors ? ». Dit au gardien-chef : « Je donne mes effets à l’oeuvre » et demande du rhum. A la chapelle, se confesse et entend la messe de l’abbé Béranger, curé de St-Victor. Au greffe, se confie aux aides et au bourreau : « Allez, je ne suis pas méchant ! Ne serrez pas trop les entraves de mes mains ! Ce n’est pas permis d’exécuter un homme comme moi, qui sors de maladie. C’est un mourant, M.Deibler, que vous conduisez à l’échafaud. Voyez, je sors de convalescence, et j’ai encore le corps tapissé de vésicatoires. » En quittant la prison, il remercie les gardiens, et en particulier le chef, M.Duplomb, et embrasse l’aumônier Michelot et l’abbé Béranger. Soutenu par ce dernier, il va vers la guillotine en la regardant en face, puis embrasse les prêtres une dernière fois. 23 décembre 1891 21 mars 1892 Lundi,
5h55 Saint-Nazaire
Loire-Inférieure Emile David 21 ans. Le 03 mars 1891 à la Tour du Commerce (hameau de Saint-Nazaire), avec deux complices, Victor Cabel (16 ans) et Forget, tue à coups de couteau de cuisine deux vieilles soeurs, Mmes Jeanne Péault et Catherine Malenfant, pour les voler. Cabel est condamné à perpétuité, Forget, en fuite, condamné à mort par contumace. « Bah ! Quand on a commis une faute, lui répond tranquillement le condamné, il faut bien l’expier », dit-il quand on le réveille. Fume, assiste à la messe. Pendant la toilette, demande aux exécuteurs : « pouvez-vous donner une mèche de mes cheveux à ma mère ? ». Arrivé place Marceau, lance à la foule : « Au revoir, mes amis, au ciel ! Vive notre seigneur Jésus-Christ ! Et vive la France ! «  23 décembre 1891 09 avril 1892 Samedi,
5h20 Paris Louis Anastay 25 ans, sous-lieutenant, assassine pour la voler la baronne Dellard, amie de sa famille, et blesse grièvement la domestique à coups de couteau le 04 décembre 1891 au 42, boulevard du Temple.Autre photo. A l’arrivée des officiels, à 5h, déjà réveillé. « Je vous attendais, messieurs, je mourrai avec courage. » On l’aide à se chausser, à mettre son pantalon. Refuse le cordial de l’aumônier, et discute avec ce dernier. Au greffe, tend une lettre au directeur Beauquesne : « Veuillez remettre ceci à mon frère. » L’abbé Valadier veut lui cacher le couperet avec le crucifix, mais il le cherche du regard. 26 février 1892 16 avril 1892 Samedi,
5h Dijon
Côte-d’Or Jean-Claude Charton 43 ans. Tue à Dijon dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier 1892 ses anciens employeurs, les époux Roy, loueurs de voitures pour les voler, et met le feu à leur maison. Réveillé à 4h30. « C’est bien. A propos, quel jour sommes-nous ? » Le directeur répond : « Samedi,
la veille de Pâques. » « Je finis bien ma semaine, alors. » Parle avec l’aumônier qui lui sert un verre d’eau-de-vie. Toilette rapide. Sourit en voyant la guillotine. Corps donné à la Faculté. 25 février 1892 05 juillet 1892 Mardi,
4h Valence
Drôme Mathias Hadelt 39 ans, aventurier allemand. Assassin du réverend père Ildefonse (né Henri Cady), trappiste trésorier à l’abbaye d’Aiguebelle (commune de Montjoyer), le 28 octobre 1891, pour lui voler 15.000 francs. Réveillé à 3h35. Le gardien-chef Chaffoix annonce la nouvelle. « Deo gratias », répond le condamné. Il s’habille, lace ses souliers. Aucune déclaration au procureur. Le docteur Chalvet lui offre un verre d’élixir de Garus, qu’il refuse, puis qu’il prend pour se tremper les lèvres. Demande au procureur et à son avocat, Me Ollagnier, de faire procéder à son autopsie pour qu’on atteste qu’il n’était pas Mathias Hadelt, et donc victime d’une erreur judiciaire. Demande à parler au pasteur Causse, qui le fait communier. Toilette rapide : il demande calmement s’il doit s’asseoir ou rester debout, pendant que M.Causse récite une prière en silence. Quand le pasteur, au moment de partir, lui dit : « Courage, au revoir. », il répond « Je suis heureux, je pars tranquille. » En voyant la guillotine à l’entrée de la prison, dit simplement : « Ah, très bien. » 04 mai 1892 11 juillet 1892 Lundi,
4h08 Montbrison
Loire François Claudius « Ravachol » Koenigstein Le « Christ de l’Anarchie ». 32 ans. Assassine, le 26 mars 1886 un brocanteur de 90 ans et sa bonne à La Varizelle. Le 18 juin 1891, il assomme et étrangle le frère Jean-Baptiste Brunel, 96 ans, ermite à Chambles, pour le dévaliser. Posa plusieurs bombes dans Paris entre 1891 et 1892. Fut condamné à la réclusion criminelle à perpétuité à Paris pour ses affaires anarchistes le 27 avril 1892. Réveillé à 2h50. Reçoit la nouvelle avec calme, déjà averti par les bruits de l’extérieur. Refuse les secours de la religion. Toilette rapide. Conduit en fourgon à 50 mètres de là, à l’angle Sud-Est du palais de justice : tout au long du chemin, chante l’air du Père Duchesne : « Si tu veux être heureux, nom de Dieu, pends ton propriétaire, coupe les curés en deux, nom de Dieu, fous les églises par terre, sang Dieu, et l’bon dieu dans la merde, nom de Dieu. » Arrivé devant la guillotine, il crie : « Laissez-moi, j’ai quelque chose à dire ! Ne me serrez pas ! » Dans le bruit de la lunette, on entend : « Vive la Ré… » Le couperet interrompt la fin de la phrase. 23 juin 1892 20 juillet 1892 Mercredi,
4h07 Rennes
Ille-et-Vilaine Julien Communal 24 ans, hongreur. Sans argent pour se marier, agresse au Sertre le 08 mars 1892 Marie Gallais, 27 ans, fille d’un producteur de cidre, pour voler la fortune de ce dernier, s’élevant à 4.000 francs. Il l’assomme d’un coup de bâton, l’étrangle avec une corde, l’égorge avec son couteau, puis vole 230 francs dans une armoire avant de jeter le cadavre dans la cheminée pour faire croire à un accident. Réveillé à 3h25. Aucune émotion, s’habille, se trompe de pied en enfilant ses bottes. Accepte l’invitation de l’abbé Roullot, aumônier de la prison. Pendant la messe à la chapelle, pris d’une crise de larmes. Arrivé face aux bourreaux, au greffe, gémit : « Oh, mon Dieu ! » Boit un verre de café, se plaint des liens trop serrés qui l’empêchent de respirer. Dix minutes de fourgon jusqu’au Champ de Mars, lieu d’exécution. Lève les yeux vers le couperet, est couché aussitôt et son corps remis à la Faculté. 10.000 personnes présentes. 09 mai 1892 21 juillet 1892 Jeudi,
4h26 Caen
Calvados Henri-Pierre « Tardieu » Jean Condamné en Lozère à cinq ans de prison pour vols, blesse d’un coup de serpe, le 05 mars 1892, le gardien Pavy, à la maison centrale de Beaulieu, suite à une observation de ce dernier. Pavy meurt quelques jours plus tard. Pour la première fois depuis longtemps, dort bien (faisait habituellement des cauchemars, rêvant de son exécution, et se réveillant en hurlant). Réveillé à 3h40. Pâlit, déclare : « J’ai fait une boulette, il faut que j’y passe. » Demande une cigarette, un verre de rhum. « Je bois à la santé de tous. » Ecoute la messe, résigné. Avant d’aller au greffe, demande à embrasser son co-détenu Maximin Beaudronet, condamné à mort deux jours après lui pour le meurtre d’une femme. La chose lui est accordée. Au greffe, second verre de rhum, nouvelle cigarette, puis demande à son avocat Me Lefèvr : « Vous écrirez à ma mère ? » avant de lui serrer la main. Sur les promenades St-Julien, en descendant du fourgon, manque trébucher de peur, mais se laisse emporter sans résistance. 04 mai 1892 23 juillet 1892 Samedi,
4h06 Montpellier
Hérault Joseph Marius Martini 23 ans. Lors d’une tentative d’évasion de la prison de Montpellier, le 29 décembre 1891, tue le gardien Joseph Lambert et un co-détenu, Michel Hortet, avec trois complices, Eugène Dexemple, Raoul Baze et André Manyères. Condamné à mort, Dexemple sera gracié et partira avec les autres complices en Guyane. Ni Martini ni son complice Dexemple ne dormaient à l’arrivée des officiels, à 3h35. Dexemple est extrait de la cellule, et Martini prévenu du rejet de sa grâce. « Je m’y attendais, je prévoyais bien qu’on ne me ferait pas grâce. Mes pauvres parents ! » Discute avec l’aumônier Pépin, boit un verre de rhum, fume une cigarette. COncernant la mort du détenu Hortel, répond : « J’ai dit la vérité à la justice, et je vous répète encore que je n’ai pas touché à un cheveu d’Hortel. Tout ce que je puis vous dire, c’est que je ne suis pas le plus coupable. » Après avoir poliment remercié les personnes présentes et demandé pardon pour ses crimes, tend au prêtre un petit livre de messe à remettre à ses parents. Au greffe, remis entre les mains de Deibler, dit : « Vous pouvez faire de moi ce que vous voudrez. Je suis aux trois-quarts mort. » En sortant de la prison, entend des cris : « Courage, Martini ! » et crie en réponse qu’il en aura. Arrivé place de l’Hôpital-Général, embrasse l’aumônier, semble par deux fois faire une révérence à la foule – environ 15.000 personnes – et va de lui-même sur la bascule, sourire aux lèvres. 19 mai 1892 17 novembre 1892 Jeudi,
6h48 Epinal
Vosges Adrien Marchand 28 ans, domestique. Assassina à coups de hache à Serocourt son grand-oncle, Firmin Marchal, 81 ans, maire du village, et la soeur de ce dernier, Constance, 67 ans, le 23 mai 1892, pour les voler. Réveillé à 6h25, aucune émotion. Dit qu’il s’y attendait. S’habille, demande à parler au prêtre. En l’attendant, discute avec les gardiens, fume un cigare, boit plusieurs verres d’eau-de-vie. « Je veux me soûler pour y aller courageusement ! » Sort de cellule cigare à la bouche et le jette volontairement dans le couloir – pour que les autres détenus s’en fassent un souvenir. Au greffe, pris d’une bouffée de peur, accepte encore de l’eau-de-vie et fume une cigarette. Va à la machine, place du Palais-de-Justice, d’un pas ferme. 07 septembre 1892 16 décembre 1892 Vendredi,
7h15 Paris Eugène Crampon 27 ans. Surpris lors d’un cambriolage, tue en s’enfuyant le 03 mars 1892 le bijoutier Célestin Martinet, le pharmacien Joseph Bottelin et blessa grièvement Théodore Girault, rue Saint-Denis. Eveillé à 6 heures, une heure avant l’arrivée des officiels, qui le trouvent déjà en pantalon, en train de faire son lit. Ne répond rien, finit de s’habiller, puis parle quelques secondes à peine avec l’abbé Valadier. Refuse le verre de rhum et la cigarette. Quand M.Beauquesne lui demande s’il n’a rien à dire à la Justice, il répond : « Elle est trop inhumaine, la « Justice », ce que j’ai à dire, je l’emporte dans la tombe. » Il fait un salut militaire au juge d’instruction et au commissaire après avoir signé le registre d’écrou. En franchissant les portes, pris de faiblesse, doit être porté jusqu’à la bascule, à demi-mort. Corps remis à la Faculté. 22 octobre 1892 14 avril 1893 Vendredi,
5h08 Caen
Calvados Lucien Victor Ruffin 27 ans, journalier. Empoisonna à Gonneville-sur-Honfleur le 18 février 1892 la veuve Félicité Lefevbre, 80 ans, et le 16 novembre, le fils de celle-ci, Léonard, 61 ans, agriculteur, pour les voler. Son épouse Célestine, 23 ans, fille adoptive des Lefebvre, fut condamnée à perpétuité en tant que complice. Réveillé à 4 heures. Croyait en sa grâce : anéanti par la nouvelle. Se met à pleurer sans s’arrêter. Entend la messe. Au greffe, boit un grand verre de rhum. C’est toujours en larmes qu’il arrive sur les promenades Saint-Julien. Conduit, à demi-inerte, sur la bascule. 06 février 1893 28 avril 1893 Vendredi,
5h04 Morlaix
Finistère Jean « Yann » Combot 51 ans, bûcheron. A Taulé le 21 mai 1892, assassine à coups de sabot pour les voler Françoise Jaffrès, veuve Tanguy, et sa fille Jeannie. Réveillé à 4h10. En plus des officiels, les gardiens sont venus accompagnés de leurs épouses, car le délai assez long entre condamnation et exécution (presque trois mois) ont rendu Combot digne de pitié aux yeux des habitants de Morlaix. Au réveil, murmure : « Pardon va Jesus bennigue (Pardon, mon Jésus béni). Je vous demande pardon, Seigneur, et je vous demande pardon, Messieurs, à vous et à tous les hommes. » Puis il rajoute : « Je serai courageux, mais j’aurais été plus fort encore si, par ce retard, on ne m’avait pas laissé croire qu’on me faisait grâce. C’est navrant, c’est triste d’être exécuté 85 jours après ma condamnation. On aurait dû me faire expier mon crime plus tôt. » Après la messe dans la chapelle, conduit dans le bureau du gardien-chef, boit du café noir avec du rhum. Seules protestations pendant la toilette : « Pas la peine qu’on me coupe les cheveux, puisqu’on va me couper la tête. », puis trouve qu’on le serre trop fort. Avant de grimper dans le fourgon, Combot sourit aux épouses des gardiens et leur dit en breton : « Au revoir, mesdames ! Au revoir dans l’autre monde ! » Place Saint-Nicolas, la foule prie. Guillotine montée au mlieu de la route de Paris, à dix mètres en face du portail du cimetière. Combot descend du fourgon impassible, se laisse embrasser par l’aumônier. Soubresaut sur la bascule. 02 février 1893 26 juin 1893 Lundi,
3h50 Saint-Mihiel
Meuse François Redt 57 ans, ouvrier charpentier. Libéré d’Ensisheim où il purgeait une peine pour vol le 9 juillet 1892. Tue à coups de hachette dans la nuit du 31 octobre au 1er novembre 1892 deux vieillards, les époux Côme et Adèle Brul (88 et 82 ans) à Harville pour une quinzaine de francs, une tabatière, un couteau, un foulard, un mouchoir, deux chemises et une blouse, et mange des tartines de confiture avant de partir. Adèle survit trois mois à l’agression, et meurt le 30 janvier 1893. Réveillé bien avant l’arrivée des magistrats – à 3h30 – par la foule. Les gardiens lui parlent d’une foire aux bestiaux qui se prépare. A la nouvelle terrible, répond : « Ah bon. » Parle avec l’aumônier, se confesse. Au greffe, prie les bourreaux de ne pas lui faire de mal, car il souffre d’une épaule. Accepte un verre de rhum, mais refuse de fumer. Marche aussi vite qu’il le peut vers la machine, dressée devant la prison. 21 avril 1893 28 juin 1893 Mercredi,
3h56 Versailles
Seine-et-Oise Jules-Léon Dupalu 18 ans, serrurier. Assassina à coups de couteau les époux Combier, séxagénaires, (de quatre coups pour le mari, qui meurt hors de sa maison, victime d’une congestion, et cinq pour la femme, qui a la gorge tranchée) le 01 janvier 1893 à Franconville pour les voler. Au réveil, dit : « C’est bien ! » Se montre décidé : « J’ai fait la bêtise, il faut que j’y aille. Après tout, j’aime autant mourir, parce que j’ai dix-huit ans, et les travaux forcés à perpétuité, c’est trop long. » Rédige une lettre à sa mère : « Ma très chère et pauvre mère. Tout est fini ! Quand tu reçevras cette lettre, j’aurai cessé de vivre. Sois tranquille. J’irai à la mort avec courage. Console-toi et embrasse toute la famille pour moi. Sois assuré que je n’ai cessé de t’aimer un seul instant. Ton pauvre fils qui t’aime de tout son cœur. Adieu ! Adieu ! Adieu ! Ma dernière larme sera pour toi. » Ne parvient pas à boire le rhum, mais fume une cigarette durant le trajet. Regardant par la fenêtre du fourgon, il remarque : « En voilà qui rentrent du bal. Il fait beau ce matin. » 3.000 personnes l’attendent au Pont-Colbert. En descendant, il regarde le public et le couperet en face, embrasse l’abbé Philibert sur les deux joues avant d’être basculé. Temps gris et lourd. 22 avril 1893 03 août 1893 Jeudi,
4h21, 4h24 Hautmont
Nord Edmond Claeys
et
Auguste DeGroote 28 et 22 ans, Belges. S’introduisent en pleine nuit chez Mme Viart, au hameau de Grattières, le 26 mai 1892, l’étranglent avant de l’assommer à coups de brique et de sabots. Le corps fut jeté dans une fontaine, à 25 mètres de la maison. Leur complice, Lecomte, réfugié en Belgique, fut condamné à perpétuité par les assises de Bruges Réveillés à la prison d’Avesnes à une heure trente du matin. Claeys se met à crier : « On va exécuter un innocent. » Puis sa colère se retourne vers son complice, mais Degroote, qui ne parle que le flamand, se contente de sourire. Dans un fourgon de l’Hôtel du Nord, ils quittent la prison vers 1h50. Pendant le trajet (18 kilomètres), prient, boivent du rhum, et Degroote fume une cigarette. Arrivée à Hautmont à 3h45, le fourgon passe place Sainte-Anne, ce qui permet à DeGroote de voir en avance la guillotine. La toilette a lieu dans le bureau du maréchal des logis Prévot, à la gendarmerie. Refusent nourriture ou boisson. Claeys se laisse faire, mais dit aux assistants : « Vous n’aurez pas tout. Vous pouvez lier mes membres, vous ne lierez pas mon âme immortelle, et vous serez punis de ce que vous allez faire. » Degroote enlève lui-même sa veste et se laisse faire, mais quand on lui lie les bras, il râle : « Ne serrez pas si fort ! Coupez-moi les bras tout de suite, pendant que vous y êtes ! ». Arrivé place Sainte-Anne, DeGroote refuse qu’on l’aide. Pâle et ferme, va vers l’échafaud, mais tente de résister quand on lui met la tête dans la lunette. On entend dans la foule des cris : « Vive DeGroote ! » Claeys demande lui aussi de ne pas être soutenu. La blouse qui recouvre ses épaules tombe au sol quand on le conduit à la machine. Il détourne la tête, résiste avec vigueur quand on essaie de le pousser sur la bascule. Parmi les incidents survenus cette nuit-là, plusieurs chutes depuis des balcons avec conséquences assez graves, quelques évanouissements. 07 juin 1893 26 août 1893 Samedi,
5h20 Evreux
Eure Marie-Ernest Onésime Gille 29 ans, maréchal-ferrant, vagabond. Le 10 janvier 1893, fracasse le crâne de M.Gagneur, 50 ans, à St-Mards-le-Fresne et met le feu à sa chambre pour effacer les traces de son crime. Le 26 février 1893, à St-Pierre-de-Cormeilles, tue de 23 coups de couteau Mme Lelièvre puis égorge sa bonne, Mme Lefranc. Mobile des trois crimes : le vol. Réveil à 4h20. Apprend la nouvelle avec résignation. Regrette de ne plus pouvoir jouer à la manille avec les gardiens. Entend la messe. Montre du courage. Au greffe, pendant la toilette, boit un verre de calvados. Arrivé sur l’avenue de Caen, lieu d’exécution, a une réaction de peur en voyant la machine, mais s’avance résigné. 06 juillet 1893 03 octobre 1893 Mardi,
6h10 Albi
Tarn Emile Veyrios PARRICIDE. 26 ans, agriculteur. Accusé en 1884 d’avoir violé et tué une domestique chez le propriétaire terrien qui l’employait comme ouvrier. L’affaire ne fut pas élucidée. Le 22 mars 1893, à Brugnac, étrangle son père après l’avoir enfermé trois jours durant dans un tonneau en espérant – en vain – qu’il y mourrait. « Eh bien, puisqu’il le faut… » répond Veyrios, les larmes aux yeux, en apprenant la nouvelle. Il tremble comme une feuille, et accuse sa femme et son beau-père de complicité. Devant le verre de rhum que lui tend le docteur Boussac, il refuse : « A quoi bon prendre cela, puisque je vais mourir ? » Mais il finit par accepter. Il parle dix minutes au père Marty, puis presse le pas pour aller au greffe, avec la volonté d’en finir au plus tôt. Mis en tenue de parricide, il accuse à nouveau sa femme et son beau-père, et crie « Je ne suis pas seul coupable. » Place du Castelviel, sous la pluie, il crie « Je demande l’égalité devant la loi ! » L’enquête prouvera que ses accusations relevaient de la calomnie. 25 juillet 1893 06 octobre 1893 Vendredi,
5h30 Versailles
Seine-et-Oise Eugène Beaujan 21 ans, souteneur. Dans la nuit du 15 au 16 novembre 1892, tua à St-Ouen Mme Valentine Dolbeau, prostituée, avec l’aide de Pauline Siller, prostituée et maîtresse de M.Dolbeau. Mobile : une double vengeance. Pauline voulait se débarrasser de sa rivale, Beaujan se venger de Valentine qui avait conseillé, quelques mois plus tôt, à sa compagne et « gagneuse » de le laisser tomber. Tous deux furent condamnés à Paris, l’arrêt cassé, et le verdict fut le même à Versailles. Réveil à 4h45. Calme, s’y attendait. En passant ses vêtements civils, s’excuse d’aller en chemise à la mort, mais refuse de quitter ses savates pour mettre des sabots : « Deux pas seulement me séparent du truc, c’est inutile. » Puis il regrette : « C’est dommage de couper une aussi belle tête que la mienne ! » Donne deux lettres au substitut, l’une pour sa mère, l’autre pour le gardien-chef. Etonné par la grâce de sa complice, il boit plusieurs verres de rhum (« pourquoi me priver ? ») et fume cigarette sur cigarette. Se souvient – vrai ou faux – d’un jour de 1889 où il a vu Deibler exécuter Kaps à la Roquette, et où le bourreau lui aurait annoncé : « Ton tour viendra ! » Promet qu’il sera courageux. Pendant la toilette, plaisante : « Ne serrez pas si fort derrière, j’ai les bras sensibles. » A cause des cahots du fourgon, rit : « Oh là là, on se fait des bosses. » Une fois arrivé au Pont-Colbert, contemple la foule avec mépris : « En voilà des poires qui me regardent ! » Un dernier mot à l’aumônier, un regard vers le gardien-chef et il est poussé en avant. 27 avril 1893, 26 juillet 1893 01 décembre 1893 Vendredi, Paris Pierre Kuntz 23 ans. Tua pour la voler le 7 février 1893 Mlle Angélique Falguier, rentière, 60 ans, rue Berthe à Paris. Déjà éveillé à l’arrivée des officiels. « Eh bien, qu’est-ce qu’il y a ? », demande-t-il inquiet. Rassure le directeur : « Du courage, oh, n’ayez pas peur, j’en aurai ! » S’habille, passe une chemise neuve, dit n’avoir rien à déclarer au juge d’instruction. Sort deux lettres : l’une qu’il donne à M.Beauquesne pour qu’elle soit remise à sa mère, et la seconde pour le père Valadier. « Bah ! Qu’est-ce que vous voulez ? C’était écrit, comme on dit. » Quand le prêtre lui propose à boire, il accepte et remercie. Il boit trois gorgées de rhum, puis reste seul avec le prêtre pendant deux minutes. Pendant la toilette, l’abbé lui demande s’il se repent. « Oui. Je demande pardon à tout le monde, et je voudrais que mon corps soit remis à ma mère. » Deibler annonce alors : « Allons, c’est l’heure. » Le visage affreusement contracté par la peur, il gémit un « Pardon » avant d’embrasser le crucifix et d’être basculé, ne quittant le couperet des yeux qu’à la dernière seconde. 10 octobre 1893 17 janvier 1894 Mercredi,
7h40 Melun
Seine-et-Marne Charles Scherer 19 ans, valet de ferme. Repris de justice libéré de la centrale de Poissy après 18 mois pour vol. Domestique chez les de la VilleHervé à Veneux-Nadon, près de la forêt de Fontainebleau, renvoyé le 10 septembre 1893 après à peine trois jours de service pour violence, paresse et attitude déplacée envers la petite bonne, Angèle Dumas, 15 ans. Le 12 septembre 1893, s’introduit dans l’écurie, viole et tue de 23 coups de couteau Angèle Dumas. Son patron, inquiet, se rendant à sa rencontre, il lui porte 18 coups. La lame se brise, Scherer frappe la patronne et un témoin avec le manche du couteau. Réveillé à 7 heures. « Ah ? Ca y est donc ? » Demande à parler à l’aumônier seul à seul pendant une vingtaine de minutes. Après cela, fait des reproches au procureur : « Dans votre réquisitoire, vous m’avez accusé d’avoir des passions honteuses. C’est faux. Je serais désolé si vous conserviez de moi une pareille opinion. » Le procureur assure qu’il ne s’est fié qu’à des rapports écrits venant de la centrale de Poissy, mais daigne croire le condamné. Au greffe, demande un cigare, boit un verre de cognac et mange un biscuit. Toilette très rapide, le condamné étant rasé. Arrivé devant le cimetière, regarde avec une horreur fascinée le couperet, dit quelques mots à l’aumônier qui l’embrasse, puis est poussé sur la bascule. 15 novembre 1893 29 janvier 1894 Lundi,
6h45 Lyon
Rhône Jean-Marie Busseuil 21 ans, artiste forain. Le 31 janvier 1892, à Lyon, étrangle la prostituée Clotilde Berthéas pour la voler. A 6 heures, réveillé par le bruit de la serrure. « Je comprends. » Se prend la tête dans les mains, muet quelques secondes avant de réponde au directeur : « J’aurai du courage, Monsieur le directeur, j’en aurai. » S’habille, annonce quand il a fini. « Avez-vous des révélations à faire à la justice ? » demande le juge d’instruction Chevalier-Joly. « Non. Ah, la Justice… » dit-il avec un triste sourire. Entend la messe à la chapelle. Dans la geôle où a lieu la toilette, accepte un verre de rhum et une cigarette. Porté dans le fourgon, avec son veston posé sur ses épaules par un aide. Arrivé place de Charrabara, à quatre mètres de la guillotine, repousse l’aumônier avant d’être exécuté. 20 novembre 1893 05 février 1894 Lundi,
7h13 Paris Auguste Vaillant Anarchiste, 32 ans. Le 09 décembre 1893, rentre dans l’Assemblée Nationale et jette une bombe en plein hémicycle. Il ne causera aucun décès, juste des blessures plus ou moins graves sur une cinquantaine de personnes, dont lui-même. Réveillé à 7h par le directeur de la Roquette, M.Brun. Promet d’avoir du courage, et dit sa surprise, croyant qu’il serait grâcié. Refuse tout cordial, « Je n’ai pas besoin de boire pour avoir du courage », et tout aussi fermement de parler à l’abbé Valadier. Va directement au greffe. Arrivé d’un pas ferme à deux mètres de la machine, crie : « Mort à la société bourgeoise ! Vive l’anarchie ! » 10 janvier 1894 13 février 1894 Mardi,
7h Coutances
Manche Auguste Mathey 19 ans, journalier. Le 21 octobre 1893, à Blosville, tua à coups de bâton la veuve Clément, mendiante, 83 ans, avant de profaner son corps avec ce même bâton et de lui dérober ses 10 francs d’économies. Déjà réveillé à 6h10. Debout, habillé, s’attendait à la nouvelle, laisse échapper un sanglot en guise de réponse. A la chapelle, entend la messe et communie. Ne dit pas un mot jusqu’à la fin. Au greffe, fume deux cigarettes et boit deux verres de rhum. Pendant la toilette, au fil des minutes, semble perdre toutes ses forces et on doit le hisser dans le fourgon. Arrivé place de la Croûte, à cinquante mètres de la prison, porté sur la bascule pendant que le prêtre l’embrasse deux fois. Environ 1.000 personnes présentes, première exécution depuis 1861. 12 décembre 1893 16 février 1894 Vendredi,
7h10 Niort
Deux-Sèvres Marseil Sabourin 32 ans, journalier à Souché. Fils d’un marginal, il est confié en maison de correction à treize ans, tandis que sa soeur Hélène, de huit ans sa cadette, est élevée au Carmel jusqu’à sa majorité. Sa soeur, devenue domestique à Niort, étant de santé fragile, dut solliciter son hébérgement pour convalescence. Le 2 août 1893, dans son cabanon de Ste-Pézenne, il la tua d’un coup de masse de fer pendant qu’elle dormait, puis la viola et l’éventra, avant de jeter son corps dans une carrière voisine. Accusé par la suite d’avoir assassiné un gardien de la maison de correction de Chizé en 1877 – lieu où il avait été enfermé -, et aussi du viol et du meurtre d’une enfant de 12 ans en 1885. Réveillé à 6h. Se cache les yeux en apprenant la nouvelle. S’habille avec calme, demande une chique de tabac, refuse le verre de rhum. S’entretient avec l’aumônier, entend la messe et communie. Arrive place de la Brêche, en face de l’avenue de Paris, fond en larmes en voyant le couteau. 16 décembre 1893 19 avril 1894 Jeudi,
4h45 Dijon
Côte-d’Or Auguste Laureau PARRICIDE. 42 ans, charcutier à Montbard. Accablé de reproches à cause de son ivrognerie et sa paresse, le 10 novembre 1893, tue à coups de hachoir à viande sa femme Marthe et sa propre mère de trois coups chacune, et blesse sa maîtresse Marie-Louise Cureau, veuve Febvre, qui en mourra le 26 février 1894, le lendemain de sa déposition aux assises et de la condamnation à mort de Laureau. Réveillé à 4h15. Déclare qu’il s’y attendait : « C’est bien, du reste, j’en avais le pressentiment ». S’habille, parle avec l’abbé Gueritte, et accepte le verre de cognac qu’il lui propose. Pendant la toilette, fume une cigarette. Deibler très nerveux, ne cesse de houspiller les aides – la foule autour de la prison est particulièrement bruyante et agitée. Hurlements de la part des spectateurs à la sortie du condamné en tenue de parricide, lecture de la sentence par l’huissier Vacher. Quand on lui enlève le voile, dit très fort : « Au revoir, messieurs. » Transport du corps à l’école de médecine. 25 février 1894 21 avril 1894 Samedi,
5h Lille
Nord Emile Vannieuwenhove 22 ans, Belge, tueur aux abattoirs de Lille. Tue le 08 décembre 1893 la vieille Mme Blandine Vancoppenole et ses deux petits-enfants, Edmond et Palmyre Tanghe (8 et 5 ans), avec une barre de fer, à Leers. Dormait bien, réveillé à 4h30. Semble ne pas prendre conscience de la nouvelle, soupire bruyamment pendant la messe. Au greffe, après la toilette, demande une cigarette qu’il garde aux lèvres jusqu’au bout. Embrasse les deux aumôniers (celui de Lille et celui de Douai), puis parcourt, tenu par les aides, les trois mètres qui séparent le seuil de la prison de la guillotine montée sur la place du Palais-de-Justice. Corps remis à la Faculté. 28 février 1894 21 mai 1894 Lundi,
4h15 Paris Emile Henry Anarchiste, 21 ans. Fit sauter le 12 février 1894 l’hôtel Terminus, causant une victime et vingt blessés. Il était également l’auteur d’un attentat, commis le 08 novembre 1892, contre le commissariat du Palais-Royal, faisant six morts : cinq policiers et un employé des Mines de Carmaux. Réveillé à 4h. Très pâle, s’habille. Refuse sèchement la fiole de cognac tendue par le directeur Brun, et encore plus violemment les secours de la religion du père Valadier. Pendant la toilette, se tourne vers l’aide qui découpe son col : « C’est vous M.Deibler ? » L’aide ne répond pas. Quand les portes s’ouvrent, l’abbé Valadier précède le condamné, mais sans porter de crucifix. Les liens sont si serrés qu’Henry se plaint : » Je ne peux pas marcher. » Puis crie : « COurage, camarades, vive l’anarchie. » Hurle à nouveau : « Vive l’anarchie ! » quand on le bascule. Très peu de sang versé : vraisemblablement mort d’un arrêt cardiaque une seconde avant la chute du couperet. 29 avril 1894 24 juillet 1894 Mardi,
4h25 Pau
Basses-Pyrénées Joaquin Noray 23 ans, Espagnol, tout juste libéré d’Eysses. Le 07 février 1894, à Lée, décapite à coups de rasoir Anne Bergeron, 54 ans, aubergiste, pour lui voler 60 centimes. Réveillé à 4h25. « Ah, c’est aujourd’hui que ma tête saute ! On ne verra pas tous les jours tomber une tête comme la mienne ! » Pendant qu’il s’habille, mouvement de colère de sa part, mais se calme seul et vite. Entretien avec l’abbé Delaporte, fume une cigarette avec plaisir, puis va au greffe d’un pas assuré. Pendant qu’on lui lie les jambes, mange avec appétit un poulet rôti froid, puis boit un verre de vin blanc et un verre de café allongé d’une rasade de cognac. S’adressant aux gens présents, déclare : « Il a fallu du courage pour faire ce que j’ai fait, hein ? Mais j’en aurai aussi pour mourir ! » Demande une seconde cigarette et commence à fumer. Deibler, voyant que le condamné n’est pas pressé, fait signe aux aides pour qu’on lui lie les mains et découpe le col de chemise. Se laisse faire. Devient blême en voyant la guillotine à l’entrée de la prison, mais va fermement à la mort. Peu de monde présent à cause des averses. Pas d’exécution depuis 1851, dernière exécution capitale dans le département. 12 mai 1894 27 juillet 1894 Vendredi,
4h25 Rouen
Seine-Inférieure Raymond Gamelin 29 ans, garçon épicier. Satyre assassin de la petite Marthe Deriberpré, 7 ans, le 26 février 1894 à Rouen. Réveillé à 4h. Dort profondément. Sursaute : « Ah, très bien, je suis à vous. Je m’habille. Claquer aujourd’hui ou un autre jour, cela m’est égal. » Demande à entendre la messe. Muet pendant la toilette, réclame à la fin une chique et un verre de rhum. Puis déclare à son avocat, Me Julien Goujon, député : « Vous savez, cela m’est égal, je suis innocent. Je vous recommande mon enfant, et si un jour, on vient à reconnaître le véritable assassin, proclamez-le bien haut. » Face à la guillotine, place Bonne-Nouvelle, s’agenouille pour l’ultime bénédiction avant d’embrasser le crucifix. 26 mai 1894 03 août 1894 Vendredi,
4h30 Limoges
Haute-Vienne Jean Bouchareichat 18 ans, valet de chambre. Assassine de deux balles dans la tête puis en l’étouffant son patron Paul Hervy, patron d’une maison de confection pour dames le 05 septembre 1893 à Limoges. Condamné en Haute-Vienne, arrêt cassé, recondamné en Corrèze Prévenu à 3h35, couché sur son lit sans dormir. Se lève pour entendre la sentence. « C’est pour ce matin… j’ai entendu assez de bruit, ce matin. » S’habille, se chausse, et demande ce qu’il doit faire d’autre. Accepte volontiers la messe, qu’il entend dans le couloir de la prison en se signant plusieurs fois. Dans un autre couloir où la toilette a lieu, un gardien lui tend un verre de café, mais le trouvant trop chaud, le condamné se contente de poser le verre près du mur avant de s’asseoir sur le tabouret. Ote lui-même sa veste, son tricot de laine et laisse déchirer le col de sa chemise. L’aumônier lui fait boire un verre de chartreuse avant qu’on ne le conduise à l’entrée de la prison où se trouve la guillotine. Pousse un cri en découvrant le couperet : « Seigneur ! » Corps réclamé par la Faculté, mais le condamné ayant demandé à être inhumé, on lui accorde ce droit. 20 février 1894, 07 juin 1894 16 août 1894 Jeudi,
4h55 Lyon
Rhône Santo Jeronimo Caserio Anarchiste italien, 21 ans. Assassine en plein défilé le 24 juin 1894 à Lyon le Président de la République Sadi Carnot. Réveillé à 4h20. Pris d’un tremblement nerveux jusqu’au bout. Aucune déclaration, refuse de parler à l’aumônier et aussi à son avocat, Me Dubreuil. Quand on lui demande s’il a une dernière volonté, répond : « Non… Faites seulement parvenir à ma mère la lettre que j’ai écrite pour elle. » En pensant à elle, il pleure quelques instants, puis se reprend. Claque des dents durant le trajet en fourgon, mais face à la guillotine, crie d’une voix nette : « Coraggio, camaradi,
evviva l’anarchia ! » Poussé sur la basculé, tombe penché sur la droite, doit être redressé sur la planche avant qu’on ne fasse tomber la lunette. Quelques bravos retentissent dans le public amassé sur le cours Suchet. 03 août 1894 17 août 1894 Vendredi,
4h50 Montbrison
Loire Jean Servajean 37 ans, boulanger. Tua d’un coup de bâton à Saint-Médard le vieillard François Chavassieu, riche propriétaire, le 30 avril 1894, avant de le pendre. Servajean espérait trouver 60.000 francs : il repartit avec 14 francs, quelques vêtements, du lard et de l’alcool. Son complice, Jean-Marie Fontvieille, écope de vingt ans de travaux forcés. Réveillé à 4h10. Hagard, dit : « Je saurai mourir ! » S’habille, mange un biscuit, boit un verre de rhum. Entend la messe. Au greffe, toilette rapide. Arrivé à bord du fourgon place Saint-Jean – l’endroit où Ravachol avait été exécuté étant trop difficile pour le montage des bois -, embrasse son avocat, puis l’aumônier et enfin le crucifix. 30 juin 1894 30 août 1894 Jeudi,
4h55 Laval
Mayenne Albert Bruneau 33 ans, vicaire d’Entrammes, prêtre débauché. Auteur de plusieurs incendies volontaires pour toucher l’assurance. Le 15 juillet 1893, égorgea la veuve Bourdais, fleuriste à Laval, qui était sa maîtresse, pour lui voler de l’argent et des biens. Le 2 janvier 1894, jeta dans le puits du presbytère l’abbé Fricot, son supérieur, curé d’Entrammes, et l’assomma à coups de bâton. Mobile : éviter une dénonciation, car Bruneau avait volé les économies de Fricot, et ce dernier s’en était rendu compte. Grave erreur de la part du ministère de la Justice : Deibler présent à Laval avant même que Me Dominique, le défenseur du condamné, ne soit reçu à l’Elysée. Réveillé à 4h. « Dois-je me lever ? » S’habille seul, répond non aux questions du procureur qui lui demande s’il a des déclarations ou des aveux à faire, puis sollicite une entrevue avec l’aumônier Foubert, puis avec son avocat. Remercie ce dernier pour toutes ses démarches, puis remet une lettre au procureur, dont le contenu ne doit être lu qu’après le supplice (il y demande pardon de son comportement de noceur, mais affirme une fois encore son innocence). A la chapelle, entend la messe, encore engoncé dans la camisole de force. Parle dix minutes avec l’aumônier. Communie. Au greffe, demande à manger un peu. Parcourt à pied la petite ruelle qui sépare la prison de la place du Palais de Justice où se trouve la guillotine, et embrasse le crucifix sans arrêt. Devant la machine, lui tourne le dos pour embrasser l’aumônier et bénit Deibler avant d’être basculé. 12 juillet 1894 29 décembre 1894 Samedi,
7h15 Châlon-sur-Saône
Saône-et-Loire Pierre Mazué 20 ans, garçon boulanger. Assassina pour les voler le 18 juillet 1894 les bûcherons Jean Carrette, 50 ans, Claude Lapierre, 53 ans, et Elie Tortillot, 60 ans, dans les bois de Nancelles, commune de Saint-Sorlin, en les frappant à coups de branche puis en les achevant au couteau. Il compléta son oeuvre en incendiant la cabane où vivaient ses victimes pour cacher les preuves de son crime. Réveillé à 7h. Quand le directeur lui dit d’avoir du courage, répond : « Oh, en en aura. » S’habille, se confesse, communie. Boit un grand verre de rhum, fume une cigarette et remercie son avocat, Me Perraud, pour tout ce qu’il a fait pour lui. Pendant la toilette, demande à son défenseur : « J’ai oublié un cigare dans ma cellule, je vous prie d’aller le chercher… Oh, allez, c’est inutile, je pourrais pas tout fumer à la fois. » Grimpe dans le fourgon dans aide. Arrivé place Ronde, va sur la bascule sans trembler. 31 octobre 1894 03 janvier 1895 Jeudi,
7h15, 7h18 Mont-de-Marsan
Landes Joseph-Marcel Daubagna
et
Jean-Joseph Ménaut 25 ans, commis dans une banque, et 23 ans, contrebandier. Voleurs incarcérés dans la minuscule prison d’Orthez (Basses-Pyrénées), s’évadent dans la nuit du 18 au 19 avril 1894 en étranglant le gardien Moula et en tentant d’assassiner son épouse. Leur co-détenu, Jean Lacoste-Darget, est condamné à perpétuité. Condamnés à Pau, arrêt cassé, rejugés dans les Landes. Réveillés à 6h05. Daubagna se met à trembler de peur et à pleurer, Menaut reste calme. En quittant le dortoir commun où ils séjournaient, Daubagna crie à ses co-détenus : « Vous voyez où mène la mauvaise conduite ! N’imitez pas mon exemple ! » Au greffe, après la messe, les condamnés mangent des biscuits, boivent du café, un verre de cognac et une cigarette. Daubagna ne cesse ne gémir « Pardon, pardon ! » et Menaut le regarde sans répondre. Arrivés place de la Tannerie, Daubagna meurt le premier, et cherche à se rejeter en arrière. Menaut meurt avec courage. La foule pousse un cri à chaque chute du couperet. 08 août 1894, 07 novembre 1894 23 mars 1895 Samedi,
5h50 Versailles
Seine-et-Oise Henri Lemoine 20 ans, berger. Satyre assassin de Camille Manceau, 19 ans, bonne dans la maison où il était domestique, qu’il assomma d’un coup de bâton et viola le 07 juillet 1894 à Illiers (Eure-et-Loir). La jeune fille repoussait ses avances depuis longtemps. Il en profita pour voler 220 francs et un complet neuf. Condamné à Chartres, arrêt cassé, rejugé à Versailles. Réveillé à 4h30. Atterré, se reprend, se dit innocent et demande qu’on le laisse seul avec l’aumônier Philibert. Ecrit une lettre à sa mère, prend une goutte de rhum, ainsi qu’un peu de vin de messe. Dans une salle voisine du greffe, fume plusieurs cigarettes pendant la toilette et se dit à nouveau innocent. « Ce n’est pas la mort que je crains, ce que je regrette le plus, c’est le déshonneur qui rejaillit sur ma famille. » Le fourgon quitte la prison à 5h30. Au Pont-Colbert, descendant le second après l’abbé Philibert, il regarde le couperet, embrasse le crucifix et crie : « Si vous ne l’avez jamais vu, vous allez voir mourir un innocent ! » 12 novembre 1894, 17 janvier 1895 16 septembre 1895 Lundi,
5h10, 5h12 Draguignan
Var Toussaint Simon
et
César Barillot 38 et 28 ans. Baîllonnèrent, rouèrent de coups et étranglèrent l’hôtelière Eudoxie Sauveur, 72 ans, rue du Baignoir à Marseille le 17 décembre 1894 pour la voler. Barillot était le garçon de chambre de l’hôtel, et Simon l’un des locataires. Condamnés à mort à Marseille, arrêt cassé, rejugés à Draguignan. A l’arrivée des officiels à 3h30, Simon se réveille aussitôt, Barillot dort profondément. Simon n’est pas surpris : « Nous le savions depuis hier. Quelqu’un a crié, hier après-midi,
vers deux heures, l’annonce de notre exécution. Barillot l’a entendu. » Les deux hommes se lèvent et s’habillent. Simon, qui trouve que son pantalon civil le serre, rit : « Je suis devenu gras, mais ici, c’est comme à la ferme, on vous engraisse pour vous tuer. » Puis il demande au substitut Michel : « Quel sera le sort de Poullain et Chabaud ? » (Les deux hommes, condamnés à mort le 30 juillet 1895 à Aix pour l’assassinat de la grand-mère de Poullain, venaient d’être grâciés). On n’ose lui dire la vérité, le substitut répond juste que la commission des grâces ne s’est pas encore prononcée. Avant de quitter leur cellule au 1er étage, Simon demande à voir un autre co-détenu, Asso, et l’embrasse. Après cela, il donne à un gardien son briquet comme souvenir, et à un autre sa blague à tabac et sa cravate. Ils entendent la messe à la chapelle et communient. Toilette dans le cabinet du gardien-chef. Simon plaisante, et sa bonne humeur influe sur Barillot. Boivent plusieurs gobelets de rhum et du café, mais refusent de manger. Simon dit : « Nous pouvons prendre une cuite, nous n’aurons pas mal aux cheveux demain ! » Puis, appréciant le rhum : « Les Allemands n’en ont pas, de celui-là ! » Puis il discute avec les gens présents, remerciant gardiens, procureur et abbé. Aux journalistes, s’inquiète : « N’allez pas me débiner au moins, vous autres ? » Les reporters le rassurent, et il rit : « Malheureusement, je ne pourrai pas vous lire ! Moi qui dévorais les compte-rendus des exécutions dans les journaux ! » Au juge d’instruction, il dit : « J’ai été condamné en octobre dernier à six jours de prison. J’ai donné un faux état-civil, celui de mon ami Alfred Linstel. Faites donc effacer cette condamnation du casier judiciaire de cet innocent. » Puis il reprend sa conversation gaie, même si cette joie est feinte. A 5 heures, Anatole Deibler arrive le premier au greffe, et Simon s’écrie : « C’est le fils Deibler qu’on m’envoie ? Ah non ! Je n’accepterai pas de me faire exécuter par un apprenti ! C’est le père Deibler que je veux, le vieux ! » Avisant Louis Deibler, il lui propose un verre de rhum, que le bourreau refuse d’un mot sec. La toilette, trop vive à leur goût, leur arrache quelques protestations. Barillot descend le premier du fourgon sur le Champ-de-Mars : exécution très rapide. Simon, en posant les pieds sur le sol, s’écrie : « Société, je te demande pardon de mon crime. J’espère que tu me pardonneras, j’expie mes fautes. » Basculé sans la moindre résistance. 26 mars 1895, 26 juillet 1895 16 novembre 1895 Samedi,
6h35 Le Mans
Sarthe Jean-Baptiste Lanceleur 36 ans. Tua les vieux époux Guiet, âgés de 77 et 70 ans, à coups de hache (deux pour lui, cinq pour elle) pour les voler le 22 février 1895 à Mareil-sur-Loir. Au réveil, à 6h, répond : « Oh, du courage, j’en ai. » S’habille, remercie le directeur et le gardien, puis se rend à la chapelle pour entendre la messe et communier. Au greffe, se laisse toiletter sans protester. Trempe ses lèvres dans la tasse de café qu’on lui tend, et ne dit pas un mot. Parcourt les deux cents mètres qui le séparent de la machine, montée sur le terrain vague où se trouvait l’Hôpital Général avant. Des cris « A mort » retentissent. Remercie un gardien une dernière fois, et quand le couperet tombe, un soldat est pris d’un malaise et doit être évacué. 04 septembre 1895 06 janvier 1896 Lundi,
7h35, 7h38 Melun
Seine-et-Marne Jules Mira
et
Alexandre
Van Hamme 19 et 20 ans, manoeuvres. Tuèrent à coups de poing, de pied et d’outil de ramoneur le 03 octobre 1895 à Melun Arthur Lefèvre, forgeron de 42 ans, pour lui voler le contenu de son portefeuille, soit environ 20 francs. Ils se débarassèrent ensuite du corps en le jetant dans la Seine. Au réveil, à 6h55, Van Hamme s’habille et on doit répéter la sentence à Mira qui n’a pas compris. L’abbé Moreau vient porter les secours de la religion à Mira et le pasteur Farjat à Van Hamme. Mira est le premier à être toiletté, ce qui est difficile tant il se débat et hurle. Deux gardiens, en plus des aides sont nécessaires pour le maîtriser. Il crie : « Laissez-moi au moins gagner une minute puisqu’il faut mourir ! » Il refuse le verre de rhum, mais fume une cigarette. Van Hamme se laisse faire sans résister, et refuse l’alcool lui aussi. Devant le cimetière, Mira descend le premier, très pâle. Van Hamme le suit, embrassant longuement le pasteur avant d’être basculé. Un vif mouvement sur la planche oblige les aides à le replacer ce qui prend quelques secondes. 21 novembre 1895 12 février 1896 Mercredi,
7h50 Chaumont
Haute-Marne Jean-Baptiste Dudot 41 ans. Le 30 mai 1895, près de Bielles, tue d’une balle de revolver dans la tempe le chauffeur du courrier Chaumont-Nogent, Narcisse-Alexandre Moussu, 29 ans, pour voler le chargement (seul vrai butin : trois billets de 100 francs). A 6 heures, dès que la porte s’ouvre, Dudot, réveillé depuis une heure, s’assoit sur son lit et insulte le procureur : « Coquin, bandit, assassin ! C’est vous, canaille, qui êtes cause de ma mort ! » Le procureur lui fait remarquer que ce n’est pas lui qui a tué le chauffeur Moussu. « Ah, misérable ! Pour un mauvais coup de revolver ! » Il faut l’intervention de Me Chaumont, son avocat, pour que le condamné se calme et accepte d’entendre la messe de l’abbé Leseur. Il se confesse, puis est conduit au greffe. Avant la toilette, dit avoir des déclarations à faire. L’entretien avec le juge d’instruction dure 45 minutes, et aurait porté sur sa participation à un crime commis en Côte-d’Or. Après cela, il accepte le rhum pendant qu’on l’attache. Quitte d’un pas ferme la prison, et ne cesse de fixer du regard la guillotine, montée à 20 mètres de la porte, pas même quand il embrasse le crucifix. 5.000 personnes présentes. 24 décembre 1895 17 février 1896 Lundi,
6h48 Ajaccio
Corse Théodore Bonelli 30 ans. Neveu du célèbre bandit Bellacoscia, conseiller municipal de Bocognagno, promit aux autorités de leur livrer un bandit nommé Cappa : pour obtenir la récompense, tua de deux coups de fusil à bout portant un pauvre bougre, Joseph Murati, en novembre 1894 dans la forêt de Vezzavona, et brûla son corps pour le rendre méconnaissable. Reveillé à 6 heures. « Ainsi donc, voici mon dernier moment arrivé ! » S’habille, se confesse, communie et entend la messe de l’abbé Marcaggi dans la chapelle de la prison. S’entretien avec Me de Montera, et le prie de faire réclamer son corps par sa famille pour être enterré près de Bocognano. Pendant la toilette, récite des prières en même temps que l’aumônier. Refuse l’eau-de-vie proposée par le gardien-chef, et remercie les gardiens pour leurs bons soins. Il fait à pied les 40 mètres qui séparent la prison de la place du Palais de Justice où se trouve l’échafaud, entouré de 6.000 spectateurs. Se tournant vers la foule, il crie en corse : « Je demande pardon à Dieu, je demande pardon à tous ! » Embrasse le crucifix. L’exécution s’accompagne de quelques sifflets, et plusieurs femmes font des syncopes. 14 décembre 1895 03 juin 1896 Mercredi,
4h05 Saint-Brieuc
Côtes-du-Nord Jean-Baptiste Dagorne 27 ans, ancien marin, cultivateur. Condamné en 1885, à 16 ans, à huit jours de prison pour avoir blessé son cousin à coups de couteau. Assassina à coups de couteau dans le coeur le 25 décembre 1895 à La Croix-Gibat en Trégueux, les frères Hellio : Louis, 10 ans (un coup) et Pierre, 5 ans (cinq coups) chez qui il était venu voler… 19 mouchoirs et 80 centimes. La veille au soir, à Kerouaran, tente d’assassiner le valet de ferme Mathurin Alleno de trois coups de couteau à pressoir dans la tête en cherchant, là aussi, à voler la ferme. Réveil à 3h15. Promet d’avoir du courage, refuse de parler à son avocat Me Rioche, mais demande l’aumônier Robert. Pendant la messe, pleure un peu. Au greffe, refuse le rhum proposé par le procureur. Le gardien insiste, en vain, avant d’offrir une cigarette. « Si vous voulez. » On la lui prépare et on la lui glisse entre les lèvres. En quittant la prison, dit adieu au gardien-chef et monte dans le fourgon. Arrivé place Duguesclin, mouvement de panique en découvrant la Veuve. Promet à l’abbé de mourir avec courage, puis se laisse saisir par les aides. 18 avril 1896 07 juillet 1896 Mardi,
4h05 Angers
Maine-et-Loire Charles Jouneau 33 ans, peintre/vitrier. Assassina à la hache Charles Persigan, 12 ans, domestique à la ferme de la Guiharais (commune de l’Hôtellerie-de-Flée), le 29 mars 1896. Jouneau comptait depuis longtemps cambrioler la ferme, mais la présence du jeune garçon lui interdisait toute tentative. Butin : 270 francs et une bague en or. Précédemment suspecté – à juste titre – d’incendie volontaire de son atelier afin de toucher l’assurance. Réveillé à 3h35. Pas de réaction, pas de déclarations, s’habille. Se confesse à l’abbé Ollivier en pleurant, entend la messe et communie. Quitte lui-même sa veste pour la toilette. Proteste : « Ne m’attachez pas trop fort. Vous prendez des précautions inutiles. Je marcherai bien. Il ne faut pas me serrer autant. Vous me faites mal. » Puis s’adressant à Deibler : « Ce n’était pas la peine de me donner cette chemise-là pour la couper comme ça ! » Se laisse faire, et prend une tasse de café avec du rhum avant de remercier les gardiens. Va à la guillotine, située à 5 mètres de la porte de la prison, sans hésiter. 25 mai 1895 12 septembre 1896 Samedi,
5h55 Reims
Marne Alexandre-Bélissaire Chapuis 19 ans, vigneron. Satyre assassin d’une fillette de sept ans, Aline Arban, le 14 juin 1896 pendant la fête du village à Cerseuil. Après l’avoir attirée à l’écart sous prétexte de lui donner des fraises, il tente de la violer, mais comme elle se débat, il lui donne des coups de pied dans la tête, lui lacère la figure avec un couteau puis la jette dans un ruisseau. Arrivée des officiels à 4h10. Ne dormait pas, jouait aux cartes avec les gardiens. Refuse café, cognac et cigarette, mais accepte d’entendre la messe et de se confesser. Une demi-heure de trajet de la prison jusqu’à la place du Marché-aux-Chevaux. En descendant du fourgon, pleure silencieusement, le corps plié en deux. Mal basculé, doit être maintenu sur la planche tant il remue les jambes. Vives protestations de la foule, furieuse de ne rien pouvoir voir ! 30 juillet 1896 14 janvier 1897 Jeudi,
7h40 Hazebrouck
Nord René Van Yngelandt 26 ans. Le 14 février 1896, au cours du cambriolage du presbytère, tua à coups de marteau la bonne du curé d’Audezeek, Herminie Follet. Réveil à 6h45. Courageux. Entend la messe, communie, refuse toute nourriture, alcool ou tabac. Exécuté sur la Grande-Place, en face de l’Hôtel de Ville. Mal poussé dans le panier latéral : Louis Deibler reçoit une giclée de sang dans le visage. 19 novembre 1896 18 janvier 1897 Lundi,
7h27 Nancy
Meurthe-et-Moselle Dominique Harsch 28 ans, luxembourgeois. Satyre assassin de Marguerite Flesch, 15 ans, qu’il viole, étouffe et égorge de deux coups de canif dans la forêt de Moyeuvre le 4 novembre 1895, près de Briey. Prétendit être le factotum d’une châtelaine, et « embaucha » Margot comme domestique en présence de ses parents. Sans nouvelles d’elle, ils lancèrent des recherches. Le corps fut retrouvé le 5 décembre sous un tas de branchages. Réveillé à 6h45. « Ah, voilà une bonne nouvelle ! » S’habille immédiatement : « C’est bien ». Terrifié, se laisse faire, promet à son avocat Me Terreaux qu’il sera fort. Entend la messe et subit la toilette sans plus prononcer un mot. Face à la machine, devant la prison, baise le crucifix sans cesser de regarder le couperet. Fausse manoeuvre : le couperet est libéré avant que la lunette ne soit fermée, d’où éclaboussures de sang sur les spectateurs les plus proches. Louis Deibler, épargné cette fois, croit pourtant avoir été sali : première manifestation d’hématophobie qui iront s’aggravant les deux années suivantes. L’exécution est representée par le peintre Emile Friant. Le corps est remis à la Faculté. 23 novembre 1896 25 février 1897 Jeudi,
6h33 Versailles
Seine-et-Oise Henri-Onésime Basset 23 ans, cultivateur, pédophile récidiviste. Satyre assassin de Louise Millier, 13 ans, qu’il enleva, viola, étrangla et pendit dans une forêt de Breuil-le-Vert le 26 juillet 1896. Condamné à Beauvais, arrêt cassé, rejugé à Versailles. Réveillé à 5h30. « C’est bien », dit-il au procureur, puis reproche au père Philibert de ne pas l’avoir prévenu plus tôt. Demande à entendre la messe et à communier. Pendant la toilette, boit plusieurs rasades de rhum, fume un cigare, puis quatre cigarettes. Doit se baisser pour grimper dans le fourgon tant il est grand. Pendant le long trajet, boit un peu de vin de Bordeaux chaud et sucré apporté par l’abbé, et se repent : « J’ai donné la mort, je la mérite, je paierai avec du sang. » même s’il avoue ne pas se rappeler les circonstances exactes du crime, commis en état d’ivresse selon lui. Les larmes aux yeux, descend au Pont-Colbert, observe la guillotine et dit : « C’est ça, cette fameuse machine ? » Embrasse le crucifix, puis l’aumônier à deux reprises. Mal engagé dans la lunette, on doit le replacer. 10 décembre 1897, 15 janvier 1897 20 avril 1897 Mardi,
4h50 Lons-le-Saunier
Jura Pierre-Elysée Vaillat 33 ans. Tue à coups de fusil le 25 décembre 1896 à Pratz Mr Dupperchy et sa soeur, tous deux quinquagénaires, pour leur voler une somme de 100 francs. Réveillé à 4h30. Aucune émotion, courageux. Boit plusieurs verres de cognac, fume deux cigarettes, et refuse catégoriquement de parler à l’aumônier. EN sortant de prison, contemple la foule avec une certaine arrogance. L’aumônier lui dit : « Allons, Vaillat, ayez un mot de repentir. » « Non », répond ce dernier en tournant la tête pour ne pas voir le crucifix. Devant la bascule, à l’instar de son presque homonyme Vaillant, il crie : « Vive l’anarchie ! Mort à la société bourgeoise ! » 09 mars 1897 11 mai 1897 Mardi,
4h30 Bastia
Corse Jean « Manaccia » Bartoli 45 ans. Chef d’un trio de malfaiteurs qui terrorisaient la région de Fiumorbo six ans durant, Bartoli vouait une haine sans nom envers Pierre Chiari, lequel avait osé le faire traîner devant un tribunal de police pour de simples contraventions. Le 25 avril 1895, Bartoli et ses sbires l’enlevèrent pendant qu’il dormait, avant de l’attacher à un arbre près du moulin de Taviano, de lui crever les yeux, de lui couper les yeux, la langue et de l’émasculer. Les complices furent abattus lors de l’arrestation. Réveil à 4h. Il faut le secouer pour qu’il ouvre les yeux. Pendant la lecture de la sentence, dit : « Non, ce n’est pas possible ! Le président de la République ne peut pas avoir rejeté mon recours en grâce, car je n’ai tué personne, je suis innocent ! » On le toilette dans sa cellule, lui repassant la camisole après avoir coupé le col de sa chemise. Refuse le cordial de chartreuse offert par le docteur Salicetti, et accepte d’entendre la messe de l’abbé Rusterucci. 6.000 personnes présentes sur la place d’Armes. Le fourgon s’arrête à dix mètres de la machine. Bartoli regarde la foule, tout le monde se découvre quand on le saisit et on l’enfourne. 03 mars 1897 13 septembre 1897 Lundi,
5h34 Loos-les-Lille
Nord Etienne Thomas Boucher, 25 ans. Incarcéré à la centrale de Loos pour cinq ans pour vol. Le 30 avril 1897, poignarde de trois coups de tiers-point dans le dos, la nuque et le visage un co-détenu, Saélens, lui aussi condamné pour vol, parce que Saelens refusait de lui donner une partie de sa nourriture – Thomas était un très gros mangeur. Réveillé à 4h12. « C’est bon, au petit bonheur ! » dit-il. Refuse l’aumônier. Demande café, cognac et cigarettes. Déclare qu’il est injuste qu’on l’exécute lui quand de bien plus coupables échappent au couperet. Trouve les liens trop serrés, dit qu’il ne tentera pas de s’évader. Remercie les gardiens et le directeur avant de monter dans le fourgon qui l’emmène place Thiers, à deux kilomètres environ de la prison. Basculé cigarette aux lèvres. 03 août 1897 12 février 1898 Samedi,
6h26 Bastia
Corse Jean Fazzini 28 ans, cordonnier. Tua son bienfaiteur, le chef de gare de Borgo, M.Quillichini, le 22 juin 1897 pour lui voler de l’argent, une montre et un revolver. Réveil à 5h. Dort profondément. Au substitut qui lui dit qu’il faut se préparer à mourir, il répond : « Si vite ? N’embrasserai-je pas ma femme et mes enfants ? » Promet d’avoir du courage. Il s’habille, boit une tasse de café, fume une cigarette et se confesse. A l’aumônier, il autorise de trahir le secret de la confession, car il avoue le crime, commis avec une lime et un petit couteau, et ce pour la somme de 20 francs. Après la messe, se laisse attacher par les bourreaux. En grimpant dedans, dit : « Regardez-moi bien, je suis un coupable. » Le fourgon arrive place d’Armes à 6h20. La foule se découvre. Fazzini dit alors : « Je demande pardon à Dieu et aux hommes. Je suis coupable, je suis un malheureux abandonné de tous. Il ne me reste plus que mes avocats. Priez pour moi. » Il embrasse ses défenseurs, Mes Maestracci et de Montera, l’aumônier Rusterucci, puis les aides le poussent. Beaucoup de femmes présentes s’évanouissent. 15 décembre 1897 09 mai 1898 Lundi,
4h05 Angoulême
Charente Georges Soulat 35 ans. Assassina à Torsac, le 15 novembre 1897, M.Roussaud, 74 ans, et blessa grièvement son fils Paul, 35 ans, le laissant à demi-paralysé et borgne. Réveillé à 3h. Dit juste « C’est bien », puis se fâche : « Ce qu’il y a de sûr, c’est que c’est pas moi qui ai fait le coup; je l’ai indiqué, c’est vrai, j’ai conduit les assassins jusqu’à la maison et leur ai donné les instructions pour commettre le crime, mais je n’ai pas versé le sang ! » Dénonce un nommé Escriba, espagnol, et un complice inconnu de lui. Etant ses seuls aveux, ils sont enregistrés plus tard au greffe. A 3h35, la toilette est finie. On attend 25 minutes l’heure de partir. A la demande de l’abbé Albot, accepte de boire un peu de rhum, qu’Anatole Deibler lui fait consommer à petites gorgées. Exécuté place du Champ-de-Mars, à 600 mètres de la prison. Du fourgon à la machine, doit être soutenu. 17 mars 1898 25 juin 1898 Samedi,
3h58 Paris Saverio-Angelo Carrara 35 ans, champignonniste, Italien naturalisé français en 1895. Au Kremlin-Bicêtre, le 30 novembre 1897, assassina d’un coup de manivelle le garçon de recettes Augustin Lamarre et fit brûler le corps dans le brasero de sa champignonnière. Mobile : ne pas payer les dettes réclamées par le garçon de recettes, et lui dérober sa sacoche contenant 20.900 francs. Réveillé à 3h40. Dès qu’il ouvre les yeux, se met à pleurer sans dire un mot. L’abbé Valadier tend une fiole de rhum dont il boit une gorgée. On l’aide à se lever, à s’habiller. Ne veut pas parler au juge d’instruction, et reste quelques instants à écouter les paroles de l’aumônier et à boire un peu de rhum. Pas de messe. Pendant la toilette, ne cesse de répéter : « Ah mon Dieu » et de gémir. Apparaît hors de la prison, le visage baissé, le corps plié en deux, pour éviter de voir le couperet. Mal placé sur la bascule, on doit le replacer, ce qui prend 10 secondes, car il s’agite beaucoup. 24 mai 1898 27 juin 1898 Lundi,
3h58 Vesoul
Haute-Saône Justin Priolet, dit « Rosdy » 47 ans. Surpris alors qu’il volait une poule, il tua la veuve Duranton, 70 ans, à Valay le 13 février 1898. Il découpa le corps, sépara les membres du tronc, fit disparaître les entrailles puis fit brûler les restes entre deux matelas auxquels il mit le feu. Réveillé à 3h35. Fond en larmes, mais garde son courage. S’habille seul. Pendant qu’on l’attache, l’aumônier lui lit une lettre de son avocat dans laquelle son défenseur lui demande d’être courageux. Pas de messe, mais l’aumônier parle au condamné pendant quelques minutes. Au greffe, boit deux verres de cognac. Ne fait aucune déclaration de dernière minute. En quittant la prison/palais de justice, le gardien-chef lui fait boire du café chaud. A cent mètres de la prison, place du Champ-de-Foire, à dix mètres de la halle, Priolet descend du fourgon pâle mais ferme. Il demande du cognac au prêtre, qui lui met un petit flacon entre les lèvres. Le condamné le vide avant d’être basculé. Plusieurs personnes se sentent mal, dont un cavalier qui tombe de cheval. 07 mai 1898 22 juillet 1898 Vendredi,
4h20 Angoulême
Charente Eugène Vinsonneaud 40 ans. Assassine la veuve Chadefaux, 73 ans, le 05 mai 1898 à Touzac pour un butin d’1 franc, avec la complicité de son épouse, qui est condamnée à 20 ans de travaux forcés. Il met ensuite le feu à la maison pour faire crire à un accident. Réveil à 3h40. Vinsonneaud s’asseoit sur son lit, rougit, tremble et s’effondre en arrière. Il pleure : « Ah, mes pauvres enfants ! Ma pauvre femme ! » Pris d’une syncope avant de s’habiller, on doit lui faire sentir des sels. En enfilant son pantalon, il s’évanouit une seconde fois. Les gardiens doivent l’habiller eux-mêmes. A la chapelle, il se confesse et entend la messe. Pendant la toilette, ne cesse de se lamenter. Se tait sur les derniers mètres : exécuté place des prisons, à l’entrée de la maison d’arrêt. Foule en masse sur les toits et aux fenêtres. 10 juin 1898 19 août 1898 Vendredi,
5h20 Evreux
Eure Alphonse Caillard 27 ans. Dans la nuit du 27 au 28 mars 1898, tua six membres de la famille Leblond au hameau du Val, à Nassandres : abat d’un coup de fusil M.Leblond, 37 ans, puis son épouse, 43 ans, puis Léonce, 10 ans et Paul, 7 ans. Il égorge Jeanne, 5 ans, avec un couteau à gigot, puis va abattre la mère de Mme Leblond, 75 ans, dans son lit d’un coup de fusil en plein visage. Orage terrible durant le montage, route de Caen. Entrée des officiels dans sa cellule du 2e étage à 4h45 : Caillard réveillé depuis une heure par la tempête. « Bien, j’aurai du courage. » Comme le procureur lui demande d’avouer un autre crime, commis à Ouville-la-Bientournée, il répond : « Inutile de mentir ! Ce n’est pas moi ! » Pâle mais calme, s’habille seul. Au 1er étage, entend la messe et communie. Au greffe, dit « C’est un drôle de réveil ! » Pendant la toilette, mange un biscuit et boit quelques gorgées de rhum. Pendant les 1200 mètres qui séparent la prison du lieu d’exécution, Caillard fume une cigarette sans dire un mot. Sur place, des gens grimpés dans les arbres en tombent, et des cris « A mort ! » se font entendre. En descendant du fourgon, Caillard est embrassé par les deux prêtres. Il regarde la foule, sourit rapidement et évite de regarder le couperet. 09 juillet 1898 26 novembre 1898 Samedi,
7h20 Brest
Finistère Victor Malavoi 22 ans. Le 17 juillet 1898, à Brest, étrangle sa soeur, Elisa Vaillant, avec une corde, et tenté d’étouffer sa nièce Olga, âgée de 5 mois en lui passant un tablier autour du cou. Il attendit plusieurs heures le retour de son beau-frère Arsène, un revolver chargé à la main, mais comme celui-ci tardait à arriver, il quitta la maison, et passa la journée à s’enivrer avant d’aller lui-même se constituer prisonnier le soir venu. Motif : vol et vengeance, Elisa refusant depuis quelques jours de garder ce bon à rien de frère sous son toit s’il ne se décidait pas à faire quelque chose de sa vie. La pluie cesse quand les exécuteurs montent la machine, en face de la porte Fautras. Ayant joué aux cartes avec ses gardiens jusqu’à 23 heures, Malavoi dormait profondément. Réveillé à 6h, informé du rejet de sa grâce, dit juste : « C’est bien ! ». Ne fait aucune déclaration, mais accepte de voir l’aumônier. Se confesse, entend la messe, communie. Malavoi enfile ses vêtements, puis au greffe, boit calmement un verre de café, un autre de rhum, et fume une cigarette. Le trajet de la prison à la place Fautras prend 25 minutes en raison des rues escarpées qui y conduisent. Très pâle, Malavoi marche sans faiblir. Il embrasse l’aumônier et lui dit : « Monsieur, si je meurs de la sorte, c’est que je n’ai pas été élevé chrétiennement. » Puis, à la foule, il dit : « Adieu, messieurs ! » 12 octobre 1898 31 décembre 1898 Samedi,
6h57 Bourg
Ain Joseph Vacher « L’éventreur de bergères », « Le tueur du Sud-Est ». 29 ans, ancien sergent, tueur en série. Après une tentative d’assassinat d’une femme ayant refusé de l’épouser en 1892 et une tentative de suicide au cours de laquelle il se loge définitivement une balle dans la tête, il passe plus d’un an dans un asile avant d’être libéré avec la mention « guéri ». Modus Operandi : strangulation, égorgement, coups de couteau, éventrement, viol, sodomie, mutilations génitales post-mortem. Meurtres avoués par Vacher : Eugénie Delhomme (21 ans), le 19 mai 1894 à Beaurepaire, en Isère ; Louise Marcel (13 ans), à Vidauban, (Var), le 20 novembre 1894 ; Adèle Mortureux (17 ans), à Etaule (Côte-d’Or), le 12 mai 1895 ; Mme Morand (58 ans), à Saint-Ours (Savoie), le 24 août 1895 ; Victor Portalier (16 ans), à Bénonces (Ain), le 1er septembre 1895 ; Aline Alaise (16 ans) à Truinas (Drôme), le 23 septembre 1895 ; Pierre Massot-Pellet (14 ans) à Saint-Etienne-de-Boulogne (Ardèche), le 29 septembre 1895 ; Marie Moussier-Lorut (19 ans) à Busset (Allier), le 10 septembre 1896 ; Rosine Rodier (14 ans) à Saint-Honorat (Haute-Loire), le 1er octobre 1896 ; Claudius Beaupied (14 ans) à Tassin-la-Demie-Lune, en mai 1897 ; Pierre Laurent (13 ans) à Courzieu (Rhône), le 18 juin 1897. Soupçonné de nos jours d’au moins 20 autres meurtres et assassinats (dont cinq commis dans son adolescence, entre 1884 et 1890), de huit tentatives de meurtres et d’une dizaine de tentatives de viols. Photo de la tête de Vacher. Au réveil, à 6h, dit: « Ca m’est égal, faites de moi ce que vous voudrez ! » Refuse les secours de la religion, puis les accepte si on le porte (!) puis se ravise une dernière fois, en disant qu’il va rencontrer Jésus dans peu de temps. Refuse nourriture, alcool et cigarette, et clame son innocence. « Si tout le monde, si vous tous qui m’entourez, étiez aussi innocents que moi, vous n’auriez pas peur de la mort ! » Se laisse toiletter, puis on doit le porter jusqu’au fourgon, tandis qu’il crie : « La voilà, la victime des hospices ! » Dans le fourgon, refuse d’embrasser le crucifix et râle : « Vous croyez, en me faisant mourir, expier les crimes de la France ? La France est coupable, tout est injustice ! On gracie Mazoyer (Un autre condamné à mort burgien) qui s’avoue coupable et on me fait mourir, moi qui suis innocent ! » Déclare qu’il ne marchera pas si on ne le laisse pas parler à la foule amassée sur le Champ-de-Mars, et comme la réponse est négative, tient sa promesse : les aides doivent le porter à l’horizontale sur la bascule, tandis que les spectateurs crient : « A mort ! Il ne sait même pas mourir proprement ! » Applaudissements quand le couperet tombe. 28 octobre 1898 14 janvier 1899 Samedi,
7h25 Troyes
Aube Pierre-François Damoiseau 65 ans. Ancien maire de Rouilly Saint-Loup, tue son gendre Cordier et tente d’abattre sa propre fille Hélène pour une affaire d’argent, le 18 décembre 1897 : son gendre et sa fille avaient voulu vendre ses biens afin de liquider la succession de la défunte Mme Damoiseau. Condamné une première fois, arrêt cassé, recondamné dans la Seine-et-Marne. Réveillé à 6h45 par le procureur Marvillet, reste hagard quelques instants puis reprend son calme. « Eh bien, monsieur le procureur, c’est vous qui triomphez ! Il y a encore de beaux jours pour la canaille ! » Au magistrat qui lui demande s’il a des recommandations à faire ou un message à transmettre, il répond non, puis envoie l’aumônier Georget sur les roses : « Je n’ai pas besoin de vous ! Je n’ai jamais cru en Dieu, ce qui ne m’a pas empêché d’être aussi honnête que n’importe qui ! » Demande à être inhumé dans ses vêtements civils, puis réclame son avocat, Me Magnin : « Maître, nous n’avons pas eu de chance ! Enfin, que voulez-vous ? Je peux dire que c’est le plus beau jour de ma vie ! » Examine les vêtements qu’on lui ramène pour être sûr que ce sont bien les siens. Demande ses bottes, et manifeste le désir qu’on l’enterre chez lui, à côté de sa femme. Pendant la toilette, proteste : « Faites donc attention, vous me faites mal ! Vous savez cependant bien que je n’ai pas l’intention de m’échapper ! » Anatole Deibler lui répond : « Monsieur, c’est une formalité qu’il nous faut accomplir. » Refuse le rhum : « Je n’en ai pas besoin pour avoir du courage, et d’ailleurs, je n’aime pas l’alcool ! » Avisant l’aumônier qui grimpe dans le fourgon à ses côtés : « Monsieur l’aumônier, je croyais que vous ne deviez pas venir ici. En tout cas, c’est malgré moi que vous m’accompagnez ! » Comme on l’exhorte au calme, il s’en tient à son avis : « Dites bien que j’ai refusé que l’aumônier m’accompagne ! » Arrivé place de la Tour, s’emporte une dernière fois contre l’abbé Georget qui lui tend un crucifix : « J’en veux pas de votre Christ ! » 19 juillet 1898, 10 novembre 1898 01 février 1899 Mercredi,
7h05 Paris Albert Alfred Peugnez 21 ans, voleur récidiviste, plusieurs fois condamné. Egorge à coups de rasoir le 04 juin 1898 à Saint-Maurice sa voisine Louise Dhaut, épouse Bertrand, 48 ans, et tue à coups de marteau son neveu Octave, 7 ans, en chantant à tue-tête pour couvrir les supplications de ses victimes, puis vole 600 francs en or. Anecdote : Peugnez habitait au 13, Grande-Rue à St-Maurice, tout comme Charles Cornu, condamné à mort en 1888 ! Eveillé en sursaut à 6h50. Redevient calme : « Mais qu’est-ce que c’est que cette façon de foutre les gens à la porte par un temps pareil ? Du courage ? Oui, j’en aurai ! Quand on n’est pas coupable, on n’a jamais peur de la mort ! La justice des hommes n’est pas la justice, j’espère que la justice de Dieu sera plus juste ! » Il s’habille puis, récemment converti, demande à parler au pasteur Arboux quelques minutes : « Vous direz adieu à ma mère et à ma soeur et vous direz à mon beau-père que je lui pardonne. » Demande à boire aux gardiens. Comme on lui tend du rhum et un verre, réagit : « Pourquoi le verre ? C’est bien inutile ! » Vide la bouteille, puis fume une cigarette. Pendant la toilette, la laisse tomber, et demande à un gardien de la ramasser. Quand on découpe son col, frissonne : « Je tremble ? Possible, mais c’est de froid. Couvrez-moi les épaules, je ne tiens pas à attraper une fluxion de poitrine ! » Quand il franchit la porte, crie : « Portez armes ! », et les soldats se mettent tous au garde-à-vous. Peugnez fait ses derniers pas en regardant le public. Le pasteur lui dit à plusieurs reprises : « Dieu vous pardonne ! » Peugnez hoche la tête, puis s’écrie : « N’avouez jamais ! N’avouez jamais ! » avant d’être poussé sur la bascule. 14 décembre 1898 08 février 1899 Mercredi,
7h05 Remiremont
Vosges Aloïs Zuckermeyer Bavarois, 28 ans, tailleur de pierres. Satyre assassin de Marie-Odile Gully, 7 ans, le 13 juin 1898, qu’il assomma d’un coup de poing dans le visage, viola puis poignarda à huit reprises dans un terrain vague, proche de la gare de Remiremont. La petite, retrouvée et soignée, demeura consciente et elle eut le temps de reconnaître le monstre. Elle succomba huit jours après l’attaque, le 21 juin, d’une péritonite causée par l’un des coups de couteau. Pas d’exécution à Remiremont depuis 1815. Réveillé à 5h30. Dormait bien : croyait qu’il serait grâcié. Assisté d’un traducteur pour entendre la sentence. « J’aurai du courage. » Le co-détenu qui partage sa cellule lui serre la main et lui dit adieu. Puis entend la messe, communie, et dit au procureur : « Je demande pardon à Dieu, à ma mère et à la société du crime que j’ai commis. Je me repens sincèrement. » Pendant la toilette, ne dit plus un mot. Le fourgon parcourt deux cents mètres de la prison jusqu’à la place de la Tour Carrée. Le condamné sort sous la pluie. Grande foule qui pousse des cris à son arrivée. Zuckermeyer demande encore pardon de son crime puis embrasse le crucifix. Applaudissements. 10 décembre 1898 12 mai 1899 Vendredi,
4h25 Saint-Nazaire
Loire-Inférieure Félix Geffroy
et
Adrien Samson 25 et 24 ans. Battent à mort et étranglent le vieux Jean-Marie Guéno le 13 janvier 1899 dans le quartier de l’Immaculée-Conception, dans les faubourgs de Saint-Nazaire, pour lui voler une vingtaine de francs, avant de mettre le feu au lit sur lequel repose le corps. « C’est pour aujourd’hui ? C’est pas possible ! » dit Samson au réveil. Exécution place de la République, à 1/2 km de la prison, pour cause présence forains place Marceau. Geffroy, ayant achevé la victime, est considéré comme plus coupable et passe en second, mais un des aides a oublié de retirer la tête de Samson de la bassine et Geffroy pousse un hurlement horrible en la voyant. Au cimetière, Mme Samson demande à récupérer le corps de son fils. Un aide saisit une tête au hasard et demande : « C’est celle-là ? » La mère s’évanouit. Deibler recevra le premier – et avant-dernier- blâme de sa carrière. 10 mars 1899 06 juillet 1899 Jeudi,
3h50 Rouen
Seine-Inférieure Alexandre-Léon Bétille Facteur, 26 ans. Tue à coups de pieu à Saint-Georges-du-Vièvre, le 19 octobre 1898 M.Plessis, 68 ans, et sa bonne la veuve Vannier, 74 ans. Crime commis pour voler : Bétille avait besoin d’argent pour se marier. Condamné dans l’Eure, arrêt cassé, rejugé à Rouen. A son réveil, son défenseur, Me Marais, lui dit d’être courageux : « Vous avez été soldat, souvenez-vous-en et ayez du courage. Je compte sur vous. » « Oui, monsieur Marais, j’en aurai. » Arrivé place Bonne-Nouvelle, il s’agenouille devant l’aumônier, puis l’embrasse et va lui-même vers l’échafaud. 26 janvier 1899, 06 mai 1899 07 août 1899 Lundi,
4h40 Montbrison
Loire Louis-Adolphe Borde 35 ans, ouvrier fondeur. Le 30 juillet 1898, assassine sa femme Victorine et sa fille Marie, 10 ans, au Coteau, à coups de hache. Il violait régulièrement son épouse, qui voulut le quitter après qu’il se soit permis des attouchements sexuels sur leur fille. Reveillé à 4 heures, dit « C’est bien, je suis prêt. J’avais rêvé que c’était pour aujourd’hui : mon rêve ne m’a pas trompé. » Comme on veut l’aider à se vêtir, répond : « Laissez, je m’habillerai seul. Qu’on me donne ma jolie chemise ! » A la chapelle, entend la messe et communie, puis manifeste l’envie de déjeuner : on lui sert un bol de café qu’il juge excellent, puis un verre de rhum. La toilette est rapide, car Borde a déjà les cheveux à ras. Fume un cigare que lui a donné son avocat, remercie le directeur et un gardien venu de Roanne. Comme Me de Brion, l’un des avocats, lui dit que ses parents lui ont pardonné ses crimes, il pleure un peu : « Dites-leur bien que, si j’ai pu commettre un crime pareile, c’est que j’étais ivre. Je ne savais pas ce que je faisais. » Exécution place Saint-Jean très rapide. Deibler qualifiera, selon la presse locale, Borde comme ayant été « extraordinaire de calme et de courage. » 17 juin 1899 10 février 1900 Samedi,
7h05, 7h08 Lyon
Rhône Evariste « Charlot » Nouguier
et
Ernest Annet Gaumet Souteneurs, 21 et 25 ans. Tuent la veuve Thérèse Foucherand, tenancière d’un bistrot, rue de la Villette à Lyon la Part-Dieu le 21 septembre 1898. Réveil à 5h45. Nouguier est le premier, dort bien. « C’est bien. » Gaumet déjà levé. Sourit : « Je m’y attendais. » Demande à parler au juge d’instruction Benoist et lui dit : « C’est égal, c’est triste de mourir… et en admettant que je sois coupable, je n’aurais pas du être condamné à mort. » Discute avec toutes les personnes présentes, refuse les secours de l’aumônier, puis désignant Nouguier qui, lui, sortait de la chapelle, a cette réflexion : « Voyez ce pauvre Nouguier comme il est triste et défait. Et dire que j’ai sacrifié ma tête pour sauver la sienne ! » Pendant la toilette, prie les exécuteurs : « Attention, ne taillez pas comme sur une bête ! » Puis « Je ne pourrai plus trinquer ! Enfin, je suis réconcilié avec les hommes ! » Nouguier est presque porté jusqu’à la machine, devant laquelle il embrasse crucifix et aumônier. Gaumet descend seul du fourgon en disant : « Ne me soutenez pas, j’aurai du courage ! » 01 décembre 1899 19 octobre 1900 Vendredi,
5h55 Saint-Gaudens
Haute-Garonne Etienne Portes PARRICIDE. Cultivateur, 44 ans. A Estadens, assassine à coups de hache sa mère Jeanne, 78 ans, et son fils, Jean-François, 16 ans, dans la nuit du 02 au 03 juin 1900. Mobile : ses proches lui reprochaient son intempérance et son caractère dépensier. Reveil à 4h30. Dort profondément. Sursaute, se frotte les yeux, et demande ce qui se passe. Aucune déclaration. Entend la lecture de la sentence de mort avant de demander du café au rhum, et de fumer une cigarette. Ecrit une lettre un testament où il admet que la peine qui le frappe est juste. Revêtu au greffe de la tenue du parricide. Exécuté place du Foirail. 11 août 1900 02 mai 1901 Jeudi,
4h35 Toulouse
Haute-Garonne Jean Allières PARRICIDE, sabotier, 27 ans. A Labarthe-sur-Lèze, tue sa mère (71 ans) de cinq coups de hachette dans la tête le 27 novembre 1900. Réveillé à 3h45. Dort bien car a joué tard aux cartes. « Tant pis ! » Urine, entend la messe, se confesse et communie. Au greffe, dit aux bourreaux : « Vous n’avez pas besoin de m’attacher, je ne vais pas m’en aller » puis s’adresse à son avocat : « Alors, vous voilà, Me Ebelot, c’est l’heure de nous quitter ? J’aurai du courage. Nous nous retrouverons là-haut. Dieu a gardé une place pour vous aussi, là-bas. » Boit quelques gorgées de café arrosé de cognac, mais en a vite assez. Vêtu de la tenue des parricides, il est conduit dans le fourgon, et se retournant, crie : « Salut à tous, mes gardiens ! » Arrivé au Port-Garaud, entend l’huissier lire l’arrêt, puis hèle le bourreau pour lui demander s’il a le droit de parler une dernière fois. Exceptionnellement, Deibler accepte. « Je demande pardon de la faute que j’ai commise. J’espérais que le Président me ferait grâce… » Puis après un sanglot qui l’empêche de terminer, salue l’assistance : « Au revoir ! » 10 février 1901 09 septembre 1901 Lundi,
4h35 Rouen
Seine-Inférieure Etienne Bouvier 37 ans, mécanicien-ajusteur. Satyre assassin de Madeleine Godaillier, 4 ans, le 04 avril 1901 à Rouen. Il dépèce le corps et les conserve dans sa chambre pendant seize jours avant de s’en débarrasser en les jetant dans la Seine. Réveillé à 3h40. « Bien, monsieur, j’aurai du courage ». S’habille seul, ne fait aucune déclaration, puis s’entretient avec l’aumônier Leborgne. Entend la messe, communie. Au greffe, attend les exécuteurs pendant un quart d’heure. Fume une cigarette, boit deux verres de rhum en regardant les gens avec hébétude. Pleure pendant la toilette, puis dit à son avocat : « Vous voudrez bien faire mes adieux à ma famille ». Place Bonne-Nouvelle, environ 400 personnes ont franchi les barrages et envahissent les lieux, criant à mort. Devant l’échafaud, Bouvier embrasse le crucifix. Un léger soubresaut sur la bascule, mais le couperet tombe aussitôt. 20 juillet 1901 11 novembre 1901 Lundi,
6h30 Montbrison
Loire Jean Emile Lejour 25 ans, ouvrier tailleur d’habits. Assassine de 26 coups de couteau Mr Joly, 70 ans, fabricant de peignes, le 07 juillet 1901 à Saint-Etienne, pour le voler. Sa complice et maîtresse, Louise Chardon, épouse Huchon, nièce de la victime, est elle aussi condamnée à mort, puis grâciée. Réveillé à 5h30. Deux autres condamnés, Tessier et Tavernier, se cachent sous leurs couvertures, terrorisés – on ignore encore que leur grâce sera décidée. Lejour doit être secoué pour ouvrir les yeux. Panique, puis se calme. S’habille, entend la messe. AU greffe, se plaint pendant la toilette : « Vous me faites mal avec vos ongles », puis dit, fataliste, à un gardien : « Je vous l’avais bien dit que je serais exécuté. » Il demande à embrasser sa maîtresse Louise, mais on le lui refuse. Demande à boire, mais refuse le rhum : « Non. Pas d’alcool. De l’eau. » Arrivé sur place, regarde l’échafaud avec peur. Mal basculé, maintenu par les cheveux par l’exécuteur-adjoint… lequel, deséquilibré par la décapitation, tombe en arrière et laisse échapper la tête qui roule à quelques mètres de l’échafaud. 07 septembre 1901 09 janvier 1903 Vendredi,
7h25 Lille
Nord Maurice Bouché 24 ans, employé de commerce. Assassin de Mlle Marie Henry, rentière, 65 ans, à Lille le 15 février 1902 pour la voler. Déjà réveillé, se redresse sur sa couchette dès l’entrée des officiels, à 6h. Pleure un peu. Promet d’avoir du courage et dit qu’il le savait. « Une lettre que j’ai reçue hier le disait entre les lignes. Puis le chien m’a prévenu, car il est venu me réveiller et m’a léché. » Remet un cahier à son avocat sur lequel il est écrit : « Offert en gage de reconnaissance pour toutes les bontés que vous avez eue pour moi. » S’adressant à la ronde, dit « Me Dubron m’a dit que le châtiment était terrible, mais ce qui me fait le plus de peine, c’est le tort que j’ai causé à ma famille. » Assiste à la messe de l’aumônier Derwez. Communie. Au greffe, allume une cigarette et boit un cordial. Parle avec les gardiens. Sur le chemin qui mène hors de la prison, dit à un gardien : « Vous voyez bien que ce n’était pas les vidangeurs » (le gardien, pour le rassurer dans la nuit, lui avait dit que le bruit était causé par des vidangeurs). Au greffe, ligoté, plaisante : « Ce n’est pas la peine de serrer si fort ! » Portant un veston, il sort de la prison, cigarette aux lèvres. Devant la machine, déclare tout haut : « Messieurs, si j’ai failli, c’est parce que je n’ai pas suivi les enseignements que j’ai reçus dans ma jeunesse. » Une femme hurle dans la foule quand le couperet s’abat. 15 novembre 1902 09 avril 1903 Jeudi,
5h Saint-Mihiel
Meuse Théophile Leclerc Berger, 19 ans, tueur récidiviste. Dans la nuit du 09 au 10 décembre 1899, aux Paroches, tue à coups de couperet à sucre la buraliste-épicière Marie-Emélie Miton, 69 ans, (il n’a que 16 ans), puis le vieux forgeron Jean-Baptiste Huraut, 84 ans, et sa fille Joséphine, 54 ans, aux Paroches le 21 mars 1901, un médecin en 1902. Le 13 juin 1902, à Troussey, il tue Victor Robert, ancien maire du village, rentier, 84 ans, et sa bonne Marie Jaillon, 56 ans, à coups de hachette. Se réfugie en Suisse, arrêté le 28 juillet. Joue tard – jusqu’à 1 heure du matin. Dort bien. Réveillé à 4h20, se frotte les yeux. « Bonjour, Messieurs. » Informé par le directeur, répond : « C’est bon, compris ! » S’habille seul, entend la messe, communie, puis passe les vêtements – notamment des bottines vernies – achetées avec l’argent de ses victimes durant sa période criminelle. Refuse l’eau-de-vie qu’on lui propose : » Je n’ai pas besoin de ça pour monter à l’échafaud. Et puis on a mis de l’arsenic dedans. » Choisit une cigarette, mais refuse délibérement celle qu’on lui proposait, la considérant elle aussi « truquée comme l’alcool ». Promet durant la toilette d’avoir du courage. En franchissant la porte – la guillotine est à un mètre à peine de celle-ci – crie « Au revoir ! » Foule peu importante. 29 janvier 1903 03 décembre 1903 Jeudi,
6h55 Beauvais
Oise Auguste Potin 20 ans, braconnier. Tue à coups de pince en fer le 26 juin 1903 à Plouy la veuve Denizart, tenancière d’un café-épicerie, et son petit-fils Robert Bertin, 7 ans pour voler deux montres. Son complice Louis Longflier, 25 ans, condamné à mort également, est gracié. Réveillé à 6h40. Dort d’un sommeil agité. Se lève, regarde le procureur et dit : « C’est bien ! » S’habille, discute avec l’abbé Pistorius. Au greffe, pendant la toilette, il est abattu et dodeline la tête de droite à gauche. Devant les magistrats, dit : « Je suis innocent. » Arrivé place du Franc-Marché, devant la guillotine, il se raidit et crie : « Vive l’anarchie ! Vive l’anarchie ! Vive l’anarchie ! Je suis innocent : les coupables courent encore ! » 03 août 1903 12 avril 1905 Mercredi,
5h05 Nancy
Meurthe-et-Moselle Constantin Jeannin 33 ans. Auteur d’une tentative de viol à Remiremont en 1901. A sa sortie de prison de Besançon (incarcéré quatre mois pour vols), le 24 février 1904, tente d’étrangler et poignarde à deux reprises au sein Mme Grenot, garde-barrière à Mathey (Doubs), enceinte de plusieurs mois, pour la violer, avant de lui voler 94 francs. Elle survit, mais perd son enfant à naître deux jours après l’agression. Arrêté le 15 avril suivant en Meurthe-et-Moselle suite à deux vols avec effraction commis à Loisy, plus une tentative de strangulation sur Mme Robert qui l’avait surpris en plein cambriolage. Délai entre procès et exécution augmenté, car Jeannin fut jugé le 7 février 1905 à Châlon-sur-Saône pour une affaire de viol, de vol qualifié et d’assassinat d’une femme de Louhans. Sa présence est averée à Frangy (Saône-et-Loire) dans la nuit du 3 au 4 mars 1904 : dans cette ville, cette même nuit, un viol suivi d’assassinat et plusieurs vols sont commis. Jeannin nie toute participation. Ne pouvant être condamné à une autre peine, se voit simplement contraint à rembourser les frais. Réveil à 4h20. Dort profondément. Très calme à la nouvelle, quand le substitut lui dit d’être courageux, il répond : « On en aura. » Il a une entrevue avec l’aumônier, entend la messe. Pendant la toilette, fume une cigarette et boit un café arrosé de cognac. Va fermement vers la guillotine : allure imposante (1m85, longue barbe noire). Mouvement de recul devant la bascule. 02 août 1904 28 juin 1905 Mercredi,
3h30 Orléans
Loiret Henri Languille 41 ans. Le 12 octobre 1903, au hameau de la Rochelle, à Nibelle-Saint-Sauveur, tue à coups de pierre et de greffoir Auguste Legeais, 79 ans, avant de l’étrangler avec un mouchoir et de voler 171 francs, une montre en argent, des souliers et des pièces de monnaie. Avant de partir, boit trois bouteilles de vin et une de champagne. Les officiels entrent dans la cellule à 3h15. Languille ne dort pas : réveillé par les cris des personnes présentes sur la place où aura lieu l’exécution. « Du courage, j’en aurai. Je vous attendais d’ailleurs ce matin. » Après avoir nettoyé son visage, il dit : « Vous me demandez si j’ai peur ? Non, je n’ai pas peur… Je n’ai jamais eu peur de ma vie ! » A son avocat, Me Séjourné, il répond : « Je vous remercie de tout le bien que vous m’avez fait. » Il confie une lettre confidentielle à Me Séjourné, puis embrasse le prêtre et l’assure qu’il sera courageux. Au greffe, on lui donne un grand verre de rhum qu’il vide d’un coup : « A votre santé, messieurs ! » Pendant la toilette, se montre un peu agacé : « Allez-vous faire ça jusqu’à demain ? Ainsi attaché, je ne pourrai pas serrer la main de mon avocat… » Le fourgon roule deux minutes jusqu’à la place du mont Bel-Air. PLusieurs milliers de personnes présentes. Languille descent, blême, il embrasse l’aumônier, puis le crucifix à trois reprises, puis regarde la foule et crie : « Tas de paysans ! Adieu Paris ! Adieu Paris ! » Le fils Legeais assiste à l’exécution. 18 avril 1905 05 août 1905 Samedi,
3h53, 3h55 Dunkerque
Nord Carolus-Louis Swartewagher
et
Henri-Jean
Van Den Bogaert 42 et 24 ans, Belges, bateliers. Etranglent avec une corde puis égorgent de deux coups de couteau le 24 décembre 1904 à Dunkerque Sophie-Philomène Fremault, épouse Knockaert, 62 ans, batelière, à bord de la péniche « La Flèche » afin de la voler. Grande foule dès 20 heures la veille. Van Den Bogaert annonce qu’il n’a rien à dire, puis, via l’abbé Destailleurs, qui sert d’interprète, demande à son avocat Me Terquem d’adresser à sa mère papiers et photographies. Demande une chope puis se lève, ainsi que son complice. A la chapelle, se confessent, entendent la messe et communie. Swartewagher déclare d’une voix forte : « Nous mourrons courageusement », puis demande à être guillotiné en second – ce qui était prévu. Toilette très brève au greffe. En passant devant les journalistes et les gardiens, Van Den Bogaert dit « Bonjour Messieurs » puis se dirige fermement vers la guillotine. Swartewagher, pâle, regarde les spectateurs sur les toits et aux fenêtres, et crie : « A mort et bon courage ! » Il se contracte au moment où on le bascule. La décollation est suivie d’acclamations « Vive Deibler ! » Les corps sont débités au cimetière et récupérés à des fins d’analyses. A sept heures, le père de Swartewagher vient se recueillir en pleurant à l’endroit où est mort son fils. 19 mai 1905 06 octobre 1905 Vendredi,
5h50 Belfort Antonio Pozzi 38 ans, maçon italien. Dans la nuit du 14 au 15 décembre 1904, agresse les époux Phelpin, buralistes à Chaux, et tue de deux coups de couteau Mme Phelpin avant de dérober 1.000 francs. Condamné par les assises de la Haute-Saône. Son complice Breveglieri est condamné à perpétuité. Réveillé depuis longtemps à l’arrivée des officiels. A l’annonce, dit avec ironie : « Certes, je m’y attendais, mais ça ne fait rien. C’est désagréable d’être dérangé comme cela de bonne heure. » Puis, il rajoute au procureur : « Puisque je vais mourir, j’ai une révélation à vous faire. Je connais le crime mieux que vous, n’est-ce pas, puisque j’y étais ? Eh bien, vous avez commis une erreur en condamnant Breveglieri comme mon complice. Il est innocent, vous en trouverez la preuve là-dedans. » Il lui donne une lettre, et demande qu’on envoie ses vêtements ainsi qu’une seconde lettre à sa mère. « Maintenant que vous connaissez mes dernières volontés, nous allons nous occuper du « petit voyage » ! » Habillé, après la communion, on lui demande s’il veut se restaurer : « Parbleu, quelle question ! Je ne me suis peut-être jamais senti aussi bon appétit ! » Au greffe, dévore trois côtelettes en mordant à même la viande, vide une bouteille de vin et trois petits verres de rhum. En mangeant, il rit : « Il n’y a rien de tel pour activer la digestion ! Messieurs, je vois pour la dernière fois à vos santés ! » Comme il veut discuter avec Deibler, ce dernier ne partage pas ses intentions et fait presser le mouvement vers le greffe. Au greffe, Pozzi rajoute : « Avant de m’en aller, comme je ne suis pas un ingrat, je voudrais bien que l’on donnât un pourboire de ma part à mon gardien, qui a été très gentil pour moi. La preuve, c’est que si je l’avais voulu, j’aurais pu me suicider. J’avais une ficelle dans ma poche. Mais cela aurait certainement fait avoir des ennuis à ce brave garçon et j’ai évité qu’il ait des désagréments à cause de moi. » Deibler fouille la poche, trouve la ficelle en question, et dit, exaspéré :  » Assez de discours comme cela ! En route ! » Plus de 2.000 personnes présentes place du Champ-de-Foire, à 200 mètres de la prison, qui poussent des cris d’animaux ou des cris de mort. A dix mètres de la machine, Pozzi descend du fourgon, regarde avec colère la foule indigne et hurle de tous ses poumons : « Merde à vous tous ! C’est tout ce que vous méritez ! » M.Phelpin, époux de la victime, assiste à l’exécution et dit : « Ah, que je suis content ! Ma pauvre femme est donc vengée ! » 05 août 1905 11 janvier 1909 Lundi,
7h20, 7h23, 7h26, 7h29 Béthune
Pas-de-Calais Élie Théophile Deroo, Canut Job Vromant, Auguste Emile Pollet
et
Abel Julien Pollet
Les « Bandits d’Hazebrouck », 30 ans, 30 ans, 38 ans et 35 ans, journaliers. Auteur de nombreux crimes crapuleux, sans compter au moins 118 vols (chiffre probablement très inférieur à la réalité). Le 18 janvier 1905, les frères Pollet blessent à coups de tisonnier à Calonne-sur-la-Lys le fermier Deron. Le 17 août 1905, Abel tue les époux Langlemetz à Locon. Le 19 novembre, il tente de tuer les époux Pruvost à Neuf-Bergnin. Le 29 novembre, à Dadizeele (Belgique), tentative d’assassinat sur M. Groote. Le 28 décembre, Abel et Deroo tentent de tuer Mme Verlynd à Pollinchove (Belgique). Le 2 janvier 1906, les mêmes tuent Marie Annothe à Cronbeke (Belgique), puis torturent et tentent de tuer à coups de matraquele fermier Louzie, 73 ans. Le 20 janvier, les frères Pollet et Vromant tuent les vieux époux Lecocq et leur fille Euphrosine à Violaines. Le 17 février, à Rumbeke (Belgique), Abel et Deroo tentent de tuer la veuve Stragier. Le 24 février, Abel tente de tuer les époux Benit à Dottignies (Belgique). Le 2 mars, à Thiennes, Abel et Deroo tentent de tuer les époux Depoix. Le 18 avril, les mêmes tentent de tuer M.Ballu à Oostoletert (Belgique). Le 21 avril, les mêmes tentent de tuer la veuve Delhaye à Ronsbrunge (Belgique). Abel déjà réveillé à 6h15 : « C’est bon, j’aurai du courage. Vous pouvez compter sur moi. D’ailleurs, je m’y attendais. » Puis soupire : « Alors, c’est pour aujourd’hui… » S’habille, puis attend, assis sur son lit, avant de remarquer le sous-préfet Genebrier, à qui il manifeste ses regrets et recommande sa femme et ses enfants : « C’est moi qui l’ai entraînée dans le mauvais chemin. » Demande à écrire une lettre de remerciements pour ses gardiens.Refuse d’un geste les secours de l’abbé. « Je vous remercie, monsieur, de tout ce que vous avez fait pour moi et de tout ce que vous m’avez donné. Mais aujourd’hui, je n’ai besoin de rien. Pour le reste, je n’ai rien à vous raconter. Je me suis d’ailleurs confessé à M. le juge d’instruction. » Auguste, réveillé le second, dormait profondément et sursaute de peur. « Qu’est-ce que c’est ? » gémit-il. Promet d’avoir du courage : « Je m’y attendais, d’ailleurs. Tant pis pour moi. » S’habille et reste effondré et muet. Deroo dormait lui aussi très bien, face au mur, et frémit à l’arrivée des officiels. « Ah oui, du courage, j’en aurai. Alors on va me guillotiner : je m’y attendais. » S’habille sans se presser, puis accepte de se confesser, d’entendre la messe et de communier avec le prêtre. Canut dormait lui aussi : « Que me voulez-vous ? » On doit lui répéter deux fois la sentence : « Ah bon ? C’est bon : j’en aurai du courage… d’ailleurs je m’y attendais ! » Rejoint Deroo pour entendre la messe et communier. Calmes durant la toilette, effectuée dans les cellules : boivent chacun un verre de rhum. Deroo sort le premier, titubant, sous les acclamations de haine du public. Ne voit pas la guillotine en sortant de prison, sur sa gauche. Exécution très rapide. Canut le suit, semble vouloir parler, mais ses forces le trahissent. Le corps décapité, d’un ressaut nerveux, rebondit presque hors du panier. Auguste le suit, et remarque aux bourreaux : « Ce que vous êtes pâles, les butteurs… C’est pourtant moi qui y passe ce matin. » En entendant les cris de la foule, dit à voix basse : « C’est pas la peine de gueuler si fort, tas de veaux ! » Enfin, arrive Abel, pâle mais ferme. Les cris de la foule l’énervent, et il hurle : « Tas de salauds ! » Poussé vers la bascule, crie encore : « Vive la Révolution ! A bas les calotins ! Merde, merde et encore merde ! » 26 juin 1908 26 janvier 1909 Mardi,
7h01 Carpentras
Vaucluse Rémy René Danvers 24 ans, garçon de ferme, fils de bagnard. Originaire du Nord, engagé en mai 1907 à Lapalud par les Donat, régisseurs de la ferme Dumas, châtelain de Kerchêne. Le 1er février 1908, tue à coup de fusil les époux Donat. Réveil à 6h05, dormait bien. Déclare : « J’aurai du courage, mais c’est injuste ce qui m’arrive, je suis innocent. Il y en a tant d’autres qui sont plus coupables que moi et qu’on n’a pas guillotinés ! Moi, je m’y attendais, car ça tardait trop. » S’habille. On lui donne un verre de rhum, en demande un second pour son avocat, Me Fabre, pour trinquer. Fume une cigarette. Messe et communion dans la salle à manger du gardien-chef. Comme l’aumônier tend à Danvers un chapelet, ce dernier le refuse. Second verre de rhum et nouvelle cigarette. Me Fabre confirme à son client qu’il meurt pour « apaiser » les consciences, notamment en raison de la grâce de Camajori, un Nervi marseillais. Toilette rapide. Dernière cigarette, qu’il fume entièrement. Il parle avec l’aumônier, puis embrasse le crucifix avant de traverser la cour. Sur la place d’Inguimbert, foule modérée en raison des barrages, mais 30.000 personnes dans la ville exprès ! A la chute du couteau, applaudissements vite réprimés. 23 juillet 1908 10 février 1909 Mercredi,
6h44, 6h48 Albi
Tarn Henri Besse
et
Pierre Simorre 33 ans, domestique au chômage et 26 ans, marchand ambulant. Besse était prévenu pour une affaire de cambriolage ; Simorre attendait son transfert au bagne, condamné à 10 ans de travaux forcés pour le viol d’une adolescente. Tentèrent de s’évader de la prison d’Albi en tuant à coups de brique le gardien Mouttet et en blessant grièvement le gardien-chef Donat le 21 mai 1908. Arrivée des officiels à 5h30. Simorre est réveillé le premier, promet d’avoir du courage, puis demande : « Et Besse, en est-il ? » La réponse positive le fait sourire. Besse, lui répond : « C’est bon. » En s’habillant, dit n’avoir aucune déclaration à faire : « Tout le monde s’est montré bon pour moi ici. Je n’ai rien à dire si ce n’est que chacun a été parfait. » Serre avec ferveur la main de Me Hucher qui essaie tant bien que mal de lui fournir des paroles de soutien. En allumant une cigarette, Besse se tape le front et dit : « Quelle belle tête Deibler aura là ! » Pendant la messe, à la chapelle, l’aumônier fait remarquer à Besse qu’il est bien calme à quelques minutes de sa mort. « C’est vrai, je ne pensais pas le prendre aussi bien. Mais je regrette qu’on n’ait pas grâcié Simorre, qui est jeune et plein de santé. » (Besse était atteint de tuberculose et eût-il été gracié qu’il n’aurait pas survécu plus d’un an à sa maladie). Au greffe, boivent une tasse de café et un grand verre de rhum. On coupe le col de Besse qui dit : « Quel maître tailleur vous faites ! » Simorre poursuit : « Oui, bon coup de ciseaux. » Il part le premier, exécution très rapide. En voyant revenir les bourreaux, Besse dit : « Simorre est parti ? Il aurait fallu au moins lui dire adieu. On va loin ? Non ? Oh, alors… » Soutenu par les aides, embrasse les aumôniers puis bascule, les yeux rivés sur le couperet. 29 octobre 1908 05 août 1909 Jeudi,
4h52 Paris Georges Henri Duchemin PARRICIDE, 27 ans, garçon charcutier. Tue sa mère Maria-Rose à coups de couteau dans la gorge le 15 août 1908 chez elle, 35, boulevard de Ménilmontant pour lui voler 300 francs. Première exécution boulevard Arago, près de la Santé. Revéillé par les bruits de pas, déclare : « Ma peine est trop forte. » Pendant qu’on l’habille, gémit : « C’est tout de même bien dégoûtant. On gracie Soleilland, et puis moi… voilà la justice ! » Après un entretien avec l’aumônier, prend un verre de rhum et une cigarette. Au greffe, reconnaît parmi les gens présent M. Rivière, l’époux de sa cousine, venu s’assurer que le corps de Duchemin ne sera pas remis aux médecins de la Faculté, et lui offrir le pardon au nom de toute sa famille. Revêtu de la tenue des parricides, ne comprend pas : « Pourquoi m’a-t-on couvert la tête d’un voile ? Je n’en ai pas besoin. » puis demande : « Où me conduit-on ? » Arrivé à quelques mètres de l’échafaud, descend du fourgon, puis attend la lecture de l’acte de condamnation pour être exécuté. Environ 200 personnes présentes autour de la guillotine. 07 juin 1909 22 septembre 1909 Mercredi,
6h, 6h03, 6h06 Valence
Drôme Louis Berruyer, Octave David, Urbain Célestin Liottard 46 ans, colporteur, contrebandier, 36 ans, colporteur, 36 ans, cordonnier. « Les Chauffeurs de la Drôme » : seul, Liottard assomme d’un coup de pierre le 05 novembre 1905 à Livron M.Vaneille, 80 ans, et lui fouille les poches sans rien trouver. Assomme d’un coup de bille de charrette Mlle Marie Juge, 76 ans, à Bourg-de-Péage le 22 septembre 1906, une fois encore pour rien. Tous ensemble, agressent M.Delaye, cultivateur, 81 ans, à Alixan, dans la nuit du 23 au 24 janvier 1907, et lui brûlent la plante des pieds pour lui faire avouer la cachette de ses biens, soit 40 francs. Le pauvre homme en mourra un an plus tard. Le 11 avril 1907, à Peyrins, Liottard et Berruyer assassinent Frédéric Tardy. A nouveau tous ensemble, torturent, battent à mort et étouffent M.Malbourret, 72 ans, dans la nuit du 05 au 06 mai 1907 à Bren pour lui voler 900 francs. Etranglent sur la route M.Girard, meunier, alors qu’il revient de la foire de Romans le 24 mai 1907, et lui volent 8.000 francs. Assomment à coups de bâton et étranglent aussi François et Julie Tortel, frère et soeur, 80 et 81 ans, demeurant à Chambois le 03 janvier 1908, et mettent le feu à la maison pour dissimuler leur crime (ce qu’ils réussissent, puisque jusqu’à leur arrestation, cette double mort passe pour accidentelle). En avril 1908, Liottard et Berruyer assassinent l’un de leurs complices, Romarin, à Chatuzange, en lui fracassant le crâne d’un coup de barre de fer et jettent le corps dans un puits profond de quarante mètres. Assassinent M.Dorier, 65 ans, et sa fille Noémie, 35 ans, le 11 avril 1908 à Alixan, qu’ils assomment à coups de canon de fusil. Leur complice Jean Lamarque, en fuite, est condamné à mort par contumace. Réveillé le premier à 5H30, Berruyer saute de son lit à peine lui a-t-on effleuré l’épaule. D’un signe de tête, dit n’avoir aucune déclaration à faire, puis rajoute : « J’ai commis des crimes, c’est vrai, je méritais les travaux forcés, mais pas la mort, c’est trop cher payé ! » Discute avec Me Pey, son avocat, puis va au greffe. Réveillé par le départ de son complice, Liottard s’est assis au bord du lit. « J’irai sans crainte. » Baisse la tête et rejoint Berruyer devant un autel pour la messe. David lui aussi est éveillé par la scène, et enfile un pantalon en voyant le procureur. Il ricane : « C’est bon, pas de boniments, je comprends de quoi il retourne ! » Se met à chanter une chanson paillarde, repousse l’aumônier, allume une cigarette et demande de quoi écrire à sa femme. Remet le message à Me Chabanon, puis se remet à chanter en allant au greffe. Une fois arrivé, il dit au procureur avec gouaille : « J’ai commis dix-huit crimes, vous en connaissez dix, il vous en reste encore huit à trouver, mais il faudra les trouver. Même après ma mort, je vous donnerai encore du travail. » Puis : « Il est bien entendu que c’est moi qui passe le dernier, n’est-ce pas ? Il ne faudrait pas me faire la blague, parce que j’y tiens ! » Le procureur le rassure en ce sens. « Comme cela, ça marche : je suis content ! » Berruyer sort le premier, la joue gonflée par sa dernière chique. Il voit le procureur et lui dit : « Monsieur le procureur, vous vous souviendrez… Mes enfants, mes enfants… » Malgré ce qui avait été convenu, David passe le premier, le procureur jugeant que Liottard fut un assassin plus actif que le chef des chauffeurs en personne. Barbu, cigarette au bec, David va à la guillotine en roulant les épaules : « Salut, salut ! Allons, à la butte ! » Il remarque l’aumônier : « Bon, bon, ça va bien, une autre fois… A cet été, sur la glace ! » Sur la bascule, crie : « Alllez-y ! Allez-y ! Bonjour la compa… » Liottard vient le dernier, grogne et frémit de peur en voyant la guillotine et se laisse basculer sans plus de réaction. 10 juillet 1909 06 novembre 1909 Samedi,
6h24 Saintes
Charente-Inférieure Camille Favre 24 ans, ouvrier agricole. Satyre assassin (viol et étouffement) de la petite Hélène Boisnard, 6 ans, le 04 juin 1909 à Thaims. Réveillé à 6h. Dort profondément, persuadé de ne pas être exécuté. Le procureur lui tape sur l’épaule plusieurs fois. Yeux remplis de terreur, regarde les officiels présents. « Ah… je ne croyais pas… Je ne m’attendais pas ! » S’accoude sur son lit et se met à pleurer. Son avocat, Me Peraut, s’excusant de lui avoir menti sur sa grâce, il lui dit : « Oh, je vous pardonne, monsieur, et je vous remercie de tout ce que vous avez fait pour moi, car vous êtes bon et vous vous êtes dévoué pour un misérable ! » Refuse d’assister à l’office religieux, prétextant qu’il n’aura « peut-être pas la force d’aller jusqu’au bout de la messe », mais demande à parler à l’aumônier. En pleurant, se confesse. N’a rien à dire au juge, mais fait mention de remords profonds. Fume la cigarette offerte par son défenseur, ainsi qu’un café très chaud arrosé d’eau-de-vie, puis se rend au greffe en tenant la main de Me Péraut. Après la toilette, c’est d’un pas assez ferme qu’il se rend vers l’échafaud, dressé sur la gauche de la porte de la prison. En voyant la machine, ses yeux s’écarquillent d’horreur. Le prêtre l’embrasse, lui dit « Courage ! » avant de s’écarter pour que Favre soit basculé. 18 août 1909 01 décembre 1909 Mercredi,
6h51 Montbrison
Loire Henri Riboulet 22 ans, journalier. Double assassinat à coups de fusil du couple Lebouré à Saint-Germain-Lespinasse le 18 avril 1909 pour voler. Réveillé à 5h50. Le procureur Palix doit le secouer un peu : paraît ne pas comprendre, et se laisse habiller par ses gardiens. Boit un verre de rhum d’un trait, ce qui le ramène de son engourdissement. Suit l’aumônier, entend la messe, et sans dire un mot, va au greffe pour la toilette. Monte dans le fourgon qui le conduit place Saint-Jean, à 500 mètres de la prison, en compagnie de l’aumônier et de son avocat, Me Chanteret. Arrivé, le prêtre tente de masquer la guillotine avec son crucifix, mais la chose est inutile. Un jet de sang éclabousse le surplis de l’aumônier. 14 septembre 1909 06 janvier 1910 Jeudi,
7h17 Montauban
Tarn-et-Garonne Jean-Alexandre Hébrard 37 ans, marchand de jouets. Passa 4 ans à Clairvaux pour avoir étranglé une prostituée de Perpignan. Le 20 mai 1909, à la foire de Montpezat, enlève, viole et étrangle la petite Marie Lacam, 6 ans. 131-35 Réveillé à 6h35. Au bruit de la porte, se soulève sur son lit, et se frotte les yeux. En apprenant le rejet de sa grâce, proteste de son innocence avant de s’habiller. A son avocat, Me Besse, il prie de s’occuper de son fils de 11 ans et de l’ »arracher aux mauvais conseils de sa belle-mère. » Mécréant, accepte malgré tout d’entendre la messe. Toilette rapide. Arrive place Montauriol, à 500 mètres de la prison. Foule dense : un photographe sur un toit est prié de ranger son appareil sans attendre. Devant la bascule, l’aumônier embrasse le condamné. 28 septembre 1909 24 mai 1910 Mardi,
3h55 Sisteron
Basses-Alpes François « Franzoni » Olive 35 ans, cultivateur. Chef des « Etrangleurs des Alpes » (Blanc, Gouzin et Trouin). Le 15 juin 1909, ils étranglent le forain Dusserre pour le voler et jettent le corps dans la Durance. En été, ils font le même sort à un chanteur des rues, M.Seguin. Seul « Franzoni » fut condamné à mort, les autres finirent au bagne. Montage de la machine devant la prison, place de l’Eglise, sous une averse continue. Réveil à 3h15. Tremble comme une feuille. Quand on le détache, fond en larmes : « Mon Dieu ! Ma mère ! Ma pauvre mère ! Si seulement c’était moi le plus coupable ! » Il s’écroule sur le lit. Ne parvient même pas à dire non quand on lui propose du rhum. Entend la messe et communie : mâchoire si serrée que l’aumônier – le père Féraud, qui avait fait faire sa première communion à Olive – a du mal à lui faire prendre l’Eucharistie. Toilette rapide, exécution complètement silencieuse. Foule imposante. Unique venue de la guillotine à Sisteron. 17 mars 1910 27 mai 1910 Vendredi,
3h42 Orléans
Loiret Sylvain Laroche 19 ans, ouvrier agricole. Renvoyé par les Guitton, propriétaires de la ferme des Petites-Brosses à Coullons, le 1er novembre 1909, viole et étrangle Marie Guitton, 16 ans, la fille aînée de ses anciens patrons, le 10 novembre 1909. Réveillé à 3h. Dort à poings fermés. « Tachez d’avoir du courage. » « On tâchera d’en avoir. » Il discute avec l’aumônier, et promet à nouveau qu’il sera courageux, ce qui ne l’empêche pas de trembler durant la messe. Au greffe, pendant la toilette, le gardien-chef lui donne un verre de rhum. Laroche ne dit plus rien jusqu’à la guillotine, place Bel-Air. En voyant les bois de justice, il a un geste de recul, puis crie : « Au revoir pour toujours ! » 27 janvier 1910 01 juillet 1910 Vendredi,
3h47 Paris Jean-Jacques Liabeuf 24 ans, ouvrier cordonnier. Condamné à tort pour proxénétisme – sa compagne était une prostituée -, il éprouve une vive rancoeur face à l’injustice dont il est victime, et rompt l’interdiction de séjour qui accompagne son incarcération. Surpris en flagrant délit d’ivresse agressive rue Aubry-le-Boucher, armé d’un couperet, d’un revolver et de brassards de cuir hérissés de clous, abat pendant son arrestation l’agent de police Deray, blesse d’un coup de tranchet à la gorge l’agent Fournès, et blesse à coups de balles l’agent Vaudouin et Doulet, le 08 janvier 1910. Réveil à 3 heures. « Je vous attendais, mais mon exécution ne prouvera pas que j’étais un souteneur. » Promet d’être courageux : « J’aurai autant de courage pour marcher vers la mort que j’en ai eu pour faire ce que j’ai fait. » Ecrit une dizaine de minutes à sa mère, refuse poliment les aides de la religion, puis mange une tablette de chocolat offerte par son avocat Me Leduc avant de repousser l’alcool pour accepter un verre d’eau. Donne une photographie de sa mère et de son frère à l’avocat, puis se laisse faire pour la toilette. « Inutile de me serrer, je n’ai pas l’intention de fuir. » Un peu mécontent lors de la découpe du col : « Ce qu’il me fait, comme échancrure, Deibler ! » Devant l’échafaud, il crie à deux reprises : « Mon exécution ne prouvera pas que j’étais un souteneur ! » Puis, cédant à la peur à l’ultime seconde, pousse un hurlement vite interrompu par le couperet. 04 mai 1910 23 septembre 1910 Vendredi,
5h12 Remiremont
Vosges Séraphin Vançon 24 ans, ouvrier agricole. Tente de tuer deux vieillards à Remiremont en 1909, puis assassine aux alentours de Remiremont le maquignon Félicien Gavoille, 42 ans, de quatre coups de hache le 18 janvier 1910 pour lui voler près de 4.000 francs. Frappé de stupeur au réveil. « Du courage, du courage, j’en aurai… » Se raidit et ne dit plus un mot. Se laisse faire pour tout : habillage, messe, communion, toilette. Boit un verre de vin. Arrive devant la guillotine, dressée à l’entrée de la prison, un paletot noir sur les épaules. Un gamin, grimpé avec agileté sur le mur de la prison, commente la scène. Vançon cherche la guillotine en étendant le cou et en la regardant bien en face. Protestations du public obligé de rester 300 mètres plus loin, et qui aurait souhaité que l’exécution ait lieu sur une grande place comme pour Zuckermeyer en 1899. 10 juin 1910 24 septembre 1910 Samedi,
4h50 Saint-Dié
Vosges Adrien Pierrel PARRICIDE. 52 ans, cultivateur à Taintrux. Ivrogne et violent, battait sa femme : reconnu dangereux après une correction plus rude que de coutume. Tua à coups de pilon de bois le 1er février 1910 sa mère, Marie-Anne, 82 ans, pour lui voler 540 francs. Réveillé dès minuit par le bruit des clôtures qu’on dressait à l’extérieur pour tenir la foule à distance. Demandait ce qui se passait tout en le sachant pertinemment. Ses gardiens le rassurent en vain : il quitte sa cellule, va dans la courette en fumant une pipe et écoute les bruits extérieurs. Les officiels le trouvent debout, devant sa couchette, tremblant et mort d’angoisse : se laisse tomber sur son lit, désespéré. Le docteur présent doit lui faire avaler un révulsif. Pierrel n’entend rien, il pleure et ne cesse de gémir : « Innocent ! Pas faute ! Pardon ! Oh ! Pas faute ! Innocent ! Pas coupable !  » S’évanouit pendant la toilette, quand on découpe son col avec des ciseaux. Pour pallier à un arrêt cardiaque potentiel, le docteur lui administre deux piqûres de cocaïne. A cause de son état, on s’abstient de lui faire endosser la tenue des parricides. On le porte dans le fourgon, qui va à soixante mètres de là, à l’entrée du Parc (la porte de la prison, initialement choisie pour l’exécution, aurait été trop « visible » pour la foule). Soulevé et porté par les aides sur la bascule. Meurt une seconde avant la chute du couperet. Un jet de sang atteint un gendarme au visage. 09 juin 1910 29 septembre 1910 Jeudi,
5h14 Rodez
Aveyron Jean Terry 28 ans, mineur à Gages. Satyre assassin d’Adrienne Pons, 16 ans, élève à l’Ecole Normale, qu’il étrangla dans les bois de Canabols le 18 avril 1910. Au réveil, surpris. Calme, s’habille seul. « Donnez-moi mon gilet, je pourrais prendre froid, et je veux l’emporter. » Parle avec Me Colomb, puis à l’aumônier. Entend la messe, communie. Sourit à ses gardiens. En traversant la cour pour aller au greffe, il crie : « A vos rangs » au service d’ordre. Au greffe, écrit à sa mère : « Ma chère mère, je t’écris au dernier moment pour te dire de ne pas te faire de mauvais sang. Je serai courageux jusqu’à la fin. Embrasse pour moi Louise M. Embrasse bien mon bébé qui est là-bas, ainsi que les frères et les soeurs. J’ai demandé pardon de mes fautes à Dieu. » Boit un verre de rhum sucré, et porte un toast : « A votre santé, messieurs ! » Fume une cigarette, salue le directeur de la prison, et demande au procureur que ses gardiens, qui ont toujours été bons pour lui, l’accompagnent jusqu’à l’échafaud. Le procureur accepte, à sa grande joie. En voyant Anatole Deibler signer le registre d’écrou, il remarque : « Il a un beau bouc, cet homme-là ! » Puis il rajoute : « Je vais mourir. Il faut bien mourir un jour ; peut-être mourrez-vous avant huit jours, avant un mois, chacun son tour… La guillotine est à Rodez, que voulez-vous, on ne voit pas tous les jours une machine comme ça ! » IL se retourne vers son avocat et lui dit : « Je vous serrerai la cuillère devant l’échafaud ! » Calme et ferme, est « toiletté » puis grimpe dans le fourgon. Arrivé place du Palais-de-Justice, regarde la foule et dit : « Salut ! Où sont les gardiens ? » Sans lui répondre, les aides le poussent sur la machine. 22 juin 1910 30 novembre 1910 Mercredi,
7h Le Mans
Sarthe Joseph Valentin Doilin 33 ans, charretier. Le 25 mars 1910, tua à Mézeray la Veuve Besland, 77 ans, rentière, avec la complicité de son frère Frédéric, condamné à perpétuité. Réveillé bien avant l’heure. Entrée des officiels à 6h. Doilin est couché, mains derrière la tête et somnole. Quand le procureur lui annonce la nouvelle, il balbutie : « Alors, je vais avoir le cou coupé… » Frémit de peur. Les gardiens ont de la peine à l’habiller et à le chausser. Entend volontiers la messe : cela le calme. Se remet à trembler au greffe, durant la toilette. Boit du café largement arrosé d’eau-de-vie. Refuse les cigarettes, préfère fumer sa pipe bourrée par l’aumônier. Parle de sa femme incarcérée à Rennes avec tendresse, se rappelle de son fils préféré et demande qu’on lui laisse six chaises et sa montre d’argent. Rend la pipe à l’aumônier pour que ce dernier la replace dans son cercueil et dit : « Ah, si je n’avais pas suivi mon frère ! J’avais toujours pensé qu’un jour j’irais à la machine. Jamais je n’ai eu de chance dans la vie. » Va à l’échafaud sans dire un mot. Son avocat, Me Georges Bouvier, se plaint de ne pas avoir été reçu à l’Elysée pour plaider la cause de son client. On apprendra qu’il a fait parvenir le dossier Doilin au président Fallières, mais sans solliciter précisément un entretien dans la lettre qui l’accompagnait, et que le chef de l’Etat prit sa décision en se basant sur le dossier en question. 05 octobre 1910 11 janvier 1911 Mercredi,
7h27 Lille
Nord Antoine Favier 26 ans, représentant en vins et spiritueux. Assassine à coups de couteau, de marteau, de ciseaux et de grattoir le garçon de recettes de la Banque de France, Cornil Thain, le 31 janvier 1910 à Lille pour lui voler 2.738 francs. Réveillé à 6h20. Le procureur lui annonce la nouvelle, puis lui demande s’il a entendu. « Oui, j’ai bien compris. » S’habille seul. Dit à un gardien : « Vous saviez bien que c’était pour aujourd’hui et vous me l’avez caché ! » A un autre : « J’en avais le pressentiment. » Remercie Me Dubron en lui prenant les mains, et le rassure : « Soyez sans crainte, je mourrai bravement ! » Lui donne un paquet de lettres et une médaille à l’attention de sa femme. Entend la messe au parloir des familles. Digne jusqu’au bout, descend les marches de la prison, située place du Palais de Justice, regarde la foule et se laisse pousser en avant. Au premier rang, le père et le frère de sa victime. 09 novembre 1910 25 mars 1911 Samedi,
5h30 Nantes
Loire-Inférieure Jules Clément Grand 26 ans, soldat déserteur. Grand fut condamné à 8 mois de prison à Aix-en-Provence en 1902. En manoeuvres à Puget-Théniers, en 1909, commet des vols, et surpris en pleine action, tue le sapeur Féminier et parvient à s’enfuir. Après quelques jours passés dans la région de Nice, il part vers l’Ouest et remonte le long de l’Atlantique, assistant notamment à l’exécution de Camille Favre. Le 27 décembre 1909, viole et tue la bergère Clémentine Foucher, 15 ans, au Pouliguen. Jusqu’à son arrestation en Vendée, le 14 janvier 1910, il commet entre la presqu’île de Guérande et Nantes 22 crimes et délits divers, violant Mlle Fresneau, 28 ans, directrice d’école à Savenay, commettant deux tentatives d’assassinat au Temple et à Orvault, des vols et des cambriolages. Jugé par le tribunal militaire de Marseille, il est condamné à mort et à la dégradation militaire. Puis aux assises de Nice, le 04 août 1910, condamné aux travaux forcés à perpétuité pour tentative de meurtre sur une jeune cabaretière, Valentine Giraud, qu’il poignarda dans un café de Peymeinade le 04 octobre 1909. Réveil à 5h. Malgré le carnaval et les cris qui ont résonné place Lafayette toute la nuit, Grand dort profondément. Sans rien dire, montre qu’il a compris. On lui retire la camisole avant qu’il ne refuse les secours de la religion. A Me Radot de St-Guedas qui lui demande s’il a un message à transmettre à ses proches, répond : « Inutile. J’ai assez déshonoré ma famille. » Calme, accepte une cigarette et une tasse de café. S’étonne : « Je croyais bien, cependant, subir la loi martiale » (être fusillé en raison de sa condamnation à mort devant un conseil de guerre). Paraît sur le seuil de la prison pâle mais courageux, exécution rapide sans incidents. 24 mai 1910, 17 décembre 1910 21 juillet 1911 Vendredi,
3h20 Vitry-le-François
Marne Henri Deviot 30 ans, manoeuvre. Assassine à coups de couteau la boulangère Antoinette Ketter, 18 ans, le 11 janvier 1911 à Chaussée sur Marne pour la dévaliser. Réveillé à 3 heures. Dormait bien. Aucune panique. Remercie son avocat, Me Dupont-Nouvion, puis le prie de veiller sur ses trois enfants. Entend la messe. Pâle mais courageux, franchit la porte de la prison. La guillotine est montée dans une rue étroite : seuls les autorisés et la presse peuvent y assister. Pousse un cri rauque quand il est poussé sur la bascule. 11 mai 1911 22 juillet 1911 Samedi,
3h16 Saint-Mihiel
Meuse Charles-Marie Philippo 24 ans, coureur cycliste et ouvrier boulanger. Le 23 juin 1909, tue en l’assommant à Saint-Gérant-le-Puy (Allier) son ancienne patronne, Mme Rochot, boulangère, pour la voler. Le 17 octobre 1909, à Laheycourt (Meuse), assassine avec un coutre de charrue Mme Veuve Marie-Adeline Bernard, 75 ans, boulangère. Arrêté, condamné en premier dans la Meuse, puis uniquement aux frais du procès dans l’Allier, le 1er février 1911. Le ministère public fait appel, et Philippo est rejugé et condamné à mort dans le Puy-de-Dôme. Pendant son séjour à la prison de Riom, tente de tuer un gardien en l’assommant avec le couvercle du poêle de sa cellule. Réveillé à 3 heures. N’a pas fermé l’oeil de la nuit, s’y attendait. Horrifié, ne dit pas un mot, et refuse d’un geste rhum et cigarette. Quand on lui coupe les cheveux, dit : »C’est malheureux de me couper le cou aujourd’hui. On aurait bien pu le faire il y a un an » (allusion au délai exceptionnellement long entre sa première condamnation à mort et son supplice). A peine plus d’un quart d’heure après le réveil, franchit le seuil de la prison. Exécution très rapide. 05 juillet 1910, 31 mai 1911 09 août 1911 Mercredi,
5h Toulon
Var Allain Marie Guéguen
et
Marcel Edgard Le Maréchal 21 ans, matelot mécanicien de 1e classe et 20 ans, matelot chauffeur de 3e classe. Tuèrent de 43 coups de couteau le 12 janvier 1911 à Ajaccio Pierre-Marie Carrel, matelot, leur camarade, pour le voler. 14 mars 1911, 11 mai 1911 06 septembre 1911 Mercredi,
4h30 Melun
Seine-et-Marne Lucien Pajot 25 ans, souteneur. Blessa sa maîtresse et ancienne gagneuse Marie Ambroise, 17 ans, le 22 mars 1911 à Melun. Mobile : vengeance. Marie refusait de se prostituer pour lui, et l’avait dénoncé pour un vol qui lui avait valu de passer près de trois mois en prison. Il avait été libéré le matin-même du crime. Elle mourut après 13 jours d’agonie. Réveillé à 3h30. Dort bien, s’est couché à minuit après avoir passé la veille à jouer aux cartes et à chanter. Ne comprend pas pourquoi on le secoue, fait mine de se rendormir. Informé, ne peut répondre que « oui » aux questions du procureur, d’une voix presque inaudible. Accepte les secours de la religion, s’habille, se confesse et entend la messe. S’entretient quelques instants avec son avocat, puis accepte le verre de rhum que lui tend un gardien, remerciant ce dernier après avoir bu. Refuse la cigarette. Toilette rapide. La machine, montée à un mètre de la porte de la prison, elle-même située au bout d’une impasse cernée de hauts murs, rend l’exécution peu accessible aux spectateurs. Mouvement de recul de Pajot, vite réprimé. Aucun incident. 19 juillet 1911 04 octobre 1911 Mercredi,
5h25 Nancy
Meurthe-et-Moselle Lucien-Félix Alexandre 20 ans, domestique de ferme. Satyre assassin de Louise Krier, 4 ans, qu’il tua à coups de bûche après l’avoir violée à Brainville le 18 juin 1911. Réveil à 5 heures, hébété. Se passe les mains sur les yeux, ne dit pas un mot. Refuse de voir l’aumônier. Boit un verre de rhum et fume la moitié d’une cigarette. Impassible, va à l’échafaud à pas presque rapides. Foule calme : quelques cris après la chute du couperet. Pluie incessante du montage jusqu’à l’exécution. 04 août 1911 10 octobre 1911 Mardi,
5h19 Toulon
Var Eduardo Caturegli 22 ans, Italien. Envoyé en prison pour vol, tenant la police pour responsable, tira sur un groupe de policiers à la Seyne-sur-Mer, abattant de trois balles le secrétaire de police M. Noël, le 10 avril 1911. Réveil à 4h45. « Ils ne m’ont pas gracié, ces bâtards ! C’est tout de même malheureux qu’on n’ait pas eu de pitié pour moi, car je suis innocent ! » S’habille, se chausse, puis embrasse son avocat, le gardien et l’abbé Sicre. A ce dernier qui lui propose les secours de la religion, répond : « Parfaitement ! Et je veux encore entendre la messe ! » La guillotine est montée devant la porte de la prison, au bout de l’impasse Baudin. L’abbé Sicre tente, de son crucifix, de masquer la guillotine au condamné, mais ce dernier le repousse. Il voit alors dans le public proche les agents de police de la Seyne, ses victimes rescapées : « Sias countent, bandits ! » grogne-t-il. Pâle, les yeux haineux, se laisse basculer aussitôt. 24 juillet 1911 08 décembre 1911 Vendredi,
7h05 Le Mans
Sarthe Henri Jean Eugène Hamet PARRICIDE. 27 ans, cultivateur. Attira son père Hippolyte, employé principal à la gare des Batignolles de Paris, dans un piège à La Feuillère le 04 mars 1911 en lui envoyant un télégramme dans lequel il se disait mourant. A l’arrivée de son père, il l’abattit de trois balles de revolver dans la tête. Il fit croire à un suicide, mais espérait toucher l’héritage de 50.000 francs. Réveil à 6h30. Dort profondément, s’habille aussitôt. Donne au procureur son testament dans lequel il lègue ses biens aux hospices d’Alençon. Entend la messe et communie à la chapelle. Au greffe, boit un verre de vin blanc et fume une cigarette. Demande aux gardiens de distribuer le peu d’argent qu’il conservait à ses amis détenus. Comme on lui dit que c’est impossible, ne dit plus un mot. Conduit à l’échafaud en tenue parricide, arrivé devant la machine, demande à la foule de lui pardonner son crime. Mais quand les exécuteurs s’emparent de lui pour l’étendre sur la bascule, se replie sur lui-même et les exécuteurs doivent user de force pour lui passer la tête dans la lunette. Le photographe manque avoir les doigts sectionnés par la chute du couperet, et Deibler déclarera devant témoins que jamais il n’avait vu de condamné montrer une telle résistance. 29 septembre 1911 09 janvier 1912 Mardi,
7h20 Saint-Brieuc
Côtes-du-Nord Alphonse-Jules Boursier 22 ans, journalier. Satyre assassin de Jeanne Derrien, 14 ans, qu’il viola et étrangla à Bégard le 18 août 1911. Réveillé à 6h10. Dormait bien, le procureur doit lui secouer l’épaule. Promet d’avoir du courage, mais se dit innocent. S’habille, se lave et se peigne. Se confesse et entend la messe. Remet deux lettres au procureur, dont une contient une photo de lui pour sa soeur, et l’autre une pièce en vers de sa composition pour sa mère. Dit aux aides : « Ne me serrez pas si fort, ce n’est pas la peine de m’attacher. » En franchissant la porte, constate l’absence – ou presque – de spectateurs (ils sont une quarantaine, la foule ayant été repoussée aux extrémités de la rue) : « C’est étonnant qu’il n’y ait pas plus de monde que cela. » Se débat un peu quand on le pousse sur la bascule. 01 novembre 1911 20 janvier 1912 Samedi,
6h55 Paris Arthur Renard 24 ans, tueur de bestiaux à la Villette. Suite à un accrochage entre le fiacre qui le transportait et une automobile au carrefour Réaumur-Sébastopol, le 05 août 1910, assomme d’un coup de poing le chauffeur de la voiture qui cherchait querelle. Les agents Letiec et Richard interviennent alors et mentionnent un passage obligatoire au commissariat. Renard réplique en tirant trois coups de revolver sur Richard, qu’il blesse très grièvement, manque de peu l’agent Le Tiec. Cependant, M.Pelletier, agent de police également et en congé – donc en tenue civile – se promenait sur le boulevard et décida d’intervenir. Il fut abattu d’une balle dans la tête. Trois autres gardiens de la paix en patrouille furent nécessaires pour arrêter le colosse meurtrier, libéré trois semaines plus tôt de Fresnes après une peine pour coups et blessures. Déjà réveillé à l’arrivée des officiels à 6h30, inquiet depuis plusieurs jours. Assis sur sa couchette, discutait avec deux co-détenus qui lui servent de compagnons. Devient pâle et se redresse, tandis que ses camarades s’enfuient, effrayés, et seront retrouvés sous un préau de promenade, tremblants de peur. Accablé, doit s’asseoir, dit au substitut qu’il saura marcher au supplice sans faiblir, mais dit : « Je suis innocent de ma volonté ! Voilà où mène la boisson ! Mais on n’aurait pas dû m’exécuter pour ça, parce qu’il y en a d’autres qui en ont fait plus que moi ! ». S’adresse à M.Desmoulins, sculpteur et visiteur exceptionnel des condamnés à mort : « Vous voyez ! Voilà où l’alcool vous mène ! Je vous prie d’écrire à ma mère et de lui dire que je ne suis pas fautif du crime pour lequel on me guillotine ! J’étais ivre ! » Se rend dans une petite chapelle dressée près de la cellule, soutenu par Desmoulins, entend la messe et parle de sa famille : « Je demande bien pardon à ma mère ». Pendant la toilette, reste muet, accepte un verre de rhum offert par le gardien, et ne boit qu’une gorgée. Boulevard Arago, descend seul du fourgon, ne prononce plus une parole. Embrasse Desmoulins et l’aumônier, puis se dirige sans soutien vers la bascule. 27 novembre 1911 03 février 1912 Samedi,
6h44 Marseille
Bouches-du-Rhône Giuseppe Rosa 59 ans, vidangeur. Satyre assassin de Marguerite Carrozzo, 13 ans, le 10 avril 1911 à La Ciotat. Il tenta de violer puis trancha la gorge de la fillette avec un couteau car il s’était brouillé avec M.Carrozzo pour une cage à lapins. Guillotine montée à l’entrée de la prison Chave pour la première fois. Réveil à 6h13. Semble ne rien comprendre. L’abbé Charreyre vient lui parler cinq minutes. Ne comprend toujours pas : « Alors quoi ? Ca va mal ? » Demande à aller aux toilettes, mais on le conduit directement à la rotonde. La messe dure 17 minutes, Rosa communie. Ce n’est que quand le prêtre lui administre l’extrême-onction qu’il comprend enfin l’imminence de sa mort. La toilette a lieu dans le bureau du gardien-chef. Rosa manifeste une seconde fois le besoin d’uriner. Refuse une cigarette, mais demande à boire : il avale un verre de rhum goûlument pendant qu’on lui coupe le col de la chemise. Sur le seuil, garde la tête obstinément tournée pour ne pas voir la guillotine. 11 novembre 1911 28 mars 1912 Jeudi,
5h15, 5h18 Le Mans
Sarthe Benjamin Eugène Tisseau
et
Henri Fernand Nolot Tisseau, 22 ans, et Nolot, 20 ans. Soldats au 117e régiment d’infanterie de ligne casernés à la Flèche. Tuèrent le 8 décembre 1910, de Mme Marie Lusseau, née Masson, à la ferme des Montaudières, près de La Flèche à coups de bâton très pointu. Motif du crime : vol pour rembourser des dettes et ne volèrent que 16 francs. Condamnés par le Conseil de guerre du IVe Corps. Exécutés place du Conseil de Guerre, rue de l’Arsenal. Réveillés à 4h30. Tisseau ouvre de grands yeux, puis s’habille en disant : « La préméditation n’est pas établie. Nous n’avions pas prémédité le crime. Je serai courageux. » A sa demande, on le laisse à sa demande avec l’abbé Grandin. Nolot, lui aussi, dort profondément. A Me Moulière, il dit : « Parfaitement, je saurai mourir. » Après avoir parlé avec l’abbé DuFragne, il discute avec l’abbé Grandin. Mains liées dans le dos, ils sont conduits dans une chapelle de fortune, au parloir des avocats. Après une messe de 25 minutes, ils reçoivent la communion et se mettent à pleurer. Ramenés au corps de garde pour la toilette. On leur offre un verre de café avec un peu de cognac et une cigarette. Nolot ayant les mains attachées, il dit en souriant : « Il faudrait vraiment être acrobate ! » Dociles, se laissent toiletter, tendent les jambes et les mains pour qu’on les attache. Tisseau part le premier : en partant, il dit à son complice : « Surtout, aie du courage ! » Cigarette aux lèvres, il descend les marches du perron du conseil de guerre. Il embrasse l’aumônier puis dit à son défenseur : « Monsieur Moutet, au revoir et merci. Je suis courageux. » Nolot le suit quelques instants plus tard et dit à l’abbé qui l’accompagne : « Dites à ma mère que mes dernières pensées sont pour elle !!! Je serai courageux. » L’abbé l’embrasse avant qu’on le pousse sur la bascule. Cris poussés par la foule, très nombreuse, rue des Marais. Durée de la double exécution : 6 mn 50. 18 décembre 1911 29 mars 1912 Vendredi,
5h25 Laval
Mayenne Paul Bourges 26 ans, garçon de ferme. Etrangle la veuve Mariette Billet, 73 ans, à Madré le 23 novembre 1911 et vole 90 francs. Le corps est retrouvé six jours plus tard, le visage et le cou mangé par un des chats de la maison. Réveillé à 3h30. Ne semble pas comprendre ce qui se passe. S’habille seul, muet, puis assiste à la messe. Après cela, son avocat, Me Lebreton, lui propose une cigarette : « J’peux pas, j’ai la lèvre écorchée, ça me ferait mal. » Il prend un café et un verre de rhum. Me Lebreton lui demande s’il a une photographie à laisser à sa soeur comme souvenir, il répond : « Je ne sais pas, mais fouillez dans mes affaires, vous trouverez peut-être… » Après la toilette, il n’ose pas regarder la guillotine. Il embrasse le crucifix avant d’être basculé. 26 janvier 1912 04 mai 1912 Samedi,
4h27 Coutances
Manche Pierre-Auguste « Coq-Gris » Polydor 47 ans, journalier, chemineau. Egorge à Digulleville la veuve Aubrais, 92 ans, le 21 janvier 1912 pour voler huit oeufs qu’il avale avant de partir. A l’entrée des officiels, à 3h30, ne dort pas, et ne répond rien. Habillé par les gardiens. A la chapelle, entend la messe, communie. Au greffe, son avocat lui fait boire deux verres de rhum. Pâle, soutenu par les aides, il est conduit jusqu’à la guillotine, dressée à six mètres de la porte ; le prêtre tente de lui cacher de son crucifix. Exécution rapide. 09 mars 1912 24 mai 1912 Vendredi,
4h15 Amiens
Somme Alphonse Auffray Soldat au 9e régiment de cuirassiers. Tente de tuer de trois coups de couteau dans le ventre le 22 octobre 1911 à Noyon son supérieur, le maréchal des logis Marcel Chéradame, qui lui avait ordonné de retourner à la caserne sous prétexte que sa tenue n’était pas correcte. Condamné par le Conseil de Guerre du 2e Corps. Son complice Justin Moreau est condamné à perpétuité (sa dégradation a lieu quelques instants avant l’exécution d’Auffray). Pas du tout réveillé par l’entrée des officiels à 3h15. Le commissaire du gouvernement doit le secouer. Auffray ne comprend pas tout de suite, et met quelques minutes pour réaliser. « C’est tout de même cher ! Quel malheur ! Enfin, puisqu’il le faut, allons-y ! » Le commandant Brisorgueil lui dit d’avoir du courage : « Vous êtes Breton comme moi. Les Bretons ont la réputation d’être courageux. Faites-le voir. » S’entretient avec son avocat, Me Renard, demande du papier et écrit une lettre à ses parents. Accepte d’entendre la messe et de communier. Demande des obsèques religieuses, et dit au prêtre Jolly : « Ecrivez à mes vieux, et dites-leur que je suis mort courageusement, et en bon chrétien ». En allant à la chapelle, au premier étage, passe devant la cellule de son complice : « Au revoir, Moreau ! » Après une demi-heure de prière, boit une tasse de café (refusée plus tôt en ces termes : « Je le prendrai après la messe »), fume une cigarette, puis est attaché. Va au poteau en refusant d’être soutenu, mais doit se résoudre à avoir les yeux bandés. « C’est inutile ! », proteste-t-il. Les douze balles tirées l’atteignent toutes dans la tête, mais le coup de grâce est quand même tiré. Fusillé à la citadelle. 22 février 1912 31 mai 1912 Vendredi,
3h30 Saint-Pol-sur-Ternoise
Pas-de-Calais Robert Duperrat 20 ans, ouvrier agricole. Contrefait, bossu, louche. Assassine à coups de hache, le 14 février 1912, à Rollancourt, la veuve Sidonie Thibaut, née Bétourné, 73 ans, mère de son patron, pour la violer, et son petit-fils Rémi, âgé de 4 mois, qui s’était mis à pleurer, après l’avoir bercé un peu. Difficulté à monter la machine, rue de la prison en pente. Réveillé à 2h50, dormait profondément, couché sur le ventre. On doit le secouer pour le réveiller. Ne dit pas un mot, reçoit la nouvelle avec indifférence. Au juge qui lui dit d’avoir du courage, il répond : « Oui, monsieur ! » avant de serrer la main de son avocat. S’habille, se confesse et entend la messe. Pendant l’office, le chant d’un coq rompt le silence et saisi, le condamné tremble et pleure. Au greffe, boit un verre de rhum, refuse le second ainsi que la cigarette qu’on lui propose. Exécution rapide. 29 mars 1912 05 juin 1912 Mercredi,
3h30 Riom
Puy-de-Dôme Guillaume Courmier 37 ans, braconnier/pêcheur au Pont-des-Goules, près de Vic-le-Comte. Plusieurs fois condamné, mettait ses déboires sur le dos des autres habitants du hameau. Le 14 décembre 1911, tue ses voisins, le couple François et Nathalie Mandonnet, à coups de revolver (trois balles dans le corps pour lui, deux dans le visage pour elle) avant d’égorger le corps d’Antoine au rasoir. Après être allé boire à l’auberge Blanchon, va à l’autre auberge, celle des Verdier, et abat Marie, la mère de famille, d’un coup de fusil, puis le fils Emile, et blesse grièvement de deux coups de fusil le père Verdier, qui mourra trois jours plus tard. Arrêté le lendemain. Réveillé à 3h. Pas d’émotion. Avait promis d’être courageux : tient parole. Remercie ses gardiens et Me Robin, puis demande à entendre la messe. Communie, se confesse. Au parloir, où se déroule la toilette, demande une cigarette, dont il tire quelques bouffées, et un grand verre de rhum bu cul-sec. A la question de son avocat sur ses dernières déclarations, dit juste : « Je regrette seulement d’être guillotiné à cause de ma famille. Sans cela… » Promet de nouveau à son défenseur d’être courageux et le remercie. Redresse la poitrine en arrivant devant la machine. 03 mai 1912 08 juillet 1912 Lundi,
3h22 Auxerre
Yonne Paul Aubert 25 ans, vigneron. En pleine nature, tua à coups de pioche et tenta de violer post-mortem Mlle Berthe Johannard, institutrice, 29 ans, à Vermenton le 23 août 1911. Interrompu par l’arrivée de deux autres personnes sur place. Réveillé à 2h45. Secoué pour être réveillé, aucune réaction. A M.Philippon, le procureur, qui l’exhorte au courage : « J’en aurai. » S’habille, boit un cordial, entend la messe et communie. Se dirige d’un pas ferme vers la guillotine. Foule immense. 03 mai 1912 22 octobre 1912 Mardi,
5h55 Paris Jean-Baptiste Bour 24 ans, décolleteur, ancien « Bat d’Af ». Le 14 mai 1912, assassine Mme Schmidt lors d’un cambriolage, rue de Charonne. Réveil à 5h, dort bien. Crie « Vive l’anarchie ! » quand on l’informe de la décision présidentielle. Se laisse habiller par les gardiens, puis rabroue le père Geispitz : « Foutez-moi la paix ! Vive l’anarchie ! » Le crie une fois encore en traversant les couloirs. Au greffe, boit un verre de cognac et laisse les exécuteurs faire la toilette. En descendant du fourgon, crache sa cigarette et crie : « Adieu les amis ! Vive l’anarchie ! » 23 août 1912 22 janvier 1913 Mercredi,
7h05 Nancy
Meurthe-et-Moselle Georges Gérard Marinier, 37 ans. Satyre assassin de la petite Lucienne Schumacher, 7 ans, le 20 mai 1912, à Pompey qu’il noie dans la Moselle. Au réveil, à 6h30, dit : »C’est bien. » Reste cinq minutes en tête à tête avec l’aumônier, puis avec son avocat : « Je vous remercie beaucoup de ce que vous avez fait pour moi. Je sais que ce n’est pas de votre faute si vous n’avez pas réussi. Je vous prie d’écrire à ma famille, à ma femme et à mon frère, en leur disant que je regrette la honte que je leur ai causée. Je leur en demande pardon. » A la chapelle, entend la messe. Se plaint d’avoir un peu froid, et boit un demi-verre de rhum. En entendant la foule, il a un sursaut, et Me Leblanc le prie à nouveau de faire preuve de courage. Tout en tortillant sa moustache, il dit : « C’est bon, j’en aurai. » A la salle, pendant la toilette, son avocat lui met une cigarette entre les lèvres, et quand il a fini de fumer, lui propose encore du rhum. « Je veux bien. » A l’entrée de la prison, apparaît très pâle, marchant assez rapidement. Garde sa cigarette entre les dents jusqu’au bout. Les parents de l’enfant assistent à l’exécution. 16 novembre 1912 01 février 1913 Samedi,
7h Versailles
Seine-et-Oise Joseph Renard 27 ans, anarchiste. Au soir du 30 janvier 1912, tente de cambrioler la gare d’Orléans avec un complice, Alexandre Britannicus, 23 ans, et blesse gravement à coups de revolver le sous-chef de gare Raymondi et l’ouvrier Martin. Ralliant la Seine-et-Oise par le premier train, remarqués au petit matin du 31 janvier alors qu’ils s’enfuient à contre-voie à Angerville, sont poursuivis par les gendarmes. Lors de la tentative d’arrestation, le brigadier de gendarmerie Dormoy est abattu. Au niveau d’Etampes, Britannicus est tué par les gendarmes, et Renard arrêté à la gare d’Etrechy. Réveillé à 6h40, s’assied brusquement dans son lit. « C’est pour ce matin ! » Demande à voir son avocat, Me Henri Géraud, puis est pris d’une crise de larmes. L’abbé Batut l’entend en confession et lui donne l’absolution. Redemande à voir son avocat et le remercie. Dans une pièce proche du parloir, est confié aux bourreaux pour la toilette. Proteste pendant qu’on l’attache : le procureur Perrussel lui explique que c’est la loi. En sortant du bâtiment, interpelle le procureur : « Avant de mourir, je veux vous dire ceci. Mon acte n’était pas prémédité. Je le regrette, je le paye bien cher. Je ne dis pas cela pour moi, mais pour les miens qui pleurent. » Le procureur répond : « Songez aussi à la malheureuse veuve du brigadier Dormoy ! » Promet à l’aumônier d’avoir du courage avant de franchir les portes. En voyant la guillotine, mouvement de recul, mais poussé en avant aussitôt. « Salut » du côté de l’avenue de Paris, première exécution à l’entrée de la prison Saint-Pierre. 10 novembre 1912 08 février 1913 Samedi,
6h47 Le Mans
Sarthe Gustave Auxerre 42 ans, mineur au chômage, journalier, Belge. Satyre assassin de la petite Madeleine Besnier, 10 ans, bergère qu’il viole au Mézain le 26 juillet 1912. Auteur d’une tentative de viol sur une adolescente de 14 ans quelques jours plus tôt. La veille de son exécution, certain d’être grâcié, Auxerre parle de casser la figure à Deibler. Réveillé à 6 heures, il faut le secouer pour qu’il ouvre les yeux. Quand il voit les gens présents, il comprend, claque des dents et balbutie : »Quel malheur, ah, mon Dieu, quel malheur ! » Tremblant, livide, il boit un verre de rhum que lui propose son avocat, ce qui lui donne assez de forces pour aller jusqu’à la chapelle. Il doit être soutenu par les aides pour atteindre la guillotine. 10 décembre 1912 19 avril 1913 Samedi,
4h40 Versailles
Seine-et-Oise Charles Barré 48 ans. Etrangla au cours d’un cambriolage nocturne M.Languedoc, marchand de bestiaux octogénaire, le 09 septembre 1911 à Amblainville, et lui vola 15.000 francs. Dans des circonstances similaires, étrangla dans son lit Mme veuve Legendre, 75 ans, le 05 avril 1912 à Andrésy, et vola le peu que contenait la maison. Le 23 du même mois, retourne à Andrésy, et est arrêté par le garde-champêtre au moment il va pénetrer, revolver en main, chez Mme Leprince, rentière, voisine de sa seconde victime. Soupçonné de deux autres meurtres à Gueschard (Somme) et Etampes. Réveillé à 4h20 : les gardiens doivent le secouer légèrement pour qu’il ouvre les yeux. Comprend lentement ce que lui annonce le procureur, se met à pleurer et à gémir, puis s’emporte contre sa complice : « Oh, la vache qui me vaut cela ! » Se laisse habiller sans resister. Accepte de discuter avec son avocat, à qui il serre la main, et l’aumônier Battut, qui ramène un peu de calme dans son esprit. Refuse d’un signe de tête d’entendre la messe. Pâle, franchit les portes de la prison, la tête inclinée sur l’épaule droite. Embrassé par le prêtre, sursaut quand on le bascule : les aides doivent le pousser davantage car il est assez petit. 28 janvier 1913 21 avril 1913 Lundi,
4h31, 4h33, 4h35 Paris André Soudy,
Raymond
« La Science »
Callemin

et
Etienne « Simentoff » Monier Membres de « la bande à Bonnot », véritables anarchistes dirigés dans une voie criminelle par Jules Bonnot. Soudy, 21 ans, garçon épicier; Callemin, Belge, 23 ans, ouvrier typographe ; Monier, 24 ans, camelot. Le 21 décembre 1911, 148, rue Ordener, Callemin, en compagnie de Jules Bonnot et d’Octave Garnier participe à l’agression de M.Ernest Caby, garçon de recettes de la Société Générale, pour lui voler sa sacoche. Garnier blesse de deux coups de feu Caby avant que les bandits ne s’enfuient à bord d’une automobile Delnaunay-Belleville volée une semaine plus tôt. Le 25 mars 1912, en forêt de Sénart, à Montgeron, Callemin, Soudy, Monier, Bonnot, Garnier et René Valet volent une voiture De Dion-Bouton en tuant le chauffeur, M.Mathilde, puis vont à Chantilly (Oise) braquer l’agence locale de la Société Générale, abattant au passage deux employés, MM. Trinquier et Legendre, et en blessant gravement six autres employés, MM. Choquet, Combe, Guilbert, Lesage, Masson et Sitterlin. Le chef de la bande, Jules Bonnot, est mort à Choisy-le-Roi lors d’un siège de la police le 27 avril 1912, trois jours après avoir abattu le directeur-adjoint de la Sûreté Nationale, Louis Jouin, à Ivry-sur-Seine. Garnier et Valet meurent dans les mêmes circonstances, le 14 mai 1912, dans une villa de Nogent-sur-Marne. Les membres de la bande se sont également rendus coupables : du meurtre d’un veilleur de nuit à Gand (Belgique) le 31 décembre 1911 alors qu’ils essaient de voler une voiture dans un garage (auteur du crime : Garnier, complices : Bonnot et Carouy), du meurtre de l’agent de police Garnier place du Havre à Paris le 27 février 1912 (l’auteur du crime est l’anarchiste Garnier), et d’une tentative d’assassinat sur Me Zintout, notaire, lors d’un cambriolage à Pontoise, le 28 février. Leurs principaux complices ayant survécu, Carouy et Metge, sont condamnés à perpétuité, et Carouy se suicide quelques heures après le verdict en s’empoisonnant. Eugène Dieudonné, accusé d’avoir été présent à l’attaque de la rue Ordener, innocenté de toute participation aux crimes par Bonnot dans sa dernière lettre, fut malgré tout condamné à mort, mais grâcié. Réveillés à 4 heures. Monier embrasse son avocat et serre la main de l’aumônier Geispitz en disant : « C’est à l’ami que je donne la main, et non au prêtre. » Callemin sourit, et refuse qu’on l’aide à s’habiller : « Je n’ai besoin de personne. D’ailleurs, ce n’est pas la peine de mettre grand’chose pour ce petit voyage… Ah ! On m’a rendu mes vieilles bottines ! » Quittant sa cellule, dit à ses gardiens : « Mes pressentiments d’hier ne m’ont pas trompé… Ca y est… Enfin, me voilà libre. » SOudy promet d’être courageux, embrasse son avocat et demande ce qu’il adviendra de ses camarades. « Si j’allais seul à l’échafaud, ça ne serait rien. Malade, tuberculeux comme je le suis, je ne perds pas grand-chose. » S’habille seul, se coiffe, serre la main de l’aumônier, demande un verre de café, frissonne : « Je tremble… mais je dirai comme Bailly, au temps de la Révolution : c’est de froid, et non de peur ! » En allant au greffe, MOnier croise le juge Gilbert à qui il dit : « Je ne vous en veux pas… Adieu ! » Soudy chante : « Salut, ô mon dernier matin ! » Au greffe, Callemin boit un verre d’eau et sourit à Monier, avant de remarquer en riant : « Tiens, je croyais que l’on nous couperait les cheveux en faisant notre dernière toilette… Mais on nous les coupera en coupant autre chose avec. » Monier demande à son avocat de l’accompagner jusqu’à la machine : « Je tiens à ce que vous voyiez mon dernier sourire de Méridional quand le couteau tombera. » L’abbé Geispitz demandant à les assister à leurs dernières secondes, Callemin répond : « Venez, monsieur l’abbé… mais pas en curé… non, en ami, en consolateur ». Seul Monier accepte un seul verre de rhum, puis repousse le second : « Est-ce que vous voulez me griser ? Je n’en ai pas besoin. Je tiendrai bien. » Soudy, lui, aurait souhaité deux croissants. Monier remercie deux agents de la sûreté pour leur amabilité, puis les trois hommes grimpent dans le fourgon. A l’arrêt, se disent adieu en camarades. Monier, descendant, dit à son défenseur : « Vous direz à mes parents que ma suprême pensée a été pour eux. » Soudy descend le premier, souriant. Devant la guillotine, sans regarder le couperet, dit : « Brr…comme il fait froid, ce matin, messieurs… » Monier s’apprête à passer en second, mais Callemin le devance : « Non, laisse-moi passer avant toi ! » Sur le marchepied, remarque avec dédain : « C’est beau à voir, l’agonie d’un homme… » Enfin Monier sort, pâle mais ferme, et dit à voix haute : « Adieu à vous tous, messieurs… et à la société aussi ! » Petit mouvement de résistance sur la bascule, vite contenu. 27 février 1913 15 mai 1913 Jeudi,
3h53 Béthune
Pas-de-Calais Auguste Lhomme 40 ans, électricien. Tua de 11 coups de couteau Mme Droumont, coutelière à Lens, 65 ans, le 10 octobre 1912, et pour voler 15 francs, qu’il dépensa le soir-même en boisson et au cinéma. Réveil à 3h20. « C’est bien. » Rien à déclarer, s’habille et répond « Si vous voulez » quand on lui propose de voir son défenseur. Parle avec l’aumônier, se confesse et entend la messe. Accepte un verre de rhum, serre la main à ses gardiens. « On ne meurt qu’une fois. » Remarque l’absence d’un gardien : « Mais où est Grosjean ? » Exécution rapide. 300 personnes présentes derrière les barrages policiers, dont M.Droumont, veuf de la victime, et ses deux fils. 14 mars 1913 11 juillet 1913 Vendredi,
3h17 Paris Georges Laage 28 ans, marchand forain. Etrangle Jeanne Labro, veuve Lacke, 76 ans, dans la nuit du 10 au 11 juin 1912, hôtelière au 9, passage de la Ferme-Saint-Lazare pour la voler. Son complice Henri Vervalcke, 26 ans, est condamné à mort et gracié. L’autre acolyte, Truffard, écope de vingt ans de bagne. Déjà éveillé quand on rentre dans sa cellule. « Oui… oui… je m’y attendais… Laissez-moi m’habiller. » Passe une chemise, un pantalon, prend des papiers, des cartes postales et trois lettres. Au substitut Kioess, il donne une grosse enveloppe libellée « La vérité sur l’affaire », et à Me Viven, les cartes postales et les lettres, destinées à sa soeur et à sa mère. Puis il s’intéresse au sort de Vervalcke : « Suis-je le seul à mourir ? » Informé de la grâce de son complice, il verse quelques larmes mais se ressaisit vite : « C’est bien, je paie seul… C’est juste… Je suis le plus coupable ! Je suis un misérable assassin, c’est vrai, mais je n’ai jamais été un souteneur ! » En route pour le greffe, il dit à l’aumônier : « Mon père, je vais mourir ! Je l’ai mérité ! Je suis heureux d’expier mes fautes, car je suis un grand coupable ! Je demande pardon à Dieu et à la société. Vous direz à ma mère que je suis mort repentant et en pensant à elle ! » En descendant du fourgon, il sent des gouttes s’écraser sur son visage : « Tiens, il pleut ! » En voyant la guillotine, il a un mouvement de recul. L’aumônier l’incite au courage et il part sur la bascule. 21 mai 1913 22 octobre 1913 Mercredi,
5h53 Toulouse
Haute-Garonne Louis Albus PARRICIDE, 37 ans, jardinier. Tue son père Jean et sa mère Bertrande à coups de bûche à Aucamville dans la nuit du 12 au 13 juin 1912, et vola 800 francs avec lesquels il fit la noce trois jours durant. Suite à un décret publié la veille, guillotine montée à l’entrée de la maison d’arrêt Saint-Michel – à cinq mètres du battant droit de la porte, opposé au poste de garde. Pluie battante toute la nuit. Dort profondément, doit être secoué à 5h20 pour ouvrir les yeux. « Ah ! » Aucune déclaration à faire. Prend du café noir avec du rhum, puis dit à son avocat à qui il tend une épaisse enveloppe : « J’ai là quelques papiers. Prenez-les. Ils sont pour vous. Vous les lirez. » S’habille. S’entretient avec l’abbé Prouvet, puis va à la chapelle pour entendre la messe. Attaché, revêtu de la tenue des parricides, nu-pieds. Franchit les portes de la prison tremblant. L’huissier Escat lit l’arrêt de condamnation. On retire le voile, Albus apparaît très pâle et sur un geste de Deibler, est poussé sur la bascule aussitôt. Corps remis à sa veuve. 23 juillet 1913 06 décembre 1913 Samedi,
6h54 Boulogne-sur-Mer
Pas-de-Calais Albert Carlu 32 ans, valet de ferme. Dans le bois de Course, à Doudeauville, égorge à coups de couteau Céline Lecerf, veuve Carlu, 31 ans, cultivatrice, veuve de son cousin et son ancienne patronne, pour se venger d’avoir refusé ses avances, et lui vola 80 centimes le 13 mai 1913. Réveil à 6h25. « C’est bien ». S’habille avec calme, entend la messe, se confesse et communie. Fume une cigarette, boit un verre de rhum. Embrasse l’aumônier en franchissant le seuil de la porte. Par testament, confie sa tête au médecin-chef de la prison, mais ayant défendu tout examen médical ou prélèvement sur son corps, ce dernier est inhumé au cimetière de l’Est. 10 octobre 1913 24 décembre 1913 Mercredi,
7h29 Dunkerque
Nord Clément Monvoisin 27 ans, souteneur, voleur récidiviste, évadé de Guyane. Dans un soir d’ivresse, abat d’une balle de revolver le marinier Arthur Bernard le 27 juillet 1913 à Dunkerque parce que celui-ci lui avait heurté accidentellement le pied en dansant. Au réveil, il devient tout pâle : « Vous direz à Rachel (Richet, sa maîtresse et prostituée) que c’est pour elle que je meurs et vous lui demanderez de venir déposer des fleurs sur ma tombe. » Puis, à l’aumônier, il dit : « J’ai froid ! Allons, je ne vais pas trembler… je tremble. » Au greffe, il hésite devant le verre de rhum : « Non, je n’aime pas le rhum et je ne suis pas alcoolique… Tout de même, donnez… » Il fume un cigare que lui offre l’aumônier avant d’être toiletté. « Allons-y », dit-il aux aides. Cigare à la bouche, il arrive devant la guillotine et hurle : « Dunkerquois, vous êtes tous des lâches ! » 24 octobre 1913 16 janvier 1914 Vendredi,
7h08 Mézières
Ardennes Frédéric Paul Edmond Delacourt 43 ans, émeuleur. Vivant depuis 18 ans à Monthermé avec sa concubine Eugénie Sury, dont il avait eu deux filles, Delacourt fut chassé par sa maîtresse le 02 juillet 1913 pour avoir fait des attouchements à leur fille aînée Isabelle, 13 ans. Le 09, il rentra de nuit, blessa Eugénie dans son lit de vingt coups de marteau, frappa Isabelle d’un coup de massue alors qu’elle venait, attirée par le bruit, et enferma son autre fille à la cave. Eugénie survécut, pas Isabelle. Réveillé à 6h40. Dort profondément. Calme, dit à son avocat Me Hénon : « Je vais donc pouvoir aller retrouver ma pauvre gamine ! Je savais bien que ça finirait comme cela ! Je vous l’avais bien dit. » Refuse d’abord les secours de la religion, puis revient sur son idée et se confesse. Boit un verre de rhum et fume une cigarette au greffe. Sort de la prison : la machine est dressée à 1m50 de la porte. Eugénie Sury, son ex-compagne et victime, est absente, n’ayant pas obtenu du Parquet l’autorisation d’assister à la mort de Delacourt. 21 novembre 1913 06 avril 1914 Lundi,
5h14, 5h16 Vesoul
Haute-Saône Umberto Piccinelli

Joseph Kirstetter

Piccinelli, 22 ans, ouvrier mitron, Italien, tua à coups de hache M.Copatey, son patron, boulanger à Lure, le 28 septembre 1913 et tenta de faire subir le même sort à sa femme alors enceinte, et ce afin de les voler.

Kirstetter, Allemand, 39 ans, valet de ferme, assassina à Belfort Marthe Koenig, 19 ans, fille de ses patrons, d’un coup de couteau de boucher au poumon, pour se venger de son licenciement suite à des brutalités sur leurs animaux.

Réveillés à 4h. On traduit la sentence en allemand à Kirstetter, qui en reste abattu. Sans dire un mot, Piccinelli se lève et s’habille puis demande à entendre la messe. Les deux hommes sont séparés pour la toilette : Kirstetter boit un verre de rhum, mange une tranche de jambon et fume une pipe en grommelant : « C’est malheureux ! Les innocents sont décapités et les coupables courent les champs. » Après la toilette, Piccinelli reste avec l’abbé Bellot et Kirstetter avec son avocat, Me Bergeret. Ce dernier demande qu’on lui bande les yeux, mais en vain. Piccinelli sort le premier, pâle, les jambes flageolantes.Sur la bascule, il pousse un cri rauque. Kirstetter descend les marches en fixant le couperet du regard. Des applaudissements se font entendre : M.Koënig, le père d’une des victimes, assiste à l’exécution. 12 février 1914

13 février 1914

17 avril 1914 Vendredi,
4h35 Versailles
Seine-et-Oise François Prigent 25 ans, peintre. Tua à coups de marteau le contremaître Fortin sur un chantier ferroviaire de Villeneuve-Saint-Georges le 28 juin 1913, mais n’eut pas le temps de s’emparer de la paye des ouvriers faute de temps. Réveillé à 4h10, le procureur lui frappe sur l’épaule. Se laisse habiller. Accepte de discuter avec son avocat et l’aumônier, mais ne manifeste aucune émotion : « Je savais bien que cela m’arriverait. On me l’avait prédit en maison de correction. » Se confesse, entend la messe et communie. Toilette rapide au greffe. Recul devant la guillotine. 17 février 1914 11 juillet 1914 Samedi,
3h20 Nevers
Nièvre Robert Fabre 19 ans, voleur, évadé de Poissy le 10 octobre 1913, arrêté pour vols le 14 novembre et incarcéré à Cosne-sur-Loire (dont il s’évade une journée durant en novembre). Simulant la léthargie, assomme d’un coup de barre de fer et égorge d’un coup de couteau le gardien Edmé Bontemps, 73 ans, pour s’évader de l’asile de La Charité-sur-Loire, le 05 février 1914. Capturé le lendemain. Réveillé à 2h30, dormait bien, doit être secoué par le procureur pour ouvrir les yeux. « C’est bien », dit-il avant de s’habiller. Se confesse, entend la messe et communie. Remercie son avocat, puis va au greffe. Boit un verre de rhum et fume une cigarette avec calme. Grand mouvement de recul en voyant la guillotine quand les portes s’ouvrent. Un aide lui retire le veston qu’il portait sur les épaules avant qu’il ne soit basculé. 11 mai 1914 17 juillet 1914 Vendredi,
3h22 Tours
Indre-et-Loire Maurice Doucet 24 ans, clerc de notaire, repris de justice. Dans un bois de Mazières, tend un guet-apens et étrangle le jeune encaisseur Gisors, 16 ans, le 17 mars 1914. Butin : 6.000 francs. Son complice, un adolescent de 15 ans, Paret, est condamné à vingt ans de bagne. Réveillé à 2h50. Dormait bien, mais répond avec malice au procureur : « D’abord, mon pourvoi et mon recours en grâce ne peuvent pas avoir été rejetés, puisque je ne les ai point signés. Mais soyez tranquilles : je resterai calme jusqu’au bout. Je me doutais que ce serait pour ce matin, j’avais vu hier le directeur de la prison en grande conférence avec son collègue de la centrale de Fontevrault. Cela m’avait donné à réfléchir, et j’avais fait part de mes idées à mes gardiens. » Un gardien confirme. S’habille seul, enfilant même ses chaussures, puis dit : « Et mon verre de rhum ? J’y ai droit, je pense. » Boit deux verres, puis discute avec son avocat, et demande à pouvoir embrasser sa maîtresse Berthe Cognet. L’avocat lui dit que c’est impossible : Doucet n’insiste pas. Se confesse, entend la messe, puis va au greffe pour subir la toilette. Se plaint que ses mains soient trop serrées, puis dit au bourreau : « C’est vous, Monsieur Deibler ? Je suis heureux de faire votre connaissance ! » Traverse la cour d’un pas ferme. Croisant un gardien, dit : « Au revoir, monsieur Chatrier ! Non, je me trompe : adieu ! » Au public, crie : « Bonjour les amis ! A mort, Tours ! A mort, Tours ! A mort, Tours ! » Embrasse le crucifix, se laisse basculer en criant : « Adieu les amis ! Courage ! Un, deux… » Pousse un hurlement violent quand la lunette s’abat. 19 juin 1914 06 octobre 1914 Mardi,
16h30 Suzanne (Somme) Omer Louis Roby 26 ans, soldat au 43e RIC. Le 04 octobre 1914, à Maricourt, abandonne son poste puis viole sa logeuse, Elise Dumonchot, avant de la tuer et de lui voler un porte-monnaie et une montre en or. Fusillé une heure après le jugement. 06 octobre 1914 27 novembre 1914 Vendredi,
7h30 Bar-le-Duc Franz Josef Ott 24 ans, brancardier allemand de la 3e compagnie sanitaire du 16e corps d’armée. Fait prisonnier le 08 septembre 1914, auteur de même que les autres soldats de sa compagnie de pillages, d’incendies volontaires et d’assassinats commis notamment le 23 août 1914 à Malavillers, et le 05 septembre à Vraincourt. Fusillé route de Saint-Dizier 10 octobre 1914 23 décembre 1914 Mercredi,
5h15 Bastia
Corse François « Cecco » Tomasini 34 ans, boucher à Carreja. Dejà condamné pour meurtre à 5 ans d’emprisonnement en 1907. Dans une taverne de Barchetta, provoqua et abattit d’un coup de fusil un vieillard, Roch Sarti, le 09 novembre 1913, puis se rendant à la ferme de sa victime, tua de trois coups de fusil le garçon de ferme Félix Gabrielli, puis fit main basse sur une montre et un peu d’argent. Horriblement surpris : s’attendait à être gracié. Accepte les secours de la religion, meurt courageusement. 25 juillet 1914 30 janvier 1915 Samedi,
9h Courtisols (Marne) Alexis Jean Marie Oho 21 ans, cavalier de 2e classe au 14e Hussards. Au cours d’une tentative de cambriolage à main armée durant la nuit du 14 janvier 1915 dans une épicerie de Marson, blesse la propriétaire, Mme Delaval, puis tente également d’assassiner son supérieur, le maréchal des logis Coudray. Exécuté à l’Ambulance 7/4. 29 janvier 1915 05 avril 1915 Lundi,
6h Rennes
Ille-et-Vilaine Karl « Gotthold » Vogelgesang 24 ans, soldat allemand au Fusilier Regiment 36 de Magdeburg. Blessé et fait prisonnier lors de la bataille de l’Ourcq dans la Marne en septembre 1914, fut découvert en possession d’un carnet dans lequel il relatait ses scènes de pillage et plusieurs meurtres de blessés français qu’il achevait sans pitié. Inculpé pour 28 massacres de civils et 83 incendies entre le 16 et le 18 août 1914. Fusillé au polygone. 26 février 1915 14 avril 1915 Mercredi,
15h Toul (Meurthe-et-Moselle) Paul-Eugène Durand 29 ans, gardien de la paix à Paris, soldat au 2e régiment d’artillerie coloniale. Abat à coups de revolver Charles Meyer, Gaston Chaty et Constant Jacquard, habitants du village de Blénod-les-Pont-à-Mousson qui l’avaient surpris en plein cambriolage le 13 janvier 1915. Fusillé dans les fossés des fortifications. 13 avril 1915 17 avril 1915 Samedi,
4h35 Versailles
Seine-et-Oise André Martin PARRICIDE. 18 ans, tua ses parents d’une balle dans la tête pendant leur sommeil le 26 décembre 1913 à Cumières dans la Marne. Mobile : hériter de leur argent plus rapidement. Condamné une première fois à Paris (la Marne étant au milieu de la guerre), jugement cassé, rejugé dans la Seine-et-Oise. Réveillé à 4h05. Calme, se lève, s’habille seul. Parle avec son défenseur Me Pichon puis entend la messe et communie en compagnie de l’abbé Chesnais. Accepte ensuite une tasse de café arrosée de cognac. Au greffe, revêt la tenue des parricides. Arrivé au pied de la guillotine, se retourne pour embrasser Me Fichon, son défenseur, tandis que l’huissier lui lit l’arrêt de mort. Exécution R.A.S. 10 décembre 1914, 07 mars 1915 13 mai 1915 Jeudi,
4h Maizy (Aisne) François Marie Bihouise 36 ans, scieur de long, soldat de 2e classe au 88 RIT. Tente d’assassiner, le 12 mai 1915 à Blanzy-les-Fismes, le sous-lieutenant Grillet. Fusillé sur la route de Glennes. 12 mai 1915 20 mai 1915 Jeudi,
5h30 Ningles
Pas-de-Calais Jules Désiré Mercier 36 ans, chauffeur, soldat au 5e territorial. Le 21 mars 1915, à Wimereux, ivre, refuse d’obéir au caporal Lucien Deschodt, 41 ans, qui vient lui ordonner de prendre son tour de garde. Face à son insistance, le frappe d’un coup de poing dans la figure, auquel Deschodt riposte à coups de lanterne. Blessé au visage, après avoir été soigné à l’infirmerie, Mercier abat Deschodt d’une balle en pleine tête. Fusillé au champ de tir d’Alprech. 02 avril 1915 25 juin 1915 Vendredi,
21h30 Vauvillers (Somme) Julien Pierre Mons 23 ans, soldat au 52 RI. Tente d’assassiner le 25 juin à Vauvillers le capitaine Marchal de deux coups de feu. Précédemment condamné à deux ans de prison pour désertion. Fusillé au nord-est du village. 25 juin 1915 16 juillet 1915 Vendredi,
6h Braines (Aisne) Emil Pollert 23 ans, instituteur, soldat prussien de 2e classe au 21 RI, prisonnier de guerre. Tentative d’assassinat sur des soldats français. Fusillé près des hauteurs de la Folie 15 juillet 1915 22 juillet 1915 Jeudi,
3h20 Nancy
Meurthe-et-Moselle Joseph Lagarde 35 ans, tailleur de pierres. Le 24 janvier 1913, tue de deux coups de hache dans la tête le livreur de café Paul Mougel, près du fort de Roulon dans les Vosges. Recherché par la police, parvient à leur échapper le 29 janvier. Le 23 mars 1914, assomme à coups de gourdin à Maxéville le débitant de boissons Deleau pour voler sa caisse, qui contient cent francs. Deleau meurt 24 heures après l’agression. Condamné d’abord à Nancy, puis lors d’un second procès à Chaumont (les Vosges étant en plein champ de bataille). A l’arrivée des autorités, à 2h30, déjà réveillé, fume une cigarette debout à côté de son lit. Répond fermement : c’est bien. Entend la messe. Toilette rapide. En franchissant le seuil de la prison, crache la cigarette qu’il avait à la bouche, et embrasse le crucifix. 27 mai 1914, 20 mai 1915 30 juillet 1915 Vendredi,
5h Hartennes (Aisne) Henri Louis Chassaigne 39 ans, soldat de 2e classe au 321e RI. Le 28 juillet 1915, sur la côte de Villemontoire, tire un coup de feu sur le sous-lieutenant Rambaud qui lui fait une remontrance, manquant l’abattre d’une balle en pleine tête mais ne touchant que son képi. 29 juillet 1915 11 août 1915 Mercredi,
6h Toul (Meurthe-et-Moselle) Arthur Louis Joannès 24 ans, cannonier, ouvrier d’usine à Saint-Nicolas-du-Port. Tente de cambrioler la cantine du fort de Pagny-la-Blanche-Côte le 13 juillet 1915. Surpris par la propriétaire, Mme Bourrée, 34 ans, la blesse grièvement de 42 coups de couteau, la laissant estropiée. Fusillé dans les fossés des fortifications. 10 août 1915 22 août 1915 Dimanche, 7h20 Westvleteren (Belgique) Pierre-Marie Charles Régnier 39 ans, coiffeur, soldat du 80e RIT. Le 18 juin 1915, à Woesten, assassine de cinq balles le soldat Charles Delpit, 39 ans, du même régiment que lui, avec lequel il avait connu de nombreux différends. 03 août 1915 05 septembre 1915 Dimanche, 7h Krombeke (Belgique) Marc Emmanuel 21 ans, garçon de café, chasseur au 3e BMILA. A Eikhock (Belgique), le 20 août 1915, tentative de tuer le chasseur Jodart qui l’avait surpris en flagrant délit de vol des biens de M.Bory en compagnie de trois complices, puis menace et outrage l’adjudant-chef Ponceau en le braquant et en le traitant de « boche ». Le chasseur Laforêt est condamné à dix ans de travaux publics et les chasseurs Rolla et Mogenet aux travaux forcés à perpétuité 04 septembre 1915 11 septembre 1915 Samedi,
5h30 Giromagny (Haute-Saône) Ahmed ben Abdelkerim 24 ans, chauffeur, Tunisien, soldat de 2e classe au 21e de marche du 2e étranger. Le 04 juin 1915, dans les tranchées de Sillery, assassine le légionnaire Kling et tente de tuer le sergent Séchaud, qu’il blesse à la cuisse d’un coup de fusil. Fusillé à trois cents mètres à l’ouest du cimetière. 09 septembre 1915 23 octobre 1915 Samedi,
5h25 Marseille
Bouches-du-Rhône Jacques Bonnabot 26 ans, cultivateur, soldat de 2e classe au 24e régiment d’infanterie coloniale basée à Perpignan. Ayant déserté cinq jours plus tôt, le 24 avril 1915, à Marquixanes (Pyrénées-Orientales), viole et étrangle Angèle Demonte, épouse Fieux, 38 ans, viticultrice, puis la vole, avant de mettre le feu à la maison. Condamné par le conseil de guerre de Montpellier, arrêt cassé, rejugé à Marseille. Réveillé à 5h. « Ca va bien ». S’habille lentement, entend la messe. Lecture du jugement sur place. Fusillé au champ de tir du Pharo. 31 juillet 1915, 11 septembre 1915 04 décembre 1915 Samedi,
15h30 Saint-Maurice-sur-Mortagne
Vosges Jean Thérin 26 ans, mineur, soldat de 2e classe. A Saint-Maurice, le 02 décembre 1915, se fâche contre ses camarades et quitte le camp, muni d’un fusil avec sa baïonnette. Arrêté par une sentinelle à l’entrée du village, sur la route de Roville, met le soldat en joue pour que celui-ci le laisse passer. A Roville, de nouveau arrêté par une seconde sentinelle, le soldat Fernand Launoy, 29 ans, le blesse mortellement d’un coup de feu dans la cuisse. 03 décembre 1915 19 février 1916 Samedi,
6h30 Champagney (Haute-Saône) Alfred Mathieu 36 ans, mineur, canonnier servant au 114 RA. Le 04 décembre 1915, au hameau de Noirmouchot, commune de Plancher-Bas (Haute-Saône), assassine le lieutenant Bernardot, menace de mort l’adjudant Chamonard et tire un coup de carabine sur les canonniers qui venaient l’arrêter sans les toucher. 17 février 1916 03 mars 1916 Verdun (Meuse) Aït ben Ahmed Abdallah 21 ans, Marocain, soldat à la 15e compagnie de tirailleurs marocains. Meurtre. Fusillé dans le bois de Sartelles. 01 mai 1916 Lundi,
4h06 Marseille
Bouches-du-Rhône Giovanni Antonio Casetta 23 ans, soldat à la légion garibaldienne (1er régiment étranger de marche). Durant son sommeil, tue à Avignon le 04 mai 1915 à coups de tisonnier le lieutenant Angelo Mario Arizio, 38 ans, de la légion étrangère, dont il était l’ordonnance. Demande les secours de la religion. Meurt courageusement. Fusillé au Pharo. 18 mars 1916 10 juin 1916 Samedi,
3h15 Tours
Indre-et-Loire Louis Lefèvre 57 ans, ouvrier agricole. Commet un triple assassinat à coups de bâton sur Mme Dormeau, 35 ans, et ses enfants Odette, 10 ans, et Pierre, 5 ans, à Pezou (Loir-et-Cher) le 19 janvier 1915. Condamné à Blois, arrêt cassé, recondamné à Tours. Lien vers une page contenant des photos. ATTENTION : le contenu de ces documents est de nature à choquer les plus sensibles ! Réveillé à 2h40. Ne dit pas un mot. Accepte un verre de rhum, entend la messe, fume deux cigarettes. Se débat un peu devant la bascule de la guillotine montée sur le boulevard Béranger, mais est vite maîtrisé. Meurt la cigarette aux lèvres. Remis à la Faculté. 17 novembre 1915, 25 mars 1916 10 août 1916 Fricamps (Somme) Claude Emile Aristide Coudert 42 ans, vigneron, soldat au 49e Régiment territorial. En compagnie d’un autre soldat, déserte le 22 mai 1916, et au hameau d’Algoutte, commune de Ban-de-Laveline (Vosges), attaque une ferme où il se fait servir à boire par la fermière et sa fille de 16 ans, sous la menace d’une arme. Dérobe également les bijoux de la fermière et 117 francs, mais la femme s’interpose quand Coudert parle d’enlever sa fille adolescente : elle est alors abattue d’un coup de fusil. Arrêté cinq jours plus tard. Son complice est condamné à ? 06 juillet 1916 11 août 1916 Saint-Lumier-la-Populeuse (Marne) Moktar ben Tidjani ben Salem Tunisien, tirailleur de 2e classe au 3e RMT. Tentative d’assassinat et de meurtre sur deux camarades. 21 août 1916 Lundi,
5h55 Rennes
Ille-et-Vilaine Pierre-Marie Lagrée 20 ans, soldat du 1er RIC. Le 02 décembre 1915, à Fermanville (Manche), agresse et étrangle avec un mouchoir le soldat Edouard-Louis Bitel, 19 ans, du 1er régiment d’infanterie coloniale, à qui il dérobe porte-feuille et porte-monnaie. Le 03 janvier 1916, au Quessoy (Côtes-du-Nord), tue Mme Monvieux, sa fille Marie, 8 ans et son fils Joseph, 4 ans, en les égorgeant à coups de couteau au point de les décapiter et vole 50 francs. Le 14 juillet 1916, au retour de sa promenade, tente de s’évader en frappant de quatre coups de baïonnette le maréchal-des-logis Bourdennec qui le surveillait. Réveillé à 4h45. Dormait bien, prend la nouvelle avec calme, dit n’avoir aucune déclaration à faire. Entend la messe de l’aumônier Carré, puis communie. S’entretient avec le prêtre en attendant le véhicule. A bord d’une ambulance, se rend au Polygone. Une centaine de personnes présentes route de Saint-Jacques, qui mène au lieu d’exécution. Temps brumeux qui empêche de voir. Attaché au poteau, entend la sentence. Le capitaine Dauvillier, rapporteur, lui demande à nouveau s’il n’a pas de déclarations. « Si, mon capitaine. Je suis coupable de deux autres crimes, commis par moi aux environs de New York. Je demande pardon aux hommes, à Dieu, et à mon régiment. » Remercie son avocat, et sollicite du sergent Piétri l’autorisation de mourir debout sans bandeau. La seconde partie est refusée. 25 juillet 1916 03 octobre 1916 Mardi,
6h Brottes (Haute-Marne) Emile Houtmann 23 ans, maçon, soldat au 21e RI. Blessé à Verdun, soigné à l’hôpital de Chaumont, s’échappe le 14 juillet 1916 et cambriole une maison, avant, dans la soirée, de blesser mortellement à coups de couteau l’artilleur Gabriel Richard, 29 ans, qu’il venait de croiser dans la rue. Richard meurt à l’hôpital trois jours après. Ses deux complices sont condamnés aux travaux forcés à perpétuité. 17 août 1916 20 novembre 1916 Lundi,
7h15 Mérignac (Gironde) Gabriel Joseph Daudirac 38 ans, serrurier, cambrioleur, ancien complice des tueurs de Langon. Condamné à cinq ans de réclusion en 1908. Mobilisé comme ouvrier à l’usine Dyle et Bacalan. Devenu l’amant d’une femme mariée, Alice Fatin, 24 ans, la dépouille de son argent en usant de menaces. Comme elle menace de la quitter, le 21 août 1916, chez elle, au 21, rue des Pontets à Bordeaux, l’abat de deux balles de revolver et se tire une balle dans la tête, ne parvenant qu’à s’érafler le front. Réveillé à 6 heures. « C’est bien. » Essuie une larme, et demande pardon à Dieu. S’habille seul. « Je regrette de ne pas avoir vu ma femme avant de mourir. » Prie au parloir de la prison militaire en compagnie de l’abbé Redon. Calme, tremble à un seul instant. Boit trois tasses de café au rhum, qu’il sucre lui-même. Fume deux cigarettes en parlant à son avocat. Part de la prison à 6h50. Le chauffeur se trompe de chemin et doit faire un détour pour arriver au champ de tir de Luchey-Halde, situé entre Pessac et Mérignac. Cigarette aux lèvres, va vers le poteau sans assistance, se laisse bander les yeux. 12 octobre 1916 21 novembre 1916 Mardi Villeurbanne (Rhône) Justin Marius Follis 20 ans, soldat au 4e bataillon de chasseurs à pied. Abat à coups de revolver Jean Parodi,
marchand d’oeufs, 43 ans, à Villefranche-sur-Mer (Alpes-Maritimes) le 14 mars 1916 pour le voler. Condamné en première instance à Marseille, arrêt cassé, rejugé à Lyon. Son complice Justin Gilly est condamné à dix ans de travaux forcés. Fusillé au stand de tir de la Doua. 20 juillet 1916, 10 octobre 1916 29 novembre 1916 Somme-Suippe (Marne) Louis-Marie Legendre 33 ans, caporal du 225e RI. Le 31 août 1916, au camp Allègre, non loin de Saint-Jean-sur-Tourbes, ivre, abat d’un coup de fusil son supérieur, le sergent François Louis Bailleul, 32 ans, après une remontrance. 03 novembre 1916 04 décembre 1916 Lundi,
8h Le Châtenois
Vosges Claude Victor Magnouloux 33 ans, chaudronnier dans le civil, soldat au 20e bataillon de chasseurs, condamné au front plusieurs fois pour retard, blessure involontaire sur camarade. Puni de quatre jours de prison par le sous-lieutenant Jean-Marcel Verdier le 22 septembre 1916 à Harbonnières (Somme) parce qu’il a été absent ce jour-là d’une revue de troupes, en état d’ivresse avancée (il a bu au moins trois litres de vin), le blesse mortellement de trois balles. Il blesse également le soldat René Lerousseau, mais la plaie est sans gravité. Verdier, 25 ans, instituteur dans le civil, décède le 23 septembre au matin à l’hôpital de campagne de Cayeux-en-Santerre. Condamné par le Conseil de Guerre à Harbonnières, puis après cassation le 08 octobre, est rejugé par le Conseil de Guerre de la 120e DI siégeant à Coix (Somme). Passé par les armes au sud du village, direction Mirecourt, à l’ouest de la voie ferrée, par un piquet de chasseurs à cheval. Atteint de huit balles, sept au coeur et une dans la tête, il ne reçoit pas de coup de grâce. Il est mentionné sur les registres comme « tué par l’ennemi et mort pour la France ». 27 septembre 1916, 26 octobre 1916 23 décembre 1916 Guindrecourt-aux-Ormes (Haute-Marne) Messaoud ben Belkacem Benchelighem 21 ans, Algérien, soldat du 3e Régiment de marche. Le 04 octobre 1916, assassine le caporal Chabal et un autre tirailleur. 16 novembre 1916 30 décembre 1916 Samedi,
7h05 Paris Jean Roose 20 ans, Belge. Tua à coups de marteau et égorgea au rasoir Charles Verbeck, 45 ans, ouvrier agricole belge, dans la nuit du 31 mars au 1er avril 1916 à Mormant (Seine-et-Marne) pour voler 705 francs. Dans la nuit du 30 avril au 1er mai suivant, dans un hôtel du 12, rue de la Charbonnière, égorge à coups de rasoir Edouard Van den Berghe, 29 ans, journalier belge, pour voler 298 francs. Son complice Camille Bolle, 18 ans, est lui aussi condamné à mort et gracié. Un troisième complice, Henri Mortelé, est condamné à vingt ans de bagne. Déjà réveillé à l’arrivée des officiels, à 5h50. Serre la main de Me Maurice Garçon et de l’abbé de Lacroix, puis écrit une lettre de quatre pages à son frère. En la terminant, dit : « Autant s’arrêter maintenant, sinon, j’écrirais encore comme cela pendant 24 heures. » Entend la messe. Précipitation pour la suite, car une heure s’est déjà écoulée depuis le réveil. En sortant dans la cour, remarque : « Tiens, il pleut. » Peu de monde en raison de la guerre. Voudrait parler, mais le temps presse. Il s’agite un peu, et un des aides lui dit « Du calme, mon garçon, du calme. » Exécution rapide. 24 octobre 1916 20 janvier 1917 Samedi,
6h55 Lyon
Rhône Paul Badin 19 ans, étrangle au Petit-Parilly le 17 janvier 1916 Mme Chedéal, 73 ans. Sa petite-fille, Jeanne, 5 ans, ayant assisté au crime, il l’étrangle et lui casse la tête à coups de talon. Il s’enfuit avec 95 francs et des bijoux. Réveillé à 6h. Etait assis sur son lit quand le directeur entra dans sa cellule. « Je vous attendais. J’avais eu un cauchemar l’avant-dernière nuit. » Il ne fit aucune déclaration, passa ses vêtements et but une tasse de café avant la toilette. Il marcha fermement vers la guillotine. 28 octobre 1916 21 avril 1917 Samedi,
5h10 Rouen
Seine-Inférieure Marius Alexandre Paudière 37 ans, ouvrier confiseur, déserteur du 236e régiment d’infanterie. Le 1er décembre 1916, à Rouen, étrangla et tua à coups de marteau, Lucienne Accard, 16 ans, dont il allait épouser la mère, pour voler 35 francs. Réveillé à 4h25. Dormait bien. Annonce au procureur Bazenet : « Je vous attendais. J’aurai du courage. » Demande l’assistance d’un prêtre, entend la messe et communie. Confie à son avocat, Me Dieusy, plusieurs lettres, dont une destinée à sa mère. Au greffe, boit une tasse de café largement coupée de rhum et fume une cigarette. Descend du fourgon, mégot aux lèvres, embrasse l’aumônier puis, calme et sans crainte, avance à l’échafaud. 24 février 1917 03 juillet 1917 Mardi,
4h Villeurbanne (Rhône) Ernest Joseph Terrier 22 ans, soldat du 133e régiment d’infanterie. Assassine le 21 janvier 1917 à Romilly (Haute-Savoie) la veuve Rosalie Chavanel, 70 ans, pour lui dérober quelques milliers de francs. Fusillé à la butte de tir du Grand Camp, terrain de la Doua. 11 mai 1917 20 juillet 1917 Vendredi,
4h45 Saintes
Charente-Inférieure Célestin 21 ans, déserteur du 418e régiment d’infanterie. Assomme à coups de pelle et poignarde Julien Papillaud, 74 ans (5 coups de couteau) et sa soeur Germaine, 66 ans (10 coups de couteau), ses anciens maîtres, pour les voler le 31 août 1916 à Villemorin. Le 17 novembre 1916, tente de s’évader de la prison de Saint-Jean-d’Angély en assommant le gardien-chef d’un coup de cruche. Ses complices, également déserteurs, sont condamnés à des peines bien inférieures : Félix Tourel à 3 ans de prison, Raoul Redon est acquitté. Réveillé à 4h15. Proteste vivement : « C’est pas juste ! C’est la faute à Tourel, c’est lui qui a tout fait, et je meurs pour lui ! » Demande à parler – en vain – à son épouse. S’entretient avec l’aumônier brièvement. Refuse cognac, café et cigarette dans le but d’aller au plus vite. Peu de monde présent. 02 mai 1917 25 juillet 1917 Mercredi,
4h45 Paris Léon Jean Spoëtler PARRICIDE, 20 ans. A sa sortie de prison, le 29 novembre 1916, alla avec deux complices chez son père Jules, marchand de journaux rue Montmartre. Ils l’étranglèrent pour voler 400 francs, un revolver et des bijoux. Son complice, André Grèze, 19 ans, condamné à mort, est gracié. Son autre complice, Charles Garche, 20 ans, à vingt ans de bagne. Déjà réveillé à l’entrée des officiels. Très calme : « Après ce que j’ai fait, je n’ai plus le droit de vivre. On a raison de me supprimer, je suis un exemple des jeunes gens qui tournent mal. » Puis s’adressant au juge Gilbert : « Quand vous aurez de jeunes accusés, racontez-leur ma conduite et dites-leur tous les regrets qu’elle m’inspire, cela leur évitera de faire comme moi. » Ecrit une lettre à sa soeur et la confie au pasteur Arboux, avant de se mettre à pleurer. La toilette est rapide, et il est revêtu de la tenue des parricides. Arrivé boulevard Arago, marche sans défaillir vers la bascule. 26 mai 1917 07 août 1917 Mardi,
5h Montbrison
Loire Jean Duplay 22 ans, déserteur. Assassin du fermier Coignet à Rochetaillée le 11 mars 1917 pour le voler. Son frère Antoine est condamné à vingt ans de travaux forcés. Entrée des officiels à 5h20. Duplay est déjà réveillé, s’habille seul. Entend la messe, communie. Promet d’avoir du courage. Se plaint d’avoir les poings et les chevilles liés. A l’entrée de la prison, avant d’être basculé, embrasse l’aumônier. 17 mai 1917 12 septembre 1917 Neuviller-sur-Moselle (Meurthe-et-Moselle) Konan Bo Sénégalais, soldat au 68e BTS. Assassine une femme à Neufmaisons le 03 août 1917, et tentative d’assassinat. 28 septembre 1917 Vendredi,
6h Montpellier
Hérault Basile Théodule Buttard 21 ans, soldat au 20e Génie. Tua d’un coup de couteau de tranchée dans le coeur, durant la nuit du 05 au 06 février 1917 sa maîtresse Alix Aubert, 30 ans, prostituée, 10, rue Castelnau à Montpellier, pour la voler. Crie aux troupes assistant à son supplice : « Ne faites pas comme moi ! N’écoutez pas les femmes ! Maintenant, allez-y ! » Fusillé à la citadelle du Génie. 31 juillet 1917 05 octobre 1917 Droisy (Aisne) Hassen ben Salah ben M’Bareck Tunisien, tirailleur au 8e RMT. Meurtre et tentatives de meurtres. 13 octobre 1917 Houdainville (Meuse) Kaddour Ould Embareck Marocain, spahi de 2e classe au 2e régiment de spahis. Viol et meurtre. 20 novembre 1917 Mardi,
7h10 Angoulême
Charente Augustin Tissier 54 ans, fermier à Touverac. Endetté, dut vendre sa propriéta à son voisin, Théophile Furet. Le 29 avril 1917, Furet, permissionnaire (il était mobilisé), va visiter sa nouvelle ferme avec son épouse. Tissier l’abat d’une cartouche de fusil de chasse en pleine poitrine, avant d’aller manger, se raser et se dénoncer aux gendarmes. 06 septembre 1917 05 décembre 1917 Mercredi,
7h23 Vincennes René Gaston Robert Minangoin 33 ans, adjudant au 19e escadron du train des équipages, ancien dessinateur à la Compagnie de chemins de fer. Voulant refaire sa vie, profite d’une balade en barque sur la Seine, à Villennes-sur-Seine (Seine-et-Oise) le 03 mai 1917 pour noyer sa femme Yvonne et ses deux enfants, Gaston, 9 ans, et Odette, 5 ans. Arrive sur place à 7h20. Se rend au poteau d’un pas ferme, cigarette aux lèvres. Refuse de se laisser bander les yeux, regarde une dernière fois la photo de son épouse et de ses enfants qu’il avait dans la poche. Fusillé au Polygone de la Maison-Blanche. Première exécution par fusillade en région parisienne d’un criminel de droit commun depuis le début de la guerre. 04 septembre 1917 18 février 1918 Lundi,
6h55 Vincennes Philibert Margottin 22 ans, soldat. Déserteur évadé à quatre reprises, arrêté le 5 juillet 1917 à Bobigny en compagnie de Camille Pygmalion, 18 ans, blesse de de deux balles de revolver dans le visage le gendarme Ramada puis s’enfuit vers Pantin. Tue d’une balle dans le ventre le bigadier Billon, blesse les sous-brigadiers Forêt et Petrez, les agents Bougrain et Dubail, puis abat de deux balles dans la tête le gendarme Boussedayne. Pygmalion, condamné à mort également, est grâcié. Reveillé à 5h45. Dormait bien. Peu d’émotion, s’habille seul, fume plusieurs cigarettes. Parle avec l’avocat, Me Valud, qu’il prie d’aller voir sa soeur pour lui dire que sa dernière pensée fut pour elle. Déclare : « Je reconnais que j’ai mérité le châtiment, et d’ailleurs, j’aime mieux mourir que de rester ainsi enfermé. » Demande à parler avec l’aumônier, se repent et promet d’expier avec courage. Descend de voiture sur place, va d’un pas ferme vers le poteau, refuse qu’on lui bande les yeux. Quand on l’attache, crie « Camarades, visez droit au coeur. » Coup de grâce donné par un adjudant. Fusillé à la Caponnière. 04 décembre 1917 26 mars 1918 Mardi,
6h Furnes (Belgique) Emiel Ferfaille 26 ans, maréchal des logis dans l’artillerie. Le 27 octobre 1917, dans un champ de Furnes, tue à coups de marteau et étrangle sa maîtresse Rachel Ryckewaert, 20 ans, domestique de ferme, enceinte de quatre mois (Ferfaille étant le père) et dont il voulait se séparer après l’avoir trop hâtivement demandée en mariage. Exceptionnellement, la grâce est refusée par le roi – comme pour douze autres soldats, dont trois meurtriers, durant la guerre -, mais précise que l’exécution se fera par la guillotine, ce qui n’était pas arrivé depuis 1863. Faute d’exécuteurs sur place, la France prête bourreaux et guillotine à la Belgique. Après un périple en train et en camion, l’équipe arrive en retard d’une journée. Ville sous les bombardements : on monte la machine sur la grand-place, puis on se résout à la transférer dans la cour de la maison d’arrêt locale, en laissant les portes ouvertes, publicité oblige. A son réveil, hébété Ferfaille gémit : « C’est impossible ! Le roi n’a pas voulu ça ! C’est affreux… la peine de mort n’existe plus. Mon Dieu ! Sauvez-moi ! » Une bombe tombe tout près, faisant exploser les vitres du greffe, et Ferfaille redouble de cris : « Je ne veux pas mourir comme ça ! Je veux aller me battre, me faire tuer pour mon pays ! Mais pas ça ! » Deibler, paniqué, presse le mouvement. Le condamné crie : « Vive la Belgique ! » avant de basculer. Une trentaine de spectateurs présents à peine. 29 janvier 1918 12 avril 1918 Vendredi,
5h35 Lyon
Rhône Charles Flaguais 28 ans, jockey, déserteur assassin de son caporal, se rend le 27 mai 1917 chez Aude-Benoîte Gaty, veuve Rollin, demeurant au hameau de Mérège, à Saint-Didier de Chalaronne (Ain). Sous prétexte d’acheter de la paille, il se fait offrir un verre de vin et tue la veuve Rollin à coups de maillet et d’un poids de 5 kgs avant de voler 2.400 francs en or. Condamné une première fois à Bourg-en-Bresse, arrêt cassé, rejugé par les assises du Rhône. S’attendait à mourir. Entend la messe, se confesse, communie, et demande à l’aumônier de dire adieu à ses parents en son nom. Arrivé devant l’échafaud, salue ses gardiens : « Bonsoir, Messieurs ! » Peu de monde présent, temps clair. 10 septembre 1917, 24 janvier 1918 17 avril 1918 Mercredi,
5h40 Rouen
Seine-Inférieure Gaston Declercq 33 ans, facteur. Satyre assassin de Marcelle Deuwel, fille de sa voisine, 6 ans, à Loon-Plage (Nord) le 13 juin 1917. Il l’attira chez lui en lui offrant un bouquet de fleurs, et quand il tenta de la violenter, elle se débattit. Il l’attrapa par les pieds, lui fracassa la tête sur le carrelage, puis abusa d’elle. Le lendemain matin, après avoir coupé une mèche de cheveux en souvenir, il alla discrètement enterrer le corps dans un champ de pommes de terre. Il avoua peu après que les gendarmes aient retrouvé le corps. Douai, siège des assises du Nord, étant trop proche du front, Declercq fut condamné à Rouen. Entrée des officiels à 5h05. Réveillé depuis 3 heures selon un rituel qui le persuadait que, si personne n’était venu lui rendre visite à cette heure-là, il bénéficierait de 24 heures de sursis. « J’aurai du courage », dit-il. Il s’entretient avec Me Lecrosnier et lui donne un souvenir pour ses parents restés en pays envahi, et le prie de leur transmettre une pensée et des regrets. A la chapelle, se confesse, entend la messe et communie. Au greffe, confirme qu’il aura du courage, puis discute avec son avocat et remercie les gardiens pour les soins qu’ils eurent pour lui et qu’il reconnaît ne pas mériter. Fume une cigarette et refuse la tasse de café au rhum. Arrivé place Bonne-Nouvelle, très ferme. Embrasse deux fois le prêtre, puis le crucifix. 20 février 1918 24 mai 1918 Vendredi,
4h45 Versailles
Seine-et-Oise Emile Van Der Massen 46 ans, ouvrier agricole, Belge. Tua le 11 décembre 1917 à Blandy deux compagnons de travail, belssé M. Gauthier, régisseur, et blessa grièvement deux gendarmes venus l’arrêter à Sermaises (Loiret). Refuse de signer son recours en grâce et écrit au président de la République pour y solliciter son exécution. Réveillé à 4h15. Dormait profondément. « Je pensais que mon exécution n’aurait lieu que la semaine prochaine. », dit-il, se fiant aux traditionnels quarante jours qui séparent condamnation et exécution. Le procureur Roux lui demande s’il a des révélations à faire : « Absolument rien. » S’habille. Pendant qu’on lui coupe les cheveux, parle à son avocat : « Dans l’autre monde, maître, je prierai pour vous et aussi pour M. le procureur de la République. » A l’interprète flamand, M. de Goyper, déclare : « Je vous demande de faire savoir que je meurs en bon chrétien, avec un profond repentir. Dites aux journalistes que je suis mort sans peur, en véritable Flamand digne de sa race. J’engage ceux qui seraient tentés de suivre une mauvaise voie à réflechir, et surtout à éviter les mauvaises fréquentations. En mourant dignement, j’espère effacer une partie du mal que j’ai fait. » Entend la messe, communie en compagnie de l’abbé Gézelle, vicaire d’Ypres, et d’un prêtre hollandais. Au greffe, charge l’interprète de donner à sa mère son chapelet et ses deux livres de messe. « Vous direz à ma bonne et vieille maman que ma dernière pensée a été pour elle. » 29 avril 1918 01 août 1918 Jeudi,
4h40 Rouen
Seine-Inférieure Camille Carpentier 27 ans, ouvrier en usine dans la région d’Amiens. Sous prétexte qu’il n’avait pas de quoi les nourrir, tua en les étouffant les deux fillettes (3 mois et 6 mois) qu’il eut avec sa maîtresse en 1916 et 1917 : la Somme étant trop proche du front, son procès eut lieu à Rouen. Réveillé à 4h. Malgré les deux alertes de la nuit, dort profondément. Abattu par la nouvelle, convaincu d’être gracié après le 14 juillet. Pleure quelques secondes, puis discute avec Me de Beaurepaire, son avocat. Soutenu par les gardiens pour aller à la chapelle. Se retourne sans cesse durant la messe. Communie. Au greffe, redevient impassible. Très pâle, descend du fourgon, et a un vif moment de panique, résistant aux aides qui ont vite raison de lui. 17 mai 1918 06 août 1918 Mardi,
5h30 Nantes
Loire-Inférieure Koli ben Ameur Saouchi 30 ans, Algérien, travailleur colonial. Au soir du 07 janvier 1918 à Brest, avec deux complices, tend un guet-apens à son coreligionnaire et collègue Bennour pour le dévaliser. Bennour est frappé de 18 coups de matraque, dont trois mortels, mais survit assez longtemps pour désigner le nommé Mekki comme l’un de ses agresseurs. Mekki et Madaoui, condamnés à mort, sont graciés. Prévenu par le lieutenant Legrand, répond : « C’était écrit », puis s’habille, résigné. Refuse le rhum que lui propose son avocat, Me Lemoyne, mais boit un bol de café tout en demandant à son défenseur d’écrire à son père. Conduit en auto, en compagnie de gendarmes, d’un goumier interprète et d’un marabout. Arrivé sur le terrain nord du stand de la Porterie sous une pluie fine, est conduit au poteau en priant, n’écoute qu’à peine la lecture du jugement, puis s’agenouille seul, les yeux bandés. 16 avril 1918 08 août 1918 Jeudi,
4h50 Paris Felino Vicini 28 ans, Egyptien. Viole et étrangle avec une cordelette Catherine Léger, épouse Michel, 29 ans, prostituée, dans un hôtel, au 38, rue de Douai, le 03 juillet 1917. Vola à sa victime 500 francs et des bijoux. Auteur d’un assassinat en 1913 envers un photographe du boulevard des Batignolles. Réveillé à 4h30, couché tout habillé sur son lit, se lève dès qu’il entend la clé tourner dans la serrure : « Je vous attendais, messieurs, je m’excuse de vous faire lever de si bonne heure. » S’asseoit à sa table et écrit un dernier mot sur une lettre entarmée la veille. Entend la messe, communie. Boulevard Arago, en voyant les gens présents, dit avec ironie : « C’est trop d’honneur. Adieu messieurs. » L’abbé Geispitz l’embrasse. Il lui répond : « Adieu, monsieur l’aumônier. » Toise la guillotine un instant avant d’être basculé. 18 février 1918 21 août 1918 Mercredi,
5h Marseille
Bouches-du-Rhône Jean-Baptiste Bourda PARRICIDE, 27 ou 31 ans. Soldat au 6e Régiment d’infanterie coloniale, tua à coups de hache dans la nuit du 19 au 20 décembre 1917 sa grand-mère maternelle, la veuve Rouvier, au hameau de Malesvieille, à Lesperon (Ardèche), avant de voler 50 francs, un sautoir en or et de mettre le feu à la maison. Entend la messe. Va calmement à la mort, en tenue de parricide. Fusillé au champ de tir du Pharo. 6 juin 1918 31 août 1918 Samedi,
6h30 Chars (Seine-et-Oise) Abdallah ben Ahmed 21 ans, Marocain, cultivateur, tirailleur de 2e classe au 1e RTM. Le 01 août 1918, à Gouy-les-Groseillers (Oise), agresse et viole Sophie Froidure, veuve Debouverie, avant de la tuer. 05 août 1918 02 septembre 1918 Lundi,
5h30, 5h35 Draguignan
Var Armand Spadoni
et
Jean André Grilli 20 ans, manoeuvre, insoumis et 19 ans, matelot, déserteur. Tuèrent à Gassin le 15 février 1918 le couple Antoine et Marie Daumas, propriétaires cultivateurs pour les voler, avec la complicité du neveu des victimes, Lucien Bergon, 16 ans. Bergon est condamné à vingt ans de prison. Réveillés à 4h45. Très calmes, comme résolus. Après la messe, Spadoni manifeste le désir de boire du champagne, et le directeur va chercher une bouteille dans sa réserve personnelle. Après avoir fumé une cigarette chacun, Grilli demande à écrire à ses parents, message dans lequel il leur demande de supporter sa mort avec courage. Devant la guillotine, Spadoni, cigarette aux lèvres, va à l’échafaud en criant : « Au revoir à tous ! » Grilli meurt avec autant de calme et de courage. Pluie fine durant l’exécution. 14 juillet 1918 09 septembre 1918 Belrupt-en-Verdunois (Meuse) Laboué Diop Samba 33 ans, Sénégalais, soldat de 2e classe au 53e RIC. Meurtre d’un de ses camarades à Belrupt, et rébellion à main armée. 27 septembre 1918 Vendredi,
6h45 Bordeaux
Gironde Charles Ménesplier PARRICIDE, 35 ans, charpentier et chauffeur d’automobile. Assomme sa mère à coups de gourdin à Paillot le 23 mai 1917 pour la voler et mit le feu à la maison pour effacer les traces. Déjà condamné pour vols et aussi tentative de meurtre sur agent de police. Réveillé à 6h. « Bien, répond-il. Ne craignez rien, maître, je saurai mourir. » S’asseoit sur son lit, et s’adresse à nouveau à son avocat, Me Chancogne. « Je vous l’avais bien dit : Dieu le voulait. Je savais très bien qu’en dépit de votre dévouement, mon destin serait accompli. » Conduit à la chapelle, se confesse et entend la messe. Au greffe, refuse la cigarette et boit une demi-tasse de café au rhum. Aux encouragements du prêtre, répond d’une voix visiblement mal assurée : « Vous êtes le fils de Dieu, vous n’avez pas à me plaindre. » Quand on lui lie les chevilles, grimace : « Ca, c’est l’imitation de Jésus-Christ. » Quand les ciseaux découpent son col : « Ah, c’est fini, ma bronchite… » Tente de saluer le gardien-chef, mais déjà poussé vers l’extérieur par les aides. Face à la machine, montée dans la cour commune à la prison et au palais de justice, entend la lecture de la sentence. « Je veux parler »… Il n’en a pas le temps. 24 juillet 1918 25 octobre 1918 Le Portel
Pas-de-Calais Pierre Joseph Creton 31 ans, soldat au 8e RI. Meurtre. 25 novembre 1918 Lundi,
6h40 Versailles
Seine-et-Oise Antonio Guerrero y Guerrero 26 ans, Guatemaltèque, mécanicien dentiste. Pédophile récidiviste. Satyre assassin de Carmen Berman, 7 ans, qu’il viola et étrangla le 10 juillet 1917 au 172, rue Legendre à Paris (17e), et se débarrasse du corps empaqueté sous un banc de la gare du Nord. Condamné à Paris, arrêt cassé, recondamné à Versailles. Réveillé à 5h55. « Ah bon ? Je vais vous suivre. » Demande un prêtre : le vicaire de l’église Notre-Dame le fait se confesser et lit la messe. On lui propose une cigarette, mais en raison de la crise du tabac, il faut aller en demander une aux spectateurs « privilégiés » : c’est un officier américain qui l’offre. Dit n’avoir aucune déclaration, et ne prononce aucun mot de repentir. Sursaut de peur en voyant la guillotine, on doit le porter sous le couperet. 25 juin 1918, 26 octobre 1918 07 décembre 1918 Samedi,
7h32 Orléans
Loiret Fong Kai Wo Cantonais. Assassine début 1918 un de ses compatriotes de trois coups de revolver pendant que celui-ci dormait au Port-Sec. Quatre autres Chinois accusés de complicité acquittés, l’autre principal acusé, Tchang-Yi, bénéficie d’un délai supplémentaire pour un examen mental. Réveillé à 6h30 par le capitaine Moinet, fait preuve de courage. Mange un gros morceau de pain, deux quarts de café et trois verres de marc coup sur coup. Fume plusieurs cigarettes, demande à écrire à sa mère, mais ne parvient qu’à tracer que quelques caractères avant d’abandonner. Grimpe dans un fourgon automobile en compagnie de l’interprète et des gendarmes jusqu’au stand des Groues. Marche vers le poteau, planté au pied de la butte, d’un pas assuré, mais quand on lui bande les yeux, s’écrie en cantonais : « Les Français ne sont pas justes ! » Tombe sur le côté gauche avant d’être achevé par un maréchal-des-logis. 24 juillet 1918 21 décembre 1918 Samedi,
7h05 Caen
Calvados Clément Tranquet 35 ans, terrassier, déserteur. Meurtre et vol qualifié de M.Lecomte, 73 ans, la tête cassée à coups de sécateur, le 27 mai 1918 à La Folletière-Abenon. Au réveil, à 6h35, on ôte au condamné la camisole et les fers. Il affirme n’avoir aucune déclaration à faire. Après la messe et la confession, il est conduit au parloir, boit deux verres de café et un de rhum avant que les aides ne procèdent à la toilette. En voyant la guillotine, Tranquet titube. L’abbé Bacon lui fait embrasser le crucifix. En franchissant le seuil de la porte, le condamné dit : « Un, deux… Allons-y ! » 18 octobre 1918 04 février 1919 Mardi,
6h30 Lyon
Rhône Claude Cuisinier 22 ans, déserteur du 155e régiment de ligne. Tua à coups de revolver l’agent cycliste Journot qui le traquait le 20 mai 1918 à Lyon. Dormait à l’entrée des officiels. Aucune réaction à la nouvelle. Pendant la toilette, pris de regrets, gémit : « Pardon, maman ! Pardon ! » Rappelle à son avocat de donner les deux lettres qu’il lui a remises quelque temps auparavant (pour sa mère et pour sa soeur, il y en avait une troisième pour sa maîtresse, mais Cuisinier l’a récupérée l’avant-veille) Il va courageusement à la guillotine. Peu de monde présent, temps brumeux. 29 octobre 1918 18 février 1919 Mardi,
6h17 Digne
Basses-Alpes Lucien Giraud 19 ans, journalier. Tue à coups de fusil Mme Eudoxie Isoard, 75 ans, son fils Daniel Isoard, 30 ans, et son petit-fils Amielh Kléber, 11 ans, le 18 avril 1918 à la ferme des Hauts Cognets, à Thoard afin de les voler. Temps pluvieux. Réveillé à 5h30. Fond violemment en larmes à la nouvelle. Accepte d’entendre la messe. Va jusqu’à la guillotine en pleurs, il faut presque le traîner pour l’y conduire, et pousse un hurlement en découvrant la machine. Foule assez dense (pas d’exécution à Digne depuis 63 ans). 16 décembre 1918 09 avril 1919 Mercredi,
6h20 Paris X… dit
« Giulio Sanazzaro » Véritable nom inconnu, probablement italien, cuisinier, 27 ans. Bat à mort et étrangle avec une serviette Henriette Boulogne, veuve Alba, tenancière d’un hôtel rue Croix-des-Petits-Champs (1er arrondissement) le 27 mai 1918 et dérobe environ 5.000 francs en bons de la Défense nationale et billets de banque. Deux complices : Guido Morra, garçon de café, condamné à perpétuité. Umberto Sacco condamné à mort et grâcié in extremis (voir récit exécution ci-contre). Réveil à 4h50. Sanazzaro et Sacco accueillent la nouvelle avec calme. Sacco seul accepte d’entendre la messe, et pendant qu’il est absent, Sanazzaro fait des aveux au juge d’instruction : Sacco n’a appris le crime qu’après qu’il l’ait commis, il a aidé à cambrioler, mais il ignorait les intentions de son complice. Quand on lui demande pourquoi ce mensonge, Sanazzaro répond : « Je ne sais pas… Je croyais qu’en France, on n’exécutait pas deux condamnés pour le même crime. » Quelques appels plus tard, on surseoit à l’exécution de Sacco. Sommé de dire sa vraie identité, Sanazzaro refuse : « Non, cela, je ne peux pas. Tout ce que je peux dire, c’est que j’appartiens à une honorable famille. Je ne dirai pas mon nom, on croira que je suis mort au front, en combattant. Je suis heureux d’avoir sauvé mon ami. » Au greffe, Sacco est informé de la mesure le concernant. Les complices se saluent une dernière fois, et Sanazzaro grimpe dans le fourgon calmement. Meurt courageusement. 30 décembre 1918 03 juin 1919 Mardi,
4h10 Nantes
Loire-Inférieure Joseph Perrot 23 ans, souteneur, soldat déserteur, refugié à l’hôtel du Petit Saint-Nicolas à Nantes, y tue le 15 janvier 1919 l’inspecteur de police de la Sûreté Jean Le Buzit venu l’arrêter. Après avoir grièvement blessé un agent, il fut maîtrisé par deux autres. Son surnom était « Pas de chance ». Réveillé à 3h45. « Il vaut mieux en finir. Je n’ai guère eu de chance. » S’entretient avec l’aumônier, entend la messe. Au greffe, boit un bol de café avec du rhum. Fume une cigarette et discute avec son avocat Me Dortel. La toilette est très rapide. En sortant, sentant une brise matinale, il remarque : « Pour mon dernier matin, il fait du vent. » Se laisse ôter la cigarette qu’il tète encore et se dirige seul vers la bascule. 10 mars 1919 21 août 1919 Jeudi,
5h Paris Pierre Joseph Grisard 20 ans, blessé de guerre en convalescence. Assassin de Berthe-Françoise Sacavin, épouse Delajon, 33 ans, marchande de vin, qu’il tue le 16 août 1918, 70, boulevard des Batignolles, en l’étouffant, l’étranglant et en lui martelant le crâne d’une quinzaine de coups de silex pour voler 4.300 francs. Son complice Alexis Didier est condamné à perpétuité. Au réveil, à 4h15, maîtrise son émotion. S’habille, se confesse, mais refuse d’entendre la messe. Boit un verre de rhum et fume une cigarette. Aucune déclaration à faire, s’entretient avec Me Hultin, remplaçant Me Campinchi, à qui il demande de faire parvenir ses effets personnels à sa mère. Exécution sans histoires. 23 mai 1919 30 août 1919 Samedi,
6h15 Vincennes Constant Moujot
et
Claudius Janin Etranglent dans la chambre de Moujot le 28 janvier 1918 Louise Cormier, femme de chambre, maîtresse de Moujot, laissent son corps sur le trottoir de la rue Bousset, enveloppé dans une blouse camouflée d’artilleur, avant d’aller fouiller son domicile et de voler 400 francs. Le 5 août 1918, rue Vallier à Levallois, étranglent avec son tablier Mme Léonie Soyer, débitante, pour lui voler 5.000 francs. Deux verres et une bouteille de vin entamée portant leurs empreintes permet leur arrestation. Réveillés à la prison du Cherche-Midi à 5h. Moujot est le premier… mais il est habillé et caché derrière la porte, une barre de fer à la main fraîchement déscellée du mur. Tentant d’assommer le commissaire du gouvernement, il ne fait qu’atteindre un gendarme au visage. Le coup est heureusement amorti par le képi. Maîtrisé, il reste muet. Janin ne cause aucun problème. Refusent la messe. Grimpent dans la camionnette en direction de la Caponnière. Sur place, vont au lieu d’exécution entourés par deux prêtres, et refusent de se laisser bander les yeux. 02 juin 1919 30 septembre 1919 Lundi,
6h30 Lille
Nord Bougelli Kaddour Ould Mohamed Travailleur au 10e Régiment colonial. Assassine à Salomé (Nord) le soldat Gustave Lehant, son chef de groupe le 22 juin 1919. Réveillé à 6h à la Citadelle par le lieutenant Boucher, remplaçant le commissaire du Gouvernement. Tremble fortement quand l’interprète Amar Kabaltra lui traduit les paroles de l’officier et répond à ses exhortations d’une voix : « Plus de courage du tout ! » Accepte en pleurant l’assistance de l’aumônier Régent malgré sa religion, gémit et prie pendant plusieurs minutes avec le prêtre. Tout au long du chemin jusqu’aux fossés, au pied des remparts, continue à psalmodier, mi-pleurant, mi-priant, et doit être soutenu tout au long du chemin. Attaché, les yeux bandés, il entend la lecture du jugement par l’adjudant-greffier Bouvelle, avant que l’adjudant-chef Duthilleul ne commande le peloton. Toutes les balles touchent le condamné, mais le sergent-maître d’armes Mans donne tout de même le coup de grâce. Enterré au cimetière du Sud. 26 juillet 1919 23 octobre 1919 Jeudi,
6h20 Rennes
Ille-et-Vilaine Louis-Marius-Joseph Lion Soldat du 136e régiment d’infanterie. A Fouchy (Bas-Rhin), le 19 avril 1919, tue à coups de manche de pelle Célestine et Thérèze Autzenberger, 76 et 83 ans, rentières, pour les voler. Condamné à Nancy par le Tribunal militaire de la 20e Région mais incarcéré à Rennes (!). Réveillé à 5h. « J’aurai du courage : j’ai fauté, je dois expier. » Passe une veste bleu horizon, s’entretient avec l’abbé Lefoul. Demande à écrire à ses parents, puis assiste à la messe et communie. Quitte la prison militaire à 5h40 en camion. Arrivé au Polygone, près de la butte de tir, blêmit en descendant du camion, puis se reprend et va d’un pas ferme au poteau auquel il s’adosse sans aide. On l’attache et on lui bande les yeux, avant qu’on ne lise à voix haute le jugement. Se met à genoux pour être abattu : trois balles l’atteignent au front et lui font sauter le calot de la tête, mais un sergent donne quand même le coup de grâce. 24 août 1919 29 novembre 1919 Samedi,
6h45 Paris Henri Edmond Borel 19 ans, garçon boucher. Tua – en plein jour – de 30 coups de couteau Edmond Roffé, 65 ans, employé d’octroi à Noisy-le-Sec le 21 mars 1919 pour voler 233 francs. Réveillé à 6h. Aucune surprise, s’habille sans dire un mot. Au greffe, fume une cigarette, boit un verre de rhum, entend la messe. Calme tout au long. 22 août 1919 03 janvier 1920 Samedi,
7h45 Le Mans
Sarthe René Desiré Saumureau 32 ans, chaudronnier, soldat au 166 RIA, ancien Bat d’Af, délinquant multirécidiviste. Le 24 septembre 1916, à Saulchoy (Pas-de-Calais), insulte et frappe à coups de poing son supérieur, le sergent Sarda, puis tenta de l’abattre de deux coups de pistolet automatique, le blessant gravement à la cuisse, en apprenant que les voies de fait le conduiraient de toute façon en conseil de guerre. S’échappe le 20 octobre, et est condamné à mort par contumace le 11 janvier 1917. Le 19 janvier 1918 à Marseille, après une rixe dans le bar de l’hôtel des Alliés, rue des Petites-Maries, tire à coups de revolver sur trois consommateurs, Mazerma, Mohamedi et Dalmasso, et finit par abattre Mazerma alors que celui-ci, cherchant à s’échapper, s’engouffre dans l’entrée de l’hôtel de Grenoble et de Savoie, boulevard d’Athènes. Saumureau est arrêté le 23 janvier, avant d’être condamné aux travaux forcés à perpétuité par les assises des Bouches-du-Rhône le 08 juin 1918, de même que son complice Joseph Gatti, 38 ans, tandis qu’un troisième inculpé, Victor Simon, 35 ans, est acquitté. Réveillé à 6h45 par le capitaine Sergent, commissaire du gouvernement, dormait bien. Dit qu’il ne regrettera personne. Assiste à la messe de l’abbé Fontaine, puis communie. Conduit au lieu d’exécution, la butte de tir de Pontlieue, en voiture cellulaire militaire, parle tout le long avec calme, affirme une nouvelle fois qu’il ne regrettera personne, sauf une femme qu’il aimait et qui lui écrivait durant son incarcération. Refuse de se laisser attacher au poteau et de se laisser bander les yeux. Comme on l’y contraint, insulte le président de la République, les ministres, les députés et la société, ttaché au poteau, avant de crier : « Vive l’anarchie ! A bas l’armée ! Vive l’Allemagne ! A bas la France ! » Alors que le peloton commandé par l’adjudant Lecomte se met en position, il commence à dire : « Maintenant, Messieurs, je suis à votre dispo… » La salve l’interrompt net. Coup de grâce porté par le sergent Janvier. 07 octobre 1919 26 janvier 1920 Amiens
Somme Chow Pao Wen et Ho Te Cheng Chinois. Assassinat et tentative de vol qualifié. Fusillés dans les fossés de la citadelle. 25 février 1920 Mercredi,
7h20 Tours
Indre-et-Loire Albert Fournier 35 ans, ouvrier agricole. Le 20 août 1919, à la ferme de la Brissonnière, commune de Chambray-les-Tours, abat d’un coup de fusil dans le dos Henri Monmarché, 58 ans, cultivateur, son ancien employeur, puis fait subir le même sort à sa soeur, Marie-Louise Vouteau, 66 ans, puis à Marie Thillier, 23 ans, domestique, dont il viole le corps. Pille la maison, empoche pièces d’or et billets de banque, puis se fait une omelette dans la cuisine. Réveillé à 6h45, dormait profondément. Aucun trouble, promet d’avoir du courage. Demande à entendre la messe et communier. Ne dit plus un mot. Refuse la cigarette de Me Guibaud, accepte un verre de rhum, d’une main tremblante, puis se reprend assez vite. Durant la toilette, très calme. Encadré par les aides et précédé par le chanoine Arnault, franchit la cour de la prison et arrive boulevard Béranger. Embrasse le crucifix et reçoit un baiser de l’aumônier avant d’être basculé. 18 décembre 1919 01 avril 1920 Jeudi,
6h05 Paris Auguste Genevrois 29 ans, ajusteur, déserteur de l’armée belge. Ne pouvant règler son loyer, tue à Saint-Denis le 23 novembre 1919, sa logeuse Mme Ariès, vole 11.000 francs, met le feu à la maison, puis, croisant dans l’escalier le père de la victime, M. Jean Fèvre, en s’enfuyant, le tue à coups de hachette. Réveil à 5h15. Promet d’être courageux. S’habille, s’entretient avec l’aumônier, mais n’entend pas la messe, ayant déjà accompli ses devoirs trois jours plus tôt. Refuse cordial et cigarette, mais demande à écrire un petit message à sa fiancée, à qui il dit adieu et la prie de ne pas oublier ses parents. S’étonne que la justice laisse faire son exécution, compte tenu de ses services rendus pendant la guerre au sein des sections de contre-espionnage. Au pire pensait-il être confié aux autorités militaires belges. Tremble en écrivant, et dit : « Vraiment, ce n’est pas l’instant de manquer de courage ! » Confie son message au père Geispitz. Demande que son corps ne soit pas remis à la Faculté. Pendant qu’on l’attache, râle : « Serre pas si fort, mon vieux ! » Public presque complètement absent derrière les barrages. Au pied de la machine, s’arrête une seconde et la regarde sans faiblir. Embrasse l’aumônier et lui dit « Faites le nécessaire, monsieur l’aumônier ! Adieu ! » 18 décembre 1919 08 juin 1920 Mardi,
3h05 Rouen
Seine-Inférieure Alfred Maquennehen 41 ans, charretier. Assassina en leur brisant la tête à coups de pieu de fer Mme Turquet et de sa bonne Maria Numelle, le 03 août 1919 à Mortemer, et s’enfuit sans pouvoir ouvrir le coffre-fort contenant les 30.000 francs qu’il convoitait. Très peu de gens présents. Réveil à 2h45. Doit être secoué plusieurs fois, s’étire, se frotte les yeux. Pousse un cri de stupeur, puis demande à son avocat Me Pellerin « Est-ce que je vais être exécuté aujourd’hui ? » Entend la messe et communie. Au greffe, refuse la cigarette que lui propose un gardien en disant : « Non merci, je ne fume que le Nil ! », mais finit par l’accepter, puis prend le verre de rhum. Descend du fourgon en tournant le dos à la guillotine, puis laisse tomber sa cigarette, embrasse le crucifix, et se laisse basculer. 25 février 1920 12 juin 1920 Samedi,
3h40 Epinal
Vosges Marc-Paul Ballyet 31 ans, soldat au 47e régiment d’artillerie de campagne. Pendant une permission, tue d’un coup de hachette le 14 janvier 1918 à Pontarlier Me Emile Mignot, notaire, pour lui voler 8.045 francs. Condamné par le Conseil de guerre de Besançon, arrêt cassé, réjugé par le Conseil de guerre de la 21e région. Incarcéré à la caserne Schneider, route de Golbey. Quand le commandant Jacquet, commissaire du gouvernement, entre dans la cellule à 3 heures, sa jambe artificielle lui fait faire un faux pas. Sa chute réveille le condamné, qui pousse un cri de stupeur. Bien que pensant au début qu’on lui annonce que son exécution aura lieu dans quelques jours, Ballyet se montre courageux et ne dit pas un mot. Il se confesse à l’aumônier Minod, communie, accepte un verre de rhum. Après dix minutes de trajet, arrive devant la prison de la Loge-Blanche, près de la route de Remiremont. Pâle, titubant, doit être soutenu pour les derniers mètres avant la machine. 12 novembre 1919, 08 mars 1920 06 juillet 1920 Mardi,
3h55 Vesoul
Haute-Saône Marcel Lamielle 26 ans, conducteur de bestiaux. Tua à la hache M.Thouvenin, 54 ans, et la bonne Joséphine Zimmermann, 28 ans, et blessa Mme Thouvenin, 53 ans, et la bonne Mme Fleury, le 07 janvier 1920 à Larivière. Mobile : se procurer de l’argent, Lamielle devant se marier huit jours plus tard. Temps couvert. Réveillé dans la nuit par les aboiements d’un chien dérangé par l’agitation autour de la prison. Se rendort. Eveillé à nouveau par les autorités à 3 heures : « Je croyais que ce ne serait pas encore aujourd’hui… mais autant que plus tard ». Se lave un peu, boit plusieurs verres de rhum – l’équivalent d’un demi-litre. Entend la messe et communie avec ferveur, accompagné à sa demande par deux gardiens avec lesquels il a sympathisé en détention. Ne parle pas. Calme durant la toilette. Soutenu jusqu’à la porte principale par les gardiens avant d’être poussé sur la bascule par les aides. 05 mai 1920 09 juillet 1920 Vendredi,
4h30 Evreux
Eure Constant Sternat 20 ans, déserteur. Le 14 juillet 1919, tua à coups de bâton la Veuve Maréchal, 72 ans, à Normanville. Le 11 août, à Richeville, agresse la veuve Letellier ; le 12, Mme Leteurtre à Guitry ; le 14, Mme Debret à Gaillon ; le 17 septembre, Mme Viel à Gamaches ; arrêtés le lendemain. Raoul Bloquet, 19 ans, Albert Benoist, 18 ans sont condamnés à perpétuité. Delphin Bloquet, 17 ans, est acquitté faute de discernement et envoyé en maison de redressement. Réveil à 3h30. S’habille seul. Refuse d’assister à la messe, mais se confesse. En descendant du fourgon, est embrassé par le prêtre. La guillotine est dressée près de la friche du Buisson, au carrefour de la route de Saint-André et de chemins vicinaux, à 200 mètres à l’arrière de la prison. Très peu de gens présents, exécution très rapide. 13 avril 1920 13 juillet 1920 Mardi,
4h22 Nantes
Loire-Inférieure Jean-Marie Henri « Bébert » Laval 26 ans, titulaire de la croix de guerre avec trois citations. Tue d’un coup de revolver, à Nantes Pierre Mainguy, 48 ans, agent de la Surêté, le 12 octobre 1919 alors que celui-ci vient l’arrêter dans le cadre du cambriolage d’une bijouterie commis la veille. Ne dormait pas, se montre décidé. « Vous en faites pas ! J’en aurai, du courage ! » Il insulte les magistrats pour que ceux-ci sortent de sa cellule, lui permettant de parler à son avocat et d’entendre la messe. Pendant la toilette, il injurie les aides. Devant la guillotine, crache la cigarette qu’il a à la bouche et dit : « Adieu les amis ! » Un des aides, à sa demande, lui met entre les lèvres une mèche de cheveux de sa maîtresse et c’est ainsi qu’il est poussé sur la bascule. 17 mars 1920 14 août 1920 Samedi,
5h Montbrison
Loire Joseph-Régis Mathon 27 ans, berger. Le 22 décembre 1919, se rend chez ses anciens patrons, les Giraudet, à La Versanne. Abat d’une balle de revolver dans la tête M.Giraudet, manque tuer Mme Giraudet à coups de crosse sur le visage, et menace Mlle Giraudet pour qu’elle lui serve à boire et à manger. Au bout de quelques heures, profitant d’un instant d’inattention de l’assassin, la jeune fille s’enfuit et va prévenir les voisins. Mathon tente de les abattre, mais son arme s’enraye. Réveillé à 4h. Le procureur lui secoue l’épaule et lui demande s’il reconnaît qui il est. Devant sa réponse négative, il s’identifie. « Alors, je sais ce que ça veut dire. » En quittant la cellule, il passe devant celle d’un co-détenu, Deleuze, condamné deux semaines plus tôt, et lui lance : « T’en fais pas, mon vieux, je passe avant toi ! Je commanderai ton complet ! » Il fume une cigarette offerte par son avocat, refuse le rhum, mais boit deux gamelles de vin. En voyant la guillotine, montée devant la prison, il la contemple d’un air étonné, puis embrasse l’aumônier avant d’être basculé. 29 mai 1920 24 août 1920 Mardi,
5h Nancy
Meurthe-et-Moselle Djermane Areski ben Kaci Camelot, déserteur. Tue d’une balle dans la tête M.Louis David, 34 ans, employé des Postes, pour le voler, avec la complicité de Paul Pérotin, à Nancy le 07 mai 1919. Tous deux furent condamnés à mort. Réveillé à 3h55. Certain d’être exécuté, ne réagit pas. On lui fait croire que Pérotin sera exécuté juste après lui, alors que ce dernier vient d’être informé qu’il est grâcié. Converti en prison, parle avec l’aumônier. Il s’habille tranquillement, boit quatre verres de rhum et roule une cigarette. Devant l’échafaud, sous une légère pluie qui tombe par intermittence, embrasse le crucifix. 19 mai 1920 15 octobre 1920 Vendredi,
6h15 Douai
Nord Alphonse Dehaemne Prisonnier de guerre, en avril 1917, il s’évade d’un camp de concentration situé à Halluin, et assassina à Coolkerque (Belgique) son ami et ancien co-détenu Fernand Lagron. Pleure et crie son innocence jusqu’à la chute du couperet. Présence de la tante et de la mère de sa victime. 1ere exécution devant la prison de Cuincy, ouverte en 1907. 10 juillet 1920 09 novembre 1920 Mardi,
6h30 Montbrison
Loire Louis Deleuze 29 ans, ouvrier peintre en bâtiment. Tente de violer et assassine de trois coups de couteau dans la poitrine sa soeur Marguerite, épouse Rabeyrin, 21 ans, le 26 avril 1920 à Saint-Etienne. Réveillé à 5 heures 55, dort profondément. On doit le secouer plusieurs fois pour le tirer du sommeil, d’autant qu’il dort tourné contre le mur. Croyait en sa grâce. Semble plus étonné que touché par la situation : »Ben quoi, quand on est mort, on ne vit plus… » On l’aide à s’habiller. A la chapelle, entend la messe, communie : pris de faiblesse, les gardiens doivent le soutenir. Au greffe, refuse le verre de rhum mais demande du vin (il en boira 1/2 litre), puis une cigarette. A la porte de la prison, crache son mégot, embrasse le crucifix et se place bien en face de la bascule. 06 août 1920 28 décembre 1920 Mardi,
6h45 Bourg
Ain Eugène Fursat 33 ans, domestique de ferme. Tua de 17 coups de hache le 23 décembre 1917 le rentier Claude Guibert, son ancien patron, à Chaponost. Condamné à Lyon en juillet 1920, arrêt cassé. Réveillé à 6h. S’habille seul, impassible. Communie, entend la messe. Au greffe, demande cigarettes et rhum : « Vous ne pouvez pas me refuser ça, voyons ! » Puis il reproche à sa soeur de ne pas l’avoir aidé, demande encore tabac et alcool et promet à son avocat, Me Perraud, qu’il sera ferme jusqu’au bout. « On est un homme ! » La toilette est faite à 6h20. Comme le procureur demande si l’heure est venue, Deibler répond qu’il ne fait pas encore jour, et que la loi doit être respectée. L’attente durera 25 minutes ! Toujours buvant et fumant, Fursat fait une dernière déclaration : « Vous êtes bien bons, vraiment bien bons. Mais pourquoi qu’on gracie Brenner, Didier et pas moi ? Il n’y a de grace que pour la crapule. » Cigarette aux lèvres, va à l’échafaud dressé au ras de la dernière marche de l’escalier, n’ayant qu’un simple sursaut quand on le pousse sur la bascule. 29 septembre 1920 31 décembre 1920 Vendredi,
7h10 Paris Alfred Carré 22 ans, souteneur. Assassina Nicolas Laurent, un journalier, à Saint-Ouen le 15 novembre 1919 pour lui voler sa prime de démobilisation. Ayant remarqué que le fêtard montrait trop ostensiblement son argent, il l’attira dans un piège : pendant que Laurent avait des rapports sexuels dans un terrain vague avec Eugénie Desfossés, la compagne et « gagneuse » de Carré, il le tua d’un coup de couteau dans le coeur. Eugénie, traumatisée par le crime – elle connaissait les intentions malhonnêtes mais pas homicides de son compagnon – alla le dénoncer. Réveillé à 6h55. Doit être secoué pour ouvrir les yeux : « Ah, diable, je vois ce que c’est. » S’habille seul, en disant « Vite, vite ! » à l’aumônier qui lui propose son aide. Au greffe, pendant la toilette, ne dit rien sauf à la fin parce qu’on le serre trop fort. Boit un verre de rhum et fume une cigarette. En sortant du greffe, dit à l’aumônier : « Tout de même, ma famille aurait bien pu venir me voir. » Au pied de la guillotine, la regarde et dit : « Ah, te voilà, toi… Allez, et que ça ne traîne pas ! » 07 octobre 1920 03 février 1921 Jeudi,
6h45 Dunkerque
Nord Michel Bauw 21 ans, chef de la « Bande de Gravelines », auteurs de vols, viols et incendies. Avec la complicité de son frère et d’un certain Hennequart, abat à coups de pistolet les époux Albert et Louise Hontschoote, âgés de 72 et 68 ans, à Saint-Georges le 29 février 1920 et blesse la jeune bonne, Hélène pour voler 5.200 francs, des pièces d’argent et une montre en or. Ses principaux complices, son frère Henri, 17 ans, est condamné à perpétuité, et Hector Hennequart, 19 ans, est condamné à 15 ans de travaux forcés. Trois autres complices sont eux acquittés. Réveillé à 6 heures. Entend la messe, puis demande à écrire à son frère et à son père – leur mère est morte folle de chagrin en avril 1920. Au greffe, boit deux verres de rhum et fume une cigarette. Part à l’échafaud la tête haute, un petit sourire aux lèvres. 20 octobre 1920 10 février 1921 Jeudi,
6h20 Melun
Seine-et-Marne Albert Brossard 21 ans, tourneur et souteneur. Abattit à coups de revolver une aubergiste, la veuve Pauline Auber, 64 ans, et Jeanne Bouvier, sa domestique de 15 ans, à l’auberge des Rosiers de Valvins (Vulaines) le 12 janvier 1920 pour voler 170 francs. Son complice Henri Leclercq, plombier, 20 ans, fut condamné à mort et gracié. Réveillé à 5h45. Met quelques instants pour comprendre, puis rassure les officiels et promet de se montrer courageux. Au greffe, boit un verre de rhum et fume une cigarette, qu’il apprécie au point de dire : « Ah, ben ça au moins, c’était pas de la camelote ! » En franchissant les portes de la prison, crie : « Bonsoir, messieurs ! Pour une fois, la justice s’est trompée ! » 26 octobre 1920 09 avril 1921 Samedi,
5h20 Metz
Moselle Joseph-Auguste Béna 28 ans, mécanicien, vagabond. Ancien légionnaire, assassin de son patron M.Villemanse à Moyoeuvre-Grande le 17 mars 1920 pour le voler. Détenu à la prison militaire (située alors dans l’actuelle rue Maurice-Barrès). Au réveil, promet d’avoir du courage. « J’ai commis un crime, je suis prêt à l’expier. » Communie et entend la messe. Refuse le verre de rhum, puis se rend d’un pas ferme vers l’échafaud, dressé dans la rue. 11 décembre 1920 16 avril 1921 Samedi,
5h20 Mézières
Ardennes Léon-Marie Giquel 26 ans. Satyre assassin de la jeune Henriette Parisse, 5 ans, qu’il viola et tua à Attigny le 24 août 1920. 01 mars 1921 20 avril 1921 Mercredi,
5h30 Evreux
Eure Emilio « José Almandia » Echavarri 26 ans, anarchiste espagnol, déserteur. Le 29 mars 1918 à Arnières-sur-Iton, assassina de neuf coups de couteau Francisco Jimenez pour lui voler 2.000 francs. S’évade le 17 mars 1919. Condamné à mort par contumace le 24 janvier 1920. Réveillé à 4h45. Atterré en apprenant la nouvelle, pensait être gracié après neuf mois de condamnation. Mais se montre calme. Se confesse, entend la messe et communie. Pendant la toilette, grand fumeur, ne cesse d’allumer cigarette sur cigarette. Couché sur la bascule cigarette aux lèvres. L’aumônier est oublié dans la prison et ne peut accompagner le condamné jusqu’au pied de l’échafaud, dressé comme la fois précédente à la friche du buisson, à 200 mètres de la maison d’arrêt. 27 juillet 1920 10 mai 1921 Mardi,
4h50 Versailles
Seine-et-Oise Gaston Castin 20 ans. Assassin et voleur d’Auguste Goubel, ouvrier de culture, 60 ans, qu’il tua le 1er septembre 1919 à coups de couteau dans un bois d’Auvers-sur-Oise, où il fut trouvé dix jours plus tard, et ce pour le voler. Réveillé à 4h30. Dort profondément. Comprend immédiatement, et quand le procureur Beylot lui demande de faire preuve de courage, il répond : « J’en aurai, mais qu’on fasse vite. » Comme Me Manche, son avocat, lui demande s’il veut qu’on prévienne son frère, il répond par la négative et ajoute : « Si j’avais su que cela finirait ainsi, je me serais fait justice moi-même. ». Au greffe, boit deux verres de rhum, puis embrasse son avocat et le pasteur Monod. Un petit sourire aux lèvres, il regarde la guillotine de haut en bas avant d’être poussé dessus. 18 février 1921 14 juin 1921 Mardi,
4h07 Beauvais
Oise Kléber Boucher 25 ans, charretier. Etrangla ses camarades, les ouvriers Louis Tubeuf, 36 ans, et Maximilien Dhièvre, 27 ans, le 02 juillet 1920 à Rieux-Angicourt pour les voler. 09 mars 1921 17 juin 1921 Vendredi,
3h45 Boulogne-sur-Mer
Pas-de-Calais Albert Routtier Etrangla à Hâmes-Boucres Marie Lefebvre, cabaretière, 66 ans, dans l’après-midi du 05 octobre 1920 pour voler 2.485 francs, et fit passer le crime pour un suicide en pendant le corps à un clou fiché dans le mur. 15 mars 1921 30 août 1921 Mardi,
5h37 Paris Albert-Clément Philippe 20 ans. Tua à Vanves la veuve Victorine Roulleau, blanchisseuse, 47 ans, le 11 novembre 1920 de dix-neuf coups de socle de lampe à pétrole pour voler deux bons de la Défense et deux billets de banque. Son frère cadet Auguste, qui l’avait plus ou moins involontairement incité au « coup », est condamné à 5 ans de prison. Gémit au réveil, à 5h20 : « C’est bien malheureux, tout de même, oui, c’est bien malheureux. » Il renifle, agenouillé sur son lit puis s’habille sans aide et quitte la cellule. Au directeur de la prison et au procureur, il pérore : « Vous voyez, messieurs, j’ai tout mon sang-froid. » Il refuse les secours de la religion, la cigarette et l’alcool, mais promet à l’aumônier qu’il l’embrassera devant la guillotine. En descendant du fourgon, il achv ève une prière par ces mots : »Mon Dieu, donnez-moi du courage. » Il embrasse le père Geispitz, puis va seul vers la bascule. 28 mai 1921 02 septembre 1921 Vendredi,
5h58 Carpentras
Vaucluse Juan Cortès 18 ans, gitan Espagnol. Dans la nuit du 19 au 20 novembre 1920, à l’entrée de Bédarrides, tue d’un coup de couteau en plein coeur le maraîcher François Bayle, ancien Poilu, pour lui voler 450 francs. Son frère cadet, Lucian, 17 ans, est condamné à mort et sa peine commuée en 20 ans de travaux forcés. Réveillé à 5 heures, il fond en larmes, et dit qu’on ne peut pas le faire mourir à son âge. Assisté par un interprète, il demande en vain à voir son frère gracié, puis refuse les secours de la religion avant de se raviser. Deibler se plaint car les délais ne sont pas respectés, ils sont en retard de 30 minutes. Soutenu par les aides qui craignent qu’il ne s’évanouisse, il est toiletté rapidement. En voyant la machine, montée en direction de la Poste, il a un violent tremblement. L’aide photographe lâche la tête et Deibler doit la récupérer sous la bascule. L’épouse de la victime, ses fils et ses soeurs assistent à l’exécution. 30 avril 1921 06 septembre 1921 Mardi,
6h Bordeaux
Gironde Boularik Amokrane ben Saïd 34 ans, Algérien, ouvrier charpentier. Assassine Marie Poirier, veuve Mathieu, 65 ans, tenancière du bar du 5, place de la Bourse à Bordeaux, en l’égorgeant avec un couteau à cran d’arrêt le 10 février 1921. Butin : 340 francs. Son complice Fernand Carlet est condamné à vie. Réveillé à 5h15 en sursaut. Tremble à la nouvelle, puis se lève, s’habille et parle avec son avocat. Accepte les secours de la religion. Refuse cigarettes et café qu’on lui propose. Pendant la toilette, pris de frissons incoercibles. Doit être soutenu pour sortir du greffe. Face à la machine, très violent mouvement de recul. 11 juin 1921 21 septembre 1921 Mercredi,
5h50, 5h55 Chaumont
Haute-Marne Alphonse Ernette

Fernand Bâton

Ernette, 25 ans, ouvrier. Le 13 mars 1921 à Saint-Dizier, assomme mortellement à coups de bouteille de bière et de coups de pied Charles Saulnier, employé au parc automobile, avant de le noyer dans un fossé, pour lui voler 410 francs.

Bâton, 23 ans, cheminot auxiliaire à la Compagnie des chemins de fer de l’Est, assomma à coups de bâton et étrangla Mlle Marthe Huguenin, 42 ans, le 20 janvier 1921 à Rouvres-sur-Aube, pour voler… 4 francs et un parapluie qui causa son arrestation.

Les deux cellules sont ouvertes simultanément à 5h10. Les condamnés dorment profondément. Bâton, l’air mécontent et buté, promet d’avoir du courage, et demande à écrire à sa femme. Ernette est horrifié : « Ah, alors ! Si je m’attendais à celle-là ! » Pleure et demande à son avocat d’écrire à son frère et de lui envoyer une photo. « Ah, quand il est venu samedi,
j’aurais dû m’en douter ! Ah, c’est terrible ! Terrible ! » Tous deux sont conduits à la chapelle pour entendre la messe de l’abbé Moussu et communier. Effondré, Ernette demande ce qu’il va arriver à Bâton. Me Mialon l’en informe : « Rassurez-vous. Vous allez le retrouver. Il sera guillotiné comme vous. » Bâton ne lui dit pas un mot. Ernette doit être porté jusqu’au greffe tant il menace de s’évanouir. Me Mialon a apporté du rhum pour Ernette, Me Lavocat, du marc de pays pour Bâton : on leur sert l’alcool dans des quarts de soldat. Bâton a également droit à un cigare. Ernette demande une seconde ration d’alcool, qui lui donne enfin un peu de courage, mais juste assez de temps pour supporter la toilette, effectuée dans le couloir central, juste derrière la porte cochère. Ernette, en larmes, gémit à nouveau : « Je n’aurais jamais cru cela… J’aurais du m’en douter… Oh ! C’est terrible ! Est-ce que le moment approche ? » Me Mialon lui verse une troisième ration de rhum. Bâton regarde son compagnon confié aux exécuteurs avec une certaine curiosité détachée, puis quand il se rend compte que son tour approche, il pâlit et son avocat lui donne à nouveau du marc. La double porte s’ouvre et livre passage à Ernette. L’abbé Moussu tente de lui cacher le couperet de son crucifix, mais le condamné le voit et s’écrie, terrorisé : « Ah ! La voilà ! » Embrassé par l’aumônier avant d’être basculé. Le bruit du couperet surprend Bâton : Me Lavocat lui sert un nouveau gobelet d’alcool, mais Bâton le repousse d’un coup d’épaule. S’avance vers l’échafaud d’une démarche de somnabule, en murmurant une prière et embrassant le crucifix avant d’être poussé sur la machine. 29 juin 1921

28 juin 1921

24 septembre 1921 Samedi,
6h08 Caen
Calvados Emile Genest 29 ans. Assassina sa tante, Mme veuve Sébire, d’une balle en plein coeur et immola le corps le 23 octobre 1920 à La Chapelle-en-Juger (Manche). Condamné par les assises de la Manche, arrêt cassé le 12 mai, recondamné dans le Calvados. Crime commis pour de l’argent : le meurtrier n’en trouva pas. Réveillé à 5h25. Dormait profondément, car avait joué aux cartes jusqu’à minuit avec son gardien. Hoche la tête quand l’avocat général l’informe de la nouvelle. Va à la chapelle, communie et entend la messe. Exécution sans histoire. Corps non réclamé par la famille, confié à l’Ecole de Médecine. 18 mars 1921, 11 juillet 1921 07 octobre 1921 Vendredi,
6h30 Quimper
Finistère Yves Hervé 34 ans, cultivateur. Le 1er décembre 1920, à Bec-ar-Menez, abat sur la route M.Le Du, qui revenait de la foire de Châteauneuf-du-Faou et lui vole 705 francs. Le 20 janvier 1921, sur un chemin de Plouyé, il abat de deux balles de revolver Jean-Louis Guinguant qui revient de la foire du Huelgoat et lui vole 1950 francs. Exécution prévue le 29 septembre 1921, mais suite à une discussion juridique, celle-ci est repoussée, et les exécuteurs retournent à Paris pour revenir une semaine plus tard. A son réveil, Hervé dit : « Je ne méritais vraiment pas cela, je ne savais pas ce que je faisais. » Entend la messe, communie, refuse rhum et cigarette. 09 juillet 1921 11 octobre 1921 Mardi,
6h35 Chartres
Eure-et-Loir Casimir Veignal 18 ans, repris de justice. Egorge au cran d’arrêt M.Laroche à Marolles le 29 décembre 1920 sans avoir le temps de dévaliser sa maison. Son complice Raymond Ricordeau, 19 ans, vagabond, est condamné à perpétuité. Réveillé à 6h10. « C’est bien, on y va ! » Se confesse, entend la messe et remercie ses avocats. Pendant la toilette, dit : « J’aurais préféré être averti hier soir. Je regrette mon crime. On va me guillotiner, je l’ai mérité. Prévenez ma famille. » A un moment de recul devant la bascule. 06 juillet 1921 15 octobre 1921 Samedi,
6h30 Epinal
Vosges Mohamed ben Ali ben Salah 21 ans. Ouvrier marocain dans une usine de blanchisserie de Thaon, fractura avec une lourde pierre le crâne de son compagnon de baraquement, Joseph Lamaze, 56 ans, le 21 janvier 1921 pour lui voler son porte-monnaie, et jeta le corps dans un fossé qu’il recouvre de feuilles. Comprend à peine ce qui lui arrive. A demi-conscient, doit être porté jusqu’à la bascule par les aides, tremblant comme une feuille. 15 juin 1921 20 octobre 1921 Jeudi,
6h20, 6h26 Strasbourg
Bas-Rhin François Frintz
et
Albert Luntz
26 ans tous les deux, Frintz, journalier, et Luntz, mécanicien. Assassins du gardien des Postes Spinnhirny, 42 ans, qu’ils étranglèrent dans l’agence de la place du Dôme à Strasbourg le 28 décembre 1920 pour voler 230.000 francs. Condamnés à Strasbourg, arrêt cassé, puis recondamnés à Colmar. Réveillés à 5h45. Luntz reste calme. Dit n’avoir aucune déclaration à faire, écrit à son épouse, demande des cigarettes. Refuse l’alcool, mais boit deux verres d’eau. Frintz se dit innocent, demande qu’on entende à nouveau Luntz à ce sujet. Luntz dit juste : « Il est fou. » Frintz se confesse, écrit à sa famille. Luntz va à l’échafaud le premier en fumant. Frintz cherche des yeux la guillotine, mais il est déjà poussé dessus avant d’avoir eu le temps de la voir. 24 février 1921, 12 juillet 1921 24 octobre 1921 Lundi,
6h41, 6h43 Paris Armand Fargues
et
Robert Ricard 34 ans tous les deux. Assassins de la domestique Amélie Dumaître, le 08 juillet 1920 au 52, avenue d’Orléans, chez Mlles Caplon et Barthélémy, deux soeurs qui avaient été les bienfaitrices de Fargues quand il avait 16 ans. Comme la femme refusait de révéler où ses patrons cachaient leur argent, ils l’étranglèrent et Ricard lui coupa la gorge d’un coup de rasoir. Le crime leur rapporta 25.000 francs en titres. 07 août 1921 08 décembre 1921 Jeudi,
7h06 Beauvais
Oise Léon Bourbier 40 ans, manoeuvre. Assassin de Mme Jeanne Alliot, courtisane, le 15 janvier 1921 à Margny-les-Compiègne, pour la voler. 22 septembre 1921 30 janvier 1922 Lundi,
6h35, 6h38 Carpentras
Vaucluse Fortunato Aloïa
et
Alessandro Aletto
34 et 32 ans, Italiens. Le 21 février 1921, sur la route entre Cheval-Blanc et Cavaillon, lors d’un contrôle d’identité, abattent le gendarme Paul Luciani et blessent le gendarme Henri Odru. Leur complice, Antonio Polito, condamné à mort lui aussi, est gracié. Bruine glaciale. Réveillés à 5h45. Aloïa grogne : « Je m’y attendais. Qu’on se depêche, et que ce soit fini ». En voyant le gendarme Odru présent, regrette tout haut de ne pas l’avoir tué, et dit de Luciani que cela fait un gendarme de moins. Aloïa envoie l’aumônier au diable, puis tout en fumant la pipe, écrit une lettre dans laquelle il maudit sa femme et leur famille. Aletto, lui, demande à son avocat d’écrire à sa mère et à sa soeur avant d’entendre la messe, mais il finit par trouver la cérémonie trop longue et sort avant qu’elle ne s’achève. Au greffe, Aloïa boit deux verres de rhum et fume deux pipes ; Aletto boit autant d’alcool, mais se contente d’une cigarette. Avant qu’on ne les attache, Aloïa s’adresse au juge d’instruction et regrette de ne pas être mort à la guerre, comme un homme bien. Aletto part le premier. MOuvement de recul devant la guillotine. Sourire aux lèvres, Aloïa le suit. 26 octobre 1921 01 février 1922 Mercredi,
6h30, 6h33 Marseille
Bouches-du-Rhône René Bouy
et
Jerôme Marcheselli Bouy, 24 ans, garçon de café, Marcheselli, 32 ans, forgeron. Assassinent au matin du 1er novembre 1920 Mme Banère, la patronne de Bouy, à coups de marteau puis de lime (41 blessures au total) alors qu’elle ouvre son café « Le Robinson », place du Prado, pour la voler. 21 octobre 1921 25 février 1922 Samedi,
6h04 Versailles
Seine-et-Oise Henri-Désiré Landru 52 ans, escroc récidiviste, dit « Le Barbe-Bleue de Gambais ». Marié et père de quatre enfants, usant d’un grand nombre de fausses identités, organise durant la guerre une incroyable entreprise d’escroquerie au mariage qui se solde par onze meurtres. En février 1915, lors d’un séjour dans sa villa « The Lodge » à Vernouillet, il fait disparaître Jeanne-Marie Cuchet, 39 ans, lingère et veuve, ainsi que son fils André, 17 ans. Le 28 juin 1915, à Vernouillet, il tue Thérèse Laborde-Line, 46 ans, séparée de son mari. Le 3 août 1915, à Vernouillet, disparaît Marie-Angélique Guilin, 51 ans, veuve, gouvernante. A compter de décembre 1915 et avec Berthe Héon, 55 ans, femme de ménage, veuve, c’est dans la villa « L’Ermitage », à Gambais, que se dérouleront les crimes. Le 27 décembre 1916, Anne Collomb, 44 ans, secrétaire en assurances, veuve ; le 12 avril 1917, Andrée Babelay, 19 ans, domestique, victime d’un récent chagrin d’amour ; le 19 août 1917, Célestine Buisson, femme de ménage, veuve ; le 26 novembre 1917, Louise Jaume, 38 ans, en instance de divorce ; 5 avril 1918, Anne-Marie Pascal, 33 ans, couturière, divorcée ; 13 janvier 1919, Marie-Thérèse Marchadier, 37 ans, ancienne prostituée et mère maquerelle. Reconnu dans un magasin parisien par la soeur d’une disparue, il est arrêté le 12 avril 1919 rue Rochechouart en compagnie de sa dernière maîtresse en date, Fernande Segret. Faute d’aveux de la part de Landru, les circonstances exactes des crimes restent inconnues : empoisonnement, strangulation ? Il semble certain que les corps aient été dépecés et brûlés dans la cuisinière – tout du moins à Gambais. Outre les 35.600 francs retirés des crimes, Landru aura connu – dans tous les sens du terme – 283 femmes entre 1914 et 1919. 30 novembre 1921 14 mars 1922 Mardi,
5h30 Epinal
Vosges Paul Saigain 28 ans. Recherché pour plusieurs affaires de vols, assassine d’un coup de carabine l’agent de police Chaponnais venu l’arrêter à Thaon-les-Vosges le 25 juillet 1920. Réveillé à 5h. Très courageux. Discute avec le prêtre, mais sans réclamer de messe. Demande à faire des déclarations et avoue avoir participé au meurtre à coups de hache d’une vieille dame à Metz peu avant le crime de Thaon (ce qui serait apparemment faux). Devant la machine, cigarette à la bouche, veut parler, mais poussé par les aides, n’a que le temps de dire : « Adieu les amis ! Adieu ! » 12 décembre 1921 31 mars 1922 Vendredi,
6h20 Paris Maurice « Dudule » Cassang 28 ans, souteneur. Abat dans un bal-musette du Faubourg-Saint-Martin son rival André Langevin, dit « Dédé le nez cassé », le 06 septembre 1920. Le 19 octobre suivant, rue Oberkampf, tire sur MM. Troslay et Carré, agents de la Sûreté, qui cherchaient à l’arrêter. Arrêté à Barcelone (Espagne) le 17 décembre 1920. Réveillé à 6h, très surpris. « Je ne croyais pas qu’on exécutait un vendredi. Je pensais, en outre, que le président de la République étant parti pour le Maroc devait surseoir à mon exécution jusqu’à son retour. » Evoquant une tentative de suicide vieille d’à peine deux semaines – il s’est entaillé le bras gauche avec une lame de rasoir -, remarque : « Je n’aurais pas dû me rater il y a quinze jours. Je n’aurais pas causé tant de dérangements à ces messieurs. » Refuse le rhum, mais demande un verre d’eau, puis du café et de quoi écrire. Rédige une lettre, la confie à son avocat Me Doublet, puis se ravise et en fait des confettis qu’il jette aux toilettes en disant : « Non, ce ne serait pas bien de me venger. » Pâle, cigarette aux lèvres, descend du fourgon, regarde l’assistance – parmi laquelle se trouvent les deux inspecteurs blessés par ce dernier lors de son arrestation – puis s’arrête face à la machine. « C’est ici… » Le pasteur se précipite pour l’embrasser deux fois. Cassang lui rend son baiser, puis dit « Au revoir, monsieur. » avant d’être poussé sur la bascule. 28 décembre 1921 20 mai 1922 Samedi,
4h51 Rennes
Ille-et-Vilaine Fernand Lagadec PARRICIDE. 24 ans, valet de ferme. A Romagné, tue son père Pierre, 68 ans, et le jette dans le puits avec l’aide de sa mère, Joséphine Génain, le 25 juillet 1921. La veuve Lagadec est condamnée à vingt ans de travaux forcés. Réveillé à 3h50, dormait profondément. Hébété, reprend vite ses esprits et répond au substitut : « Du courage, j’en ai toujours eu jusqu’ici, et j’en aurai encore. » S’habille, et passe une paire de sandales. Très calme, entend la messe, communie. Accepte un verre de rhum et une cigarette. Passe une blouse blanche et un voile noir, garde ses sandales. En sortant de prison, entend la lecture de l’arrêt de condamnation. Après qu’on lui aie retiré voile et blouse, va avec courage à l’échafaud. 16 février 1922 23 mai 1922 Mardi,
4h25, 4h28 Paris Emile Loeuillette
et
Louis Cadet 27 ans tous les deux. Tueurs de Mme Descheyer, 60 ans, débitante à Boulogne-sur-Mer, qu’ils attachent, bâillonnent et à qui ils coupent la langue le 02 juillet 1921 avant de voler 400 francs. Le 08 juillet 1921, à Ivry-sur-Seine, ils agressent Mme Bertrand, 80 ans, pour la voler, et la laissent s’étouffer avec son baîllon. Loeuillette reste hébété, Cadet est ferme. Refusent de parler au pasteur Beuzard, Loeuillette rajoute : « Je n’ai jamais cru ni à Dieu ni au diable. » Cadet se ravise : « Moi, j’aurai du courage. Il faut savoir supporter la mort, quand on a su la donner. » Il boit cul sec un verre de rhum, tandis que Loeuillette refuse alcool et cigarette : « A quoi bon ? Ce serait une cigarette de perdue. » Loeuillette part le premier, et regarde le couperet avec horreur. Cadet tient à voir la guillotine, se défait des embrassades du prêtre, mais sur la bascule, tente de se débattre en vain. 02 février 1922 28 juin 1922 Mercredi,
3h46 Chaumont
Haute-Marne François-Joseph Diétrich 27 ans, électricien. Satyre assassin de Jeanne Graillot, 15 ans, ouvrière en brasserie, qu’il tue d’un coup de couteau dans le coeur et viole dans le bois de Bettancourt, entre Chancenay et Saint-Dizier, le 22 juin 1921. Croyant ne l’avoir que blessée, pour éviter qu’elle le dénonce, il lui crève les deux yeux. Déjà condamné pendant la guerre pour une tentative de viol dans les Vosges. Réveillé à 3h10. Dormait profondément. Répond simplement « Oui » aux injonctions du procureur et de son avocat. Discute dix minutes avec son avocat à qui il dit : « On s’est trompé. Mon cerveau est malade. Je ne suis pas coupable ! On va faire mourir un malade ! » Demande à Me Mialon de dire adieu à sa fiancée, de remercier son notaire et lui confie des papiers. Refuse la messe, mais se confesse et communie. Conduit au greffe, tire quelques bouffées de cigarette et la rejette aussitôt. Refuse le rhum et se plonge dans le silence. Au greffe, toilette rapide, exécution idem. Les époux Pfister, mère et beau-père de la victime, assistent au supplice et commentent : « Enfin, notre petite Jeanne est vengée. » Environ 800 personnes présentes. 28 mars 1922 30 juin 1922 Vendredi,
3h55 Metz
Moselle Fréderic Schneider
et
Emile Flaesch 22 et 23 ans, mécanicien et ouvrier, sans domicile. Etranglent à Redange le 13 juillet 1921 Michel Frantz, vieillard sourd-muet, et le 29 juillet suivant, tuent à coups de talon le caissier d’usine Schlesser, pour les voler dans les deux cas. Apprennent la nouvelle de la bouche d’interprètes, car aucun des deux ne parle français. Flaesch montre du repentir et fond en larmes. Schneider, lui, n’a aucune réaction ni aucune parole de remords. Le premier, catholique, entend la messe et communie. Le second, protestant, s’entretient avec un pasteur de l’église réformée avant d’être confiés tous deux aux exécuteurs. 18 mars 1922 06 juillet 1922 Jeudi,
4h20, 4h25 Châteauroux
Indre Alexandre Lucas
et
Alphonse Daubord 22 et 19 ans, vagabonds. Assassinèrent les vieux époux Limousin à Buxerolles, le 12 juin 1921 : le mari d’une balle dans la tête, la femme de cinq coups de couteau, pour voler 1455 francs. Avertis la veille. Profitent d’un dernier repas copieux, un peu trop arrosé – grâce aux bons soins de leur avocat -. Daubord finit en camisole de force pour terminer la nuit. Assistent à la messe. Font des révélations au juge d’instruction sur un autre complice. Daubord part le premier. Devant la guillotine, Lucas crie : « Salut à mon dernier matin ! Vive la Révolution ! » 29 mars 1922 11 juillet 1922 Mardi,
4h25 Evreux
Eure Léon François Gicquel 19 ans. Tua à coups de crosse de fusil Mme veuve Rosse et sa fille Aline au Chesne le 17 janvier 1922 pour voler deux montres en or, de l’argent et des titres au porteur, le tout pour une valeur de 45.077 francs. Son frère Marcel Gicquel, 17 ans, est condamné aux travaux forcés à perpétuité. Réveillé à 3h40. Aucune émotion au réveil, se lève et s’habille sans un mot. Pleure durant la messe. Boit deux verres de rhum avant la toilette, et ne prononce aucun mot. Monte dans le fourgon en compagnie de l’aumônier, arrivé à la friche du buisson, se laisse basculer sans résister. 07 avril 1922 02 août 1922 Mercredi,
5h04 Paris Jacques-Mécislas Charrier 27 ans, anarchiste. Au cours de la nuit du 24 au 25 juillet 1921, dans le rapide n°5 Paris-Marseille, entre Dijon et Lyon, agresse les passagers des compartiments de 1e classe en compagnie de deux autres repris de justice, Bertrand et Thomas, et dérobe au moins 30.000 francs en numéraire et en bijoux. Les victimes furent menacées de mort si elles donnaient l’alarme. Le seul à résister, le lieutenant Carabelli, fut abattu d’une balle dans la poitrine. Le major Palaper, qui voulut intervenir, fut frappé à la tête. Dès le 27 juillet, Charrier fut arrêté à Paris, et ses complices abattus par la police lors de leur interpellation, avenue de Wagram, non sans avoir abattu l’inspecteur Curnier. 29 avril 1922 10 octobre 1922 Mardi,
5h50 Saint-Brieuc
Côtes-du-Nord Eugène Huquet 41 ans, cultivateur. Pour se venger de sa femme qui voulait divorcer, noya ses quatre enfants (Elie, 8 ans, Marie, 7 ans, Eugène, 3 ans, et Albert,17 mois) dans une mare à Plélan-le-Petit le 28 janvier 1922. Dort profondément, doit être secoué deux fois pour être réveillé. A son avocat, dit : « Je suis content de mourir pour aller retrouver mes petits enfants. » Accepte les secours de la religion. Fume la pipe tout en parlant agriculture. On lui propose vin blanc ou rhum : il choisit rhum. Conduit vers la bascule, c’est l’aumônier qui lui retire la pipe de la bouche. 06 juillet 1922 12 octobre 1922 Jeudi,
5h50 Paris Charles Burger 35 ans, sommelier. Tue à Paris Gaston Jobin, 40 ans, sommelier, avec la complicité d’Estelle Jobin, 36 ans, dont il était l’amant, le 23 mars 1919. Après l’avoir assommé dans son lit et découpé le corps en quatre morceaux, il jeta une jambe et le tronc dans la Seine, et enterra la tête et l’autre jambe dans le bois de Clamart. Estelle Jobin fut condamnée à perpétuité. Réveillé à 5h30. S’asseoit sur son lit, sourit tristement : « J’avais la croix de guerre, je méritais plus d’indulgence. » Puis, il pleure : « Mes pauvres parents, ma pauvre petite fille ! » Donne à Me Darmont ses dessins à remettre à sa famille. Au greffe, refuse le rhum, mais fume une cigarette qu’il garde à la bouche jusqu’au bout. En descendant du fourgon, il embrasse le crucifix puis appelle son défenseur : « Mon avocat ! Je veux voir mon avocat !  » mais en vain, car Me Darmont a préféré se tenir loin de l’échafaud. 25 juin 1922 14 octobre 1922 Samedi,
5h50 Mézières
Ardennes Léon Lheur 22 ans, émailleur. Agresseur des époux Boistay, débitants à Oignies (Belgique), sur lesquels il tira deux coups de revolver le 15 avril 1922. Mathilde Boistay mourut aussitôt, son mari Gustave, grièvement blessé au visage, survécut. Mobile : le vol, mais Lheur quitta les lieux sans rien prendre car sa maîtresse et complice, Lucienne Mouchet, 16 ans, s’enfuit de l’estaminet prise de panique sitôt le crime commis. Lucienne fut condamnée à être enfermée dans une maison de correction jusqu’à la majorité. Réveillé à 5 heures. « C’est bien, je l’ai mérité ! » S’entretient avec l’aumônier Camus. Refuse la cigarette et le cordial de rhum et de vin rouge qu’on lui propose. Proteste quand on lui retire le scapulaire que lui a donné l’aumônier pour effectuer la toilette. Ce dernier lui enroulera le scapulaire autour des mains. Exécuté à la porte de la prison de Mézières (située dans l’actuelle rue des Liégeois). 02 août 1922 24 janvier 1923 Mercredi,
6h56 Paris Marius-Félix Gounaud 23 ans, tue d’une balle dans la tempe son oncle Léon Boissière, concierge au 29, rue de Constantine, le 16 août 1921, pour lui voler 1.100 francs. Il enferme le cadavre dans une malle d’osier qu’il laisse en consigne à la gare de Lyon. Dénoncé par des commissionnaires qu’il avait embauché pour jeter « 80 kilos de viande avariée » dans la Seine. Réveillé à 6h30. Reste un moment silencieux, avant de réclamer cigarettes, rhum et café. Demande également du papier à lettres, et rédige un dernier message à sa mère dans laquelle il la prie de le pardonner et d’entreprendre des démarches pour récupérer sa dépouille. Ecrit une seconde lettre d’adieu, à une maîtresse nommée Mado. Avant de grimper dans le fourgon, répond au procureur qui le priait de faire preuve de courage : « Ne craignez rien, je suis un homme du siècle. » Poussé sur la bascule, crie : « Adieu, maman ! » Un soldat du service d’ordre s’évanouit. Son officier faisant remarquer que c’est la seconde fois qu’il perd connaissance lors d’une exécution capitale, un journaliste lui rétorque acerbement : « Pas possible ! Vous voulez le tuer lui aussi ? » 18 octobre 1922 20 février 1923 Mardi,
6h15 Laon
Aisne François Thys Belge, 22 ans, manouvrier. Assomme de deux coups de bûche, abat de deux balles dans la tête et viole le 22 janvier 1922 Mme Van der Hallen à Essigny-le-Grand parce qu’elle refusait ses avances. Réveillé à 5h30, dormait. Aucune réaction, se confesse à l’abbé Verhoever, aumônier des émigrants belges en France, et le prie de demander pardon à ses parents. Entend la messe. Remercie Me Huet, son avocat. 13 novembre 1922 10 mars 1923 Samedi,
5h45, 5h49 Toulouse
Haute-Garonne Georges Léon Patte
et
Roger-Victorien Vignau-Cazalaa Patte, 22 ans, caporal au 18e régiment d’infanterie, et Vignau, 22 ans, cavalier de 2e classe dans la 17e section des commis et ouvriers. Tuent à coups de bouteille, de crosse de fusil, de canif et de rasoir à main le 19 avril 1922 à Auch (Gers) le boulanger Jean-Baptiste Dilhan, 69 ans, et Louise-Joséphine Jordana, dite « Café-au-Lait », 24 ans, dont Patte était épris et qui se refusait à lui. Pendent les corps pour faire croire à un suicide. Volent 5.000 francs. Condamnés par le Conseil de guerre de Toulouse. Réveillés à 5h05. Patte gémit : »Mon Dieu ! Mon Dieu ! Il faut donc mourir ! » Ils s’habillent, remercie leurs avocats, et communient. Patte sort le premier. Tout pâle, regarde le ciel, puis la machine et crie : « Chrétiens, je suis chrétien, j’ai fauté, je paye ! » Vignau, lui, dit : « Messieurs les juges, je vous remercie, vous avez fait votre devoir. » 18 octobre 1922 05 mai 1923 Samedi,
3h40 Nice
Alpes-Maritimes Pavel
« Piotr Riaboff »
Brysgaloff
31 ans, ancien infirmier à la Légion Etrangère, déserteur, morphinomane. Sous le faux nom de Pierre Riaboff, cambrioleur du consulat russe de Marseille en 1920. Le 28 septembre 1921, à Nice, tente de tuer de trois coups de marteau, Mme Marie Horessaroff, dite « Mme Frank », rentière russe, 67 ans, qui l’a surpris en train de cambrioler son appartement. Pris au piège dans les dépendances de l’hôtel du Luxembourg, abat le télégraphiste Casimir Tahon, 28 ans, mutilé de guerre, et blesse un bijoutier ainsi le brigadier Louis Chevalier. Jugé le 17 novembre 1922, son état fait penser à celui d’un dément. De nouvelles analyses prouvent le contraire : l’homme, bien que souffrant d’une syphilis avancée, est responsable de ses actes. A la nouvelle, pâlit et manque s’évanouir. Son avocat le réconforte. Au greffe, demande des cigarettes fortes, et boit trois verres de rhum. Pendant qu’on le lie, pris d’une crise de colère en russe et en français, et hurle : « Vive Lénine ! Vive la Troisième Internationale ! » 08 février 1923 15 juin 1923 Vendredi,
9h Sarrebrück (Allemagne) August Weibel 24 ans, employé dans un magasin de tissus, repris de justice. A Sarrebruck, dans la nuit du 26 au 27 novembre 1922, tue de 28 coups de hache son oncle Peter Neumann, libraire, puis porte dix coups à sa tante Anna Binger, avant de tuer de la même façon les enfants, Hugo Neumann, 2 ans et Ludivina, 1 an, qui s’étaient réveillés et pleuraient de peur. S’enfuit en emportant un complet, la montre de sa tante, 70 francs et 120.000 marks qu’il dépense dans la journée dans les cafés de la ville, avant d’être arrêté le soir même. Arrivé la veille, Deibler refuse de monter la guillotine dès la fin de soirée. Montage dès 2 heures du matin, sur un échafaud haut d’un mètre et illuminé de cierges, à proximité d’un corbillard, ce qui fait pester Anatole Deibler. Conduit devant l’échafaud, Weibel doit endurer la lecture de l’acte de condamnation pour chaque crime, soit près d’un quart d’heure de lecture. Exécution très rapide. 14 février 1923 12 juillet 1923 Jeudi,
4h50 Mont-de-Marsan
Landes Bernard Louis Bordes 28 ans. Abat au fusil de chasse les époux Vital-Glize à Bélis dans la nuit du 06 au 07 janvier 1923 pour les voler. Réveillé à 3h15. Dort profondément. A l’aumônier qui l’incite à embrasser le crucifix, il répond : « Pff, il n’existe pas, votre Dieu, sans quoi il ne permettrait pas ça ! » Refuse de parler au juge : « J’en avais à dire, j’en avais… Maintenant c’est trop tard. J’en avais… » Pieds nus, il quitte sa cellule. Il entend malgré tout la messe, puis au greffe, il écrit une lettre à ses parents et souligne « Je suis innocent. » On lui donne une cigarette et un verre d’eau-de-vie. Il trempe ses lèvres, grimace, dit : « Je croyais que c’était du vin blanc. » avant de vider le godet. Il reste tranquille pendant la toilette. 27 avril 1923 07 septembre 1923 Vendredi,
5h35, 5h37 Nancy
Meurthe-et-Moselle Jozef Witkowski
et
Szczepan Kazmierowski 29 et 27 ans, Polonais. Le 28 octobre 1922, à Soxey, près de Longwy, tuent à coups de revolver dans la tête le grand-père Hippolyte Pierson, 74 ans. Le fermier Edmond Pierson, atteint à la colonne vertébrale, devient définitivement handicapé, de même que sa fille, Marie, 8 ans. Mme Pierson est blessée à l’épaule et frappée à coups de crosse quand elle cherche à s’enfuir. Croyaient en leur grâce. A la nouvelle, Kazmierowski fond en larmes. Witkowski s’agenouille et prie. Ils écrivant à leur famille, et Kazmierowski dit « On ne devrait pas nous tuer. NOus allons cesser de vivre, mais ceux que nous aimons continueront à souffrir. » Après la messe, Witkowski part le premier, blême et en balbutiant. Kazmierowski va à la guillotine sans rien dire. 27 avril 1923 09 octobre 1923 Mardi,
5h32 Aix
Bouches-du-Rhône Félix Gueydan 32 ans, cambrioleur. Evadé de la prison de Nîmes le 15 décembre 1920. Le 04 janvier 1921 à Valence, tue de trois coups de couteau la veuve Joly, domestique, en compagnie d’Albert Lévy, sans pouvoir cambrioler la maison, car la maîtresse des lieux, Mlle de St-Alyre, donne l’alerte par la fenêtre. Blesse de trois balles de revolver à Arles l’inspecteur Sébeille le 06 janvier 1921. Arrêté le 08 février. Jugé d’abord pour une série de vols par les assises de l’Hérault fin 1921, condamné en premier lieu à Aix, puis à Valence. Son complice Michel Cadière – auteur probable des coups de feu d’Arles – est condamné à mort et grâcié. Dans le cadre du crime de Valence, Albert Lévy est lui aussi condamné à mort et gracié (NB : Lévy avait été condamné à mort le 9 janvier 1923 à Nîmes pour une tentative de meurtre, et l’arrêt cassé). Réveillé en même temps que Cadière, à 4h40. Pendant qu’on informe son complice de sa mesure de grâce, se contente de dire : « Je m’y attendais. » Conseillé par l’abbé Guigue, entend la messe et communie. Fume une cigarette, boit deux verres de rhum. Demande à faire une dernière déclaration au juge Bouis : « Je suis coupable dans l’affaire d’Arles, mais je jure que je suis complètement innocent de l’assassinat de la veuve Joly. » Très calme durant la toilette. En franchissant les portes de la prison, s’adresse à un aide qui le soutient par les épaules : « Ne me poussez pas. » Se « libère » et fait ses derniers pas, avec volonté et tête haute. 02 mai 1922 et 24 avril 1923 11 octobre 1923 Jeudi,
5h21 Privas
Ardèche Louis Germain Sapet 26 ans. A Valgorge, tue à coups de revolver le 12 janvier 1923 ses parents nourriciers, Louis-Paul et Marie-Lou Sedat, pour les voler. Réveillé à 4h35. Au procureur, répond : « Tas de vendus, je savais bien qu’on me cachait la vérité. » Gronde contre le juge d’instruction, râle contre la justice. S’habille seul. A l’aumônier qui lui propose une messe, répond : « Vous avez des idées trop hautes pour moi, l’abbé. » A Me Lautier, son avocat, lui montre deux jeux, l’un de jacquet, l’autre de dames, qu’il a personnellement fabriqués en cellule, et évoque au gardien-chef le souvenir d’une partie de manille la veille. Il écrit une lettre à son épouse : « Aujourd’hui, 11 octobre à 5 heures du matin, je pars pour l’autre monde. Malgré mon indignité, je vous aime tendrement. Je ne me plains pas. J’ai mérité ma peine, mais je jure que je n’ai prémédité mon crime. » Pris de tremblements, ne peut achever son message, et son avocat dut lui-même écrire l’adresse. Il se roule une dernière cigarette, puis donne au gardien-chef un cahier contenant une ébauche de roman « Amour lointain ». En voyant Deibler, sur le seuil, il lance : »Alors, Monsieur de Paris, on n’a pas emmené la musique de la Garde Républicaine ? » Puis il jette un oeil vers la guillotine : « Vous me laisserez bien le temps de la voir un instant. » 600 personnes présentes. 16 mai 1923 16 octobre 1923 Mardi,
5h45 Rouen
Seine-Inférieure Charles Vasseur 24 ans, journalier. Etrangla Mme Renée Galliande au Havre le 28 mars 1923 avec la complicité du cousin de cette dernière, Henri Maniable, 18 ans, pour voler 25.000 francs. Maniable, condamné à mort aussi, est gracié. Brouillard épais. Réveillé à 5 heures. Se montre courageux, s’habille seul. A la chapelle, se confesse, entend la messe et communie. Au greffe, fume une cigarette, boir un verre de rhum et demande au gardien-chef s’il peut conserver au cou une médaille que sa mère lui avait offert, et regrette de mourir sans avoir vu l’enfant que sa femme attend. Place Bonne-Nouvelle, il embrasse le crucifix, puis l’aumônier. Le mari et le père de Mme Galliande sont présents dans l’assistance. 06 juillet 1923 13 novembre 1923 Mardi,
6h21 Saintes
Charente-Inférieure Edmond Sicard 46 ans. Brise le crâne le 02 janvier 1923 Maurice Durand, 14 ans, valet de ferme chez la famille Sacré à Marans, pour dévaliser la ferme du Clousiq que Durand surveillait en l’absence de ses employeurs partis au marché. Butin du vol : 300 francs. Le corps est retrouvé à l’embouchure d’un canal voisin et de l’océan trois semaines après. La veuve Barré, sa concubine et complice, est condamnée à mort et graciée. Leur fils, Ernest, 23 ans, est condamné à perpétuité. Réveillé à 6h. Après avoir repris ses esprits, se lève et s’habille tranquillement. Affirme : « C’est moi qui ai jeté Durand à l’eau, mais c’est Ernest qui l’a tué. » Refuse la messe, mais accepte – à la demande de Me Lamor, de parler avec l’aumônier. Demande à voir la veuve Barré, mais c’est impossible. Se résigne : « Puisqu’il faut y aller, allons-y ! » Mâchonne une cigarette pendant la toilette, boit un verre de rhum, et dit aux aides : « Coupez-moi le cou, mais ne me faites pas mal ! » Pousse un grand soupir quand on le pousse sur la bascule. 21 juillet 1923 22 décembre 1923 Samedi,
6h40 Toulon
Var Marcellin Delval 25 ans. A Auchy-la-Bessée, au lendemain d’une rixe au cours de laquelle il tire sur son beau-père et son beau-frère sans les toucher, abat les gendarmes Cahuzet et Petit le 24 septembre 1922. Refugié dans le Var, le 06 décembre 1922 à Draguignan, agresse un boucher pour le voler, puis part pour Toulon. Le 08 décembre, arrêté en sortant d’un bar, parvient à s’enfuir. Blesse grièvement M.Gelato, épicier, le policier Mathieu, puis abattit Charles Blanc, préfet de police à Toulon. Condamné dans le Var, puis dans le Pas-de-Calais. Temps glacial. Réveillé à 6 heures. Dort profondément, car il a passé la soirée à jouer aux cartes avec des co-détenus. Au juge d’instruction, il crie : » Vous, Dellor, j’ai à vous dire cela ; je vous en veux parce que vous m’avez mis sur le dos un vol à Draguignan dont je ne suis pas coupable. Je ne suis pas un voleur. » A l’aumônier, il dit : « Votre religion, je n’en veux pas, votre Dieu m’a oublié, mais je peux le dire, vous, vous êtes un chic type, vous avez joué à la manille avec moi. » Puis il se retourne vers son avocat, Me Brun :  » Vous, Maître, vous êtes plus chic que le Président de la République. Je sais que vous avez du coeur. Je m’en souviendrai au Paradis. » Puis de nouveau au prêtre : « Parce que j’irai au Paradis, que vous le vouliez ou non ! Et je me souviendrai aussi de vous car vous n’êtes pas si mauvais. » Mais au greffe, il s’énerve : « Tas de calotins, tas de crapules ! Je vous emmerde ! Vive l’anarchie ! La religion, je m’en fous, la société, je l’emmerde ! » Il refuse café et verre de rhum avant de se raviser, expliquant que c’est parce que c’est le gardien-chef qui les lui propose. Puis il rédige une lettre sans dire pour qui, et la remet à son défenseur. Pendant la toilette, il dit : « Coiffez-moi bien, si on doit me photographier. » Devant la bascule, il hurle : « Ici, il faut crier, vive Me Brun ! » Et comme ce dernier s’avance pour l’embrasser, il dit : « C’est ça, embrassez-moi, mais pensez aussi à la petite fleur rouge. » (Il s’agissait de sa dernière volonté exprimée dans la lettre précédemment citée : qu’on dépose une fleur rouge sur son tombeau.) 17 avril 1923, 06 octobre 1923 12 janvier 1924 Samedi,
7h15 Lille
Nord Louis Dumont Belge. Commet un triple assassinat à Sailly-lès-Lannoy, dans la nuit du 08 au 09 avril 1919. Tue à coups de revolver la veuve Darras, 55 ans, l’ancienne patronne de sa mère – et aussi sa marraine -,le domestique Leopold Declercq, 60 ans, et la bonne Julienne Dubas, 29 ans, pour voler 4.500 francs et de l’argenterie. Meurt courageusement. Entend la messe, refuse le verre de rhum et la cigarette. Exécuté place du Palais. 19 octobre 1923 08 février 1924 Vendredi,
6h35 Carcassonne
Aude Andrés
Garcia-Tejeron
42 ans, ouvrier agricole. Lapida José Torrès pour le voler le 06 mai 1923 à Ladern, puis posa le corps sur une meule de paille qu’il incendia. Son complice Jaime Ibanez est condamné à perpétuité. Réveillé à 6h. On doit le secouer pour qu’il ouvre les yeux. Le procureur lui explique la situation, traduit par un interprète. « Merda… no me mateis » (Ne me tuez pas), répond-il. Prend un petit verre de rhum ce qui lui donne un coup de fouet. Demande une clope et reproche à Me Riart, son avocat, de lui avoir caché la décision du président. Demande à entendre la messe. En allant à la chapelle, passe devant la cellule de Torrès, et grogne : « Crapule, c’est par moi que je meurs. » Pendant l’office, cigarette aux lèvres, reste prostré, et repète plusieurs fois : « Ne me tuez pas, faites moi grâce encore quelques jours. » Au greffe, pendant qu’on le ligote : « Je ne partirai pas, tuez-moi d’un coup de revolver, mais ne me faites pas souffrir. » Demande une seconde cigarette, qu’un aide lui glisse entre les lèvres. Tire deux, trois bouffées. En quittant la prison, embrasse le crucifix. Devant la guillotine, a un mouvement de recul. 07 novembre 1923 28 février 1924 Jeudi,
6h Metz
Moselle Mohamed ben Abdelkader « Lebekakcha Badri »
ben M’Barek 23 ans, tirailleur Algérien, caserné à Morhange, commit un double crime à Pevange le 24 décembre 1922. Assassine à coups de fusil Albert Pouillon, domestique, 24 ans et sa fiancée Jeanne Souchon, 20 ans, et les achève à coups de couteau. Dérobe 600 francs, la montre du garçon et le sac de la demoiselle. Prétendit que, quelques jours plus tôt, Souchon l’avait insulté et traité de « sale bicot ». Condamné en première instance par le conseil de guerre de Metz, jugement infirmé par le Conseil de guerre de Nancy. Réveillé à 5h30. Aux questions du commissaire du gouvernement, répond qu’il a tué parce que ses victimes l’avaient insulté. Néanmoins, il reconnut avoir fauté et demanda pardon à la Société. S’entretient dans sa cellule avec un soldat musulman qui sert d’imam. Passe un pantalon de treillis bleu et des sabots (tenue réglementaire des soldats lors de leur exécution). Remercie son avocat, le prie de prévenir son oncle en Algérie. Très peu de spectateurs. 27 février 1923, 09 octobre 1923 17 mai 1924 Samedi,
5h25 Laon
Aisne Raoul Marchand 21 ans, conducteur de trains. A Soissons, tente de violer le 22 septembre 1922 Mme Henriette Leboeuf, 28 ans. Tue de huit coups de couteau et viole Mlle Anne-Marie Bourgeault, 20 ans, le 31 octobre 1922 à Soissons, et vole 50 francs à sa victime. Condamné une première fois, incarcéré à la prison de Laon, assomme d’un coup de chaise sur la tête son gardien Germain, 50 ans, pour s’évader au soir du 25 octobre 1923. Le maton meurt à l’hôpital le lendemain. Réveillé à 3h40. Ne répond rien. Ecoute la messe et se confesse à l’abbé Lefèvre, aumônier et curé de St-Martin. Prend un verre de rhum et en renverse la moitié en le saisissant. Accepte une cigarette roulée. Manifeste du regret. Poussé sur la bascule, hurle : « Vive la France ! » 04 août 1923, 14 février 1924 19 août 1924 Mardi,
5h23 Paris Mohamed Ousliman Khémilé 36 ans, Algérien. Amoureux d’une femme mariée, Mme Billard, épicière rue Fondary, ne supporte pas ses incessants refus. Le 07 novembre 1923, il l’attrape dans son magasin, la traîne dans la rue et la tue de quatre coups de couteau de cuisine. Pris d’une fureur homicide, frappe les passants au hasard dans la rue : tue Mme Fougère, 60 ans, qui ramenait son petit-fils de l’école, blesse au ventre Mme Raymonde Brunet et Mme Gisèle Hescu à l’aine, avant d’être mis hors d’état de nuire par des policiers qui lui tirent une balle dans le ventre. 21 mai 1924 16 septembre 1924 Mardi,
5h40 Saint-Mihiel
Meuse Jean-Baptiste Arthur Lequy 45 ans, sabotier. Tua à coups de marteau son voisin, M. Ernest Quinquet, 75 ans, à Autréville dans la nuit du 23 au 24 octobre 1923 et pend le cadavre dans le grenier, pour le voler et rembourser ses dettes. Entrée des officiels dans la cellule à 5h, Lequy est déjà réveillé. Demande à se confesser, entend la messe et communie. Embrasse le crucifix devant l’échafaud. 11 juillet 1924 19 septembre 1924 Vendredi,
6h Tours
Indre-et-Loire Zeiro Finatti 40 ans, Italien, cimentier. Au 29, rue du Cygne à Tours, suit la prostituée Suzanne Lavollée, 25 ans, dont il était un client régulier. Sous prétexte qu’après leur relation, elle lui aurait dérobé un billet de 50 francs, il la frappe, l’étrangle, puis l’éventre avec un couteau, lui coupe les seins et les parties génitales puis vole ses bijoux et ses économies le 13 avril 1924 Très calme au réveil, en présence d’un interprète. Fume quatre bouffées de cigarette, puis sa pipe qu’il a personnellement bourrée. En se remémorant des parties de cartes avec les gardiens, il dit : « On en a fait, de ces parties ! » Au moment de la toilette, se met à trembler et devant la guillotine, se met à hurler. 26 juin 1924 21 janvier 1925 Mercredi,
6h50 Nancy
Meurthe-et-Moselle François Salvador Titulaire de la croix de guerre, 29 ans, chef artificier pendant la guerre, chargé de la destruction des dépôts de munitions ennemies. Le 02 février 1920, il attire dans un piège Casimir Delaville qu’il tue dans un bois de St-Julien-les-Gorze d’un coup de revolver et lui dérobe 400 francs. Il répète la technique à Montanville sur Jacques Roussel en janvier 1921, et fait exploser un dépôt de munitions à proximité de son cadavre pour effacer les traces de son crime, qui lui rapporta 6.000 francs en bons de la Défense Nationale. Ses deux victimes étaient ouvriers sous ses ordres. Réveil à 6 heures. Finit quelques lettres pré-rédigées, fait quelques recommandations à son avocat. Assiste à la messe, et se laisse « toiletter » en silence. Un des frères Roussel assiste à l’exécution. 25 octobre 1924 25 février 1925 Mercredi,
5h50 Strasbourg
Bas-Rhin Jean Blies 38 ans. Concierge à l’hôtel Continental de Strasbourg, assomme à coups de pelle, viole et étrangle le 13 mai 1924 Marthe Heymann, 22 ans, bonne dans l’hôtel, venue acheter une baignoire usagée dans ce même hôtel. Après cela, il se débarrasse du corps en le mettant dans un sac et en le jetant dans le canal du Rhône au Rhin. Réveillé à 5h10. Hébété. N’a aucune déclaration à faire. Après que les gardiens l’aient aidé à s’habiller, il parle une dizaine de minutes avec le pasteur Klein, ce qui lui donne du courage. Au greffe, il boit un verre de rhum et un verre d’eau qu’il boit cul sec, puis il écrit ses dernières volontés et lègue tout à sa femme. Ensuite, il fait une lettre à sa mère, et se dit prêt à mourir. A sa demande, on ne lui lie pas les jambes. Devant l’échafaud, le pasteur embrasse Blies chancelant avant qu’on ne le pousse en avant. 15 novembre 1924 23 mars 1925 Lundi,
5h30 Saint-Pol-sur-Ternoise
Pas-de-Calais Antonief Paprocki 44 ans, ouvrier métallurgiste, chef d’un quatuor de bandits polonais, cambriole dans la nuit du 10 au 11 avril 1924 une ferme isolée de Saulty-l’Arbret. Réveillé par le bruit, le fermier Lombard, 50 ans, se lève et lutte avec les bandits. Il est abattu d’une balle dans le ventre par Paprocki. Mme Lombard, 48 ans, est blessée à son tour. Henri Lombard, le fils, 28 ans, intervient alors et il est frappé à coups de couteau par Emil Husar, ainsi que sa plus jeune soeur, Madeleine, 18 ans. Enfin arrivent les neuf domestiques de la ferme : l’un d’eux est assommé et jeté dans la mare de la cour. Butin : à peine 1.000 francs. L’un des complices ne sera jamais repris. Le plus jeune, Kranicek, 20 ans, est condamné à perpétuité. Emil Husar, 38 ans, est condamné à mort et gracié. Exécuté place de la Gendarmerie. Faiblit un bref instant au réveil, puis va courageusement à la guillotine. 18 décembre 1924 24 mars 1925 Mardi,
5h27 Lille
Nord Henry « Le Tigre » Olivier 32 ans, ancien des Bat d’Af, chef d’une bande de dix-neuf chauffeurs, les « Cagoulards », qui écumèrent la région de Roubaix de 1917 à 1922. Insoumis pendant la guerre, abattit en 1916 un gendarme allemand qui allait l’arrêter. Le 5 novembre 1918, à Mouscron (Belgique), tue Mme Augustine Demeulemeester, épicière, qu’il étrangle avec l’un de ses propres bas. Le 8 décembre, à Roubaix, assomment le pontonnier Paul Doléan et volent plusieurs milliers de francs. Par la suite, leurs agressions s’accompagnent souvent de violences, mais jamais de mort. Le principal lieutenant d’Olivier, Jules Pollet, alias « Lévrier », est condamné à perpétuité. Réveillé à 4h45. « Je n’ai pas mérité l’échafaud. » Refuse les secours de la religion. Place du Palais de Justice, devant la guillotine, embrasse son avocat puis dit à Deibler : « Vous pouvez y aller. » Sa glande thyroïde est greffée à une fillette, ce qui la sauvera. 04 décembre 1924 23 avril 1925 Jeudi,
5h05 Paris Loucief Lakdar 33 ans, Algérien, ouvrier. Hébergé le 28 février 1924 dans une cabane proche de la gare de St-Denis par trois ouvriers portugais. A coups de barre de fer, frappa dans leur sommeil Juan Vieira, Antonio Ferreira et Francisco Mendès pour leur voler 5.500 francs. Mendès parvint à s’enfuir pour donner l’alerte. Ferreira eut la mâchoire brisée mais survécut, pas Vieira, qui eut la gorge tranchée à coups de couteau. Réveillé à 4h45. Confie à son avocat plusieurs missions auprès de sa famille, et quand on lui demande s’il a une ultime volonté, répond : « Je désire ne pas être exécuté, je suis innocent. » Durant la toilette, récite des versets du Coran. Descend du fourgon pâle mais calme. 10 janvier 1925 05 mai 1925 Mardi,
4h50 Paris Paul-Louis Dervaux 37 ans, garagiste. Tua le 26 septembre 1923 à Paris, rue Mathis (19e) son épouse Germaine Vayssière à coups de marteau, puis l’étrangle avec une corde et débita le cadavre pour s’en débarrasser dans la Seine. Réveillé à 3h30, insulte ses visiteurs, les traite d’assassins et de bandits. Me Torrès, son avocat, emploie toute sa patience pour le calmer. Embrasse le crucifix, mais refuse la messe, et demande qu’on s’abstienne d’annoncer la nouvelle trop brutalement à sa mère : « Surtout, qu’on la ménage, elle en mourra. » Ecrit une lettre pour son avocat, formule une plainte contre son beau-frère, et refuse cigarette et verre de rhum. Devant la guillotine, grogne : « C’est injuste ! » et pousse un soupir quand on le pousse sur la bascule. 31 décembre 1924 27 juin 1925 Samedi,
4h30 Dreux
Eure-et-Loir Noël Charpentier 28 ans, ouvrier agricole. Etrangle avec un mouchoir à Dreux le cordonnier Baril le 11 novembre 1923. Ses complices : Paul Jacquot est condamné à mort – il sera grâcié – et Gustave Duroc à perpétuité. Réveillé à 5h05. Dit : « Je suis prêt. » Il entend la messe, et au greffe, fume une cigarette et boit deux verres de vin blanc. Aux aides, il dit : » Vous trouverez une lettre dans une de mes poches. » En voyant la guillotine, dressée à l’entrée de la prison, rue d’Orfeuil, il pousse un « Ah ! » d’épouvante, puis embrasse le crucifix. Sur la planche, il crie : « Adieu ! ». 07 avril 1925 31 octobre 1925 Samedi,
5h45 Aix
Bouches-du-Rhône Yves-Alexandre « Nez-Pointu » Couliou 35 ans. Le 24 septembre 1920, étrangle Yvonne Schmidt, 22 ans, danseuse de music-hall et prostituée occasionnelle, 19, rue de la République à Marseille, pour la voler après avoir passé la nuit avec elle. Son complice, Albert « L’Athlète » Polge, est condamné à perpétuité. Réveillé à 5 heures. A la nouvelle, répond : « Gardez vos boniments pour d’autres. » Parle vingt minutes environ avec son avocat Me Castelbon, refuse les secours de l’aumônier. En sortant de la prison, crache sa cigarette et en fixant le couperet, crie : « Vive l’anarchie ! Mort aux vaches ! » 25 juillet 1925 19 décembre 1925 Samedi,
7h07 Beauvais
Oise Stanislas Maklès 27 ans, Polonais. Condamné une première fois pour meurtre crapuleux d’un autre Polonais, M.Bardzinski, à Sarry (Marne) en janvier 1924. Recondamné le lendemain pour le meurtre crapuleux de M.Sivek, à Ribécourt. Son complice Muzenski, 28 ans, est condamné à vingt ans de travaux forcés. Réveil très calme à 6h45. Entend la messe de la bouche d’un prêtre polonais. Se plaint de ne pouvoir vivre assez longtemps pour voir Noël et le Jour de l’An. Boit un verre de rhum, une tasse de café, et fume sa cigarette. Marche fermement vers la guillotine, mais après le baiser du prêtre, il s’écrie : « Non, non, laissez-moi finir ma cigarette ! » Il faudra la force des trois aides pour arriver à le pousser sur la bascule tant il se débat. 30 septembre et 01 octobre 1925 14 janvier 1926 Jeudi,
7h05, 7h08 Bordeaux
Gironde Benito Castro
et
Ramon Recassens Recassens, 26 ans, boulanger. Castro, 32 ans, menuisier. Le 11 juillet 1925, attaquent la fabrique de meubles Harridez à Talence. Tuent les employés MM.Gimon père et fils, et blessent grièvement M.Labrousse, qui sera amputé de la jambe gauche. Accompagnés de deux complices, Isidoro Cazals, qui sera condamné à perpétuité, et Solar Aznar, qui s’enfuira en Espagne. Recassens est soupçonné du meurtre, en Espagne, de deux boulangers et d’un conducteur de train. Réveillés à 6h30. La nouvelle ne leur arrache pas la moindre réaction de peur. Ils refusent les secours de la religion, ainsi que le verre de rhum, mais fument plusieurs cigarettes. Au greffe, Castro écrit une lettre à sa famille tout en discutant avec son complice. Aucune déclaration de dernière minute. Devant la guillotine, Castro crie : « Vive l’anarchie ! » Recassens tente de pousser le même cri, mais l’exécution va trop vite pour qu’il y parvienne. 31 octobre 1925 15 février 1926 Lundi,
6h21 Lyon
Rhône Maurice Berger 25 ans, journalier, repris de justice. Epris d’une femme mariée, Mme Rival, tenancière d’un café avenue Jean-Jaurès, il n’avait de cesse qu’elle finisse par lui cèder. Quand le 12 février 1925, il finit par proférer des menaces de mort, la famille Rival prévient la police. Alors qu’il guette, tapi derrière un urinoir faisant face au café, remarque le sous-brigadier Daleix et le gardien de la paix Vallat allant à sa rencontre. Il les abat chacun d’une balle dans la tête. Se réveille vers 5 heures et demie et demande à son gardien si six heures sont passées. Devant la réponse négative, il s’apprête à somnoler de nouveau, mais les autorités entrent dans la cellule. Il frémit, et répond « Ca va bien. » Voyant son avocat, Me Sabatier, il le salue : « Bonjour, Maître, et au revoir. » Allume une cigarette, s’habille, écrit une lettre à sa mère – la plume étant usée, il demande qu’on la lui change -, se confesse, entend la messe. Au greffe, boit une tasse de café. Fume une cigarette tout en parlant avec son avocat et l’aumônier, puis demande aux exécuteurs s’l peut garder dans sa poche une photo de sa mère et de sa jeune nièce. Quand on lui lie les mains, il dit : « Enlevez-moi ma cigarette. » Devant la guillotine, ferme et droit, crie : « Adieu Maman ! Adieu Maman ! Adieu Marguerite ! » 31 octobre 1925 10 août 1926 Mardi,
5h Evreux
Eure Auguste Roland Marcel Agnan 19 ans, ouvrier agricole. Le 1er décembre 1925, dans un chemin vicinal de Gouville, tua la veuve Lanciaux, 80 ans, à coups de nerf de boeuf pour la voler. Il dérobe ses clefs et fouille sa maison, mais ne trouve rien à dérober. Réveillé à 4h20, dort profondément. Se lève sans mot dire, accepte d’entendre la messe d’un signe de tête, communie. Au greffe, fume une cigarette et boit trois petits verres de rhum coup sur coup. Arrivé devant la guillotine, il dit au revoir à son défenseur, Me Chauvin. 23 avril 1926 13 août 1926 Vendredi,
5h07 Riom
Puy-de-Dôme Barthélémy Antoine Chabaud 25 ans, manoeuvre. Tua à coups de bâton sur la tête Irenée Garraud, rentier septuagénaire pour lui voler 12 francs, dans le bois de la Charade le 12 août 1925. Son complice Maréchal, 25 ans, garçon boucher, est condamné à perpétuité. Réveillé dès minuit par les cris de la foule amassée place Desaix, devant la prison, se doute de son sort. S’habille, malgré les tentatives de son gardien pour le rassurer, et rédige son testament avant de proposer au même gardien une partie de cartes « pour tuer le temps ». A plusieurs reprises, le comportement des gens à l’extérieur lui fait perdre son calme et c’est avec soulagement qu’il voit les officiels rentrer dans la cellule. « Du courage, j’en aurai. J’en ai eu pour commettre un crime, j’en aurai pour expier. » Il refuse les secours de la religion, et se laisse « toiletter » sans mot dire, avant de marcher fermement vers l’échafaud. 30 avril 1926 24 août 1926 Mardi,
5h15 Reims
Marne Georges-Alphonse Passevache 27 ans, valet de ferme. Tue à coups de fusil Marie Boude, 24 ans, fille de ses anciens patrons, à Saint-Quentin-le-Verger le 19 novembre 1925, pour avoir refusé de l’épouser. Réveillé à 4h27. Effondré, durant la messe, murmure « Misère de misère, c’est malheureux tout de même ! » Sur le seuil de la prison, en voyant l’échafaud, répète : « Malheur de malheur, dire que je vais là… » et en reconnaissant la mère de sa victime au premier rang, lance : « Lucienne, Lucienne, qu’est-ce qu’il y a ? » 10 juin 1926 08 février 1927 Mardi,
6h55 Bordeaux
Gironde Fernand Jeanty 39 ans, cultivateur. A Saint-Avit-du-Moiron, empoisonne son frère Gabriel, alcoolique et légèrement retardé, avec la complicité de son épouse, Marguerite Cluzeau, condamnée à mort elle aussi, et graciée. Les époux Jeanty avaient escroqué leur parent de 2.000 francs (toutes ses économies), et il avait même rédigé un testament en leur faveur, avant de comprendre qu’il ne reverrait pas son argent. Il réclama qu’on le rembourse. Pris à la gorge par les dettes, les Jeanty lui servirent un verre d’alcool mêlé à de l’acide sulfurique, le 12 mai 1926, qui le rendit atrocement malade, mais pas assez vite au goût des meurtriers. Le 14 mai, ils servirent au malheureux une soupe assaisonnée de mort-aux-rats, qui le tua en trois jours. Entend la nouvelle avec calme. Boit un café arrosé de rhum, fume une cigarette. Discute avec le pasteur, écrit deux lettres à ses enfants et demande à voir sa femme. Exceptionnellement, la demande est acceptée. Il embrasse sa femme et lui : « Voilà où tu m’as conduit. Débrouille-toi comme tu pourras, maintenant. » 09 octobre 1926 17 février 1927 Jeudi,
6h40 Rouen
Seine-Inférieure Désiré Bénard 27 ans, ouvrier agricole. Satyre assassin de Yolande Lejeune, 4 ans, fille de ses patrons, dont il abusa avant de lui trancher la gorge le 27 juin 1926 à Ménonval. Réveillé à 6 heures. Accablé, ne dit pas un mot. Discute quelques instants avec son avocat, puis conduit à la chapelle, entend la messe, se confesse et communie. Au greffe, boit un café arrosé de rhum et fume une cigarette. Aux gardiens, il dit : « Je vous remercie, vous êtes des braves gens, et je voudrais vous serrer les mains. » Arrivé place Bonne-Nouvelle, l’abbé Maunoury lui enlève la cigarette des lèvres et l’embrasse. Un peu de brume. Présence du père Lejeune. 26 novembre 1926 03 juin 1927 Vendredi,
4h46 Montauban
Tarn-et-Garonne Félix Blanquefort 35 ans, cultivateur. Le 11 mars 1926, à Montpezat-de-Quercy, tue à coups de revolver les époux Dejean pour leur voler 15.000 francs, sous les yeux de leur fils de cinq ans. Réveillé à 3h55. « Eh bien », répond-il au procureur, visiblement très ému. Le juge d’instruction Molinié lui demande s’il a une dernière déclaration : « Il y a eu simulacre de crime. » Refuse la cigarette, mais accepte une tasse de café arrosée de rhum. Demande à entendre la messe et à se confesser. Office dans le parloir des avocats, chapelle improvisée pour l’occasion, en compagnie de l’abbé Pons. Au greffe, confié aux exécuteurs, se plaint : « Vous me faites mal ! Ne tirez pas si fort ! » Place Montauriol, s’avance vers la guillotine sans opposer la moindre résistance. 28 décembre 1926 05 juillet 1927 Mardi,
4h40 Versailles
Seine-et-Oise Gabriel Montfort 22 ans, ouvrier métallurgiste. Arrêté pour plusieurs vols commis à Limours et ses alentours, s’évada de la prison de Rambouillet le 11 juin 1926 en compagnie de deux autres forçats, François Barrère, 24 ans, et Henri Montillon, 21 ans, en étranglant le gardien Lenormand. Furent capturés le lendemain, et tous trois condamnés à mort. On doit l’éveiller tant il dort bien. « C’est pour ce matin ! J’aurai du courage ! » Au procureur, il dit : »Vous, laissez-moi tranquille. Je vous ai assez entendu ! » Il s’habille, puis demande de l’encre, du papier, une plume pour écrire à sa soeur une lettre dans laquelle il demande pardon et fait ses adieux. Tout en rédigeant, il fume une cigarette et boit un verre de rhum. Demandant à serrer la main de ses complices, il se voit refuser cette volonté, et il en profite pour demander si « les autres allaient y passer. » Me Ribet, son avocat, lui ment et laisse entendre que Barrère va le suivre, ce qui le réconforte. Communie et se confesse. Sort de la prison cigarette aux lèvres, embrasse le crucifix et donne l’accolade à l’aumônier. Se raidit sur la bascule, doit être saisi par les cheveux. 03 mars 1927 08 juillet 1927 Vendredi,
4h10 Metz
Moselle Marcel Sinn 23 ans, ouvrier. Poignarde de 26 coups de couteau le taximan Alfred Studert, 27 ans, à Thionville, le 26 juillet 1926. Révéillé à 3h15. Demande à se confesser et à communier. En voyant la guillotine dressée rue Maurice-Barrès, sourit et dit en allemand : « Voilà la machine infernale. »/td> 24 mars 1927 18 août 1927 Jeudi,
5h05 Laon
Aisne André Supply 24 ans. Le 12 février 1927, à Braine, tue le livreur de farine Sauvage pour le voler. Manifeste un grand repentir. Communie, entend la messe. Refuse le rhum et la cigarette. Devant la guillotine, dit à son avocat : « Embrassez ma mère pour moi. »Le fils Sauvage assiste à l’exécution. 16 mai 1927 24 décembre 1927 Samedi,
7h10 Douai
Nord Abderrhamane ben Naceur Anglo-égyptien. Assassin d’un coup de revolver sa maîtresse Marguerite Motte à Auby en janvier 1927. Le même jour, tente de tuer deux amis arabes, dont un certain Kherradine qui lui reprochaient le crime et menaçaient d’aller le dénoncer. A 6h35, dort encore à l’entrée des officiels et des magistrats. Sitôt réveillé, quitte son lit et se montre courageux. Par le biais de l’interprète, le procureur demande s’il a des déclarations à faire : réponse négative. Ben Naceur répète alors sa version du crime : Marguerite lui en voulait, et elle s’est suicidée pour le perdre ! Kherradine était lui aussi dans le complot. Une fois ceci dit, le condamné se met à plaisanter en arabe. A l’imam venu le soutenir, il dit : « J’en sais autant que toi. Allah est grand, et Mahomet est son prophète… Ca devait arriver. Inch’Allah ! » Puis en français : « On va couper cou, mais tout le monde mourir comme moi ! » Au docteur Lambilliote, qui le soignait depuis des mois, il se montre rassurant : « Plus besoin pilules, ni tisanes, ni faire toc toc sur poitrine. Moi guéri ! » On doit insister pour qu’il accepte de boire un café, mais il fume avec un plaisir évident sa dernière cigarette. Il va ensuite la tête haute vers la guillotine. 06 juillet 1927 21 janvier 1928 Samedi,
7h10 Evreux
Eure Auguste Martin 41 ans, docker. Mari violent, poignarde mortellement son épouse qui venait de le quitter le 16 août 1926 en pleine rue du Petit-Quevilly (Seine-Inférieure). Condamné à Rouen, cassé, recondamné dans l’Eure. Réveillé à 6h30. Assis sur son lit, a compris d’avance. Pâle. Promet à l’aumônier d’être courageux. Ne dit quasiment rien par la suite. Anéanti, se laisse vêtir et accepte la messe. Communie debout. Au greffe, fume une cigarette et accepte un verre de rhum offert par le gardien-chef. En marchant dans le couloir, dit « Voilà la justice française qui passe. » La guillotine est pour la première et seule fois dressée devant la porte d’entrée de la maison d’arrêt. Surpris de la voir si près, a un moment de surprise, puis s’avance vers elle, ferme et cigarette aux lèvres sans même qu’on ait à le pousser. Temps de pluie. 02 mars 1927, 12 octobre 1927 22 mars 1928 Jeudi,
5h15 Epinal
Vosges Paul Valence PARRICIDE. 38 ans, menuisier. Tue à coups de marteau sa mère, la veuve Marie-Joséphine Valence, 65 ans, à Saint-Dié le 17 février 1927 parce qu’elle refusait de lui donner de l’argent. La veille, il avait tenté de l’empoisonner avec un bol de café au lait mêlé de dix grammes d’arsenic. Réveillé à 4h40. Très courageux, répond : « Bien, monsieur ». Parle avec l’aumônier, se confesse et communie. S’habille seul et met ses chaussures qu’il lace – même si il va devoir les retirer pour aller au supplice. Au greffe, refuse verre de rhum et cigarette proposés par son avocat Me Jeanpierre : « Merci, j’aurai du courage, et puis, quand je bois, je ne sais plus ce que je fais. ». Le prie d’acheter une couronne de fleurs à déposer sur la tombe de a victime. Revêtu de la tenue des parricides. 14 décembre 1927 27 mars 1928 Mardi,
5h10 Rouen
Seine-Inférieure Paul-Emile Lasgi 22 ans, bouilleur de cru. Dans la nuit du 10 au 11 juin 1927, à Sévis, assassine à coups de marteau M.Facon, 74 ans et son domestique Guerrand, 67 ans, pour les voler, et met le feu à la ferme. A un bref instant de défaillance au réveil, puis se reprend. Mais au moment de monter dans le fourgon, fait des révélations de dernière minute : il était accompagné par un nommé Henri Renaux, 21 ans, charretier, pour commettre le crime, et c’est Renaux qui a personnellement tué Facon. Arrêté quelques heures après l’exécution, Renaux avouera sa complicité, et sera condamné à perpétuité par les assises de Seine-Inférieure le 13 juillet 1928. 27 novembre 1927 03 avril 1928 Mardi,
4h59, 5h01 Paris « Julian Pachowski »
et
Wladimir « Wladek » Zinczuk Wladek, chef de « la bande des Polonais », 28 ans, fils d’un commissaire de police, soldat dans les armées russes, bachelier, polyglotte (cinq langues), et « Pachowski » – véritable identité inconnue -, son principal homme de main (la bande comptant 28 malfaiteurs). Auteurs d’une trentaine de cambriolages, agressions, vols, crimes et méfaits entre juillet 1924 et février 1925 dans une quinzaine de départements de France, dont six meurtres recconnus. Dans la nuit du 1er au 2 juillet 1924, Zinczuk, Zaszeck, Furmanczyk et Bronck tentent de tuer à coups de revolver M. Pozzo, bijoutier à Reims (Marne). Le 21 juillet, toujours à Reims, Zinczuk et Zaszack tuent à coups de barre de fer Ali Maouch, algérien, pour lui voler ses économies. Le 6 octobre, à Soissons (Aisne), Zinczuk, Pachowski, Zaszack et Najmrocki tuent à coups de barre de fer le Polonais Niemec pour lui voler ses économies. Le 5 novembre, près de Fismes (Marne), échange de coups de feu entre deux gendarmes, MM. Gourdin et Mathis, et Zinczuk, Zaszack et Skopowicz. Le 21 novembre, rue des Monnaies-d’Hyères, à Paris, Skopowicz et Zaszack tuent l’ouvrier polonais Prozycki pour le dépouiller. Le 24 novembre, Zinczuk, Skopowicz, Jasick et Zaszeck sont contrôlés par le gendarme Rognon à St-Witz (Seine-et-Oise). Zinczuk l’assomme d’un coup de crosse de revolver, avant de lui tirer quatre balles dans le cou. M.Rognon survivra. Le 18 décembre, à Metz (Moselle), Pachowski et Wrobelski tuent à coups de hache M.Valerjean, ouvrier, pour lui voler son argent, et jettent son corps dans la Moselle. Le 28 janvier 1925, à Chalvigny (Eure), Zinczuk, Pachowski, Gogolewski et Jasick s’introduisent chez la veuve Curtis, une femme âgée pour qui Jasick a travaillé comme valet de ferme. Ils la réveillent, la menacent de leurs revolvers, et quand elle essaie de s’enfuir et de donner l’alerte, Pachowski lui tire deux balles dans le dos, et Zinczuk deux autres balles dans le ventre. La pauvre femme meurt quelques jours plus tard dans une clinique parisienne. Le 6 février, à Versailles, Zinczuk, Bruzda et Gogolewski sont surpris par un vigile, M. Viot, et un commerçant, M. Langlois, avenue de Toulon, alors qu’ils viennent de cambrioler une villa de Versailles et l’église de Glatigny. Le gardien est abattu, et M.Langlois blessé de trois balles. On soupçonne divers membres du gang d’avoir été mêlés à pas moins de dix-sept meurtres et assassinats commis à cette période et demeurés impunis. Six membres ne seront pas retrouvés, Jasik meurt pendant l’instruction, Bruzda est jugé et condamné à 5 ans de prison en Allemagne. Skopowicz et Gogolewski sont condamnés à perpétuité, Les seize autres bandits écopent de peines allant de dix ans de travaux forcés à quatre ans de réclusion. Réveillés à 4h10. Pachowski ne parle quasiment pas, Wladek, lui, parle pour deux, plaisante et même chante : « Je vais mourir en fumant ! La semaine où le Seigneur ressuscite, moi, on m’envoie à l’échafaud. Vous savez, il y a des voleurs à la Santé ! On m’a pris mes boutons de manchette ! Et si je faisais des révélations, ça prendrait combien de temps ? » Puis s’adresse à Me Sasia Erlich, son avocate – première avocate à assister au supplice d’un client – « Retirez votre gant, maître, que je vous baise la main. » Pachowski refuse le rhum d’un signe de tête ; Wladek, avec enthousiasme, se fait remettre le quart de livre qu’il avale jusqu’à la dernière goutte. Courte messe et communion : ce n’est qu’à la demande de l’aumônier que les complices daignent se serrer la main. « Me pardonnes-tu ? » demande le chef à son lieutenant sans obtenir de réponse avant d’aller au greffe. Quand les portes du fourgon s’ouvrent boulevard Arago, Wladek salue le départ de son compagnon : « Poz dania. » Pachowski descend le premier, les yeux rivés sur le couperet. Toujours fasciné par le couteau, embrasse l’un des aumôniters puis se laisse pousser sur la bascule. Wladek, cigarette aux lèvres, calme, s’adresse en polonais à Me Erlich avant de saluer l’assistance : « Au revoir, messieurs. » Il détourne la tête pour embrasser l’aumônier sans le brûler avec sa cigarette, et se laisse entraîner par les aides. 27 novembre 1927 14 avril 1928 Samedi,
4h45 Caen
Calvados William Follain 22 ans, commis chez un architecte de Lisieux. Ayant détourné 900 francs de la caisse de son patron pour les dépenser en soirées fines, abat d’une balle dans la nuque le taxi Boulle le 15 juin 1927, à deux kilomètres de Lisieux, et lui vole 600 francs et une montre, somme qu’il dépense le soir-même dans un café, au restaurant et au cinéma. Dans la nuit du 27 au 28 juin, à bord du train Cherbourg-Paris, abat de deux balles dans le coeur tirée à bout portant le colonel Jacques Sauvalle, professeur à l’Ecole de Guerre. Croyant que le train ralentit alors parce qu’on a tiré le signal d’alarme – alors que le convoi approche simplement d’une gare -, Follain n’a pas le temps de voler les 4.000 francs que le colonel avait sur lui. Se blessant en sautant du convoi en marche, il est récupéré par un mécanicien et conduit à la gare de Bernay (Eure) pour y être soigné. Se perdant dans les explications, il avoue ses crimes. Son père, accablé de douleur, se tira une balle dans la tête en apprenant la nouvelle. Réveillé à 4h10. Doit être secoué à trois reprises pour le faire se lever. Une fois debour, très calme. Reste un peu avec son avocat, Me Gouget, et le prêtre. Demande à conserver sur lui une lettre écrite par sa mère. Entend la messe et communie. Embrasse son avocat et fond en larmes, mais se reprend très vite. Après la messe, fume une cigarette et boit un cordial au greffe. Va à l’échafaud sans recul. 12 janvier 1928 04 mai 1928 Vendredi,
5h Dunkerque Lucien Beyen Belge, docker, 21 ans. Assassine à coups de matraque à Dunkerque le docker Alfred Boens, 33 ans, le 10 octobre 1927, pour lui voler son argent. Deux complices : son frère, et un garçon de 17 ans, Petyt, condamné à séjourner dans une colonie pénitentiaire jusqu’à la majorité. Réveillé à 4h30. Aucune réaction face à la nouvelle. Refuse les secours de la religion. Boit un verre de rhum. Devant l’échafaud, crie : « Vive la Belgique ! » 10 janvier 1928 19 mai 1928 Samedi,
5h Périgueux
Dordogne André Bellier PARRICIDE. 35 ans, bon à rien entretenu par sa femme fleuriste et leur fille, décide de quitter le domicile conjugal, et retourne chez ses parents, 60 ans, anciens marchands de vins, habitant à Périgueux. Continuant sa vie de fainéant, il décide de voler le coffre-fort de son père. En l’absence de ce dernier parti à la pêche, attire sa mère à la cave et l’abat d’une balle dans la nuque, puis au retour de son père, lui fracasse le crâne avec une tapette de tonnelier. Faute de pouvoir forcer le coffre, il se contente de 2.700 francs retrouvés dans la maison. Réveillé à 4h. Apprend l’information pâle, mais avec un demi-sourire, et se contente de grogner : « On aurait pu me le dire plus tôt. » Demande à se confesser et à entendre la messe. A son avocat, me Desdemaine-Hugon, qui ne peut contenir ses larmes, il répond : « Vous pleurez ? Ca n’en vaut pas la peine ! Ma vie et ma mort ne furent qu’un rêve ! » Après l’office, pendant la toilette, plaisante avec le bourreau et les aides. Foule imposante devant la maison d’arrêt. Sort dans la tenue parricide. Face à l’échafaud, entend la lecture de l’arrêt de mort, puis un aide lui retire son voile. Blêmit fortement en voyant la machine, a l’habituelle réaction de recul, vite corrigée par les aides. 01 mars 1928 21 juin 1928 Jeudi,
5h08, 5h10 Montbrison
Loire Joseph Allier
et
Jacques Montagnon 25 ans, sans profession, et 23 ans, chiffonnier. Assommèrent mortellement à coups de canon de fusil le 15 avril 1927 Claude Masson, armurier à Aboën, oncle d’Allier, dès son réveil. Ils cachèrent le corps dans la cave où on le retrouva huit jours plus tard, et partirent sans un sou, n’ayant pas réussi à retrouver les 42.000 francs d’économies de leur victime. Réveillé peu avant 4 heures, Montagnon se lève d’un bond. « J’ai compris ! » Pendant cinq minutes, il reproche avec force injures le procureur Aubert d’être responsable de sa fin, et on doit le calmer. Allier, lui, reste calme et ne pipe mot. Boivent l’un comme l’autre une demi-gamelle de vin, et demandent à entendre la messe. Montagnon va à la chapelle en chantant et en dansant. Après la cérémonie, il prie le procureur de l’excuser de son emportement. Au greffe, ils demandent du rhum, des cigarettes, et un verre de fine. Après avoir chacun écrit une lettre à leurs familles, ils réclament un autre verre de rhum. Montagnon sort le premier, et crie aux gendarmes qui barrent le passage : « Eh là, enlevez vos fusils, pas besoin de ça ! » Puis reconnaissant quelqu’un dans la foule : « Ah, Monsieur Renaud ! Au revoir, Monsieur Renaud ! » Il est très rapidement poussé sur la machine. Allier, comme hébété, doit être presque porté de la porte à la guillotine. Il a un mouvement de recul, vite maîtrisé. Durée totale de la double exécution : 1mn26. 05 mars 1928 24 août 1928 Vendredi,
5h45 Foix
Ariège François Dedieu 28 ans, cultivateur. Assassine son oncle Jean-Baptiste Couderc, maire d’Artix, et son épouse Albine, à coups de masse, dans la nuit du 29 au 30 octobre 1927 pour voler 60.000 frs. Réveillé à 4h50. « C’est bien, c’est bien… Puisqu’il faut y aller, j’irai… » Aucune déclaration. Entend la messe, puis boit un verre de Banyuls. Pendant la toilette, fume un cigare offert par un gardien. Embrassé par l’aumônier devant la guillotine, garde le cigare à la bouche. 22 mai 1928 06 octobre 1928 Samedi,
6h28 Bourg
Ain Georges Niogret 23 ans, voleur récidiviste. Le 27 janvier 1928, à Oyonnax, tue de quatre balles de revolver M.Ancian, 60 ans, pour lui voler une sacoche de toile cirée qu’ils croyaient remplie d’argent et qui ne contenait que de la nourriture et quelques pièces de quincaillerie. Son complice, Georges Girod, 19 ans, est condamné à perpétuité. Réveillé à 5h40. Dormait à poings fermés. On lui enlève chaînes et camisole de force, il s’habille et reçoit un verre de rhum. Manifeste l’envie d’écrire, puis se ravise. A la question du procureur, il accepte de communier et d’entendre la messe. Au greffe, après la toilette, embrasse en pleurant son avocat, Me Rogier, lui demande une cigarette, le remercie de tout ce qu’il a fait pour lui, et le prie de dire que ses dernières pensées furent pour ses parents. Cigarette aux lèvres, il descend l’escalier au pied duquel se trouve la guillotine. Dit « Adieu mes frères ! » et est poussé sur la bascule. Ses jambes sont prises d’une violente secousse une fois à l’horizontale. 29 juin 1928 11 octobre 1928 Jeudi,
6h26 Metz
Moselle Alphonse Herbivo 23 ans, journalier. Tue d’un coup de manche de pelle le 05 janvier 1928 Mlle Germaine Leclerc, 68 ans, rentière à Morhange. Soupçonné d’autres crimes. Réveillé à 4h40. Résigné, entend la messe, communie, et écrit une lettre à sa mère. 08 juin 1928 09 novembre 1928 Vendredi,
6h Privas
Ardèche Joseph Léon Rauch 31 ans, tapissier. Assassine le maquignon Philémon Théron, 43 ans, à Gluiras le 25 novembre 1927 de six balles de revolver avant de l’achever à coups de talon dans le visage et de jeter le corps dans une mare. Butin du crime : 102 francs. Son complice René Frédillon est condamné à perpétuité. Deux semaines plus tôt, le 13 novembre 1927 à Montpellier, tente de tuer de deux coups de revolver, Achille Miglionico, propriétaire d’une maison close avant de chercher à l’égorger à coups de rasoir. Embauché comme tueur à gages par Mme Miglionico, née Marie Giral, l’épouse de sa victime – elle-même blessée à la main par une balle pour donner le change – et par Augustin, le frère de cette dernière, contre une somme de 50.000 francs. Le 12 juillet 1928,Frédillon est de nouveau condamné à perpétuité, les complices Augustin Giral à trente ans de travaux forcés et Marie Miglionico à 5 ans de bagne. tenta également de tuer une épicière à Nîmes – ce qui lui valut une condamnation à perpétuité. Réveillé à 5h30. Dort profondément. Répond au procureur : « J’ai tué, il est juste que l’on m’en fasse autant. » Demande à écrire à ses parents, à Paris. Embrasse son avocat, le remercie de ses efforts, regrette ses crimes. Au greffe, avale un verre de rhum et refuse la cigarette. Pluie fine et froide. La place des Prisons est vide de tout spectateur tant les barrages sont placés à l’entrée de chaque rue qui y mène. 16 mai 1928, 12 juillet 1928 08 février 1929 Vendredi,
6h25 Strasbourg
Bas-Rhin Emile Quirin 43 ans, carreleur, repris de justice. Auteur de plusieurs vols dans le quartier du Neudorf, à Strasbourg, tue d’une balle en plein coeur le maréchal des logis Léon Nast, 40 ans, venu l’arrêter le 20 octobre 1927. Réveillé à 5h40. Aucune déclaration. « J’étais un honnête homme, et si j’en arrive à cette fin, c’est la faute aux tribunaux. » Puis il se met à insulter les magistrats, le prêtre qui s’approche, et refuse les secours de la religion : « J’ai réglé mon compte directement avec Dieu, je ne veux pas d’intermédiaire ! J’ai regretté ce que j’avais à regretter ! » A son avocat, Me Fonlupt, il dit sarcastiquement : « A vous, je vous souhaite beaucoup de bonheur. » En voyant le commissaire Lorentz, il dit : « Si vous aviez été à la place de Nast pour m’arrêter, je vous aurais fait le même coup. » Au greffe, il fume cigarette sur cigarette, se plaint du froid, trouve la situation trop longue : « Fermez la porte ! » Il boit deux verres de rhum avant qu’on ne l’entraîne hors de la prison. Pâle et barbu, il avance vers l’échafaud. 15 novembre 1928 19 février 1929 Mardi,
6h20 Valence
Drôme René Frédillon 21 ans. Assassina d’un coup de couteau Mlle Brun, 75 ans, buraliste à Valence le 11 août 1927 avec son complice Joseph Rauch. Sitôt le crime commis, il dérobe 8.500 francs et s’enfuit à Nîmes où il tente d’étrangler une épicière. S’ensuit l’assassinat du maquignon Théron à Gluiras, puis la tentative d’assassinat rémunéré du souteneur Miglioni à Montpellier. Condamné à perpétuité à Privas le 16 mai 1928, puis à Montpellier le 12 juillet 1928. Aucun regret au réveil, à 5h50. Refuse de parler à l’aumônier Dumonteil : « Ca ne m’intéresse pas. » Comme il fait -6°C, il commente : « C’est quand même malheureux de partir pour l’autre monde par un froid pareil. » Au greffe, il dit : « Je l’ai bien mérité ! » Puis quand on l’attache, il rajoute : « On est ficelé comme un saucisson, c’est pas drôle votre truc ! » Remercie son avocat, Me Fouillié, l’aumônier et ses gardiens, toujours aimables avec lui. Puis il part à la guillotine clope au bec et en regardant le couperet. 23 octobre 1928 26 février 1929 Mardi,
6h22 Amiens
Somme Serge Gambier 19 ans, ouvrier chaisier. Le 1er juillet 1928 à Beaucamps-le-Vieux, assomma à coups de hachette et égorgea au rasoir les soeurs Céline et Marie Villerel, 72 et 68 ans, épicières, pour leur voler 7 francs. Réveillé à 5h20. Dort à poings fermés. Surpris : croyait en sa grâce. Mais très fermement, parle à son avocat Me Chevrio, et avec l’aumônier qui l’avait baptisé la veille. Après la messe et la communion, écrit deux lettres tout en fumant plusieurs cigarettes et une tasse de café. La cigarette aux lèvres, va sur la bascule et crie : »Adieu messieurs ! » 3.000 personnes présentes. 24 octobre 1928 21 mars 1929 Jeudi,
5h15 Douai
Nord Léon Vendredeuil 36 ans, ouvrier couvreur, onze condamnations préalables. Il maltraitait sans répit sa femme Augustine Kelner, 30 ans. En janvier 1928, après une rossée qui la laisse alitée deux semaines, elle le quitte avec leurs trois enfants et part s’installer chez sa mère. La guettant à proximité de son lieu de travail, la filaterie Tanguy, rue d’Arcole, le 18 mai 1928, il la frappe de cinq coups de couteau, dont un au foie, quand elle refuse de reprendre la vie conjugale. Elle expire le 20. Réveillé à 4h45. Fait preuve de sang-froid. Il parle avec son avocat, Me Busquin, puis avec l’aumônier, mais refuse d’entendre la messe. Quand la bascule pivote, il crie : « Au revoir à tous ! » 18 janvier 1929 15 mai 1929 Mercredi,
4h45 Marseille
Bouches-du-Rhône Bonaventure Balsanti 20 ans, vagabond, déjà condamné sept fois. Sorti de prison le 1er octobre 1927. S’enfuit lors d’un contrôle d’identité, le 20 octobre 1927, et blesse de deux coups de revolver dans la poitrine l’agent cycliste Feutrier, 30 ans, qui le poursuivait rue Poids-de-la-Farine à Marseille, puis blesse M.Cient, représentant, qui s’était jeté sur lui pour l’arrêter, ainsi qu’une passante, Mme Fourrel. Feutrier meurt à l’hôpital trois jours plus tard. Réveillé à 4h05, dormait bien. S’emporte : « Du courage ? Vous me demandez du courage ? Comment voulez-vous en avoir quand la société vous assassine en détail ? » Pas de déclarations à faire. Allume une cigarette et boit un verre de rhum. Serre la main de son avocat et demande à écrire à sa tante qui l’a élevé, mais ne parvient à rédiger que « Ma chère tante » avant d’être pris de tremblements qui l’empêchent de continuer. Me Auguste Arnaud se propose de la terminer, Balsanti accepte et se contente de signer en bas de page. Fume-cigarette aux lèvres, va à la chapelle, communie et entend la messe. Toilette rapide durant laquelle il boit plusieurs verres de rhum et allume une seconde cigarette. Quand on le soulève de sa chaise, dit adieu à son avocat qui l’embrasse. En aperçevant la guillotine à l’entrée de la prison, s’arrête un instant et murmure : « La voilà ! » puis reprend sa marche jusqu’à la bascule. 21 janvier 1929 24 janvier 1930 Vendredi,
6h30 Digne
Basses-Alpes Alexandre Jules Joseph Ughetto 19 ans, journalier. Le 04 décembre 1928, à la ferme des Courrelys à Valensole, tue à coups de revolver, de pieds de chaise et de briques la famille Richaud, ses anciens patrons : Adrien, 46 ans, Antonia, 40 ans, Roger, 10 ans, Clément, 3 ans, ainsi que le valet de ferme quinquagénaire Louis Amaudric pour les voler. Son complice et amant, le Polonais Szczepan Mucha, dit « Jozef Witkowski », 16 ans, est condamné à vingt ans de travaux forcés. Arrivée des officiels à 5h45. Ughetto assis sur son lit ne dort pas. Tremble face à la nouvelle, puis se ressaisit et s’habille seul. Dans la chapelle, entend la messe. Boit trois verres de rhum et fume une cigarette. « Messieurs les gardiens, vous avez été chics pour moi, je vous remercie. De vous aussi, Monsieur le gardien-chef, je n’ai pas à me plaindre, merci ! » Au procureur, reconnaît : « Vous avez fait votre devoir. » Il remet à son avocat Me Auguste Arnaud une lettre adressée à ses proches, dans laquelle il reproche amèrement à son père d’avoir « facilité » sa condamnation, et où il dit adieu à sa soeur. Serre la main de son défenseur : « Maître, je vous remercie de tout ce que vous avez fait pour moi. » Pendant la toilette, réagit à peine et ne dit pas un mot. Descend la pente qui mène de la prison à la rue avec crânerie. Poussé sur la bascule, crie « A moi les murs, la terre m’abandonne ! » 17 septembre 1929 20 mars 1930 Jeudi,
5h35 Douai
Nord Charles Masselis 41 ans, chauffeur de dragueuse, surnommé « L’Ogre d’Haubourdin ». Père incestueux, abusait de sa fille depuis qu’elle avait 12 ans. Le 20 novembre 1928, à Lhomme, enlève Nelly Dellavallée, 8 ans, et tente de la violer dans un terrain vague. Le 26 avril 1929, à Lhomme, satyre assassin de Marie Notteau, 8 ans, dont le corps ne sera jamais retrouvé. Le 10 mai 1929, aux alentours d’Haubourdin, satyre assassin de Marcelle Billiaud, 9 ans, dont il jette le corps étranglé dans le canal de Seclin. Dort profondément à son réveil. Assis sur son lit, ne semble pas comprendre que c’est la fin. Entend la messe, refuse de communier. Son avocat lui demande d’avouer son premier crime, mais Masselis se dit innocent. Il évoque sa mère, sa fille, puis dit « J’espère que d’autres me suivront. » Quand il apparaît au seuil de la prison, des cris retentissent : « Tu as tué ma fille ! A mort ! A mort ! » Ce sont les mères de ses victimes qui assistent à l’exécution. 23 octobre 1929 02 avril 1930 Mercredi,
5h Versailles
Seine-et-Oise Marcel Morice 19 ans, garçon boucher à Montigny-les-Cormeilles. Assassina à coups de cheville de fer sur le crâne la veuve Adèle Darlan le 21 avril 1929 à Franconville pour lui voler 400 francs. Dort bien. Le gardien-chef doit lui taper plusieurs fois sur l’épaule. Il comprend aussitôt : quand le procureur lui dit de faire preuve de courage, il hausse les épaules et boit un verre de rhum. Silencieux, va au greffe et communie. Boit un second verre de rhum et fume une cigarette, et c’est clope au bec qu’il va vers la guillotine : avant de le basculer, on lui retire son mégot. 29 novembre 1929 06 mai 1930 Mardi,
4h50 Reims
Marne Albert Clarisse 27 ans, vannier ambulant, marchand de lapins. Cambriole la taverne de la veuve Foucault, 68 ans, à Glannes le 31 octobre 1928, et tue la débitante en lui cassant la tête avec une bouteille de champagne, puis en la décapitant avec une serpe avant de mettre le feu à la maison. Sa cousine et maîtresse Lisa Karl, 35 ans, ayant participé au crime, est aussi condamnée à mort et graciée : elle devient folle en apprenant l’exécution de son amant. Suite aux accusations de Lisa Karl, la police sut que, le 29 septembre 1926, Clarisse avait également assommé et violé à Orcomte la veuve Hamiez, 89 ans, pour lui voler 25 francs. Un nommé André Rémy, idiot du village, 25 ans, avait été arrêté et condamné à vingt ans de bagne pour ce crime – et libéré trois semaines plus tard quand son innocence fut reconnue. Clarisse fut également soupçonné de trois autres assassinats : M. Poirson, de Droyes (Haute-Marne), la veuve Lesdanon, de Puelmontier (Haute-Marne) et Louis Boutonnier, tué à coups de marteau et dévalisé à Condreville (Marne) en 1924. Il avait aussi fait de la prison en 1926 pour avoir participé de plus ou moins près à l’assassinat d’un vieil homme à Favresse. Condamné sage, se laisse faire. Boit deux verres de marc de champagne, assiste à la messe, et dit : « Ce n’est pas parce que j’ai été poussé par Lisa que je dois mourir comme ça. Mais ça ne fait rien, j’irai tout seul, sur le machin, sans qu’on me tienne les mains. Je m’en doutais bien que c’était pour aujourd’hui, ma femme ne m’a pas écrit hier, et puis la façon dont les gardiens m’ont enlevé mon travail hier soir… » Ses derniers mots : « Je suis courageux, messieurs, mais je vois que vous êtes aussi courageux que moi ! » 18 novembre 1929 09 mai 1930 Vendredi,
4h44 Boulogne-sur-Mer
Nord Paul Dufour 41 ans, cultivateur. Assomme à coups de rondin Marie Huguet, 56 ans, à Radinghem le 15 mai 1929, parce qu’il ne pouvait pas lui rembourser les 375 francs qu’il lui devait. Au passage, il déroba 22.000 francs en bons de la Défense nationale. Le corps est retrouvé le 21 juillet suivant, dépecé à la hache en une quarantaine de morceaux, enfoui dans le bois de Mengas. Son complice, Eugène Truitte, lui aussi condamné à mort, est grâcié et libéré après 20 ans de bagne, mourra libre à Radinghem en 1962. Réveil à 3h45. Dort profondément. Ne répond rien aux officiels. Accepte d’entendre la messe, communie et se confesse. Demande à son avocat la photographie de son fils, et la glisse dans sa chemise. Il demande ce qu’il va advenir de Truitte, et le procureur choisit de lui mentir en répondant que rien n’a été décidé le concernant. S’entretient longuement avec son avocat Me Sergeant, à qui il fait de longues recommandations. Fume une cigarette et boit un verre de rhum. Un geste de recul devant l’échafaud, à cinq mètres de la porte de la prison. 16 décembre 1929 16 mai 1930 Vendredi,
4h45 Marseille
Bouches-du-Rhône Jean-Baptiste « Le Griffe » Guiffaut 28 ans, navigateur. Déjà auteur d’un braquage de transport de fonds en 1923 à Ajaccio. Le 21 novembre 1928, avec quatre complices, attaquèrent le Crédit foncier d’Algérie et de Tunisie à Marseille, et braquèrent les employés chargés d’un dépôt de 385.000 francs. Charles Loudier, 66 ans, économe de la banque, surveillait le transfert, revolver à la ceinture. Quand il intervint pour aider ses deux collègues, MM.Toussaint Confortini et Auguste Roques, il fut abattu d’une balle en plein coeur par Guiffaut. Ses complices, au nombre de huit (trois principaux, cinq secondaires), furent condamnés à des peines allant de 20 ans de bagne à 5 ans de prison. Reveillé à 4h par un gardien qui lui annonce que le procureur veut lui parler. Se lève lentement. « Je n’ai rien à dire », conclut-il avant qu’on ne le détache. S’habille, se toilette, se lave les mains et lace ses chaussures. Serre la main à son avocat, écrit une lettre à sa maîtresse et une lettre à sa mère, puis interroge le juge Pierucci : « Dites-moi, monsieur le juge, croyez-vous vraiment que j’ai mérité la peine de mort ? » Le juge dit qu’il n’a pas à critiquer le jugement prononcé, et Me Acquatella explique que la grâce a été rejetée en raison de ses antécédents. L’explication convient à Guiffaut : « Ah, c’est bon ! ». Avant de quitter le greffe, a une dernière volonté : « Je voudrais, avant de mourir, voir la guillotine et M.Deibler que je n’ai jamais vu ! » Sur le seuil, embrasse l’aumônier et l’avocat, puis crie : « Adieu Fifi ! Mort aux vaches ! » 15 décembre 1929 21 juin 1930 Samedi,
4h15 Rouen
Seine-Inférieure Henri Fernand Verdière Débardeur, 24 ans. Le 11 décembre 1929 à Rouen, viole et étouffe sous un matelas la petite Christiane Galland, 8 ans. Ne comprend pas ce qu’on lui dit, on doit répéter l’annonce. Après la messe, son avocat lui dit : « Montrez que vous êtes un homme ! » « Je veux mourir comme un brave, je n’ai pas peur. » Au greffe, il fume une cigarette et boit un demi-verre de rhum, remercie les gardiens pour leurs bons soins. Place Bonne-Nouvelle l’attendent le père de Christiane et ses deux grands-pères. 07 mars 1930 26 juin 1930 Jeudi,
4h40 Vannes
Morbihan Jean-Marie Gabillard 25 ans, journalier. A Lanouée, le 19 février 1929, assomma de trois coups de rondin sa maîtresse, la veuve Colin, puis mit le cadavre dans l’âtre avec de la paille. Déroba 1.500 francs avant de partir. Reveillé à 3h30, en entendant le bruit des officiels dans l’escalier. « Parce que j’ai tué, je dois être tué. » Remercie l’assistance, mais affirme n’avoir jamais prémédité son crime. Se confesse, entend la messe et communie. Boit un verre de rhum, fume trois cigarettes, puis écrit deux lettres, dont une à son avocat absent pour cause de maladie. Demande à l’aumônier de dire une messe pour lui après l’exécution, puis est remis à Deibler et à ses aides. 19 mars 1930 26 juillet 1930 Samedi,
4h53 Dunkerque
Nord Félix Bergeron 45 ans, navigateur. Meurtre des époux Blondé-Caillau, meuniers à Cassel, à coups de barre de fer dans la nuit du 31 août au 1er septembre 1928. Son complice, Anselme Pierre, est condamné à perpétuité et meurt à l’hôpital en avril 1930. Réveillé à 3h. Pendant qu’il entend la messe, tente de se suicider en s’enfonçant la pointe d’une épingle de sûreté dans la tempe, mais ne parvient qu’à s’égratigner légèrement. 25 janvier 1930 29 juillet 1930 Mardi,
5h20 Périgueux
Dordogne Firmin Cipierre 36 ans, métayer. Renvoyé par les époux Vignaud, cultivateurs à la Boneylas, à cause de sa grande brutalité, et trouvant ses indemnités de licenciement insuffisantes, décida de se venger. Le 23 juin 1929, il les trouva dans un vignoble, tua Mme Vignaud de deux coups de fusil, et M.Vignaud de trois, le dernier étant tiré en plein visage. Son père avait été condamné à mort pour meurtre quelques années auparavant, gracié et décédé au bagne. Suite à sa violence verbale durant son procès, étroitement surveillé en prison. Persuadé d’obtenir la grâce. Au réveil, assez calme en apparence, entend la messe en grommelant de façon inintelligible, puis demande à voir sa femme et ses enfants, ce qui lui est refusé. Au greffe, prend une tasse de café arrosé de rhum et une cigarette. Après les avoir consommés, entre dans une rage folle. Les trois aides et quatre gardiens sont nécessaires pour le maîtriser, et deux d’entre eux sont blessés au cours de la lutte (il mord profondément un des gardiens). Il demande à parler au procureur, veut écrire, demande sa bague et ses vêtements, crie des injures en patois. ON doit le traîner jusqu’à la machine. Sa dernière phrase, prononcée cigarette aux lèvres sur la bascule, est « Bande de… » Il parvient à se retourner et est décapité la tête de côté. Le couperet s’en retrouve ébréché. 18 février 1930 05 août 1930 Mardi,
5h20 Quimper
Finistère Yves Le Floch 34 ans, cultivateur. A Plouhinec, dans la nuit du 1er au 2 janvier 1930, s’introduit chez la veuve Colin, 47 ans, qu’il tente de violer dans son lit. Comme elle se débat, l’assomme à coups de poings et la poignarde plusieurs fois avec une paire de ciseaux avant finalement de l’étrangler et de tenter à nouveau de la violer. Dérangé par la fillette de sa victime, Marie, 4 ans, réveillée par le meurtre, il l’étrangle et tente elle aussi de la violenter, avant de dérober pièces d’or et billets puis de mettre le feu à la maison pour cacher les crimes. A 15 ans, avait été condamné à être enfermé au pénitencier pour enfants de Belle-Ile jusqu’à sa majorité pour avoir tué un autre adolescent de 20 coups de couteau. Réveillé à 4h45. Comprend aussitôt. Au procureur qui l’informe du rejet de sa grâce, il dit « Bon », et à Me Feillet, qui tente de le réconforter, un simple : « Oui, oui. » Demande à son avocat de donner sa montre à l’abbé Pichon, puis à ce dernier, dit : « Après ce que j’ai fait, j’ai bien mérité la mort. » Entend la messe, se confesse et communie. Au greffe, boit le verre de rhum. Porté jusqu’à la guillotine. 12 avril 1930 28 août 1930 Jeudi,
5h30 Beauvais
Oise René Roos 30 ans, briquetier. Suite à la fuite de sa maîtresse Germaine Bailly, lasse de sa méchanceté et de sa violence, se persuada que son collègue et ami Henri Prudhomme savait où elle se cachait. A la gare de Longueil, le 5 octobre 1929, après l’avoir interrogé en vain, tue Prudhomme de deux coups de revolver et s’enfuit. Le lendemain, à Nogent-sur-Oise, devant chez sa mère, abat de trois balles le gendarme Delattre venu l’arrêter pour le premier meurtre. Au réveil, se confesse et communie. Proteste contre l’arrêt de mort. Devant la machine, crie : « Au revoir les amis, mort aux vaches ! » 13 mars 1930 20 septembre 1930 Samedi,
6h Le Puy
Haute-Loire Marius Chabrolles 35 ans, manoeuvre sans domicile fixe. Viole le petit Jean Morel, 6 ans, au Puy-en-Velay, le 02 février 1930, puis l’assomme à coups de poing et l’égorge et l’éventre de deux coups de couteau avant de lui broyer la tête avec une pierre, et de jeter le corps dans les eaux du Dolaizon, où il est retrouvé trois jours plus tard. Réveillé à 5h10. A l’aumônier, il dit : « J’ai mon culte à moi, je suis libre penseur. » Quand il voit Anatole Deibler et ses aides, il dit : « Eh bien, j’irai avec ce monsieur… Je n’ai pas pu crever à la guerre, je vais crever maintenant. » Il fume une cigarette, puis avale trois verres de rhum et une bouteille de vin rouge. C’est ivre mort qu’on le conduit à la guillotine. Temps de pluie. 02 juillet 1930 25 novembre 1930 Mardi,
6h35 Metz
Moselle Roman Daszkowski 31 ans, Polonais, tourneur sur métaux. Licencié de son entreprise de Knutange, décidé à se venger, abattit dans son bureau de quatre balles de pistolet automatique son ancien contremaître M.Vesque le 12 novembre 1929 et blessa deux des gendarmes venus l’appréhender, notamment le gendarme Lhuillier, atteint très gravement à la cuisse gauche. Réveillé à 5h45. Aucune surprise de sa part. Demande qu’on lui achète une couronne avec l’argent qu’il a gagné durant son incarcération. Accepte les secours de la religion. Prend une cigarette et le verre de rhum. Sursaut de peur en voyant la machine. Pluie violente. 27 juin 1930 28 novembre 1930 Vendredi,
6h55 Rouen
Seine-Inférieure Alfred-Albert Fleury 30 ans, ouvrier agricole. Abat à coups de revolver le cultivateur Rambure, 55 ans, son ancien patron, fermier à Beaussault, le 18 février 1930 et blesse la bonne Marie Sueur, 44 ans, qui venait à son secours, avec l’intention de les voler. Très calme, s’habille seul, entend la messe, communie. A plusieurs fois, il dit : »C’est une femme qui m’a poussé à faire ça. » Il cherche à mettre aussi le crime sur le compte de l’ivresse : « C’est parce que j’étais saoul que j’ai agi ainsi. » Il boit quatre verres de rhum, fume deux cigarettes et grogne envers l’adjoint qui lui lie les poignets : « Ne me serrez pas aussi fort, je ne bougerai pas. » Peu de gens présents, en raison de la pluie. Devant la guillotine, il dit aux gardiens : « Merci au gardien-chef et à vous tous ! » 10 juillet 1930 24 janvier 1931 Samedi,
7h Mont-de-Marsan
Landes Etienne Bordus 40 ans, scieur de long. Tue à Saint-André-de-Seignanx le 07 juillet 1930 l’aubergiste Jeanne Lafourcade à coups de marteau pour voler 3100 francs. Réveillé à 6h20. Très calme. Entend la messe. Bordus refuse cigarette et rhum avant de se raviser en ce qui concerne l’alcool. Il a un court moment de révolte : « Je ne suis pas un voyou. Jusqu’à quarante ans, je m’étais bien conduit. J’ai fait sept ans de service militaire sans une seule punition. On n’en a pas tenu compte.  » Quand Me Sourbeis, son avocat, lui demande s’il désire écrire à sa femme, il répond : « Non, sans elle, je ne serais pas là. » Puis il pense à son fils : « J’aurais tant voulu le voir, mais ce n’est pas sa faute s’il n’est pas venu ; je ne pourrais pas lui écrire maintenant. » Mais il prie son avocat de dire à son épouse et à son enfant que ses dernières pensées furent pour eux. Pendant la toilette, Bordus grogne : « Ne serrez pas, vous allez me faire du mal. Ce n’est pas la peine de me faire souffrir avant. » 29 octobre 1930 14 février 1931 Samedi,
6h15 Châlon-sur-Saône
Saône-et-Loire Antoine Chapponneau 32 ans, manoeuvre. Tue de quatre balles de revolver M.Ménager, fermier, à Montceau-les-Mines, le 28 décembre 1929, pour le voler. Déjà condamné le 7 mai 1925 à Lyon à cinq ans de prison pour le meurtre de sa femme et libéré le 20 juin 1928. Son neveu Henri Montitet, 18 ans, dont il avait fait son complice en le menaçant de mort, est acquitté. Réveillé à 5h30. Stupéfait, ne dit tout d’abord pas un mot. Puis demande à entendre la messe et à communier. Au greffe, boit un verre de rhum, fume une cigarette puis boit un verre de vin blanc. Son avocat, Me Jannin, lui présente ses excuses pour ne pas être arrivé à le sauver : il le remercie. Puis il s’adresse au procureur Pépin, et déclare que c’est son neveu, Montupet, le véritable criminel : « C’est une vache ! » puis rajoute : « Vous, vous m’avez un peu bêché, mais ça ne fait rien. Allez-y ! Je ne me dégonfle pas ! ». Arrivé place Ronde, plongé dans un état de prostration totale. 31 octobre 1930 05 mai 1931 Mardi,
5h05 Versailles
Seine-et-Oise Georges Loos 19 ans. Assassine d’une balle dans la bouche le 27 janvier 1930 le taximan Carlo Peretto, 35 ans, à la Patte d’Oie de Gonesse, pour lui voler son argent et sa voiture. Sa complice et maîtresse, Eugénie Bieth, 22 ans, prostituée, est condamnée à perpétuité. Persuadé qu’il sera grâcié. Réveillé à 4h40. Le bruit de la porte suffit à le réveiller. Calmement, il se lève. Quand le procureur, le tutoyant, lui demande d’être courageux, il hoche la tête sans rien dire et fume une cigarette. Il parle à l’aumônier, demande une seconde cigarette, puis sort de la cellule. Accepte d’entendre la messe. Ne prononce pas un mot, mais quand son avocat, Me Perrinard, lui dit « Adieu, mon petit. », il le regarde avec reconnaissance. Cigarette aux lèvres, il s’avance courageusement vers l’échafaud. Son oncle et l’épouse de sa victime assistent à l’exécution. 27 novembre 1930 23 septembre 1931 Mercredi,
5h Chartres
Eure-et-Loir Ernest Roi 19 ans, charretier. Tue à coups de barre de fer le 03 novembre 1930 Lucien Klein (51 ans) et sa femme (40 ans), tailleurs à Courville-sur-Eure, pour voler 500 francs et quatre sacs de vêtements. Au réveil, à 5h, répond au procureur : « Que voulez-vous, il ne faut pas s’en faire pour cela ! » en haussant les épaules. Puis il s’habille avec soin et lace ses chaussures. Au parloir des avocats, qui sert de chapelle de fortune, il entend la messe et dit : « Je regrette mon crime. S’il était à refaire, je ne le recommençerais pas. Ce n’est pas pour moi, car ça m’est égal, mais pour ma mère. » Ensuite il dicte au prêtre une lettre pour sa mère, craignant s’il l’écrit lui-même de faire trop de fautes, puis il la signe sans trembler. Au greffe, il mange un peu, fume une cigarette, refuse le verre d’eau-de-vie avant de se raviser. « Je m’en passerais bien ! » Il serre la main des gardiens, puis embrasse l’aumônier : « Eh oui, l’abbé, il faut… » Il va à l’échafaud avec courage. 29 avril 1931 15 octobre 1931 Jeudi,
5h35 Paris Mohamed ben Driss> 38 ans, Marocain. Le 19 novembre 1930 au 40, rue de Ponthieu, assomme dans sa cuisine à coups de siphon Mme Juliette Delaure, 25 ans, jeune épouse d’un restaurateur, pour lui voler 6.300 francs. Sa victime meurt le lendemain. Réveillé à 5h15. Dort profondément, on doit le secouer un peu. Comprend très vite, s’assoit sur le bord du lit. A son avocat, dit calmement : « Après tout, j’aime mieux cela que d’aller aux travaux forcés. » Reçoit les dernier sacrements d’un imam, et prie quelques minutes. Accepte le verre de rhum et fume un cigare. Pousse un cri rauque sur la bascule. 21 mai 1931 24 octobre 1931 Samedi,
5h50 Saint-Mihiel
Meuse Pasquale Passera 35 ans, maçon italien à Bar-le-Duc. Submergé de dettes, se rend à Behonne dans la nuit du 1er au 02 janvier 1931 et tue à coups de marteau de maçon Mme Camille Udar, 47 ans, et son fils René, 15 ans. Ne semble pas comprendre au réveil. L’interprète lui traduit la sentence. Sans répondre, s’habille. Il se confesse, entend la messe, mais refuse de communier. Refuse également le rhum. Au greffe, pendant la toilette, fume une cigarette. Ne fait aucune révélation. En arrivant devant l’échafaud, perd toute contenance : le visage déformé par l’horreur, se jette en arrière et hurle « Non, non ! » Poussé sur la bascule, il hurle à gorge déployée jusqu’à la chute du couperet. Pluie torrentielle. 06 juillet 1931 26 décembre 1931 Samedi,
7h Caluire-et-Cuire
Rhône Ahmed ben Mohamed Caporal au 5e régiment de tirailleurs marocains. Abat à coups de revolver, le 7 décembre 1930 au camp de la Valbonne (Ain) l’adjudant Lavague, blesse le tirailleur Ben Tahar et Mme Cartier, épouse d’un sergent, non sans tenter de la violer. En fuite, essaie de se suicider le lendemain. Réveillé à 6h. Demanda à boire du café, ainsi que l’assistance d’un prêtre et d’un imam. Conduit en voiture au fort de Montessuy. Demande pardon avant d’être passé par les armes. 26 août 1931 26 décembre 1931 Samedi,
7h05 Paris Georges Gauchet 27 ans, fils de bonne famille. Assassine de 15 coups de clé anglaise le bijoutier Dannenhoffer, 128, avenue Mozart, le 19 novembre 1930 et vole plus de 100.000 francs de bijoux pour s’adonner à la cocaïne. Réveillé à 6h20. Calme, tranquille. Il a froid et demande s’il doit mettre ses chaussettes. Son avocat, Me Campinchi, lui demande de faire preuve de courage. « Il ne s’agit pas de courage là-dedans. Je ne sais pas encore ce que c’est. » Il demande que sa mère et sa soeur ne soient pas averties de sa fin. Au greffe, refuse l’alcool et la cigarette, et rajoute à son avocat : « Il aurait fallu un miracle pour me sauver. Je mérite le châtiment. » Il remercie deux visiteuses de prison avant d’être mis dans le fourgon. 15 octobre 1931 07 juillet 1932 Jeudi,
4h25 Montbrison
Loire Antoine Martin 42 ans, valet de ferme. Le 14 septembre 1931, à Maclas, tue dans son lit de deux coups de marteau sur la tête son frère Jean-Claude, 34 ans, puis égorge le corps avec son rasoir, récupérant le sang dans un seau pour éviter de salir les draps, avec la complicité de sa belle-soeur et maîtresse Isabelle Bard. Le lendemain, après avoir caché le cadavre dans la grange au foin, ils le placent dans la cheminée toute la nuit jusqu’à ce que le corps soit réduit en cendres. Les amants sont condamnés à mort : Isabelle est grâciée. Les officiels entrent à 3h45. Martin est réveillé depuis quelque temps déjà. « Je m’en doutais, j’aurai du courage. » Il entend la messe, communie, se confesse. Pendant la toilette, proteste doucement : « Inutile de m’attacher, j’aurai du courage. » Temps nuageux, pluie tout au long du montage de la guillotine. 26 février 1932 12 juillet 1932 Mardi,
4h17 Mulhouse
Haut-Rhin Joseph Schoelcher 24 ans, paveur. Abattit d’un coup de fusil le 13 juin 1931 M.Edouard Buchlin, maçon, au bord de la grand route pour lui voler 54 francs. Réveil à 3h20, sursaute quand on l’appelle. Entend le procureur lui lire l’arrêt silencieusement, puis dit : « Ah bon, c’est bien, je vous remercie. » Quand on lui demande s’il a d’ultimes déclarations, il répond : « A vous, Monsieur le procureur, je n’ai plus rien à dire. » Il entend la messe de l’abbé Fruh, communie. Refuse la cigarette de son avocat, Me Meyer. Va courageusement, pâle mais droit, vers l’échafaud. 02 février 1932 27 juillet 1932 Mercredi,
4h55 Le Mans
Sarthe Henri-Louis Nicolas 45 ans, domestique de ferme. Mari violent : passa un an en prison pour avoir blessé de plusieurs coups de couteau sa seconde épouse. Le 05 juin 1931, à Saint-Pierre-du-Lorouer, égorge sa patronne, Thaïs Passin, veuve Boutard, 34 ans, mère de trois enfants, de trois coups de rasoir parce qu’elle se refusait à l’épouser. Réveillé à 4h10. Répond : « Ah, je vais m’habiller. » Comme Me Germaine Brière, son avocate, lui demande s’il a des déclarations à faire, il répond : « Non, que voulez-vous que je vous dise ? » Se confesse, entend la messe, communie. Au greffe, boit deux verres de rhum, fume deux cigarettes et prise du tabac abondamment. Livide mais courageux, apparaît à l’entrée de la prison encadré de deux aides. Temps : pluie violente qui s’est arrêtée cinq minutes avant le supplice. 09 mars 1932 30 juillet 1932 Samedi,
4h52 Saint-Mihiel
Meuse Lucien Louis 27 ans, employé dans une entreprise de machines agricoles. Manquant d’argent pour son mariage qui devait avoir lieu bientôt, le 16 novembre 1931, tua à coups de marteau le cafetier Gaston Rodnacq à Nouillonpont pour le voler. Réveillé à 4h10. Courageux. Se confesse, entend la messe, communie. Au greffe, écrit à ses parents, boit un verre de rhum et fume une cigarette. Mais avant de quitter le greffe, embrasse son avocat, Me Robert Kalis, et lui dit : « Je suis innocent. J’ai menti jusqu’à présent en m’accusant. C’est une femme qui a commis le crime pour lequel je vais mourir. » 14 avril 1932 14 septembre 1932 Mercredi,
5h55 Paris Pavel Timothéiévich Gorguloff 37 ans, Russe, docteur en médecine. Demi-fou, seul et unique membre du « Parti Vert Russe », aux idées politiques fascistes, décide que les dirigeants politiques européens sont à la solde du bolchévisme et doivent être punis. Le 06 mai 1932, dans un salon du livre des Anciens Combattants, au 11, rue Berryer à Paris, abat de deux balles de revolver Paul Doumer, président de la République Française, et d’une troisième balle, blesse au bras l’auteur Claude Farrère. M.Doumer expire à l’hôpital le lendemain matin. Réveillé à 4h55. Ne dit pas un mot à la nouvelle, s’habille, puis murmure en russe : « Je n’ai pas peur. » Boit deux verres de rhum, refuse la cigarette. Entend la messe, se confesse et communie avec le pope Gillet. Puis hurle en pleine prière : « Mon idée… je suis un apôtre… On m’a déshonoré… Le monde entier… ma politique… » Il poursuit ce délire pendant quelques minutes. Me Géraud finit par lui demander s’il a un message pour son épouse : « Je l’aime bien, et je lui demande pardon. » Quand à son enfant à naître : « J’espère que ce sera un garçon, que ma femme l’élèvera bien et religieusement. Je souhaite qu’il soit médecin, qu’il ne soit pas bolcheviste et qu’il ait mes idées. » Devant l’échafaud, gémit : « Pardon à tout le monde ! Ma patrie ! Ma Russie ! » 27 juillet 1932 22 septembre 1932 Jeudi,
6h05 Versailles
Seine-et-Oise Abel Barranger 30 ans, chauffeur d’automobile. Devenu jardinier chez les époux Barnault, rentiers septuagénaires à Ballancourt, licencié pour sa brutalité, décide de se venger. Le 14 février 1932, armé de deux revolvers, tire sur Mme Barnault qu’il blesse gravement, et tue M.Barnault qui voulait intervenir en l’abattant puis en lui brisant le crâne à coups de crosse. Réveillé à 5h20, se leve en entendant la porte. Ne laisse pas le temps au procureur de lui annoncer la nouvelle. « Ah, c’est pour ce matin. Je m’y attendais. » Remercie son avocat, Me Lucien Manche. « Que voulez-vous, maître, je me doutais depuis quarante-huit heures qu’il n’y avait plus d’espoir. Je ne reçevais plus de lettres de ma femme et quand il y a un naufrage, je le pressens toujours. La vie a épuisé ma sagesse, mais il y avait du bon en moi. Je n’en veux à personne, pas même à ceux qui m’ont condamné. Je voudrais que cette exécution soit la dernière, malheureusement il y aura d’autres criminels après moi. » Ecrit à sa femme et à sa mère, puis avale deux verres de rhum avant de se livrer aux bourreaux. 06 juin 1932 27 septembre 1932 Mardi,
6h30 Caen
Calvados Rabah Betra 23 ans, Algérien, manoeuvre. Egorge de trois coups de rasoir Clotilde Grignola, 33 ans, mère de deux enfants, fermière à Breuil-en-Auge, dans l’après-midi du 26 janvier 1932, et lui vole 750 francs. Réveillé à 5h35. Dort à poings fermés. Après que le substitut lui ait expliqué la situation, l’imam lui traduit la sentence. Bedrat se jette sur son lit en hurlant de peur sans vouloir bouger. Quatre gardiens doivent l’habiller tant il lutte, et pendant la toilette, il faut également réquisitionner quatre gardiens pour le maîtriser. Deux aides et les gardiens – toujours eux – le poussent jusqu’à la bascule, se débattant comme un forcené et poussant des hurlements inhumains. 07 juillet 1932 09 février 1933 Jeudi,
6h30 Riom
Puy-de-Dôme Marien Evaux 31 ans, journalier. Le 14 mars 1932, au château des Bruyères, à Saint-Georges de Mons, tire un coup de fusil sur Mlle Marie-Louise Loiseau, 61 ans, qui tombe la mâchoire brisée. Son amie, la veuve Marguerite Rossignol, née Binet, 62 ans, est frappée à coups de fusil sur la tête, puis étouffée, le visage plaqué sur le sol. Après avoir dérobé 30.000 francs, Evaux arrose le corps de la veuve de pétrole et l’embrase. Se rendant compte que Mlle Loiseau a réussi à s’enfuir malgré sa blessure, il la retrouve cachée derrière une haie. Il la couvre de foin, y met le feu, et quand la chaleur devient intolérable et qu’elle tente de s’échapper, il la saisit, la ramène dans la maison et l’étouffe comme son autre victime, avant de l’immoler à son tour. S’éveille à 5h30, quelques secondes avant l’entrée des officiels. Calmement, demande : « Alors, on va me tuer ? » Ne semble pas comprendre la situation : va jusqu’à demander à l’aumônier : « Qu’est-ce qu’on va me faire ? » « On va vous exécuter. » « Ah. » Pendant la toilette, boit d’un trait le verre de rhum, mais ne fume pas de cigarette. Ses avocats lui demandant s’il a quelque chose à rajouter, il répond « Non », l’air terrifié. Porté littéralement jusqu’à la guillotine. 26 octobre 1932 09 juin 1933 Vendredi,
4h Reims
Marne Xavier Cornet PARRICIDE. 47 ans, ouvrier agricole. Tua d’un coup de fusil Clément Cornet, son père (82 ans), le 30 juillet 1932 à Leuvrigny pour en hériter plus vite. Ne dit pas un mot, répond aux questions par des signes de tête. Refuse les derniers sacrements. Au greffe, avale deux verres de rhum. Une fois sur la bascule, se jette sur le côté et se plie en deux avant de se laisser faire. 09 février 1933 17 juin 1933 Samedi,
4h20 Coutances
Manche Emile Delanoë 29 ans, sabotier au Grand-Celland. Vivant à quatre dans une minuscule maison d’une seule pièce, ce qui provoque de vives tensions entre Delanoë et son beau-père, Léon Aufray, 68 ans. Le 06 novembre 1932, après une dernière dispute, tue Aufray à coups de bâton. Le 09, avec l’aide de son épouse, pend à un arbre du bois de Ressuveille sa fille Emilienne, 5 ans, témoin gênant de la mort de son grand-père, puis cache le corps dans un fossé. Mme Delanoë est condamnée à perpétuité. Pluie battante. Déjà réveillé par les bruits extérieurs à l’entrée des officiels à 3h50. « Du courage, j’en aurai. Puisqu’il faut y aller, allons-y, mais vite. Je vous adresse une dernière prière : demandez la grâce de ma femme. » Accepte la messe et la communion. Boit trois petits verres de rhum, et fume une cigarette qu’il crache au pied de l’échafaud, dressé à droite de la porte de la prison, avant d’embrasser le crucifix. La foule se mettant à acclamer la scène, Me Contray proteste : « C’est scandaleux d’applaudir ainsi ! » 10 mars 1933 20 juillet 1933 Jeudi,
4h02, 4h04 Angoulême
Charente
Jean Martin

Paul Véteau

Martin, 28 ans, domestique de ferme. Licencié de chez les Lauvauzelle, fermiers au Grand-Madieu, revient huit jours plus tard, le 10 décembre 1932, pour se venger. Frappe Mme Lavauzelle avec un palonnier de herse, puis l’égorge, et assomme sa fille Jeanne, 4 ans, à coups de pied et de poing, avant de voler 2.000 francs.

Véteau, 31 ans, ouvrier agricole, tue le 11 janvier 1933 à Auge les époux Biraud à coups de bûche pour les voler et met le feu à la ferme pour faire penser à un accident.

Réveillés à 3h05. Réagissent à peine à la nouvelle. Véteau tape sur l’épaule du juge Bariteau en disant : « Ca, c’est un brave ! » Entendent la messe, communient. Au greffe, Martin accepte rhum et cigarette, Véteau se contente du tabac. Martin part le premier, effondré, soutenu par les aides, soufflant des bouffées de plus en plus rapides de cigarette. Véteau marche droit et tête haute, sans dire un mot. 29 mars 1933

30 mars 1933

01 septembre 1933 Vendredi,
4h45 Vendôme
Loir-et-Cher Elie Lagarde 23 ans, déserteur du 72e RAC de Vincennes. Auteur de deux tentatives de viol à 13 ans. Agresse le 1er octobre 1932 à Coulommiers Rose Roussineau, 20 ans, et tente de la violer. Le 7 octobre, étrangle et viole Hélène Gauthier, née Fourreau, 43 ans, enceinte de six mois, fermière à la Chapelle-Vicomtesse et vole un rasoir et quelques vêtements. Soupçonné rapidement : il avait été l’amant de Marguerite Fourreau, la soeur de sa victime. Reveillé à 4h. Ouvre de grands yeux effrayés. Se lève, accepte de se confesser, et au procureur qui lui demande s’il a des déclarations à faire, répond : « Oui ! Je demande pardon à Dieu et aux hommes de tout le mal que j’ai fait. » Serre la main aux gardiens, fume une cigarette, boit un verre de rhum, et se laisse toiletter sans réagir, avant d’aller fermement à la guillotine. 25 mai 1933 19 octobre 1933 Jeudi,
5h42 Paris Roger Dureux 27 ans, manoeuvre. Aggresse chez elle, avenue Philippe-Auguste à Paris, Mme Cléré, une amie de sa famille, de trois coups de barre de fer le 06 décembre 1932, et dérobe 541 francs et quatre paquets de cigarette. Blessée à la tête, elle expire à l’hôpital huit jours après. Réveillé à 5h02. « J’avais déjà entendu… J’ai compris… Soyez tranquille, je ne tremblerai pas. » Remercie son avocat. S’habille lentement, et demande aux assistants : « Faut-il que j’enlève mon paletot ? » Demdande à voir la photo de sa soeur et celle de sa maîtresse : glisse la première dans la poche de son pantalon, déchire l’autre lentement. Accepte la messe et la confession. Au greffe, boit un verre de rhum, puis se laisse toiletter. En descendant du fourgon, salue son avocat : « Adieu, maître ! » 21 juin 1933 24 octobre 1933 Mardi,
5h50 Béthune
Pas-de-Calais Anton Cwojdzinski 27 ans, prostitué à Paris, cambrioleur. Coups mortels sur l’un de ses clients en 1926, tentative de vol à main armée en 1927 au cours de laquelle M.Thuas est blessé de deux balles de pistolet. Sortant tout juste de prison pour vol, abat d’une balle en pleine nuque le 22 novembre 1932 le garde-champêtre Duclermortier à Noyelles-sous-Lens, avant de se terrer chez les époux Nowak. Ne se rend qu’après un siège au cours duquel il tire à plusieurs reprises sur les policiers sans les toucher. Réveillé à 5h05. Pâlit à la nouvelle. « On va y aller », dit-il. Accepte d’entendre la messe de l’abbé Glopiak, communie. Au greffe, boit une tasse de café et fume une cigarette. Il serre la main de tous les gardiens présents, et leur dit : « On se retrouvera là-haut, c’est la bonne auberge. » Puis, après s’être entretenu avec Me Gaillard, le secrétaire de son avocat, il s’adresse au procureur : « Je ne voudrais pas qu’on me découpe. Je donne ma tête, mais pas mon corps. » En sortant de prison, voyant la foule amassée rue d’Aire, il dit : « Il y a beaucoup de monde aujourd’hui. Ils ont tous une mine d’enterrement, pas moi ! » Sur la bascule, crie : « Adieu, les amis, vive la liberté ! » 16 juin 1933 14 novembre 1933 Mardi,
6h30 Béthune
Pas-de-Calais Alphonse Edouard « Cabot » Lemaire 59 ans, ouvrier agricole au chômage et sans domicile, voleur récidiviste. Le 03 janvier 1933, à Bruvey, au lieu-dit « Le Hamel », tue avec une hachette Mme Aline Dubois-Facon, 77 ans, pour lui voler sa ceinture de cuir contenant au moins 7.000 francs. Réveil à 5h40. Dit : « J’ai fauté. Je paierai ma dette, je l’ai mérité. » Entend la messe, boit du café ainsi qu’un grand verre de genièvre. Pendant la toilette, l’aumônier l’exhorte au courage : « J’en aurai. » Mais lors des derniers mètres, il perd tout son courage et c’est effondré qu’il arrive sur la guillotine. 500/600 personnes présentes. 20 juin 1933 23 novembre 1933 Jeudi,
6h45 Bordeaux
Gironde Pierre Delafet PARRICIDE, 32 ans, cultivateur. Extermine sa famille à coups de hache, de couteau et de fusil à Moirax (Lot-et-Garonne) le 07 février 1932 : sa grand-mère Rosa Gauffart, 77 ans, sa mère Eva Delafet, 52 ans, son oncle Albert Midolle, 66 ans, sa seconde épouse Denise Planes, 25 ans, sa fille Lucienne, 9 ans, et son fils Jean-Michel, 3 mois. Condamné à Agen, arrêt cassé, rejugé à Bordeaux. Réveillé à 6h10. Refuse d’entendre la messe, et au greffe, refuse alcool, cigarette et tasse de café. A son avocat, Me Pereau, il dit : « Je ne sais pas pourquoi… Je ne me rappelle pas… » puis « Continuez à fleurir les tombes, continuez à défendre ma mémoire. Je ne sais pas ce que j’ai fait… Que cela puisse servir d’exemple aux autres. » Revêt la tenue parricide. Devant la guillotine, l’huissier Arthonzoul lit l’arrêt de mort. 07 mars 1933, 07 juillet 1933 15 décembre 1933 Vendredi,
7h20 Toulon
Var Marcel Grandoux 24 ans. Voleur récidiviste, cherche à quitter la France discrètement avec son épouse et complice, Violette Mauvais, 25 ans – et aussi à commettre un nouveau coup. Dans le port de Toulon, loue le canot « Le Caprice » au patron de pêche M.Palma, le 27 avril 1932, et une fois au large, lui tire une balle de revolver dans le dos et le jette à l’eau, où il se noie. Durant l’agression, il vole le portefeuille de sa victime, qui contient 80 francs. Violette Mauvais sera condamnée à 20 ans de travaux forcés. Réveillé à 5h45. Aucune émotion. « Ah, c’est bon, on y va ! Du courage, j’en aurai. » S’habille seul. Son avocat, Me Franceschi, l’embrasse : « J’ai tout fait pour vous, mais hélas… » « Je sais bien, et je vous en remercie, mais cela me fait de la peine pour vous. » Demande à serrer la main du juge d’instruction Roux, en disant « Vous êtes un des rares magistrats que j’estime le plus. » Le juge accepte. S’entretient avec le pasteur Bolle, à qui il remet une médaille destinée à son épouse. Offre à son avocat un tableau peint par ses soins représentant un paysage hollandais. Au greffe, refuse le rhum, mais boit un bol de chocolat. Ecrit deux lettres, l’une pour son père, l’autre pour sa femme, puis se retourne vers les aides : « Messieurs, je suis prêt. » Comme on lui retire veste et gilet, plaisante : « Mais je vais avoir froid ! » Quand ils parviennent dans la cour, dit aux aides : « Ne me poussez pas, je vais mourir. » Regarde la guillotine fixement, mais sans peur visible. 27 juillet 1933 12 janvier 1934 Vendredi,
6h55 Auch
Gers Ivan Dimitriévitch « Jean » Jouroucheff 37 ans, Ukrainien, ouvrier agricole chez M.Bolle, au château du May, à Barran. Le 28 août 1932, il tue à coups de couteau son collègue italien Antonio de Ossi et blesse gravement Alberto Foschiatti avant d’incendier la gerbière du May. Après deux jours de cavale, le 30 août au soir, met le feu à la ferme de la Bourdette, louée par son patron, et pendant que les fermiers vont éteindre le sinistre, il revient au château du May et menace Mme Bolle et sa fille. Par erreur, l’ouvrier italien Giovanni Simon est abattu par le commissaire Claverie tandis que Jouroucheff se réfugie dans le puits du château où il est appréhendé. Réveillé à 6h20. Dort profondément. Ne comprend pas. Après que le pope Gillet et un interprète lui aient expliqué en russe la raison de leur venue, il se met à pleurer et à hurler. Ne sait plus ce qu’il dit. Au greffe, continue de pleurer, refuse cigarette et rhum. Quand on le soulève du tabouret, il se remet à hurler et ne cesse que quand le couperet lui a tranché le cou. 25 octobre 1933 03 mars 1934 Samedi,
6h30 Angers
Maine-et-Loire Pierre Gueurie 31 ans, employé d’épicerie, pédophile récidiviste. En février 1925, à St-Pierre-Montlimart, agresse sexuellement une enfant de 11 ans (condamné à 2 ans de prison à Cholet le 6 mars suivant). Libéré le 2 mai 1927, commet un attentat à la pudeur sur une fillette à St-Pierre au cours du même mois (condamné à cinq ans de prison à Angers le 18 juin suivant). Libéré en avril 1932. Le 19 novembre 1932, à Angers, blesse d’un coup de couteau dans le dos Lucienne Joret, 11 ans, parce qu’elle refusait de se laisser embrasser. A St-Barthélémy, le 24 mars 1933, satyre assassin de la petite Simone Soleau, 6 ans, qu’il frappe de deux coups de manche de couteau sur la tête, avant de la violer, de l’égorger et de la mutiler. Reveillé à 6h. « J’aurai du courage. Puisqu’il faut y aller, j’irai. ». Demande ses vêtements civils, aidé à s’habiller par les gardiens. Se peigne. Demande à Me Pecquereau du papier pour écrire à son épouse, et joint à sa lettre quelques photos. Aucune révélation. Accepte de se confesser, d’entendre la messe et de communier. Au greffe, demande à l’avocat général de transmettre à son épouse le peu d’argent et de bijoux qu’il possède encore. Calme, pendant la toilette, refuse rhum, café et cigarette. Soutenu sous les bras par les aides, descend les marches vers la cour. Mouvement de recul en voyant la guillotine, mais qui n’est remarqué par personne tant les aides sont prompts à le basculer. 22 novembre 1933 10 avril 1934 Mardi,
5h37 Aix-en-Provence
Bouches-du-Rhône Georges-Alexandre « Sarret » Sarrejani 55 ans, avocat-conseil à Marseille, Austro-grec naturalisé français en 1903. Auteur de nombreuses escroqueries à l’assurance-vie : contractait des polices pour des personnes de santé précaire, faisait passer l’examen médical à un complice sain de corps sous la fausse identité du « souscripteur », puis attendait le décès du malade – ou le précipitant par empoisonnement ou étouffement – pour toucher l’argent. Avait ainsi favorisé la naturalisation de ses maîtresses bavaroises, les soeurs Philomène et Catherine Schmidt (42 et 35 ans) en leur faisant épouser des hommes malades qui décèdèrent rapidement après les noces. Confronté aux exigences d’un ancien complice, M.Chambon-Duverger, prêtre défroqué, il l’attira dans un piège en compagnie de sa maîtresse Blanche Ballandreaux. Le couple fut invité dans une villa que Sarret louait dans la banlieue aixoise, « L’Ermitage », le 20 août 1925, pour y être abattu à coups de fusil et de revolver. Les corps furent placés dans une baignoire et recouverts de cent litres d’acide sulfurique jusqu’à complète dissolution. La matière obtenue fut vidée avec des seaux dans le fond du jardin. Une dernière affaire d’escroquerie à l’assurance-vie en 1931 causa sa perte. Les soeurs Schmidt sont chacune condamnées à dix ans de prison. Arrivée des autorités dans la cellule à 5h sonnantes. Sarret ne dort pas, assis sur sa couchette, assiste à leur arrivée calmement. « Je suis prêt, je vous demande de faire vite. » Conduit au greffe, on propose au condamné d’entendre la messe (l’aumônier et un pope archimandrite sont venus exprès), mais refuse : « Je vous remercie, je n’ai besoin de rien. Je n’ai rien à déclarer, sinon que je suis entièrement innocent et que je vais mourir victime d’une injustice. » Refuse aussi le rhum d’un geste : « Merci, je ne demande qu’une chose, c’est qu’on en finisse au plus vite. » Accepte cependant une tasse de café. Réveillé trop tôt par rapport à l’heure légale (faute de messe et d’éventuelles déclarations), doit attendre au greffe. En profite pourtant pour soulever quelques points restés obscurs durant le procès. Pendant la toilette, proteste : « Ne serrez pas si fort, je ne m’échapperai pas. » Baisse la tête lors de la dernière marche. Sur la machine, le cou rentre dans la lunette, mais Sarret est devenu obèse en prison et son ventre proéminent le fait glisser sur le côté. Remis d’aplomb, pousse un râle alors que Deibler actionne le couperet. 31 octobre 1933 13 avril 1934 Vendredi,
5h30 Bastia
Corse Jean-Baptiste Torre 22 ans, bandit, ancien soldat déserteur au 6e régiment colonial au Maroc. En juillet 1930, alors qu’il devait comparaître pour une agression, déserte et prend le maquis avec son oncle Caviglioli. Le 20 octobre 1930, il abat Ange Siméon. Le 17 août 1931, lors du braquage de tout un village, tue le garagiste Guagno. Le 02 novembre 1931, abat le maréchal des logis Tomi et le gendarme Klein, et blesse grièvement le lieutenant Noeuveglise et le gendarme Soyer. Reveillé à 4h45. Dort tranquillement, persuadé de sa grâce. Comprend aussitôt, et sommé d’avoir du courage, répond : « J’en aurai. » Aucune révélation. Embrasse Me de Corsi qui lui affirme avoir tout tenté pour le sauver. Accepte les secours de la religion. Au greffe, boit deux verres d’une liqueur offerte par le médein de la prison, qu’il déclare « excellente ». Demande à écrire trois lettres : une pour sa mère, une pour sa soeur, une pour sa tante. Après la toilette, embrasse son avocat, et devant l’échafaud, embrasse le crucifix puis l’aumônier. 20 novembre 1933 30 avril 1934 Lundi,
5h04 Marseille
Bouches-du-Rhône Camille-Emile Maucuer 42 ans. Chef de bande, responsable de la mort des inspecteurs Alphonse Thibon, François Cambours et Eloi Saint-Pol, abattus lors du hold-up du bureau de poste de Saint-Barnabé le 21 avril 1932, en compagnie de trois autres malfrats. Son complice principal, Calixte Joulia, est condamné à mort et gracié. Réveillé à 4h30. « Ah, vous êtes venus, c’est bien. Mais ce que j’ai à dire, c’est que mes défenseurs Mes Henry Torrès et Fabre mis à part, vous êtes tous des assassins. » Il écrit à sa soeur, puis à sa maîtresse, chausse ses lunettes. A l’aumônier, il dit « Foutez-moi la pAix-en-Provence ! » Il demande à plusieurs reprises si Joulia va être exécuté mais personne ne lui répond, et en passant devant la cellule de son complice, il grogne « Crapule, va ! » Au greffe, il refuse une cigarette venant de Me Torrès, et accepte celle du gardien-chef en expliquant : « Je ne fume que cette marque-là. » Il demande à garder ses lunettes, se plaint qu’on le lie trop serré, puis dit : » Pourquoi découper une si belle chemise ? C’est idiot. On aurait mieux fait de me laisser aller torse nu. » Puis il dit « Je suis prêt. » Devant la machine, il crie « Vive la Russie ! » et sur la bascule, il crie : « Allez-y ! » 27 janvier 1934 24 mai 1934 Jeudi,
4h05 Epinal
Vosges Gaston Philippot 31 ans, manoeuvre. Le 20 septembre 1933, à St-Nabord, étrangle avec un mouchoir sa bienfaitrice Mlle Mathieu, 43 ans, pour la voler et incendie la ferme pour faire disparaître les traces de son crime. Réveillé à 3h20. « Bien, je vous remercie. » Accepte les secours de la religion. S’habille seul, fume une cigarette. Aucun regret de son crime. Avant de quitter la cellule, remercie ses gardiens. Au greffe, boit un verre de rhum et fume une deuxième cigarette. L’aumônier tente de lui cacher la guillotine avec son crucifix jusqu’au dernier moment. Très calme. 07 mars 1934 26 juillet 1934 Jeudi,
4h50 Moulins
Allier Louis Venuat 28 ans, ouvrier agricole. A Houdemont, dans la nuit du 15 au 16 octobre 1933, assassine à coups de revolver son ancien patron, le fermier Salvert, et blesse Mme Salvert, avant de voler une soixantaine de francs et quelques habits. Réveillé à 4h. Dort profondément. Stupéfait, mais calme. Entend la messe, communie. Boit deux verres de rhum et fume une cigarette au greffe. Quand Me Régnier, son avocat, lui demande s’il désire écrire à sa famille, il répond : « C’est pas la peine, ils sont assez embêtés comme ça. » Il rajoute : « Trois mois avant l’affaire, j’avais l’idée d’un mauvais coup. J’ai pas pu résister… Si j’avais été mieux surveillé, je n’aurais pas fait ça. » Parle un peu à ses gardiens, notamment de pêche : « J’aurais pourtant bien mangé un bon brochet. » Sort de la prison la cigarette aux lèvres. 25 avril 1934 06 octobre 1934 Samedi,
6h15 Béthune
Pas-de-Calais Ludwig Gala 23 ans, Polonais, mineur à Sallaumines. Satyre assassin (coups et strangulation) de Janina Onisk, 12 ans, fille de son compatriote et bienfaiteur Joseph, maître de pension à Sallaumines, le 05 février 1934. Réveil à 5h40. Portait la camisole de force. Sommeil profond : « Ayez pitié de moi. » A l’interprète, en polonais, dit : « J’ai dit la vérité, je n’ai pas tué. » Entend la messe du père Ziokowski, et au greffe, refuse rhum et cigarette. Les aides l’attachent plus solidement que de coutume, craignant une réaction de sa part, mais il faut au contraire le porter pour aller à l’échafaud tant il est abattu. 300 personnes présentes environ. 19 juin 1934 12 février 1935 Mardi,
6h35 Saint-Flour
Cantal Léon-Pierre Barbat 27 ans, cultivateur à St-Vincent-de-Salers. Frappe de quatre coups de hache le vacher polonais Andrezj Karlowiez, son voisin, dans la nuit du 15 au 16 avril 1934 pour voler 200 francs. Louis Barbat, frère et complice de Pierre, est condamné à vingt ans de travaux forcés. Réveillé à 5h30. Calme, après un temps de stupéfaction, un rictus sur les lèvres. Accepte d’entendre la messe. Au greffe, refuse l’alcool et accepte la cigarette. A l’entrée de la prison, place Spy-des-Ternes, embrasse le crucifix. 21 novembre 1934 12 avril 1935 Vendredi,
5h40 Chalon-sur-Saône
Saône-et-Loire Henri Putigny 45 ans, jardinier à Louhans. Assassina chez lui à coups de couteau ses deux fillettes, Denise et Madeleine (12 ans et 2ans1/2) le 06 août 1934 pour se venger de son ex-femme, Alice Vellet, qui en avait obtenu la garde. Réveillé à 4h40. Devant la nouvelle, devient furieux et insulte justice et magistrats. S’habille en mangeant. Repousse les services de l’aumônier Duverne : « S’il y avait un bon Dieu, on ne verrait pas de choses pareilles ! » Il va jusqu’à engueuler le prêtre qui fait la messe seul en lui reprochant le son strident de sa sonnette. Continue ses insultes, en souhaitant même qu’une guerre soit déclarée dans la futur « pour exterminer ceux qui avaient juré ma perte ». Crie « A bas la France ! » Il déclare également : « C’est honteux de me guillotiner, moi qui n’ai jamais fait de mal à personne ! Il n’y a pas de justice ! » Refusa au greffe rhum et cigarette, mais ne réclame qu’une simple chique de tabac qu’il garde en bouche jusqu’au bout. Continue à vociférer sa colère pendant la toilette, et ne fait qu’un petit mouvement de recul quand on le pousse sur la bascule de la guillotine, dressée pour la première et unique fois rue d’Autun, devant la prison. Son ex-femme, Alice Vellet, assiste à sa mort depuis une fenêtre de la rue. 23 janvier 1935 21 juin 1935 Vendredi,
4h10 Bastia
Corse André Spada Le dernier des grands bandits corses, surnommé « Le Tigre de la Cinarca », 38 ans. Le 08 octobre 1922, à Sari d’Orcino, pour éviter l’arreestation d’un ami, abat le gendarme Caillaux et blesse le gendarme Parent. En février 1925, lors de l’attaque d’une ferme de la banlieue d’Ajaccio, tue par balle M.Mubio et blesse sa mère. Sa maîtresse étant partie avec un certain Giocondi,
il abat le vieil oncle de son rival, ainsi que sa nièce le 15 novembre 1925 à Poggio-Mezzana. Le 17 novembre, dans le maquis, il blesse grièvement le gendarme Ulmer. Arrêté chez ses parents, à Coggia, le 28 mai 1933. Réveillé à 3h15. Le procureur doit lui taper plusieurs fois sur l’épaule. « Le courage ne m’a jamais manqué ! » annonce-t-il avant de se lever et de faire un brin de toilette. Souriant, demande à entendre la messe et à communier. « Si je me suis rendu, c’est parce que le Christ me l’a commandé. Christ le père. La justice des hommes m’est indifférente, puisque c’est Dieu qui m’a ordonné de l’affronter et que bientôt, j’irai tout droit au ciel. Ce que je vous dis là, c’est pour vous autres qui restez, car moi, j’ai été touché par la grâce divine et cela n’est pas donné à tout le monde. » S’emporte un peu quand l’aumônier lui parle de courage : « Du courage ? Mais j’en ai, je vous l’ai déjà dit ! » Embrasse le prêtre après la messe, refuse rhum et cigarette et certifie : « J’ai toujours dit la vérité sur tous les crimes dont on m’accuse. » S’entretient avec ses avocats, s’accuse d’un crime pour lequel deux frères, les Leca, ont été condamnés au bagne (Spada a malgré tout bénéficié d’un non-lieu dans cette affaire). Docilement, se laisse installer sur le tabouret pour la toilette. Aux aides, dit : « Laissez-moi, je marcherai tout seul. » Aumônier et avocats l’embrassant et lui disant adieu, il leur répond « Allons, au revoir ! » puis franchit les portes de la maison d’arrêt. 05 mars 1935 17 décembre 1935 Mardi,
7h16 Niort
Deux-Sèvres Joseph Lauer 44 ans, anarchiste, faux-monnayeur. Recherché par la police pour une affaire de fausses pièces de 20 francs, poursuivi dans les rues de Niort le 21 mars 1935, blessa à coups de revolver deux gardiens de la paix, Louis Charrier et Roger Archambault, et abattit un passant, Salomon Gisson, venu aider les forces de l’ordre. Reveillé à 7h en même temps que les autres détenus par la cloche de la prison. Pense qu’il aura encore un sursis. Détrompé par l’entrée du procureur. « Alors, c’est pour aujourd’hui ? C’est bon. » En guise de déclaration, affirme : « Je ne vous en veux pas. Je n’ai qu’une chose à vous dire. C’est un deuxième assassinat qu’on va commettre. Deux fois j’ai été victime d’une injustice. En 1916, quand j’ai été condamné pour fabrication d’explosifs. Jamais je n’ai fabriqué d’explosifs. Et en septembre dernier, quand j’ai été condamné à mort. Car si je n’avais pas été condamné en 1916, on ne me guillotinerait pas aujourd’hui. Mais que voulez-vous ? Je n’ai jamais eu de chance ! » Continue à parler avec une certaine crânerie. Refuse les secours de la religion proposés par le chanoine Genêt : « Vous êtes venu me dire bonjour quand je suis arrivé, vous me dites au revoir quand je pars. Moi, je vous dis adieu. » Conduit au greffe, refuse d’abord rhum et cigarette, puis se ravise et incite ses défenseurs à trinquer avec lui, ce qu’ils font de fort mauvais coeur. Pendant la toilette, s’adresse à un gardien : « T’en fais pas, ton tour viendra ! » Puis se rappelle certains détails de sa vie, parle de sa mère, de sa soeur, et prie son avocat Me Plard d’aller voir ses amis pour leur dire qu’il a pensé à eux jusqu’au bout. Quand on l’attache, proteste : « Ne serrez pas si fort, je ne me débattrai pas. » Sortant de la prison, fixe la machine, semble hésiter quelques secondes avant d’être plaqué sur la bascule. Dans le public, au premier rang, la soeur et le beau-frère de M.Gisson, et les agents Charrier et Archambaud. 27 septembre 1935 15 février 1936 Samedi,
6h20 Avignon
Vaucluse Michel Nicolini 38 ans, souteneur. A Avignon, le 30 septembre 1934, abat en pleine rue de trois balles de revolver Ouerdia Djidjoui, épouse d’un malfrat rival, et le 20 octobre suivant, abat de quatre balles Marthe Montagard, tenancière de la maison close « Le Tabarin ». Première exécution à Avignon depuis 1816. Réveil à 5h35. Nicolini dort profondément. Il dit juste « Bon. » Ecoute son avocat et le prêtre, sans y prêter vraiment attention. Dit n’avoir aucune déclaration à faire, et dans le bureau du surveillant en chef, fait de l’humour : « On attend le coiffeur? ». Boit plusieurs verres de rhum, et discute avec son maton corse, M. Agostini : « Je ne voulais pas mourir sans vous serrer la main ! » A l’aumônier, dit : »La mort n’est rien, j’ai confiance. » En reconnaissant le bourreau, dit « Ah, c’est Deibler ! » puis ne dit plus un mot jusque devant la machine. 31 octobre 1935 17 février 1936 Lundi,
6h14 Draguignan
Var Guiseppe Sasia 49 ans, vagabond. Le 4 mars 1934, près de Taradeau, abat d’un coup de fusil de chasse Adrien Vassal, 70 ans, pendant qu’il faisait la sieste et lui vole 50 francs et sa montre en argent. Au Plan de Flaysse, le 5 août 1934, abat de deux coups de fusil Ferdinand Troin, 84 ans, et lui vole son portefeuille contenant 10 francs. Le 20 octobre 1934, à Ampuis, abat d’une décharge de chevrotines dans le dos Félicien Rouvier, berger, 35 ans, et vole sa montre et son couteau. Le 30 novembre 1934, au lieu-dit « Colle des Blacas », tue de deux coups de fusil l’ouvrier Giannini Galiano et vole le contenu de son porte-monnaie. le plaisir de tuer. Réveil à 5h30. Pas de réaction. Dit à son avocat, Me Berruty : « C’est embêtant de mourir ! » puis assiste à la messe. Communie, refuse le verre de rhum, se ravise et boit avec difficulté. 06 novembre 1935 04 avril 1936 Samedi,
5h05 Rodez
Aveyron Henri Bourdon 47 ans, ouvrier agricole. Déjà condamné dans les années 20 à cinq ans de réclusion pour viol d’une fillette. Satyre assassin de Josette Fabre, 8 ans, fille de ses anciens patrons – il avait été licencié le matin-même pour son intempérence -, violée et poignardée au hameau du Mas d’Alègre, à Tournemire le 09 septembre 1934. Réveillé à 4h30. Dort bien : se dresse d’un bond à la nouvelle. « Eh bien, soit… Du courage ? J’en aurai, oui… J’en aurai plus que vous tous ici, peut-être… » Accepte les secours de la religion : « C’est à Dieu seul que je dois des comptes. » Se confesse, entend la messe et revient au greffe. Demande au procureur à écrire deux lettres, l’une au père de sa victime, l’autre à son fils. La demande est acceptée. Après avoir sollicité le pardon de M. Fabre et celui de son fils, se fâche : « Oui, devant Dieu, je demande pardon. Les hommes, je les emmerde. Je ne regrette pas ce que j’ai fait. Je voudrais en avoir fait davantage. Si j’avais à recommencer, je le ferais. » Se calme, remercie son avocat, Me Cournet, et lui donne sa montre. Refuse le verre de rhum, puis se ravise. Fume rapidement une cigarette. Arrivé sur la bascule, à l’entrée de la prison, se jette à droite et se met de travers sur la planche. Le geste de révolte est contenu en l’espace de deux secondes. 19 décembre 1935 20 avril 1936 Lundi,
6h Caluire-et-Cuire
Rhône Brahim Rabah Ancien spahi, cantonné au 9e régiment algérien de Vienne. Puni de deux jours de consigne par le brigadier Robert Saladin pour une absence à son poste de garde d’écurie, attend qu’il dorme dans la nuit du 04 au 05 septembre 1935 dans l’écurie pour lui broyer la tête avec une masse de 5 kilos, puis le décapite au rasoir. Réveillé à 5h à la prison Saint-Paul. Dormait profondément. Aucune émotion, espérait juste être gracié en raison du long délai écoulé depuis sa condamnation. Fait sa toilette, s’habille, refuse nourriture, alcool et cigarette. Quitte la prison lyonnaise en auto à 5h30. En trajet, demande qu’on prévienne son frère de sa mort et affirme : « J’ai tué le brigadier parce qu’il avait injurié mon Dieu. Cela doit se payer dans l’heure qui suit. Je m’en remets à la justice d’Allah. » Arrive au fort de Montessuy à 5h55. Va au poteau d’exécution, sous les platanes, sans soutien. Agenouillé, les yeux bandés. Réclame : « Ne touchez pas à la tête, le Coran le défend. » Peloton de douze cavaliers du 9e Spahis l’abattent aussitôt. 26 novembre 1935 06 juin 1936 Samedi,
4h22, 4h25 Coutances
Manche Victor Courcaud
et
Jules Duchemin Courcaud, 49 ans, employé au chemin de fer. Duchemin, 24 ans, amant de la fille Courcaud. Dans la nuit du 05 au 06 décembre 1931, s’introduisirent dans la maison de la veuve Lamy, 67 ans, demeurant à Lolif. Courcaud lui fracasse la tête à coups de barre de fer, et Duchemin lui mutile l’aine et l’abdomen de plusieurs coups de couteau, avant de l’éventrer avec une hachette, pour la voler. Crime demeuré impuni pendant plus de trois ans. Complices, Mme Courcaud est condamnée à perpétuité, le fils Courcaud, 20 ans, – ayant dénoncé le crime en 1934 – est condamné à vingt ans de colonie pénitentaire, et la fille Courcaud est acquittée. Réveillés à 3h40. Duchemin ne semble pas comprendre et reste hébété. Courcaud, sitôt qu’il entend le bruit des clés, saute de son lit, et hurle : « Je suis innocent, ce n’est pas juste ! Mon fils parlera, j’en suis sûr ! » Puis il maudit Duchemin : « C’est toi qui nous as mis là ! Tu vas payer mon vieux ! Mon pourvoi a été rejeté, mais mon recours en grâce ? » Se calme un peu, abattu, se rasseoit sur son lit. Entendent la messe, mais ne communient pas. Duchemin pleure pendant l’office. Au greffe, Courcaud affirme son innocence, et refuse le verre de rhum. Duchemin en boit quelques gouttes. Duchemin sort le premier, effondré, soutenu par les aides. Courcaud paraît à son tour. Quelques cris de haine retentissent, auxquels il ne répond pas. S’arc-boute en arrivant sur la bascule. Maintenu par les aides avec force pour partir sous le couperet. 06 mars 1936 15 juin 1936 Lundi,
4h40 Montauban
Tarn-et-Garonne Henri Martin 29 ans, cordonnier. Durant un cambriolage à Castelsarrasin le 09 décembre 1935, blesse de deux balles de revolver Mme Jeanne Aubry, domestique, qui venait de le surprendre et appelait à l’aide, puis tue de deux balles dans la tête la maîtresse de maison, Mme veuve Olympe Tougne, bijoutière, 71 ans, et s’enfuit à bicyclette sans rien emporter, non sans tirer sur les passants, mais n’en touchant aucun. Ne dort pas à 4h10 : réveillé plus tôt dans la nuit par les aboiements d’un chien, avait eu le pressentiment de sa fin imminente. En avait profité pour écrire à sa mère et à sa maîtresse. Au procureur, annonce : « Je suis prêt. » Refuse rhum et cigarette : « Je n’ai pas peur, je n’en ai pas besoin. Je craindrais au contraire que cela me tourne le coeur. » Accepte de se confesser, mais pas d’entendre la messe. Toilette sans histoire. Se jette presque sur la bascule. 14 mars 1936 25 juin 1936 Jeudi,
4h14 Paris Arthur Mahieu 33 ans, repris de justice. Après une tentative de cambriolage raté à Montreuil-sous-Bois, dans l’après-midi du 11 février 1935, traqué par les voisins jusqu’à un entrepôt, abat l’agent de police Pujol de deux balles, l’une dans la tête, l’autre dans la poitrine, croyant que celui-ci avait l’intention de le tuer. Grosse chaleur. N’est parvenu à s’endormir qu’à 1h30. Réveillé à 3h. S’entretient avec le pasteur Brézard. Annonce aux gens présents : « Je le savais, Messieurs. Je sentais que c’était pour ce matin. Maître, dites à mon amie que c’est mieux ainsi. » AU greffe, refuse le rhum mais fume une cigarette. Avant de monter dans le fourgon, a cette dernière remarque : « Quelle triste voiture. » Reçoit, en descendant, l’accolade de Me Legrand et du pasteur. Ferme les yeux quand on le pousse sur la bascule. 23 mars 1936 10 août 1936 Lundi,
4h50 Grenoble
Isère Antonio Rocchini 42 ans, Italien, colporteur. Abat le fermier Eugène Griat devant chez lui à Meaudre le 21 janvier 1936 pour le voler. Réveil à 4h05. Convaincu qu’il serait gracié, ne peut croire qu’il va être exécuté. Promet malgré tout d’être courageux à son avocat, Me Gonon. Agit sans volonté visible, marmonne en italien. Entend la messe, écrit une courte lettre à sa femme et son fils. Fume plusieurs cigarettes. Soutenu par les aides jusqu’à la guillotine, dressée à l’entrée de la prison, rue de Strasbourg. 27 mai 1936 13 août 1936 Jeudi,
4h55 Arras
Pas-de-Calais Casimir Dankerque 32 ans. Tua à coups de gourdin et étrangle les soeurs Mme veuve Demailly – 90 ans – et Mme veuve Delporte – 73 ans – le 24 septembre 1935 à Pommier pour voler 1.180 francs, puis le 27 octobre 1935, massacre à coups de tailleur de rosier et de barre de fer les époux Duflos-Larue (64 et 63 ans, le mari, notamment, est en fauteuil roulant) à Achicourt pour voler 1.200 francs. Réveillé à 4h. Calme, s’habille seul. Ne veut pas entendre l’arrêt de mort, et ne fait aucune révélation à Me Legrand, son avocat. Après la confession et la messe, se laisse faire par les aides. Conduit place du Marche-aux-Chevaux, devant une foule hurlant : « A mort ! » Descend seul, toujours aussi calme, et va à la bascule sans reculer. 19 mai 1936 24 octobre 1936 Samedi,
5h25 Draguignan
Var Manuel Rodriguez 46 ans, Espagnol, cultivateur. Assassin de Lucas Zurletti, Italien, 39 ans, fermier au Plan de Thèmes, à Besse-sur-Issole. Il le tua le 28 avril 1935, et après avoir versé du pétrole sur le cadavre, y mit le feu, avant de dérober ses instruments agraires, son mulet et le peu d’économies qu’il possédait. Réveillé à 4h45. Au procureur qui lui demande d’avoir du courage, il répond « Je sais ce que c’est. » Refuse d’abord d’entendre la messe, mais finit par l’accepter quand on lui propose en espagnol. Prie avec ferveur. Au greffe, refuse rhum et cigarette et dit « Van nous coupa la testo. » Il embrasse ses avocats avant la toilette. Haut-le-corps devant la guillotine. 11 juillet 1936 28 octobre 1936 Mercredi,
6h08 Caen
Calvados André Martin 31 ans, éleveur à Saint-Contest. Assassin des époux Rousselle-Tidrick, bijoutiers à Caen, qu’il attira chez lui le 23 octobre 1935 et tua à coups de hachette avant de les enterrer au fond de son jardin. Il leur déroba 12.000 francs en billets et de nombreux bijoux. Réveil à 5h30. Dort tout habillé, réveillé par bruit de la porte. « Martin, votre pourvoi est rejeté, les hommes vous pardonnent. Ayez du courage. » Le condamné répond : « Moi aussi, je leur pardonne. J’en aurai. » Il se lève, entend la messe, parle quelques minutes avec son avocat, Me Delahaye, puis se livre aux exécuteurs pour la toilette. Pendant ce temps, l’aumônier lui fait boire un verre de rhum par petites cuillèrées. Va à l’échafaud sans soutien. 08 juillet 1936 18 février 1937 Jeudi,
6h07 Dijon
Côte-d’Or Vassili Gouczouliakoff 36 ans, Ukrainien, valet de ferme. Le 07 janvier 1936, à Bellenod-sur-Seine, Meurtrier de ses anciens patrons, les frères Jules Bornot (79 ans, égorgé d’un coup de couteau), Lucien Bornot (71 ans, deux balles de revolver dans la tête et égorgé), et de leur domestique Pierre Triolet, 28 ans, tué par un coup de stylet dans l’oeil droit qui lésa le cerveau, avant de voler 3.500 francs. Le 1er mars 1936, à la prison de Dijon, frappa le gardien Georges Thomas avec un pavé de 2 kilos pour tenter de s’évader, et seuls ses deux co-détenus parvinrent à l’empêcher d’achever sa victime. Article du Bien Public. Réveil à 5h20. Entend la messe prononcée par un pope, communie. Effondré. Aucun regret, ne dit pas un mot. Refuse d’un geste verre de rhum et cigarette. Devant la machine, mouvement de recul rapidement maîtrisé. 28 novembre 1936 03 mars 1937 Mercredi,
6h10 Limoges
Haute-Vienne Henri Dardillac 27 ans, cultivateur. Sur la route entre St-Laurent-sur-Gorre et St-Junien, le 03 mars 1936, tua de deux balles dans la nuque chacun Gabriel Frédon, marchand de vin et le vieillard Maurice Chabroux, et acheva Frédon en l’égorgeant avec son couteau de poche. Il vola alors le portefeuille de Frédon, où se trouvaient 5.000 francs Courage dès le réveil. Au cours de la messe, ne cesse de parler à voix basse de ses enfants. Après l’office, donne des lettres à Me Arbellot, son avocat. Pendant la toilette, il regarde une photo de ses petits, mais ne dit rien de son épouse. « Pendant que je suis là, que je vais mourir, d’autres mangent l’argent. » dit-il. Refuse rhum et cigarette. Va à la mort avec dignité. 01 décembre 1936 08 mai 1937 Samedi,
5h28 Strasbourg
Bas-Rhin Lucien Sittler 22 ans, mouleur. Dans la nuit du 03 au 04 juillet 1936 à Illkirch-Graffenstaden, assassine avec sa propre hachette – et aussi à coups de couteau – Eugène Beick, maçon, père de six enfants, pour voler son portefeuille contenant 50 francs. Dès son réveil, se lève et s’habille sans dire un mot. Va à la chapelle, entend la messe et communie. Prie son avocat de prendre soin de son enfant, puis se soumet aux exécuteurs. Accepte le verre de rhum et la cigarette. S’avance, pâle mais droit, cigarette à la bouche, vers la guillotine. 09 février 1937 03 juillet 1937 Samedi,
4h14 Caen
Calvados Gaston Donatien 29 ans, ouvrier agricole. Satyre assassin de la petite Marie Oillier, 8 ans, qu’il étrangla et viola à Goustranville le 04 juin 1933. Un nouvel attentat à la pudeur commis à Honfleur quelques mois plus tard permit d’avoir une description de l’agresseur, qui fut arrêté suite à un vol de bicyclette. Réveillé à 3 heures. Dort à poings fermés. On doit le secouer pour le réveiller. Il proteste : « Non, ça n’est pas moi. Le crime de Goustranville, je n’y suis pour rien. » Au juge d’instruction, dit n’avoir aucune déclaration à faire, puis s’entretient avec son avocat. Celui-ci lui dit qu’il sera sûrement plus heureux dans l’autre monde. « Oh, oui, certaineemnt, car je ne l’ai guère été sur celui-là. » Se confesse, entend la messe et communie. Accepte rhum et cigarette. Marche à la guillotine tête droite, cigarette à la bouche, air décidé. M. Oillier, père de la victime, présent pour l’exécution. 23 janvier 1937 21 juillet 1937 Mercredi,
4h15 Mulhouse
Haut-Rhin René Kueny 26 ans, manoeuvre à Rixheim. « Le Vampire de la Hardt », voleur récidiviste, auteur d’attentats à la pudeur, habitué à agresser sexuellement des femmes en la forêt de la Hardt en se cachant nu dans les buissons et en surgissant sur la route au passage des femmes. Le 3 août 1936, à Geispitzen, tente de violer Mlle Rasser, 23 ans, mais devant sa résistance, s’enfuit en volant son sac à main contenant 160 francs. Le 20 août, près de Sausheim, viola Mme Mugnier, 62 ans, dans un champ, qu’il assomma avec son propre parapluie et dont il vola l’argent. Satyre assassin le 31 août 1936 de Jeanine Toillon, 9 ans, qu’il viola puis noya dans le canal de Huningue. Le lendemain, 1er septembre, il aborda deux fillettes, dont la petite Jacqueline Girardot, 7 ans, qu’il entraîna en pleine forêt pour la violer, l’assommer avec un bâton et finalement tenter de l’étrangler. Gravement blessée mais vivante, la petite survécut à son supplice. Réveillé vers 3 heures. Se met à pleurer, se confesse. Dicte à son avocat une lettre à sa mère. Boit un verre de rhum et fume plusieurs cigarettes. Plusieurs centaines de spectateurs 29 avril 1937 14 janvier 1938 Vendredi,
7h20 Saint-Brieuc
Côtes-du-Nord Lucien Boulay 23 ans, meunier. Satyre assassin de Thérèse Rouault, 09 ans, qu’il assomma, viola et étrangla avant de lui écraser le visage à Pléneuf le 12 juin 1937. Réveillé à 6h40. Comprend vite, a un petit moment de défaillance. Se ressaisit et se montre courageux. Aucune déclaration, demande à entendre la messe et communie. Pleure durant la messe. Au greffe, manifeste des regrets, comprend mériter son châtiment, mais ne peut s’empêcher de dire : « C’est malheureux de mourir à 23 ans. » Accepte un verre de rhum. Va tranquillement à l’échafaud. En l’absence d’Anatole Deibler, malade, l’adjoint de première classe Jules-Henri Desfourneaux occupe le poste d’exécuteur en chef par intérim. 28 octobre 1937 28 avril 1938 Jeudi,
5h Lille
Nord Fernand Hubert 44 ans, mécanicien-dentiste. Tue à coups de marteau et de mèche de métal la veuve Piquet, 68 ans, à Lambersart le 1er mars 1937, tout en allumant la T.S.F afin d’atténuer les bruits de son crime, et vole 3000 francs, des bijoux et une montre. Réveillé dans sa cellule de Loos à 4h15. Il dit : « Je n’ai rien à expier. Je suis innocent, et vous allez commettre un crime. » Ferme et calme tout au long de la matinée : écrit une lettre à sa fillette. Accepte de se confesser, mais pas d’entendre la messe. Arrivé place Vergniaud, devant la guillotine, il crie : « Je suis innocent ». 29 janvier 1938 30 avril 1938 Samedi,
5h04 Paris Frédéric Moyse 41 ans, concierge à Fresnes. Tua son fils illégitime, Clément Faneau, 5 ans, le 15 décembre 1935 en lui coinçant le cou dans une porte et en pressant de toutes ses forces contre le battant. Le corps nu du petit garçon sera retrouvé le 1er janvier 1936 dans un fossé aux abords du carrefour de la Belle-Epine, au sud de Paris. Son épouse légitime, en tant que complice, fut condamnée à cinq ans de réclusion. Une autre photo. Réveillé à 4h15. Hurle de toutes ses forces, traite les gardiens et ses avocats d’hypocrites de ne pas l’avoir prévenu plus tôt. Maudit toute l’assistance. Conduit devant l’autel, refuse de s’agenouiller, demande à deux reprises du rhum, qu’on lui refuse avant qu’il n’ait communié. Pendant la prière, recommence à hurler et à insulter les assistants. Une fois la messe terminée, boit les trois-quarts d’une bouteille de rhum. Au greffe, interpelle le bourreau : « C’est vous, Deibler ? Vous êtes laid, et vous autres, vous avez de sales têtes ! » Recrache la cigarette qu’on lui glisse entre les lèvres, achève la bouteille de rhum. Se plaint de la brutalité avec laquelle on lui lie les mains, gémit à son avocat qu’on lui donne « des coups de ciseaux dans le cou ». Avant de monter dans le fourgon, crie plus fort encore qu’il ne veut pas voir la guillotine. Me Hubert lui bande les yeux avec son propre mouchoir blanc. Arrivé devant l’échafaud, hurle : « Non, non ! Je ne veux pas ! Je ne veux pas ! » 08 décembre 1937 14 mai 1938 Samedi,
4h25 Charleville
Ardennes Auguste Mary 29 ans. Assassine à coups de bûche et viole la veuve Albert, 44 ans, à Villers-le-Tourneur le 1er octobre 1937. Déjà auteur d’un viol et d’une tentative d’assassinat, le 21 octobre 1928, sur sa nièce, âgée alors de neuf ans. Incarcéré pendant sept ans, libéré en 1936. Réveillé à 3h30. L’aumônier Couvreur annonce la nouvelle au condamné. Se confesse, boit un verre de rhum et fume une cigarette. Meurt courageusement. Exécuté place du palais de justice à Charleville (jusqu’en 1922, les supplices avaient lieu dans la ville voisine, Mézières). 15 février 1938 15 juin 1938 Mercredi,
3h59 Epinal
Vosges Camille Charbonnier 34 ans, domestique de ferme. Le 05 septembre 1937, à Plombières, en état d’ivresse avancée, refusant de quitter le débit de boissons de Mlle Couval, celle-ci dut faire appel à un agent de police, M. Rapenne. S’enfuyant en insultant le gardien de la paix, et entra dans un garage où il vola un revolver laissé dans une voiture. Il menaça le gardien de nuit, puis testa l’arme dans un lieu désert, avant de recroiser la route de l’agent Rapenne qui fut abattu quand il tenta de l’arrêter. Réveil à 3h30. Nul besoin de lui annoncer : « J’ai compris. Il n’est pas trop tôt. » Pâlit un peu, mais se reprend et ajoute : « J’aurai du courage. Malgré tout, ce n’est pas logique. » Accepte les secours de la religion et communie. Ecrit une lettre à sa soeur. Quand le procureur lui demande s’il consent à avouer son crime, il répond : « Ca va, mais ce n’est pas logique. » Au greffe, boit le verre de rhum et prend une cigarette offerte par son avocat, puis remercie un des gardiens pour ses bons soins. Après, il ne dit plus un mot jusqu’à l’échafaud, vers lequel il s’avance cigarette aux lèvres. 16 mars 1938 29 octobre 1938 Samedi,
5h44, 5h47 Carpentras
Vaucluse Ange Quaranta
et
Gabriel Kamphaus 35 ans et 46 ans. Le 10 août 1936, à Cavaillon, à la terrasse d’un café, Quaranta, cambrioleur, abat sa maîtresse Fernande Helvig. Il est condamné le 27 avril 1937 à 20 ans de travaux forcés, et son complice Honoré Passeron à cinq ans de prison. Le 23 avril 1935, Kamphaus, marchand de pièces de TSF à Toulouse, agresse à Entrechaux les époux septuagénaires Imbert à coups de gourdin pour les voler : il est condamné le 29 avril 1937 aux travaux forcés à perpétuité. Le 25 juillet 1937, blessent gravement à coups de barre de fer et tentent d’étrangler le gardien Joseph Martel en s’évadant de la prison d’Avignon. Quaranta se foule la cheville en franchissant le mur et est laissé en arrière. Les trois évadés sont repris dans la journée. Passeron n’est condamné qu’à 15 ans de travaux forcés. Mistral violent. Au réveil, à 4h50, Kamphaus dit « C’est bien. » Quaranta sort du lit et salue les officiels. Kamphaus parle à un pasteur, Quaranta entend la messe et communie. Au greffe, en buvant un verre de rhum et en fumant une cigarette, Kamphaus dit : « Je crois que c’est Baudelaire qui a dit mieux vaut en rire qu’en pleurer… » Quaranta part le premier. Kamphaus se rebelle sur la bascule, et se jette de côté, mais les exécuteurs ne mettent que deux secondes à le remettre en place. 28 juillet 1938 24 janvier 1939 Mardi,
6h25 Lyon
Rhône Abdelkader « Saada » Rakida 28 ans, Algérien. Interdit de séjour à Paris, auteur d’un meurtre au cours d’une bagarre, le 21 septembre 1937, tenta de forcer le passage dans une maison close de Lyon, à tel point que la tenancière, menacée d’un revolver, appella la police. Dès l’arrivée des forces de l’ordre, Rakida leur tira dessus, blessant gravement les gardiens de la paix Perret et Dusserre. Réveillé à 5h30. Quand l’avocat général lui dit de faire preuve de courage, répond : « J’en aurai. » Avec l’aide des gardiens, s’habille. Accepte de parler à l’imam Belhay ben Maafi, qui l’exhorte à se confier à Allah. Au greffe, accepte cigarette mais refuse rhum. D’un ton excédé, il dit : « Allons-y ! » En voyant la guillotine, vif mouvement de recul et se débat sur la bascule. Mal rattrapé par l’aide, à la tête tranchée au niveau du menton. 05 novembre 1938 04 février 1939 Samedi,
6h47 Rennes
Ille-et-Vilaine Maurice Jean-Marie Pilorge 24 ans, assassine à coups de rasoir le 06 août 1938 son amant mexicain Nestor Escudero à Dinard pour le voler. La veille de sa condamnation à mort, condamné à vingt ans de travaux forcés pour avoir commis sept cambriolages près de Dinard. Exécution prévue le 03 février. La veille au matin, en se rendant à la gare, Anatole Deibler décède de mort naturelle. Exécution effectuée par l’adjoint de première classe Jules-Henri Desfourneaux, exécuteur en chef par intérim et futur chef officiel à compter du 15 mars. 17 novembre 1938 02 mai 1939 Mardi,
4h50 Rouen
Seine-Inférieure André Vittel 17 ans, navigateur à bord du paquebot « Cuba », né le 22 mai 1921. Egorge et poignarde sa belle-soeur Alice Vittel, née Anne, 28 ans, le 08 juin 1938 au Havre pour la voler, puis étouffa son neveu Michel, deux mois, avec un oreiller. Réveillé à 3h55. Aucune émotion, n’a rien à déclarer. Il s’habille, entend la messe et communie. Au greffe, pendant la toilette, pleure. Boit un verre de rhum, demande une cigarette au gardien-chef. Arrivé place Bonne-Nouvelle, il reconnaît son frère et sa belle-mère et les regarde avec haine. Quand le couperet tombe, Mme Anne dit : « Tant mieux ! Ma fille est vengée ! » Première exécution de Jules-Henri Desfourneaux en tant que chef. 17 février 1939 02 juin 1939 Vendredi,
3h57 Paris Max Bloch 44 ans, cambrioleur, juif Ukrainien. Abat à coups de revolver les époux Gutowicz, Polonais, receleurs notoires rue Oberkampf à Paris, le 11 mai 1938, parce qu’ils l’avaient floué sur le prix d’un collier de perles. Dernière exécution publique à Paris, boulevard Arago 06 avril 1939 17 juin 1939 Samedi,
4h32 Versailles
Seine-et-Oise Eugen Weidmann 31 ans, interprète, Allemand, plusieurs fois condamné en Allemagne et au Canada. En 1937, profitant de l’Exposition Universelle de Paris, décide de mettre sur pied une entreprise de kidnappings en série. Le 14 juillet 1937, enlève la danseuse américaine Jean de Koven, 21 ans, et l’attire chez lui dans la villa « La Voulzie », à La Celle-Saint-Denis. Sitôt entrée, il la drogue et l’assassine avant de l’enterrer dans la cave. Le 08 septembre 1937, dans la vallée de la Loire, il abat d’une balle dans la nuque Joseph Couffy, chauffeur privé, et lui vole 2000 francs et sa Renault. Le 04 octobre, sous couvert de lui trouver un emploi de dame de compagnie, entraîne Janine Keller dans la « caverne des brigands » à Fontainebleau, et la fait abattre par son complice Roger Million, avant de la dépouiller des 2.200 francs qu’elle avait sur elle. Le 15 octobre 1937, à La Celle-Saint-Cloud, Million blesse Roger Leblond, imprésario, attiré dans la villa sous couvert d’investissement. Weidmann achève la victime d’une balle dans la nuque et lui vole 8.000 francs. Le 27 novembre 1937, avec la complicité d’un ancien co-détenu, Fritz Frommer, attirent Raymond Lesobre, agent immobillier dans une maison de Vaucresson, et Weidmann l’abat d’une balle dans la nuque avant de voler 5.000 francs. Enfin, fin novembre, Frommer, devenu témoin gênant – il avait laissé à Lesobre une carte de visite au nom de son oncle -, est abattu à son tour. Reconnu coupable dans deux des meurtres, Roger Million est condamné à mort également, les deux autres complices, Jean Blanc et Colette Tricot, écopent respectivement de 20 mois de prison et d’un acquittement. Million est gracié le 16 juin 1939.Une autre photo. Dernière exécution publique en France (hors colonies) 31 mars 1939 19 juillet 1939 Mercredi,
4h30 Saint-Brieuc
Côtes-du-Nord Jean-François Dehaene 35 ans, chauffeur-livreur. Poignarda à coups de couteau de boucher sa femme, née Alice Sorel, 30 ans, employée dans une charcuterie, et son beau-père, Victor Sorel, 59 ans, clerc d’huissier, à Dinan le 10 décembre 1938, pour se venger de leur divorce imminent. Première exécution à l’intérieur de la prison, devant un comité restreint. 27 avril 1939 16 janvier 1940 Mardi,
6h45, 6h50 Lyon
Rhône René « William » Gabriel Julien Saunier
et
Louis « Lili » Teddy Deveau 20 ans tous les deux, manoeuvre et mécanicien. Le 05 février 1938, à Reyrieux, blessent grièvement le taximan Bonnet-Ligeon, le 10 novembre 1938, à Saint-Rambert l’Ile-Barbe, tuent Mme Dorillard, 76 ans, et son gendre M.Peuillat, 55 ans, pour les voler. Le 29 décembre 1938, agressent et blessent l’automobiliste M.Toussaint aux Chères. Le 20 avril 1939, à Ecully, tuent M.Jourdan, 80 ans, parent de l’un d’eux. Deveau s’adresse au procureur : « Etes-vous sûr, monsieur le procureur, qu’il y a une justice ? » puis à son complice : « Vise-moi ça ! C’est une coupe maison. Mince, alors, ma belle liquette ! » Saunier, lui, dit : » Je tremble, possible, mais je n’ai pas peur, j’ai froid ! » 04 novembre 1939 01 mars 1940 Vendredi,
6h45, 6h47 Metz
Moselle Ammar Bouaita
et
Belaïd Ben Aïssa 25 ans, soldat, Algérien et 27 ans, caporal, Tunisien, tous deux casernés au 23e régiment de tirailleurs algériens. En avril 1939, tendent un guet-apens au jeune soldat Louis Weiss, entre Puttelange et Diding. Ben Aïssa le viole, puis l’étrangle pour l’empêcher de parler, puis ils volent son argent. Avant le procès, essayent de s’évader et tentent d’étrangler un gardien. Bouaita demande à être exécuté le premier. « Vous n’avez pas compris que j’étais innocent. Mais je vais expliquer à Dieu que c’est l’autre le seul coupable, et qu’est-ce qu’il lui passera quand il arrivera à son tour ! » La demande est acceptée, mais sur la bascule Bouaita arrive à se dégager de la lunette en rentrant le cou. Ben Aïssa est porté du greffe à la machine. 07 décembre 1939 15 mars 1940 Vendredi,
6h20, 6h25 Paris Paul Adrien Chrysostome Vocoret
et
Marcel René Vocoret 28 et 32 ans, manoeuvres. Marcel, condamné à perpétuité par les assises de la Seine le 07 novembre 1936 pour avoir, le 25 décembre 1935, abattu à Issy-les-Moulineaux le brocanteur Emile Beautour d’une balle dans la poitrine – crime accidentel, les jurés ayant voté par erreur la perpétuité alors qu’ils souhaitaient quinze ans de travaux forcés. Peine commuée en quinze ans de bagne par décret présidentiel. S’évade de la centrale de Caen le 9 avril 1939. Suspecté avec son frère de nombreux vols de bicyclettes, abattent dans un hôtel de l’île Saint-Germain, à Issy-les-Moulineaux, le 15 novembre 1939, le secrétaire de police Vaté, l’inspecteur Bernard et l’agent Wachaud venus les arrêter. Condamnés à mort par le Conseil de guerre. Au greffe, les deux frères demandent à s’embrasser. Paul dépose un baiser sur la joue de son frère et lui dit : « De toutes façons, ca ne te portera pas chance. » 28 décembre 1939 04 mai 1940 Samedi,
5h15 Rouen
Seine-Inférieure Emile René Brodin 26 ans, soldat de 2e classe, déserteur. Egorgea à Clecy (Calvados) dans la nuit du 17 au 18 septembre 1939 Mme Léontine Dupont, 69 ans, chez qui il s’était introduit par effraction pour la dévaliser. Condamné par le tribunal militaire de la 3e région, siégeant à Rouen. Réveillé à 4h30. 01 mars 1940 31 mai 1940 Vendredi,
4h15 Ivry-sur-Seine
Seine Albert-Emile Lafosse 38 ans, soldat. Satyre assassin de la petite Madeleine Lannoy, 15 ans, violée et étranglée le 13 janvier 1940 à Saint-Ouen. Fusillé au Fort d’Ivry. 8 mars 1940, 17 avril 1940 07 juin 1940 Vendredi,
4h, 4h02 Paris Marcel Louis Garnotel

Fritz Erich Anton Erler

Garnotel, 25 ans, ancien Bat d’Af, tue lors d’un cambriolage à Aulnay-sous-Bois le 14 mars 1939 Huguette Gaillac, 17 ans, en l’étranglant et en lui martelant la nuque sur le carrelage, et tente d’étrangler la bonne, Marie Milpart avant de s’enfuir.

Erler, 33 ans, cinéaste, Allemand, est condamné à mort pour espionnage.

19 mars 1940

27 avril 1940

13 juin 1940 Jeudi,
4h20 Coutances
Manche Edmond René André Marcel Laisné 31 ans, cultivateur à Parigny. Le 20 décembre 1938, tua Christiane, son enfant de 4 ans qu’il avait eu d’un premier mariage, à force de mauvais traitements. Sa femme, complice, fut condamnée à cinq ans de travaux forcés. 14 mars 1940 14 août 1940 Mercredi,
4h45 Nîmes
Gard Fernand René Torrens 20 ans, sans profession. Abattit à coups de revolver l’abbé Dourdoux, professeur, pour le voler, le 24 novembre 1939 à Nîmes. Guillotiné par les exécuteurs d’Alger. A 4h45, pousse un hurlement à son réveil, et se calme. Confessé par l’aumônier, entend la messe et communie. Discute avec son avocat aimablement. Demande à écrire à sa grand-mère, puis remercie les gardiens. Boit un verre de rhum, puis soutenu par le prêtre, s’avance vers la cour où se trouve l’échafaud. Quand il voit la guillotine, il se mit à hurler de peur, embrasse malgré tout le crucifix, et ses cris ne cessèrent que quand le couperet tomba. La guillotine reste à la maison centrale de Nîmes en attendant une prochaine utilisation. 12 avril 1940 05 septembre 1940 Jeudi,
5h55 Lyon
Rhône Léon Corgier 41 ans, manoeuvre. Dans la nuit du 30 au 31 mars 1937, après un cambriolage à Villeurbanne, Corgier et son complice Louis Pinet tirent sur deux policiers venus les arrêter, blessant gravement le brigadier Thollon. Le 06 mai suivant, à Villefranche-sur-Saône, abattent les époux Reymond, droguistes, pour les voler. Pour la tentative de meurtre sur policier, le 12 juillet 1940, Corgier est condamné à perpétuité. Guillotiné par les exécuteurs d’Alger. 13 juillet 1940 08 janvier 1941 Mercredi,
9h03 Bordeaux
Gironde Elisabeth Lamouly, veuve Ducourneau PARRICIDE. 35 ans, tenancière de bar. Epouse infidèle, sur les conseils de son amant Abdous Amar, soldat dans un régiment colonial, empoisonne à la digitaline sa mère, Mme Lamouly, le 31 août 1937 à Belin, parce que celle-ci s’opposait à sa liaison et qu’Amar abusait de la générosité de sa maîtresse. Partie s’installer à Bordeaux, où elle ouvre un café, devient la maîtresse d’Edouard Camou, 20 ans, docker, qui rêve de devenir le patron du café. Il l’incite à se débarrasser de son mari, Roger Ducourneau, qu’elle empoisonne lui aussi à la digitaline et au ferrocyanure de mercure le 25 octobre 1938. Amar et Camou sont condamnés à vingt ans de travaux forcés. Première exécution d’une femme depuis 1887. 26 avril 1940 24 mai 1941 Samedi,
5h30 Albi
Tarn Ernest Rose 44 ans, fermier à Lacrouzette. Condamné à perpétuité le 13 janvier 1940 par les assises du Tarn pour abus sexuels sur ses filles, tenta de s’évader de la prison d’Albi le 12 juillet 1940 en manquant tuer ses gardiens Emile Chausse et Adrien Andrieu en les frappant à coups de poinçon et de tabouret. Se laisse faire docilement, ne fait aucune déclaration et écoute la messe protestante. Pour accèder à la guillotine, Rose doit emprunter un escalier extérieur de deux étages, et durant cette descente, il a tout loisir de voir l’échafaud dressé dans la cour. Mort de peur, il fait sous lui arrivé devant la bascule en gémissant « Que vont devenir mes pauvres enfants ? » 14 janvier 1941 05 août 1941 Mardi,
6h Agen
Lot-et-Garonne Alexandre Cocusse 20 ans. Le 08 décembre 1940, dans un compartiment du train Cahors-Brive, tue M.Saulières, employé des PTT, pour le voler. Condamné à mort dans le Lot. 25 mars 1941 28 août 1941 Jeudi,
6h48, 6h50, 6h51 Paris Emile Jean Bastard

André Bréchet

Abraham Trzebucki

Condamnés à mort par la Section Spéciale pour communisme. 27 août 1941 24 septembre 1941 Mercredi,
6h45, 6h47, 6h49 Paris Jacques René Woog

Adolphe Guyot

Jean Joseph Catelas

Condamnés à mort pour communisme. 22 septembre 1941

22 septembre 1941

23 septembre 1941

21 novembre 1941 Vendredi,
8h20 Reims
Marne Ulysse Alfred Thilloy 41 ans, valet de ferme.. Le 20 mars 1939, à Baslieux-sous-Châtillon, étrangle et fracasse le crâne de M. et Mme Ponson avant d’incendier leur maison. Arrêté deux jours plus tard, profite d’un transfert de détenus en mai 1940 pour s’évader. Il revient à Baslieux, et le 25 janvier 1941, il est arrêté à nouveau alors qu’il tente de cambrioler une épicerie. 29 avril 1941 22 janvier 1942 Jeudi,
8h50 Melun
Seine-et-Marne Christian André Rocher Assassina le 08 août 1940 Edmond Billaud, journalier de 65 ans à Noisy-sur-Ecole pour le voler. Son complice, Jean-Christian Benoît, est condamné à 15 ans de travaux forcés. Réveillé à 8h15 par le procureur Decognée, Rocher ne manifeste aucune réaction. Il demande à manger, se confesse et communie. Il va vers l’échafaud, cigarette à la bouche. Température : -16°C. 15 juillet 1941 06 février 1942 Vendredi,
5h46 Paris – La Petite Roquette Georgette Raymonde List, épouse Monneron 30 ans, femme au foyer. Aida son mari à tuer leur fillette Liliane, qu’ils battaient régulièrement, le 10 mars 1941 à Paris. 01 octobre 1941 07 février 1942 Samedi,
5h45 Paris Emile André Monneron 31 ans, ouvrier scieur. Tua sa fille Liliane, à Paris, le 10 mars 1941, à force de mauvais traitements et alla jeter le corps dans le canal de Bonneuil. 01 octobre 1941 16 mai 1942 Samedi,
5h50 Vannes
Morbihan Gildas Marie Le Roux Marin-pêcheur à Plouguerneau. Assassine à coups de couteau le 5 mars 1941 à Merlevenez M.Runigo, cultivateur, 77 ans, ainsi que sa belle-fille, Marie Ropert, 35 ans, pour les dévaliser, sous les yeux de la petite Runigo, 7 ans, qui prévint les voisins. Entend la messe. Meurt courageusement. 04 octobre 1941 11 juillet 1942 Samedi,
5h15 Melun
Seine-et-Marne Guy André Gaston Charmeux PARRICIDE, 19 ans. Le 17 février 1941, tua sa grand-mère, Véronique, à coups de serpe parce qu’elle lui faisait des reproches. 22 janvier 1942 23 juillet 1942 Jeudi,
5h58, 5h59, 6h00 Paris Edgar Lefébure,
Henri Eugène Meunier
et
André Joseph Dalmas 37 ans, tôlier, 44 ans, employé à la Préfecture de Paris et 28 ans, commis des Postes. Participèrent à l’affaire de la rue de Buci, le 31 mai 1942 : lors d’une émeute pour la nourriture devant une épicerie réservée aux Allemands, distribuent les vivres aux manifestants. Quand l’un des meneurs est appréhendé, abattent le brigadier Eugène Vaudrey, 44 ans, et l’agent Camille Morbois, 42 ans. Trois autres policiers sont blessés. Leur camarade Madeleine Marzin, 33 ans, institutrice, condamnée à mort avec eux, est grâciée et s’évade en août durant son transfert à Rennes pour rejoindre le maquis. 23 juillet 1942 08 août 1942 Samedi,
5h47, 5h48 Paris David Isidore Grünberg

Victor Rabeux

Grumberg, juif Polonais, abattit l’agent de police Louis Lécureuil, le 07 janvier 1942 boulevard de Magenta.

Rabeux, 41 ans, cultivateur à Saint-André-les-Vergers, empoisonna à l’arsenic son épouse en avril 1941 et fournit le poison à sa maîtresse Eliane Barat, née Regnault, 30 ans, pour qu’elle fasse de même avec son époux en juillet 1941. Les deux empoisonneurs furent condamnés à mort par les assises de l’Aube. Eliane bénéficia d’une grâce.

15 juin 1942

26 février 1942

03 septembre 1942 Jeudi,
6h50 Douai
Nord Tadeusz Kempa 18 ans, mineur à Hersin-Coupigny, résistant communiste. Attaque le 8 mai 1942 une ferme à Béthencourt, et la mairie de Sailly-Labourse le 28 mai suivant. Le 20 juin 1942, à Barlin, abat à coups de revolver M.Robez-Pagillon, ingénieur, devant son domicile. Condamné par la section spéciale de Douai. 25 juillet 1942 16 septembre 1942 Mercredi,
6h45 Alençon
Orne Albert Maurice Aupée 25 ans, électricien. Attire dans une maison abandonnée d’Athis Mme veuve Desmonts, sa bienfaitrice agée de 72 ans, et la tue à coups de madrier, le 12 novembre 1941, pour lui voler 100000 francs en titres. Reveillé à 6h. Entend la messe du chanoine Garnier. Pendant ce temps, les gardiens demandent aux exécuteurs s’ils peuvent aider au montage des bois de justice, le tout finissant dans un certain désordre jusqu’à ce que les bourreaux ne décident d’y mettre un terme. Henri Sabin fait preuve de précipitation et pousse trop fort Aupée sur la bascule. Il faudra près d’une minute pour le « caler » convenablement. Tout au long de cette minute, le condamné demeure parfaitement calme. 07 mai 1942 24 septembre 1942 Jeudi,
7h00, 7h03, 7h05 Béziers
Hérault Elie Louis Eychenne

Roch « Roger » Englan
et
Hubert Englan

Eychenne, 41 ans, tua M. Latger, veilleur de nuit dans un garage qu’il tentait de cambrioler, à la Redorte, le 22 juin 1941. Condamné à mort par les assises de l’Aude.

Les Englan (Hubert, 61 ans, et ses fils Roch, 24 ans et Albert, 20 ans) tuèrent le 21 décembre 1941 à l’étang de Thau le lieutenant Marsault et le gendarme Roger. Condamnés à mort par la XVIe cour martiale siégeant à Montpellier dans l’Hérault, seul Albert fut grâcié.

22 mai 1942

30 mai 1942

20 octobre 1942 Mardi,
7h55 Amiens
Somme Charles Louis Lebecq 39 ans, ancien gendarme, agent de police auxiliaire. Le 20 février 1942, à Amiens, assassina à coups d’arme blanche la vicomtesse Jules Armand de Marolles, née Marie Hélène Yvonne Hüe de Mathan, 78 ans, pour voler un million de francs de pierres précieuses et de billets de banque. Il blesse la camériste, Mme Thuillier, 69 ans, puis met le feu aux literies des deux femmes. Mme de Marolles connaissait Lebecq, et s’inquiétait de la santé de ses quatre enfants. Au procès, deux mois après le crime, l’assassin incrimine Mme Thuillier comme étant sa complice ! Prétendra avoir usé d’un tournevis comme arme, affirmation démentie par le médecin-légiste. 27 avril 1942 22 avril 1943 Jeudi,
6h20, 6h25 Nîmes
Gard Jean Auguste Robert
et
Vinicio « Vincent » Faita 25 ans, électricien, et 24 ans, ouvrier. Résistants, fondateurs des FTP-MOI de Nîmes. Faita arrêté le 6 mars en gare de Nîmes, blesse l’inspecteur de la Sûreté Abric d’une balle dans le poumon. Robert arrêté le 8 mars aux abords du Palais de Justice alors qu’avec Morel et Chabert, cherchaient à trouver un moyen de libérer leur ami. Faita est jugé pour tentative de meurtre sur agent de la force publique, détention de faux papiers et d’arme à feu, Robert pour avoir fait sauter des camions allemands le 6 janvier 1943, pour deux tentatives d’attentats sur la voie ferrée Nîmes-Montpellier le 10 février et Nîmes Alès le 11 février, et pour activités « antinationales ». Leurs camarades Jean-Baptiste Casazza, Fernand Chabert, André Morel et Louise Sauze sont condamnés à perpétuité et déportés à Dachau. 28 mars 1943 27 avril 1943 Mardi,
6h Béziers
Hérault Diégo Banos-Noguera 27 ans, cultivateur. Pillait un poulailler à Saint-Jean de Corniès quant il fut surpris par le propriétaire, M. Edmond Buzet, qu’il abattit à coups de fusil le 04 mai 1941. 15 octobre 1942 19 mai 1943 Mercredi,
5h20 Douai
Nord Valentin Hudziak 19 ans, mineur, Polonais. Tua d’un coup de revolver dans la poitrine le 07 juillet 1942 le chef porion Renard à Harnes. Membre d’un réseau de résistance, était exécuteur, et devait abattre plusieurs personnes trop pro-allemandes. 01 décembre 1942 08 juin 1943 Mardi,
5h15 Saintes
Charente-Inférieure Germaine Besse, épouse Legrand 29 ans, cultivatrice. Maltraite Pierre Legrand, le fils de son mari, 9 ans, à Saint-Savinien-sur-Charente depuis son mariage. Le 08 décembre 1941, le bat à coups de bûche avant de le laisser agoniser trente heures dans le chai extérieur de la ferme – cabanon glacé qui servait souvent de chambre au garçonnet. Pendant la toilette, elle ne cessa de gémir en parlant au procureur : « Ne me tuez pas, mettez-moi à perpète ! » Elle eut également ce mot incroyable, quand on sait son crime : « Le Maréchal n’a donc pas d’enfants ! » Elle pleura aussi, mais c’était des larmes de crocodile, car quand elle vit qu’il n’y avait plus rien à espérer, elle bomba le torse et partit sans broncher. 26 octobre 1942 16 juin 1943 Mercredi,
4h58 Paris Albert Fernand Dubois Assassin de l’abbé Henri Noël, chapelain de la communauté des soeurs réparatrices d’Auteuil, le 09 septembre 1941, pour le voler. 27 octobre 1942 29 juin 1943 Mardi,
4h50 Chalon-sur-Saône
Saône-et-Loire Czeslawa Sinska, veuve Bilicki Tue son mari et le découpe avec l’aide de son amant. 28 octobre 1942 06 juillet 1943 Mardi,
5h27, 5h29 Douai
Nord Robert Georges Crépinge

Louis Caron

Crépinge, 21 ans, chaudronnier à Iwuy abat d’un coup de revolver, le 29 août 1942 à Thun-l’Evêque, l’instituteur Charles Lesnes, secrétaire de mairie, alors qu’il attaque avec trois complices l’hôtel de ville afin de dérober des titres de ravitaillement.

Caron, 21 ans, manoeuvre à Divion, auteur de plusieurs cambriolages et d’attaques de mairies dans le Douaisis, ainsi que de deux attaques envers les commissariats de Beuvry et de Divion, d’une agression envers le Dr Brun, président du Rassemblement Populaire de Lens, de tirs sur gendarmes à Bruay-en-Artois, ainsi de que sabotages.

Caron se montre très courageux. 20 mars 1943

17 mai 1943

23 juillet 1943 Vendredi,
5h40 Toulouse
Haute-Garonne Mendel « Marcel » Langer 40 ans, Polonais, juif, ajusteur-fraiseur, héros résistant, chef des FTP-MOI du Sud-Ouest. Arrêté le 6 février 1943 en gare de Toulouse-Saint-Agne en possession d’une valise remplie d’explosifs. 11 mars 1943 30 juillet 1943 Vendredi,
5h25 Paris – La Petite Roquette Marie-Louise Lempérière, épouse Giraud 39 ans, blanchisseuse à Cherbourg. Procéda à vingt-sept avortements clandestins entre décembre 1940 et octobre 1942. Un seul des avortements eut des conséquences tragiques, provoquant la mort de Louise M., 33 ans, à Cherbourg, le 15 février 1942, quinze jours après l’intervention. 08 juin 1943 05 août 1943 Jeudi,
5h45 Auxerre
Yonne Armand Albert Collato 23 ans. Le 15 janvier 1941, tua un manoeuvre de Sens, Marius Rey, pour le voler. Son complice, Charles Deniau, 19 ans, meurt durant l’instruction. 19 novembre 1942 10 août 1943 Mardi,
6h Nevers
Nièvre Auguste Edouard Houdayer 50 ans, ouvrier agricole. Le 14 novembre 1941, à Saint-Benin d’Azy, tua sa propriétaire, la veuve Louise Cheminat, 70 ans, qui était aussi sa maîtresse, viola le corps et vola des pièces d’or. 27 février 1943 21 août 1943 Samedi,
6h30 Douai
Nord Bronislas Kania 37 ans, mineur. Membre important d’un réseau de résistance, agent de liaison. Accusé d’avoir planifié le meurtre d’un commissaire de police (acte non réalisé au moment du procès). Accusé également d’avoir, le 18 août 1942, à Noyelles, tiré trois coups de feu sur M.Travinski, mineur polonais. Affirme que toutes les accusations sont vraies, à part la tentative de meurtre sur Travinski. 29 juillet 1943 28 août 1943 Samedi,
6h02, 6h04 Paris Larbi Kherfi
et
Ali ben Slimane Chaffi Tuèrent en février 1941 leur compatriote Zeghalache Djimal, qui venait d’acheter le café-tabac de Cherfi, et enfermèrent le cadavre dans une malle. 25 mars 1943 22 octobre 1943 Vendredi,
5h45 Paris Désiré Piogé 46 ans, hongreur. Condamné par le Tribunal d’Etat pour avoir provoqué trois avortements. 12 août 1943 30 octobre 1943 Samedi,
6h45 Agen
Lot-et-Garonne Pierre Juge Voleur, tua au cours d’une effraction le 6 juin 1943 un gendarme et en blessa gravement un autre. 22 octobre 1943 03 novembre 1943 Mercredi,
6h45 Lyon
Rhône Emile Bertrand 23 ans. Membre des FTP. Participa d’avril à septembre 1943 une douzaine de coups destinés à récuperer argent et cartes d’alimentation. Dans la nuit du 18 au 19 septembre, avec neuf camarades, tente de voler des uniformes de policiers sur des hommes en patrouille. Un des agents meurt abattu d’une rafale de mitraillette, un autre est grièvement blessé. Dépouillés de leurs uniformes, le survivant attrape une pneumonie. 25 octobre 1943 04 décembre 1943 Samedi,
7h30 Lyon
Rhône Simon Frid 21 ans, juif polonais. Membre des FTP. Participe avec quatre camarades à un braquage, le 29 mai 1943 avenue Félix-Faure à Lyon, pour voler des tickets d’alimentation. Frappe le gardien de service, et volent les tickets avant de s’enfuir à bicyclette. Poursuivis, sur le point d’être rejoint, Frid tire sur un agent qu’il blesse, mais est arrêté quand son arme s’enraye. 23 novembre 1943 15 décembre 1943 Mercredi,
7h15 Carpentras
Vaucluse Serge Fédé 34 ans, marchand de primeurs, en rivalité avec son demi-frère et ex-associé, André O’Connell. Le 14 septembre 1942 à Avignon, en pleine discussion, abat les notaires Mes Pierre Roux – de trois balles dans la tête – et Louis Imbert – d’une balle dans le coeur- et blesse O’Connell. 30 juillet 1943 29 janvier 1944 Samedi,
7h45 Laon
Aisne Fernand Louis Lalain 39 ans, électricien. Bat à mort puis étrangle une débitante de tabac, Mme Marguerite Hesbaux, à Guise le 09 octobre 1942, avant de voler billets, monnaie de billon, tabac et cigarettes, cet argent devant lui servir en zone non occupée. Son ami Alfred Martin, 35 ans, est condamné à six mois de prison. Blanche Ancelet, épouse Lalain, 42 ans, est acquittée. 04 août 1943 19 février 1944 Samedi,
7h09 Bordeaux
Gironde Henri Dulor 20 ans. Assassina le 21 juin 1941 à Bordeaux le marbrier Caniot et blessa grièvement sa femme pour les voler. Son complice, Lucien Bassibey, est condamné à perpétuité 30 octobre 1943 07 mars 1944 Mardi, Lyon
Rhône Claude-Xavier Jeanroi 36 ans, ancien contremaître de tissage dans les Vosges. Le 26 octobre 1942, rue du Plat à Lyon, assomme Mme Pastre, bijoutière, à coups de bouteille remplie d’eau, puis vole bijoux et 12.306 francs en billets dans le coffre. Avant de partir, il égorge sa victime d’un coup de rasoir. 21 novembre 1943 21 mars 1944 Mardi,
6h10, 6h12 Rouen
Seine-Inférieure André d’Almeda
et
Jean-Louis Lebaudy 19 et 26 ans. Trafiquants de marché noir, attirent dans un guet-apens Emilienne « Milou » Bénard, 20 ans, le 25 janvier 1943 à Sotteville, l’assomment à coups de nerf de boeuf, lui tapent la tête sur le sol, puis la poignardent d’un coup de couteau dans la poitrine avant de jeter son corps dans la Seine. La jeune fille était leur complice, mais soupçonnée d’avoir trahi pour une bande rivale, sa mort fut décidée par le chef Wegener, Luxembourgeois, qui paya le crime 1500 francs à chaque assassin. Wegener fut lui-même abattu par les Allemands quelque temps plus tard. 22 novembre 1943 14 avril 1944 Vendredi,
6h15 Lons-le-Saunier
Jura Gilbert Gsegner 19 ans, ouvrier agricole. Agresse le 25 février 1943 à Nance Edouard Gallet, 71 ans, fermier, en le frappant à coups de gourdin parce qu’il avait dit du mal de son père. Assomme mortellement à coups de sabot, le 24 avril 1943 à Nance, Mlle J., fermière de Nance, pour lui voler 535 francs. 07 décembre 1943 16 juin 1944 Vendredi,
5h12 Douai
Nord Emile Malle
et
Florent Masson

Léon Deplette

19 ans et 20 ans, ouvriers agricoles. Le 13 juillet 1943, à Rety, étranglent Thérèse Lecoustre, 29 ans, son fils Alphonse, 4 ans, et leur bonne Madeleine Delature, 20 ans, avant de dérober 180.000 francs et de mettre le feu à la maison. Condamnés à Saint-Omer, arrêt cassé, rejugés dans le Nord.

20 ans, garde-voies. Le 21 mai 1943 à Villers-Pol, s’introduit par effraction chez les époux Drevet-Mercier, ramasseurs de beurre, et leur fille, Mme Jouveneau, et les blesse grièvement à coups de hache avant d’être désarmé et ligoté par ses victimes. Accuse un complice et collègue, Arthur Drecq, 59 ans, qui sera acquitté.

Premières exécutions d’assises par fusillade. Exécutés au stand de tir de la porte d’Esquerchin. 18 septembre 1943, 28 janvier 1944 ; 26 janvier 1944. 04 juillet 1944 Mardi,
5h15 Beauvais
Oise François Grzasik 23 ans, bûcheron, Polonais. Voleur récidiviste, échappe aux gendarmes après une arrestation, et se réfugie le 18 février 1943 chez un ami, Georges Wontzan, 64 ans, Russe, bûcheron aussi. Wontzan lui sert à manger, mais refuse de le cacher. Grzasik le pousse dans les escaliers avant de le frapper de trois coups de marteau sur le front. Après cela, il met le corps sur le lit, l’enduit de graisse, le recouvre de linge et de bois et tente de l’incinérer. Il s’enfuit avec les habits, les souliers et les papiers d’identité de sa victime. Fusillé dans l’enceinte de la maison d’arrêt. 6 décembre 1943 29 juillet 1944 Samedi,
5h35 Arras
Pas-de-Calais Fernand Varlet 18 ans, ouvrier agricole à Maninghem Henne, séduisit la domestique Denise Ringot, 20 ans, puis sa patronne Jeanne Duflos, 32 ans, et fit une fille à la première et un garçon à la seconde. Etouffe avec un oreiller en 1942 le petit garçon qu’il avait eu avec la fermière. Le 28 juillet 1943, assomma et pendit Denise, seul témoin du crime, pour faire croire à un suicide. Sans déclarations, demande à entendre la messe du père Roy. Fusillé au stand de tir des Carabiniers d’Artois. 15 septembre 1943, 24 février 1944 06 octobre 1944 Vendredi,
7h30 Nancy
Meurthe-et-Moselle Auguste Levang 25 ans, domestique de culture. Etrangla Mme Reutenauer le 15 mai 1943 à Xousse parce que celle-ci s’opposait à son futur mariage avec sa fille Margot, avant de voler ses économies. Marguerite Reutenauer, 18 ans, sa maîtresse et complice, est elle aussi condamnée à mort, vit son arrêt cassé. Rejugée à Saint-Mihiel en avril 1944, elle fut une seconde fois condamnée à mort, puis graciée. Fusillé dans l’enceinte de la maison d’arrêt. 25 octobre 1943 10 octobre 1944 Mardi,
6h35 Arras
Pas-de-Calais Albert Debuschère 28 ans, Belge, manoeuvre. Poignarde à 34 reprises, dont 12 fois mortellement, Eliane Masset-Devay, 21 ans, mère de deux enfants de 5 et 1 ans, enceinte, pour se venger d’avoir été éconduit, le 8 décembre 1943 à Aire-sur-la-Lys. Réveillé à 5h15. Accepte d’entendre la messe de l’aumônier Roy. Au greffe, fume une cigarette. Insiste pour bien avoir les yeux bandés car il ne veut pas voir les fusils du peloton. Fusillé au stand de tir des carabiniers d’Artois. 12 mai 1944 15 novembre 1944 Mercredi,
7h Le Mans
Sarthe Fernand Clavier 62 ans, ramoneur. Viole et tue le 9 mai 1942 à Marçon la petite Andrée Fourmont, 2 ans et demi. Le corps sera retrouvé le 22 mai suivant dans un bois à Dissay-sous-Courcillon. Premier procès le 26 septembre 1943, l’affaire est renvoyée au mois de mars 1944. Réveillé par le procureur Forgeois. Dormait bien. Nie toute culpabilité, tout comme au procès. Boit une tasse de café, fume plusieurs cigarettes. Refuse d’entendre la messe. Yeux bandés, reste debout, immobile, à six mètres du peloton. Derniers mots : « Au revoir, tout le monde ! Au revoir, Maître Juge ! Au revoir, monsieur le prêtre ! » Fusillé au stand de tir du Polygone. 25 mars 1944 26 janvier 1945 Vendredi,
8h10 Clermont-Ferrand
Puy-de-Dôme Michel Jacquot 23 ans, mécanicien ajusteur. S’introduit dans la nuit du 7 au 8 février 1943 dans le casino de Royat, servant d’entrepôt du Secours National, et surpris en plein cambriolage par le gardien, Jean-Baptiste Echaville, 52 ans, l’agresse, l’attache et le bâillonne avant de lui casser la tête à coups de pince universelle, puis de manche de hache. Butin : six caisses de sardines, cinq de lait Nestlé, 1 caisse de chocolat et un sac de pâtes alimentaires. Lui et ses complices sont arrêtés le lendemain alors qu’ils tentent de revendre leur marchandise. Gabriel Deschins, 15 ans, est condamné à vingt ans d’emprisonnement. Sa mère, Claudine Meunier, épouse Deschins, 37 ans, receleuse, est acquittée. Fusillé à la poudrière de Crouël. 27 octobre 1944 17 février 1945 Samedi,
7h40 Angers
Maine-et-Loire Auguste Raymond Pied 34 ans, cultivateur. Le 30 octobre 1943, à Noyant-Méon, abat son épouse Yvonne Peltier, 32 ans, d’une balle en pleine tête et fait passer la scène de crime pour un cambriolage afin de refaire sa vie avec sa voisine. Reçoit les secours de la religion. Meurt avec courage. Fusillé dans la cour de la maison d’arrêt. 25 novembre 1944 08 mai 1945 Mardi,
5h30 Melun
Seine-et-Marne Joseph Walter 21 ans, manouvrier. Tua d’un coup de couteau dans la gorge Jean-Marie Zimmer, 74 ans, rue Aristide-Briand à Meaux, le 22 novembre 1943, pour lui voler 70 francs et des vêtements. Fusillé au stand du champ de manoeuvres. 23 janvier 1945 12 mai 1945 Samedi,
6h Bastia
Corse Léo Luca Collura 24 ans, soldat à la 9e compagnie du 5e régiment de Génie Italien, coiffeur. Assassinats et destruction d’édifice. Fusillé au quartier Saint-Joseph. 23 décembre 1944 06 juin 1945 Mercredi,
7h15 Le Mans
Sarthe Eugène Pontonnier 29 ans, ouvrier agricole. Assomme à coups de gourdin, le 22 octobre 1943, à la ferme du Lierret, à Neuville, Yvonne Letourneau, 17 ans, fille de son employeur, et la grand-mère de celle-ci, Mme veuve Bazoge, 75 ans, pour les voler, avant de les étrangler avec une corde. Fusillé. Très courageux devant le peloton. 14 mars 1945 12 juillet 1945 Jeudi,
6h Déols
Indre Sébastien Schartier 37 ans, vannier, sans domicile fixe. Assassine de trois coups de hache, dans la nuit du 16 au 17 novembre 1940 à Saint-Plaisir (Allier), Jean Aupetit, 74 ans, pour lui voler quelques centaines de francs – et passant accessoirement à côté d’un butin autrement plus conséquent mais mieux dissimulé. Condamné en première instance par les assises du Puy-de-Dôme et de l’Allier, arrêt cassé, condamné en seconde instance par les assises de l’Indre. Nicolas Martin, 36 ans, est condamné aux travaux forcés à perpétuité. Fusillé au lieu-dit « Le Grand-Verger ». 12 janvier 1944, 23 mars 1945 26 juillet 1945 Jeudi,
5h55 Caen
Calvados Martial Fernand Villerel
et
Roland Auguste Malbranche 31 ans, manoeuvre, et 23 ans, commis boulanger, demeurant tous deux à Lisieux. Attaquent à l’heure du coucher, le 7 novembre 1943 au hameau de la Picoterie, à Saint-Martin de Mailloc, Mme veuve Blanche Quentin, 74 ans. Après que Villerel l’ait prise à la gorge, Malbranche la poignarde à deux reprises dans la poitrine, avant de l’étrangler avec un lacet et de lui donner deux coups de pied dans la tempe. Lui volent 50.000 francs, des bijoux, dînent sur place et dérobent également 5 kgs de viande de veau, du beurre et du saucisson. Mme Villerel est condamnée pour complicité à cinq ans de prison avec sursis. Réveillés à 4h45 par le conseiller Boîte, président de la cour d’appel. Villerel est très ému, Malbranche ne réagit pas. Se confessent, entendent la messe et communient. Ecrivent à leur famille, fument une cigarette et boivent un verre de rhum. S’entretiennent avec leurs avocats. Vont d’un pas ferme aux poteaux d’exécution dressés dans l’enceinte de la maison d’arrêt. Se laissent bander les yeux avant d’être fusillés par un double peloton militaire. 19 avril 1945 11 septembre 1945 Mardi,
6h45 Saint-Mihiel
Meuse Marcel Bonnerave
et
Henri-Jean Da Costa 28 et 21 ans, ouvriers agricoles. Assassinent à coups de couteau le 24 juin 1944 à Vassincourt Marguerite Baillot et ses filles Monique, 13 ans, et Michelle, 6 ans pour les voler, puis mettent le feu à la maison. Fusillés au terrain militaire de la Vaux Racine. 12 juillet 1945 17 novembre 1945 Samedi,
8h10 Ergué-Armel
Finistère Joseph Eliès Docker, habitant Lambezellec, déjà condamné deux fois. Le 18 décembre 1943, agresse pour la voler Mlle Brest, epicière rue de la Vierge à Quimper, la blessant, mais doit s’enfuir à cause de ses cris. Récidive le 07 avril 1944, mais cette fois, tue Mlle Brest à coups de hache. Arrêté et incarcéré après ses aveux, libéré avec tous les autres détenus le 13 août 1944. En profite pour se réfugier à Lothey, où il est à nouveau arrêté en octobre. Réveillé par le substitut Massé. Aucune émotion. Refuse les secours de la religion. Demande à Me Roudaut, son avocat, une cigarette, qu’il fume avant de quitter sa cellule. Sur place, refuse qu’on lui bande les yeux. Fusillé au champ de tir d’Ergué-Armel sur le Frugy. 13 octobre 1945 13 février 1946 Laon
Aisne Sandor « Alexandre » Szabo 25 ans, Hongrois, chauffeur. Ayant travaillé en 1943 pour l’organisation Todt avec M.Zaigle, propriétaire à Trosly-Loire, il harcèle ce dernier pour que celui-ci l’embauche. Face à ses refus répétés, le 10 juin 1944, il tue Mme Zaigle de quatre coups de plantoir dans la tête, puis fait subir le même sort à son époux, avant de fouiller la maison et de voler 153.000 francs. Fusillé. 06 novembre 1945 30 mars 1946 Samedi,
6h15 Saint-Nicolas de Coutances
Manche Gaston
« Jean Guyot »
Hamel 24 ans, manoeuvre. Attaque et frappe à coups de hache le 31 janvier 1942 à Varouville Mme veuve Léonie Anquetil, cabaretière, pour lui voler 10.000 francs. La vieille dame meurt à l’hôpital de Cherbourg le 09 février. Condamné à mort par contumace le 15 mars 1944. Fusillé. 13 décembre 1945 30 mars 1946 Samedi,
6h30 Petit-Couronne
Seine-Inférieure Ernest Georges Augustin Thomas 25 ans, ouvrier agricole à Hautot-le-Vatois. Ayant obtenu des uniformes de la Wehrmacht, s’en sert avec ses complices, son frère Gilbert Thomas et Séraphin Dufresne, 20 ans, ouvriers agricoles chacun, pour piller des fermes aux alentours. Attaquent dans la nuit du 09 au 10 août 1944 la ferme de Mme Deschamps à Ecretteville-lès-Baons, et volent 33.000 francs et du beurre. Le même soir, à la ferme des époux Lemarchand, à Bermonville, dérobent 19.000 francs, puis 2.000 francs chez M.Biard. Dans la nuit du 21 au 22 août 1944, attaquent la ferme Turmel à Baons-le-Comte. Réclament 22.000 francs et menacent Mme Turmel, enceinte, et son plus jeune enfant. Surpris par la réaction de défense de la fille aînée et du père, qui lui sautent dessus pour le désarmer, Thomas blesse d’un coup de feu la mère à l’épaule. Turmel, assommé d’un coup de pied au menton par Dufresne, est abattu d’un coup de revolver par Thomas. Il décède le lendemain à l’hôpital d’Yvetot. Séraphin Dufresne est condamné aux travaux forcés à perpétuité. Gilbert Thomas est condamné à six ans de réclusion. Réveillé par l’avocat général. Communie en compagnie du chanoine Farcy. Fusillé au Madrillet, à la lisière de la forêt du Rouvray. Meurt courageusement. 27 novembre 1945 25 mai 1946 Samedi,
5h07 Paris Marcel André Henri Félix
Petiot
49 ans, docteur en médecine, ancien maire de Villeneuve-sur-Yonne, ancien conseiller général de l’Yonne, tueur en série. Soupçonné d’avoir, en 1926, assassiné sa domestique et maîtresse, Louise Delaveau, enceinte de ses oeuvres et qu’il n’avait pas l’intention d’épouser. Soupçonné également, le 11 mars 1930, d’avoir tué à coups de couteau sa patiente, Mme Debauve, gérante de la Coopérative Laitière, avant de lui dérober 280.000 francs et de mettre le feu à la Coopérative pour faire disparaître ses traces. Dans le mois qui suit, M.Frascot, cabaretier, qui affirmait avoir vu le maire garé près de la Coopérative au soir du sinistre, meurt quelques heures après avoir bénéficié d’une consultation gratuite de la part de Petiot, lequel lui a administré une injection contre ses rhumatismes. Perd en 1931 son mandat de conseiller général suite à une fraude à l’électricité. Condamné pour l’assassinat de 26 personnes (inculpé de 27 meurtres, lui-même en revendiquait 63) entre janvier 1942 et mai 1943. Se prétendant passeur en zone libre sous le pseudonyme de « Docteur Eugène », il attire chez lui la nuit, 21, rue Le Sueur à Paris, des malheureux cherchant à échapper à la police allemande, en les priant d’apporter avec eux leurs biens et leurs richesses. Le MO n’a jamais été vraiment connu, mais on suppose que, sous couvert de traitement médical, il leur injectait un poison mortel ou bien les enfermait dans un minuscule réduit servant de chambre à gaz, dont la porte munie d’un judas lui permettait d’assister aux agonies de ses victimes. Après cela, il découpait les corps, les brûlait dans un calorifère, les dissolvait dans la chaux vive ou bien les jetait dans la Seine. Le 2 janvier 1942, son voisin, le fourreur juif Joachim Guschinow, devient la première victime de son entreprise de meurtre à grande échelle. Petiot empoche au passage les 2.000.000 de francs en diamants qu’emportait Guschinow avec lui. Les trois victimes suivantes disparaissent pour avoir impliqué Petiot dans une affaire de deal de morphine. Jean-Marc Van Bever, 40 ans, souteneur, dont la maîtresse et gagneuse était cliente de Petiot, est tué le 22 mars 1942. Raymonde Baudet, toxicomane, et sa mère Marthe Khayt, disparaissent ensemble aux alentours du 25 mars 1942. Venue pour un avortement, Denise Hotin, 28 ans, ne donne plus signe de vie à compter du 6 juin 1942. Le docteur Paul-Léon Braunberger, 66 ans, Juif, cherchant à gagner la Zone libre, quitte son domicile à jamais le 20 juin 1942. Kurt Kneller, juif allemand installé en France depuis 1933, disparaît le 18 juillet. Son épouse Margareth et leur fils René, 7 ans, sont victimes du tueur le 19 juillet (le corps de l’enfant fut probablement repêché mais jamais identifié dans la Seine, dépecé, le mois suivant). En août, Petiot entre en relations avec des malfrats voulant rejoindre l’Amérique du Sud. François « Le Corse » Albertini et la prostituée Claudia « Lulu » Chamoux le suivent, puis quelques jours après Joseph « Jo le Boxeur » Réocreux et sa compagne Annette Basset. En novembre 1942, Petiot tue les époux Maurice et Lina Woolf, juifs allemands, ainsi que Rachel, la mère de Maurice. Faisant connaissance quelques jours plus tard des nouveaux occupants de l’appartement des Woolf, les époux Gilbert et Marie Johanna Basch, juifs hollandais cachés sous la fausse identité de Baston. Ceux-ci envisagent de quitter le pays, mais pas sans leur famille, réfugiée à Nice. En janvier, les époux Schoenker et Ehrenreich, parents et oncles de la jeune Mme Basch, rejoignent le couple à Paris. Petiot fait disparaître les parents en premier, puis les Basch huit jours plus tard. Recontacté par la pègre, il a affaire à des gens plus dangereux qu’avant : Adrien « Le Basque » Estebeteguy, 45 ans, malfaiteur et assassin à la solde de la Gestapo française disparaît en mars 1943 avec sa compagne Joséphine Grippay, dite « Paulette la Chinoise ». 24 heures plus tard, le cas du souteneur Joseph « Zé » Pierreschi et de Gisèle Rosny est réglé définitivement. Les autorités allemandes, certaines d’avoir affaire à un réseau de passeurs, tendent un piège à Petiot en mai en lui expédiant une « chèvre », Yvan Dreyfus, résistant juif et prisonnier de guerre. Hélas pour lui, le jeu de piste s’achève sur un échec, et les Allemands perdent sa trace, faisant de lui la dernière victime du docteur le 19 mai 1943. Retentant l’expérience avec succès à la fin du mois, les Allemands arrêtent Petiot, l’envoient à la prison de Fresnes, le torturent mais en vain. Il est libéré début 1944, et s’empresse de faire disparaître les restes de ses victimes, occasionnant le 11 mars 1944 un feu de cheminée nauséabond qui incite les voisins à prévenir pompiers et police, lesquels découvrent l’ampleur de ses crimes… Fuyant de justesse, Petiot reste caché sous une fausse identité, celle du docteur résistant Henry Wetterwald, alias « Capitaine Valéry » avant d’être arrêté le 31 octobre 1944. 04 avril 1946 29 mai 1946 Mercredi,
5h45 Foix
Ariège Roger Mathe PARRICIDE, 22 ans, cuisinier. Le 25 décembre 1945, à Pamiers, à coups de couteau sa grand-mère, domestique, et Mme Gayraud, la patronne de celle-ci pour voler 12.500 francs, et il brûla ensuite la maison pour dissimuler son crime. Fusillé au champ de tir, route de l’Herm. 21 février 1946 19 juin 1946 Mercredi,
7h Le Mans
Sarthe Louis Nail 42 ans, marchand de balais et de peaux de lapins. Déjà condamné à vingt-et-une reprises pour vols. Libéré de prison le 20 avril 1945, se rend le lendemain à Clermont-Créans où il agresse Pierre Bressin, septuagénaire, boucher à la retraite. Après l’avoir frappé à coups de poing et de bouteille, le tue avec un rouleau de voiture avant de dérober son portefeuille, du linge et des vivres. Fait preuve de courage. Se confesse, communie. Fume plusieurs cigarettes, refuse le verre de rhum. Fusillé au stand de tir du Polygone. 13 mars 1946 26 août 1946 Lundi,
6h30 Marseille
Bouches-du-Rhône Antoine David 53 ans, chef de garage. Au cours d’une dispute conjugale, le 30 janvier 1944 à Martigues, assomme son épouse Louise Sciorato, et décide – bien qu’elle ne fut pas morte – de se débarrasser du corps, qu’il décapite à coups de hache et enferme dans un sac qu’il jette dans l’embouchure du Rhône, où il est retrouvé le 2 mars suivant. Arrivant sur place, déclare : « La mer est belle, ce matin. » Demande qu’on ne lui bande pas les yeux, mais faveur refusée. Face au peloton, derniers mots : « Adieu Nine, adieu les Martigues ! » Fusillé au terrain militaire de Malmousque. 04 mai 1946 27 août 1946 Mardi,
6h Petit-Couronne
Seine-Inférieure André Emile Choulant 46 ans, charretier. Durant l’absence de son patron, Lucien Lepelletier, fermier à Ectot-l’Auber, prisonnier de guerre, devient l’amant de Fernande Votte, épouse Lepelletier, de dix-neuf ans sa cadette. Lucien est rapatrié le 1er juin 1945. Le 30 août 1945, étrangle Lucien dans son sommeil et part enterrer le corps dans un champ distant d’un kilomètre. Le 3 septembre, sentant l’arrestation imminente, Fernande se suicide en se jetant dans un puits. Réveillé à 5h15. Communie. Montre un courage qui surprend les assistants tant il s’était montré lâche durant le procès. Refuse qu’on lui bande les yeux. Fusillé au champ de tir du Rouvray, lieu-dit le Madrillet. 17 mai 1946 28 août 1946 Mercredi,
7h Limoges
Haute-Vienne Jean Schmitt 29 ans, vannier. Tua Marguerite Berthé, 73 ans, à La Péruse (Charente), le 13 février 1945, à coups de bêche, pour lui voler 1.000 francs et un morceau de lard. Son beau-père, Jean Winterstein, gitan, est condamné à cinq ans de travaux forcés. Arrêt rendu par les assises de Charente, cassé, second procès dans la Haute-Vienne. Conduit à la mort tremblant. Fusillé dans les carrières de Malabre. 01 février 1946, 14 mai 1946 11 septembre 1946 Mercredi,
7h05 Orléans
Loiret Edouard Georges Girard PARRICIDE. 47 ans, ancien légionnaire, membre de la LVF. Le 27 mai 1944 à Lailly-en-Val, tue sa mère, Marie Julienne Cizeau, veuve Girard, 73 ans, à coups de binette parce qu’elle lui refusait de l’argent, et dérobe 12.000 francs qu’il dépense en alcool. Réveillé à 6h. Très calme. Aucune déclaration, refuse d’écrire. Se confesse. Fume cigarette sur cigarette durant le trajet jusqu’au lieu d’exécution. Fusillé au lieu-dit « Les Groues », une ancienne carrière ayant servi aux exécutions de résistants par l’armée allemande. 02 mai 1946 14 septembre 1946 Samedi,
6h45 Petit-Couronne
Seine-Inférieure Marcel Ange Joseph Benset 24 ans, valet de ferme à Roman (Eure). Devenu en l’absence de M.Thibault, son patron, prisonnier de guerre, l’amant de Suzanne Noury, épouse Thibault, 26 ans. Parti faire son service en avril 1945, planifie avec sa maîtresse d’empoisonner le mari gênant. Prévenu par le père de Benset des manoeuvres criminelles des amants, Thibault avertit la justice, soulevant des questions sur une vieille affaire. Deux ans plus tôt, le 29 novembre 1943, les amants avaient supprimé la mère Thibault, 57 ans, l’étranglant avec une courroie de cuir avant de la jeter dans une mare pour faire croire à un suicide. Motif : elle avait vent des relations adultères de sa bru, qu’elle sermonnait sans cesse en promettant de ne rien cacher à son fils quand celui-ci reviendrait. Suzanne est condamnée à perpétuité. Condamné en première instance dans l’Eure, arrêt cassé, rejugé dans la Seine-Inférieure. Réveillé à 6h15. Apprend la nouvelle avec calme. Communie, écrit plusieurs lettres. Arrivé sur place, refuse de se laisser bander les yeux. Embrasse le chanoine Farcy, aumônier de la prison, et son avocat, Me Labéda. Fusillé au champ de tir du Rouvray, lieu-dit le Madrillet. 01 février 1946, 27 mai 1946 27 novembre 1946 Mercredi,
8h15 Périgueux
Dordogne Jean Georges Jules Chérifert 37 ans, valet de ferme. Comme elle refusait de lui donner une augmentation, fracasse d’un coup de barre de fer le crâne de sa patronne, Mme Desplanches, le 20 janvier 1946 à Puy-Mousy, près d’Agonac, et vole de l’argent et des objets. Tire plusieurs coups de feu sur les gendarmes sans les atteindre lors de son arrestation. Debout depuis 4 heures. Les officiels entrent à 7h40. Comprend aussitôt, sourit. Parle à l’aumônier Cipierre, fait un brin de toilette. Fume une cigarette offerte par le gardien-chef. Au greffe, consomme avec un plaisir évident un verre de café chaud agrémenté d’une « goutte » d’eau-de-vie, commentant : « Ca va chasser le brouillard. » Aucune déclaration à faire au juge d’instruction. Attaché à genoux au poteau, au stand de tir de la garnison. Coup de grâce tiré par l’adjudant Déchamps. 29 juin 1946 10 décembre 1946 Mardi,
8h05 Mont-de-Marsan
Landes Alexis Ducasse Le 30 décembre 1945, à Yzosse, tue de cinq coups de hache la veuve Darregert, née Emma Saint-Jean, pour la voler. Réveillé à 7h. Se dit innocent. Entend la messe, boit un verre de rhum et fume une cigarette. Départ de la prison à 7h20. Fusillé dans une carrière voisine du terrain d’aviation. 09 juillet 1946 12 décembre 1946 Jeudi,
7h50 Paris Michel Roblès 28 ans. Le 24 octobre 1942, rue des Abbesses, tua à coups de bouteille Mme Gabrielle Fauvet, épouse d’un co-détenu, pour lui voler 60.000 francs. 28 juin 1946 13 décembre 1946 Vendredi,
8h15 Arras
Pas-de-Calais Franklin Cappel 57 ans, ouvrier agricole à Essars-les-Béthune. Le 20 décembre 1945, va chercher à la gare de Béthune sa patronne, Marie Leblanc, 59 ans, qui revenait de Lille. En chemin, l’étrangle avec le foulard qu’elle portait, enterre le corps près du sentier, et pille la maison volant 725 francs. Fusillé au Stand des Carabiniers d’Artois. 02 août 1946 14 décembre 1946 Samedi,
8h10 Dijon
Côte-d’Or Albert Schrodi 30 ans, militaire de carrière. Alsacien, maquisard, connu pour sa violence et son alcoolisme. Ayant volé en juillet 1945 à M.Givord, cafetier à Cuiserey, un portefeuille contenant 2.000 francs, est appréhendé le lendemain à Brienne par le gendarme Monestier qu’il abat de trois coups de revolver. Fusillé dans la cour de la maison d’arrêt. 03 mai 1946, 02 août 1946 17 décembre 1946 Mardi,
7h50 Paris Henri Paul Audinet 32 ans, sans profession. Le 13 octobre 1944, tua à Enghein à coups de marteau M. et Mme Deville, pour leur voler 3800 francs. La femme était sa cousine. Condamné en Seine-et-Oise. 11 juillet 1946 17 décembre 1946 Mardi,
8h15 Epinal
Vosges André Charles Geny PARRICIDE. 27 ans, radio-électricien. Le 14 octobre 1945, à Dombrot-le-Sec, tue ses grands-parents à la serpe et à la hache avec l’aide de sa maîtresse Renée Lefèvre, 24 ans. Lefèvre fut condamnée aux travaux forcés à perpétuité. Temps de neige. Se réveille une première fois à 5 heures. Se rendort. Réveillé par le substitut Nicolas à 7h20. Très calme. « Je me doutais que j’allais mourir aujourd’hui. Hier, j’avais eu trois visites. Cela ne m’était jamais arrivé. » Communie, parle un quart d’heue avec l’abbé Aizier, ce dernier ne procédant pas à la messe pour éviter de prolonger les préparatifs. Fume une cigarette, boit deux verres de rhum. N’écrit aucune lettre : n’a plus de famille. Offre sa montre à l’aumônier. Franchit à pied les portes du fort de Razimont, et va droit au poteau, sans hésitation. Embrasse le prêtre et son avocate, Me Loewenstein. Yeux bandés. La salve l’atteint du côté gauche. Trois minutes s’écoulent avant le coup de grâce : l’arme de l’adjudant Ouvrard, commandant le peloton de tirailleurs nord-africains, est enrayée. Un gardien de la paix prête son arme. 26 septembre 1946 18 décembre 1946 Mercredi,
8h Agen
Lot-et-Garonne Mohamed ben Amar ben Ali,
Belkacem ben Amar ben Hacine
et
Rahar ben Dadjouche 31 ans, 30 ans et 27 ans, fournisseurs de marché noir. A Gourdon, dans la nuit du 22 au 23 décembre 1945, attaquent les époux Rhodes, Edouard, 35 ans, cordonnier, avec lequel ils étaient en affaire, et sa femme Danielle, 21 ans. Danielle a la tête fendue à coups de hache, pendant que Rhodes est ligoté et torturé, la plante des pieds brûlée avec une lampe à pétrole, pour révéler où il cache des économies. Les bandits l’achèvent en lui fracassant la tête avec un pied de travail en fer. Le petit Jean-Michel, quinze mois, qui pleurait dans son berceau, est tué de deux coups de hache et survit une heure à ses blessures. Leur seul butin : les robes de Mme Rhodes, évaluées à 3000 francs, et conservées par Belkacem, qui donne 1000 francs à chacun de ses complices et garde les vêtements pour les offrir à sa maîtresse. Condamnés à Cahors. Fusillés au Polygone de la Garonne. Au réveil, Mohamed se montre courageux, Belkacem résiste au moment de se faire attacher, et Rahar pousse des gémissements. 28 juin 1946 30 janvier 1947 Jeudi,
8h Bourges
Cher Jean-Baptiste Raffault PARRICIDE, 34 ans, journalier. Tua au hameau de Cottenson, près de Saint-Maur, le 16 mai 1946 sa mère, Marguerite Leneigre, veuve Raffault, agée de 69 ans, à coups de gourdin pour lui voler quelques pièces, des billets et du linge. Réveillé à 7h45. Très calme, à la différence de son co-détenu Candela, tremblant qu’on ne vienne pour lui. Très rapide : refuse secours de l’aumônier, boit une tasse de café, fume plusieurs cigarettes, en particulier durant le trajet de la prison au lieu d’exécution. Arrivé au point zéro du Polygone de Bourges, refuse qu’on l’attache et qu’on lui bande les yeux, mais n’obtient pas satisfaction. Continue à fumer tant qu’on le prépare, crache sa cigarette quand on lui met le voile noir sur la tête. Passé par les armes par les soldats de l’Ecole du Matériel. 23 octobre 1946 16 avril 1947 Mercredi,
5h Bourges
Cher Rodriguez Candela-Alfonsa 45 ans, bûcheron. Le 15 août 1944, à Vannes-sur-Cosson, abat les époux Voisin à coups de revolver parce qu’ils ont venu 1/2 litre de lait au lieu d’un litre ! Traumatisée, Mlle Chevalier, témoin de la scène, mourra folle à l’asile peu de temps après. Condamné à Orléans, arrêt cassé, rejugé à Bourges. Première sortie de la guillotine en province depuis 1944. Du réveil à l’échafaud, très calme. Refuse presque tout : l’assistance du prêtre, le rhum, l’autorisation d’écrire une dernière lettre. Fume une cigarette. Entraîné vers la bascule, crie : « Vive la Républiques, camarades ! » 22 janvier 1946, 29 janvier 1947 11 juin 1947 Mercredi,
4h57, 4h59 Paris Albert François Roger Brunet

Alain Bernardy de Sigoyer

Brunet, 26 ans, cuisinier. Le 15 novembre 1945, après avoir attaqué la caissière d’un cinéma, Brunet abat l’agent Geoffre d’une rafale de mitraillette (25 balles) boulevard de la Chapelle.

Bernardy, 41 ans, marquis, propriétaire d’un commerce de vins. Suspecté de meurtre en 1937. Etrangle sa femme Jeannine Kergot, 23 ans, le 28 mars 1944, à son domicile boulevard de Bercy, avant de l’enterrer dans son chai. Dénoncé par Mme Kergot mère, qui avait été sa maîtresse : possibilité cependant que le crime ait été commis par Irène Lebeau, alors âgée de 22 ans, nurse du couple et maîtresse d’Alain, qui aurait abattu sa rivale d’une balle en plein coeur lors d’une querelle de jalousie.

20 janvier 1947 et 24 décembre 1946 17 juin 1947 Mardi,
4h35 Mont-de-Marsan
Landes René Discazeaux 41 ans, cultivateur. Le 15 juin 1945, à Labatut, incite un adolescent, Gilbert Pernot, à assassiner un ancien gendarme Frédéric Fargues avec lequel il était en conflit. Le jeune criminel est condamné à dix ans de prison. 17 juillet 1946 19 juin 1947 Jeudi,
4h14, 4h16 Limoges
Haute-Vienne Lucien
« Antonio Santicci »
Jacquet
et
Jean Julien
« Romagny »
Jacquet 26 et 25 ans. Originaires du Nord, fondateurs d’un faux maquis en Haute-Vienne en 1943, composé d’une quarantaine de repris de justice. A compter du 10 février 1943, auteurs d’au moins 59 crimes et délits, d’abord en Haute-Vienne, puis dans le Nord, où les deux frères se réfugient en mars 1944 : spécialisés dans les attaques nocturnes de fermes isolés, mitraillettes à la main. Abattent d’une balle en plein coeur, le 10 février 1944 à Isle, Jean Moreau, 71 ans, cultivateur, qui cherchait à les faire fuir, et blessent gravement son fils qui se précipitait à son secours. Leur principal complice, René Lesport, est condamné à perpétuité. Au réveil, apprennent la nouvelle sans émotion. Ecrivent plusieurs lettres. Entendent la messe, communient. Jean passe le premier, à sa demande, car il souhaite « montrer le chemin à son frère ». Lucien le suit deux minutes après. En franchissant le seuil, il salue le gardien-chef : « Au revoir, chef, et sans rancune. » Puis, au pied de la machine, s’exclame : « Ah, c’est ça, la Veuve ! » 06 décembre 1946 25 juin 1947 Mercredi,
4h57 Paris Mohamed ben Salah 26 ans, tirailleur Marocain. Tua d’un coup de couteau en pleine poitrine Marie Raubert, veuve Marty, avenue Gambetta le 5 septembre 1945, pour la voler. Blesse gravement Laure Prieur, infirmière de l’hôpital Trousseau dans les mêmes circonstances le 17 septembre 1945, rue Santerre. 17 décembre 1946 28 juin 1947 Samedi,
4h Melun
Seine-et-Marne Roger Pelleman 20 ans. Tua à coups de barre de fer Joseph Destiné, 69 ans, mécanicien, à Meaux, pour lui voler 20.000 francs le 8 novembre 1945. Le 01 février 1946, à Nanteuil-les-Meaux, avec son complice Raoul Sequevale, assassine à coups de barre de fer M.Dehus, fermier au lieu-dit « Charmont » et Mme Vasselle, sa compagne, pour leur voler 4000 francs. Sequevale est condamné à perpétuité. Réveillé à 3h30 par le substitut Legentil. Indifférent. Discute un quart d’heure avec l’abbé Harel, communie. Accepte une cigarette de la part du substitut. Va à l’échafaud d’un pas tranquille, tête haute, sans détourner le regard. 06 novembre 1946, 07 novembre 1946 03 juillet 1947 Jeudi,
4h Rouen
Seine-Inférieure Guillaume-Marie Quillerou 21 ans, mouleur. Le 30 janvier 1946, au Havre, assassine de trois balles de revolver le chauffeur de taxi Etienne Fernand pour lui voler sa voiture et son portefeuille. En octobre 1945, lors d’une bagarre au Havre, avait déjà déchargé son revolver sur le soldat Marshall Robinson qui n’avait été que légèrement blessé. Son complice, Bernard Lelargue, est condamné à quinze ans de travaux forcés. Réveillé à 3h30. Ne réagit presque pas. S’habille d’un complet gris. Reçoit les sacrements de l’aumônier Farcy, écrit une lettre à sa famille, à laquelle il joint une feuille de poèmes sur la douleur rédigés durant son incarcération. Boit du café, du rhum, et fume deux cigarettes. 27 novembre 1946 04 juillet 1947 Vendredi,
4h05 Evreux
Eure Charles Robert Raymond Grenier 56 ans, bûcheron à Baux-Sainte-Croix. Violent, infidèle, s’était mis sa femme et leurs six enfants à dos par son comportement. Promet de les tuer en 1944. Abat à coups de fusil le 31 octobre 1945 sa femme Pauline, née Marais, dont il était séparé, et sa fille Christiane, 20 ans, chacune d’une décharge de chevrotines en plein visage. Tente de se pendre en cellule la veille du procès. Meurt courageusement. 31 janvier 1947 05 juillet 1947 Samedi,
4h45 Alençon
Orne Henri Marius Pelletier 26 ans, ouvrier agricole. A Saint-Agnan-sur-Erre, assassina à coups de bêche et de serpe Emile Trichet, 70 ans, le 19 janvier 1946 pour le voler. Réveillé à 3h. Ne comprend pas vraiment ce qui se passe. Horrifié en réalisant. S’entretient avec le chanoine Garnier. Refuse le verre de rhum au greffe. 06 novembre 1946 17 juillet 1947 Jeudi,
5h08 Auxerre
Yonne Constant Gustave Luzeau 24 ans, trafiquant en marché noir, abattit le 19 novembre 1943 à Treigny les époux Bouvard. 05 décembre 1946 25 juillet 1947 Vendredi,
4h15 Angers
Maine-et-Loire Albert Auguste Derré 36 ans. Acquitté quelques années plus tôt du meurtre de l’amant de sa femme. Tue à coups de barre de fer Omer Fourchereau, cordonnier à Antoigné, le 31 juillet 1945, pour lui voler tabac, argent et galoches. Endormi à 3h, réveillé à 3h35. Reste figé sur son lit par la nouvelle. Déchire toutes les lettres reçues durant son incarcération. Refuse rhum et cigarette. « Vous m’avez fait attendre pendant huit mois », proteste-t-il. Refuse de se confesser et d’entendre la messe, mais s’entretient quelques minutes avec le chanoine Uzureau. Serre la main d’Henri Biais, condamné à mort qui partage sa cellule, et lui dit : « Il vaut mieux mourir comme ça. » 28 novembre 1946 26 juillet 1947 Samedi,
4h23 Saintes
Charente-Inférieure René André Andrès 25 ans, ancien résistant du groupe FTP Soleil, où il exerçait le rôle d’exécuteur (à la hache) sur quatorze collaborateurs. Assassine à Poléon (commune de Saint-Georges-du-Bois) à coups de marteau le 20 mars 1946 les époux Jeanneau et M.Ferland, 30 ans, leur domestique, pour voler plus de 2.000 francs. Mme Ferland, 28 ans, elle aussi attaquée de la même façon, demeure partiellement paralysée. Le procureur est obligé de l’appeler trois fois pour qu’il se réveille. S’entretient avec son avocat et un pasteur avant de se laisser « toiletter ». 23 janvier 1947 02 août 1947 Samedi,
4h30 Metz
Moselle Anselme Schuler 23 ans, déjà neuf condamnations pour vols. Tua à Metz le chauffeur de taxi Marcuola pour le voler le 19 juillet 1946. Arrêté alors que, déguisé en femme, charchait à quitter la ville : il fut trahi par ses chaussures, car il n’avait pas trouvé de chaussures à talons qui conviennent à ses pieds. Réveillé à 3h30 par le bruit de la porte qui s’ouvre. Comprend aussitôt. Très courageux, s’habille, range ses affaires, et suit l’aumônier dans une salle voisine de sa cellule afin de s’y confesser et de communier (mis à part cela, ne prononce pas une parole jusqu’à la fin). Au greffe, prend une cigarette et le verre de rhum. Léger mouvement de recul devant la bascule. 05 mars 1947 04 septembre 1947 Jeudi,
5h15 Bordeaux
Gironde Jean-Marie Le Flanchec 40 ans, peintre en bâtiment, délinquant récidiviste, ancien membre honorable du maquis « Soleil ». Etrangla avec un fil électrique une vieille rentière, la veuve Antoine, rue du Rigoulet à Bordeaux, le 20 avril 1946. Lui et son complice Salemme pensaient trouver plusieurs milliers de francs et repartirent avec 420 francs. Salemme est condamné à dix ans de réclusion. 06 mai 1947 09 octobre 1947 Jeudi,
6h32 Arras
Pas-de-Calais Maurice Georges Hérault 52 ans. Le 26 juillet 1946, à Nortkerque, abat Eugène Lammez, son ancien employeur, prisonnier de guerre qui l’avait congédié à son retour de captivité. Réveillé à 5h30. Entend la messe et communie avec le chanoine Bourdrel, aumônier de la prison. 16 mai 1947 25 octobre 1947 Samedi,
6h59 Le Mans
Sarthe Gilbert Tranchard 26 ans, trafiquant de marché noir. Le 13 janvier 1945, tue à Masles (Orne) à coups de marteau M.Dakopoulos, son complice. Le 24 avril 1945, près de Lanneray, étrangle pour la voler une septuagénaire, la veuve Hilaire. Son frère, Louis, est condamné à perpétuité. Condamné d’abord à Chartres, arrêt cassé, puis re-condamné dans la Sarthe. Se montre courageux. Il refuse de pardonner à son frère, et quitte la chapelle pendant l’office religieux. Au greffe, il boit trois verres de rhum et fume deux cigarettes. Il se lance dans une diatribe contre le « milieu » à qui il reproche sa déchéance personnelle. Pendant la toilette, affirme préférer être exécuté par fusillade. 22 octobre 1946, 20 mars 1947 28 octobre 1947 Mardi,
7h01 Caen
Calvados Alexandre Eugène Gaston René Marie 37 ans, garçon de ferme. Viole et étouffe avec son propre cache-nez sa jeune belle-soeur, Georgette Madeleine, 16 ans, jeune vachère de Loucelles le 3 novembre 1946. Marie était épris de sa victime, qui s’était toujours refusée à lui. Réveil à 6h20. Le co-détenu de Marie, Fresnel, condamné quatre jours plus tôt, est plus terrifié que lui par l’arrivée des officiels. Calmement, Marie parle avec son défenseur, l’aumônier, communie, boit un verre de rhum, fume une cigarette. 25 avril 1947 11 décembre 1947 Jeudi,
8h Melun
Seine-et-Marne Lucienne Fournier, veuve Thioux 45 ans, sans profession. Fait jeter dans la Marne depuis un pont son mari, Paul Thioux, 73 ans, le soir de leurs noces, le 02 mars 1946 à Ussy-sur-Marne, et ce afin d’en hériter plus rapidement. Le complice et criminel Jacques Thioux, 23 ans, petit-fils de la victime, amant de Lucienne et de sa fille aînée Odette, sera condamné à vingt ans de prison. Dut être traînée de la cellule à l’échafaud, urina de peur en criant « Je n’ai rien fait ! Je n’ai rien fait ! » 21 avril 1947 16 décembre 1947 Mardi,
8h15 Nantes
Loire-Inférieure Joseph Jules-Marie Lasquellec 61 ans, voleur et violent notoire. Abattit un cultivateur de Donges, Etienne Hémery, le 14 avril 1946, avant de jeter son corps dans un puits vide. Réveillé à 7h. Dit « Je suis prêt ». Entend la messe du père Brisard, et accepte une tasse de café, un verre de rhum, ainsi qu’une cigarette. Exécution RAS. 13 juin 1947 18 décembre 1947 Jeudi,
8h15 Angers
Maine-et-Loire Henri Marcel Biais 32 ans, garçon boucher. A Rochefort-sur-Loire, dans la nuit du 02 au 03 mai 1946, abat d’un coup de revolver dans la poitrine pour le voler Pierre Dabat, 61 ans, marchand forain de sacs et sandales. Repart sans le moindre sou des 600.000 francs escomptés. Son complice, Edgar Blaize, 25 ans, voleur récidiviste, avec lequel il avait commis plus de vingt cambriolages entre Angers et Saumur, est condamné à perpétuité. La maîtresse de Biais, Eliane Defois, 24 ans, est condamnée à cinq ans de prison. Réveil à 7h. Ne dort pas, juste étendu les yeux fermés sur son lit. Pas de réaction. Passe ses vêtements civils, écrit trois lettres destinées à sa famille et s’entretient avec Me Loison, son avocat. Entend la messe du chanoine Uzureau. Au greffe, refuse cigarette et verre de rhum. Avance sans flancher vers l’échafaud. 22 mai 1947 23 décembre 1947 Mardi,
8h10 Riom
Puy-de-Dôme François Anselme Sampietri 23 ans, ajusteur-mécanicien. D’une balle de revolver dans la nuque, tue un chauffeur de taxi de Clermont-Ferrand, M.Anglaret, le 06 août 1946, sur la nationale 9 à un kilomètre environ de Coudes et abandonne le corps sur le bas-côté. La voiture est retrouvée près de Brassac-les-Mines. Après avoir pensé à une vengeance – M.Anglaret, résistant, avait tenu une place de premier ordre dans les comités d’épuration locaux -, simple crime crapuleux, commis pour récupérer 100.000 francs. 19 mars 1947 10 janvier 1948 Samedi,
7h40 Béziers
Hérault Raoul d’Hyon 20 ans, cordonnier, Belge. Massacre à coups de mitraillette Eugène Gouze, son épouse et leurs enfants de 11 et 06 ans, le 28 mai 1946 à Caunes-Minervois, pour leur voler 5000 francs. Prétendra avoir agi au nom de la Résistance en punissant un collaborateur – ce que M. Gouze n’était pas. Réveil à 6h45. Abattu par la nouvelle, se reprend. Entend la messe, communie, écrit à sa mère et demande à ses avocats de corriger ses fautes. Desfourneaux montre un peu d’impatience. Le condamné refuse la cigarette, mais demande un grand verre de rhum et une tasse de café – qui lui sont accordés – avant de se laisser saisir par les adjoints. Exécuté dans l’entrée de la prison (douze mètres depuis la porte). 11 mai 1947 13 janvier 1948 Mardi,
7h44, 7h46 Toulouse
Haute-Garonne Elhadi Bendib
et
Messaoud Bennour 28 et 33 ans, manoeuvres, trafiquants de marché noir. Egorgèrent le 30 mai 1946 leur compagnon Makhlouf Mékidech près du camp de Récébédou, à Portet-sur-Garonne, pour lui voler 3000 francs et 800 cartes de pain. Ils furent arrêtés deux jours après. Elhadi répond qu’il aura du courage jusqu’au bout. Ils prient à la chapelle, en présence d’un imam qui leur précise : « Vous avez tué, vous êtes tués ; c’est écrit dans le Coran. » Elhadi refuse le rhum, car sa religion lui interdit l’alcool, mais accepte la cigarette. Bennour fait de même. Premier à partir, Elhadi dit « Adieu ! » à son complice, et il a un mouvement de recul devant la guillotine. Bennour distingue le corps décapité dans le panier avant d’être basculé à son tour. 03 juillet 1947 15 janvier 1948 Jeudi,
7h45 Agen
Lot-et-Garonne Marius Roger Honoré Gilbert Andrieu 26 ans, bûcheron dans le Lot. Tua à coups de hache MM. Albareil à Montfaucon, Bourzon à Durban et Roux à Arcanbai, tous trois propriétaires terriens dans le Lot, entre mars et juin 1946. Condamné à mort à Cahors. Réveillé à 7 heures. Ne prononce pas un mot. Entend la messe. Au greffe, trempe ses lèvres dans le verre de rhum, puis rend le verre. Prend une cigarette qu’il conservera à la bouche même sur la guillotine. Aucune défaillance, mutisme absolu. 30 mars 1947 17 janvier 1948 Samedi,
7h45 Limoges
Haute-Vienne Louis Raymond Vidalie 24 ans, chauffeur de taxi. Tua le 22 novembre 1946 à Allassac, Jean-Baptiste Gaucher, chauffeur de taxi, pour le voler. Condamné par les assises de Corrèze. Réveillé à 6h. Très calme. Demande à l’abbé Robert s’il peut être baptisé. Requête acceptée. C’est une détenue qui se porte volontaire pour être sa marraine. Cérémonie, messe, communion. Au greffe, après la levée d’écrou, refuse la cigarette, mais boit un verre de rhum. Légère hésitation en déouvrant la machine au bas des marches, dans la cour. Se retourne vers M. de Monsabert, avocat général, à qui il adresse ses dernières paroles : « N’ayez pas de peine, monsieur. Vous avez voulu ma tête. Vous l’avez ! Je vous pardonne. » 04 juillet 1947 29 janvier 1948 Jeudi,
7h10 Tours
Indre-et-Loire Marcel André Arnoult 34 ans, cultivateur. Le 27 mars 1945, à Cormery, brûla vif dans leurs lits ses trois enfants (Pierre, 3 ans et demi, Pierrette, 2 ans, Jacky, onze mois) pour recommencer sa vie avec sa maîtresse. Réveillé à 6 heures, dit « Ah, bien, je vous remercie. » Son voisin de cellule, José Sanchez-Munoz, condamné à mort à Tarbes et qui attend d’être jugé pour un autre crime à Tours, se cache sous les draps. Arnoult lui lance : « Ce sera bientôt ton tour. » Il nie sa culpabilité, refuse la messe mais accepte de se confesser : « Je ne mourrai pas comme un païen, cela fera plaisir à ma mère. » Au greffe, refuse la cigarette, boit un verre de rhum et un café et dit au gardien-chef : « C’est du café perdu. » Il embrasse le chapelet destiné à sa femme et la croix destinée à sa mère, puis embrasse l’aumônier et le surveillant chef en leur disant « Au revoir. » 29 mars 1947 31 janvier 1948 Samedi,
7h30 Tarbes
Hautes-Pyrénées Julian
Agudo-Prieto
et
José
Ramiro-Bernal 32 et 29 ans. Déserteurs de l’armée espagnole, le 22 décembre 1945, se présentent à la ferme Sost à Créchets-en-Barousse. Assomment Mme Rosalie Sost qui refuse de leur donner de l’argent. Son fils Pierre, maire de Créchets, est tué à coups de couteau et de bouteille cassée. Le domestique Joaquin Rick et le voisin Jean Ribes, venus au secours, seront égorgés. Communient et expriment un repentir sincère. 26 septembre 1946 03 février 1948 Mardi,
7h20 Foix
Ariège Michel Pérez 25 ans. Commet une attaque à main armée contre la ferme des époux Jauze, à Aynat, le 5 septembre 1946. Il abat Joséphin Jauze, sa femme, grièvement blessée, succomba quelques jours après. 21 mai 1947 05 février 1948 Jeudi,
7h25 Nîmes
Gard Mohammed Ould Abdelkader Bekkouche 46 ans, manoeuvre à Alès, trafiquant de marché noir. Avec son ami Mohammed Belkacem, au hameau de La Chapelle, à Grandrieu (Lozère), le 20 janvier 1946, abat à coups de revolver M. et Mme Bonnidan, âgés d’une cinquantaine d’années, leur fils André, 14 ans, et la voisine, la Veuve Brun, 74 ans, cousine de Mme Bonnidan. Vole 34.000 francs, deux montres, un briquet et des provisions. Les deux assassins faisaient du marché noir avec M.Bonnidan et voulaient mettre un terme à leur collaboration tout en dévalisant leurs complices et amis. Condamné par les assises de Lozère, arrêt cassé. Belkacem, condamné à mort à Mende, est cette fois condamné aux travaux forcés à perpétuité. Exécuté à la maison d’arrêt. 12 mars 1947, 04 juin 1947 10 février 1948 Mardi,
7h25 Montbrison
Loire Antonio
Rodriguez-Allonzo
et
Luis
Lorente-Turreau 25 et 38 ans, Espagnols, respectivement mineur et manoeuvre à Grand-Croix. Tuèrent l’ancien patron de Lorrente, Jean-Baptiste Vallat, 77 ans, et sa femme, née Marie Gaston, 82 ans, dans la nuit du 04 au 05 décembre 1944 à la ferme du « Plat de Grêle », commune de Marols, à coups de croc à fumier et de fourche, et ce afin de leur voler leur cochon récemment tué. Vallat survécut dix jours à l’agression. Réveillés à 6h30. Lorrente reste impassible, comme au procès. Mécontent, Rodriguez crie de colère, et jure qu’il est innocent et accuse Lorrente d’être le seul et unique responsable du double crime. Se ressaisit les dernières minutes, passées à écrire des lettres à leurs proches. Tous deux meurent courageusement. 26 novembre 1946 12 février 1948 Jeudi,
7h Châlon-sur-Saône
Saône-et-Loire Wladislaw Doroszewski 19 ans, ouvrier agricole. Embauché le 4 mai 1947 par Pierre Tuloup, 44 ans, cultivateur à Cheney-le-Châtel, l’assomme le lendemain avec une tige de rampe d’escalier, puis avec une pince de carrier et une barre d’accouplement de voiture, pour lui voler 500 francs, une montre de femme et un revolver. Réveillé à 6h par le substitut Delahaye. Me Robin, absent, s’est fait remplacer par Me Daillant. Ecoute la messe, communie. Illettré, doit demander assistance à Me Daillant pour écrire une lettre à ses parents, dans laquelle il leur demande pardon pour ses fautes. Boit un verre de rhum, fume une cigarette, puis s’adresse une dernière fois à l’aumônier avant d’être entraîné vers les bois de justice. 27 octobre 1947 20 février 1948 Vendredi,
7h50 Paris Bernard Michel Mouret 31 ans. Le 30 novembre 1945, au lendemain d’un cambriolage aux établissements Géo à Bicêtre, Mouret et ses complices abattent les inspecteurs Jean Dupoix et Roger Lesauce venus les arrêter. Complice actif du crime, Louis Allainguillaume sera inexplicablement acquitté. 24 octobre 1947 04 mars 1948 Jeudi,
6h30 Metz
Moselle Michal Safka 21 ans, ouvrier agricole. Le 14 août 1946 au moulin de Bazoncourt, abat d’une balle dans la tête Michel Stojko, un compatriote Polonais et dissimule le corps dans une rivière, une grosse pierre nouée à la taille. Lui et son complice Raymond Pidolle furent condamnés à mort, Raymond est gracié. Auguste Pidolle, 27 ans, est condamné à 20 ans de travaux forcés. Réveillé à 5h30 par l’avocat général Liska. Dormait bien. Pas étonné, semblait presque s’y attendre. S’habille sans mot dire, si ce n’est pour répondre aux questions que les magistrats lui posent. Refuse la cigarette et le verre de rhum. Se rend à la bibliothèque de la prison pour s’entretenir avec son avocat, Me Gaudin, puis avec l’abbé Genvo, avant d’entendre la messe et de communier. Va à l’échafaud entouré par l’aumônier et son défenseur. Guillotine montée dans la cour, côté rue Saint-Gengoulf, entourée par un peloton de gendarmerie. Exécuté le jour de son 21e anniversaire. 04 octobre 1947 06 mars 1948 Samedi,
6h24, 6h25, 6h27 Orléans
Loiret Chérif Himan Bachir,
Hocine Guétal
et
Akli Belkout 32 ans, charpentier, 31 ans, débardeur et 31 ans, cuisinier. Egorgèrent au couteau de boucher, au soir du 11 janvier 1946 Mlle Blanche Durand, fermière à Pithiviers-le-Vieil, et ses deux domestiques, MM.Adrien Boulmier et Abel Mariel. Réveil à 6h. Bachir et Guétal restent figés. Belkout râle : « Merci la France ! J’ai fait de la Résistance et on me traite comme on n’aurait pas traité un boche ! » Chacun d’eux écrit une lettre. Guétal est seul à accepter le verre de rhum, et Belkout demande à être exécuté le dernier, ce qui lui est accordé. 30 octobre 1947 09 mars 1948 Mardi,
6h50 Mende
Lozère Louis Paul Rochette 32 ans, ouvrier ajusteur. Abat d’une rafale de mitraillette pour le voler l’ingénieur Henri Mattras le 29 mars 1946 au bord de la route à Saint-André-de-Capcèze. 09 septembre 1947 12 mars 1948 Vendredi,
6h15 Draguignan
Var Ludovic Michel Gerbi 23 ans. Le 18 décembre 1945, à la Roque-Esclapon, tua à coups de pilon de cuisine son ancien patron, l’éleveur septuagénaire Damien Lions, ainsi que sa fille, Marie Soudan, pour voler 58.000 francs. Son complice Félix G. est condamné à 5 ans de prison. 16 octobre 1947 21 avril 1948 Mercredi,
5h20, 5h22 Auch
Gers Emile André Javelot
et
Léon Armand Javelot 32 et 29 ans, ouvriers agricoles. Victimes de leurs frasques dans leurs Ardennes natales, se réfugient dans le Gers au lendemain de la guerre et s’endettent en lançant plusieurs entreprises successives toutes infructueuses (cinéma ambulant, puis bûcheronnage). Assomment à coups de gourdin Marius Mendousse, 28 ans, puis font subir le même sort à sa tante Françoise Mendousse, veuve Hau, 66 ans, avant de la pendre le 20 décembre 1946 au lieu-dit « A Guibot », à Ordan-Larroque. Leur frère et complice, Adrien Lucien Javelot, 40 ans, également condamné à mort, est gracié. Tandis qu’Adrien apprend sa grace, Léon et Emile se laissent entraîner hors de la cellule. Léon pleure pendant la messe. Aucun des deux ne fait de déclaration. Ils acceptent rhum et cigarette. Léon se laisse pousser vers la guillotine dans un état d’hébétement, cigarette aux lèvres. Emile sanglote et tente de résister. 30 octobre 1947 23 avril 1948 Vendredi,
4h50 Tarbes
Hautes-Pyrénées José Sanchez-Munoz 32 ans. Dernier auteur, avec Ramiro et Prieto, du massacre de Crèchets-en-Barousse : déserteurs de l’armée espagnole, le 22 décembre 1945, se présentent à la ferme Sost à Créchets-en-Barousse. Assomment Mme Rosalie Sost qui refuse de leur donner de l’argent. Son fils Pierre, maire de Créchets, est tué à coups de couteau et de bouteille cassée. Le domestique Joaquin Rick et le voisin Jean Ribes, venus au secours, seront égorgés. Son exécution n’eut pas lieu en même temps, car il dut comparaître devant la Cour d’assises d’Indre-et-Loire pour le meurtre de Marcel Ugal, un autre Espagnol, qu’il avait noyé dans la Loire. Il fut condamné à perpétuité le 22 mars 1948. Ne manifeste aucune émotion. Se confesse, communie, refuse le tabac mais boit le verre de rhum. C’est fermement et la tête haute qu’il se laisse emporter sous le couperet. 26 septembre 1946 27 avril 1948 Mardi,
5h10, 5h15, 5h20 Nîmes
Gard Lao Pham Van
et
Lan Nguyen Van

Marius François Rodeillat

29 ans chacun, électricien et cultivateur, Annamites. Le 27 novembre 1946, abattent le chauffeur de taxi Alphonse Chauvet à Méjannes-le-Clap.

Rodeillat, 29 ans, marchand de primeurs, tua au mas de Lauze, dans la banlieue de Nîmes, le 24 décembre 1945 M.Fernand Sallies, 43 ans, sa femme Irma, le fils René, 16 ans, et la fillette Marie-Claire, 10 ans, en les abattant à la mitraillette et les égorgeant pour voler 25 francs. Seule la cadette Anne-Marie, 7 ans, survécut à l’égorgement.

Exécutés à la maison centrale de Nîmes. Ne manifestent aucune réaction du réveil à l’échafaud. Les prières se font en présence de deux aumôniers car l’un des Indochinois s’est converti en prison. 14 janvier 1948, 16 janvier 1948 05 mai 1948 Mercredi,
4h45 Paris Maurice Eugène Marcel Thierry 24 ans. Assassina Mme Thierry, sa tante, en l’assommant avec une brique puis en l’étranglant avec un fil électrique à Taverny le 12 février 1946 pour lui voler 7.500 francs. 20 novembre 1947 11 mai 1948 Mardi,
4h15 Douai
Nord Eugène André Pfeiffer 22 ans, ouvrier. Tua à coups de maillet la veuve Fauquembert pour lui voler deux billets de 20 francs, à Campagne-les-Hesdin, la nuit de Noël 1946. Condamné par les assises du Pas-de-Calais, arrêt cassé le 22 octobre 1947, puis par celles du Nord. 08 août 1947, 20 janvier 1948 12 mai 1948 Mercredi,
4h25 Arras
Pas-de-Calais Marcel Guerbadot 20 ans. Le 13 avril 1947, pendant une permission d’un mois dans son service militaire, tente de cambrioler une ferme à Offekerque et abat l’ouvrier agricole Landry, seul témoin, de deux balles dans la tête. Le 28 avril suivant, aux Attaques, abat les vieux fermiers Bourelle pour les voler. 20 novembre 1947 25 mai 1948 Mardi,
4h10, 4h11, 4h12 Draguignan
Var Agostino Fabbri,
Gioachinno Merono
et
Carlo Tesconi 41 ans, 43 ans et 32 ans, le premier et le troisième italiens, le second espagnol. Assassinèrent à coups de marteau les époux Victorine et Irénée Martin (73 et 71 ans), anciens employeurs de Tesconi, à Sainte-Anne d’Evenos le 08 janvier 1947. Assistent tous trois à l’office religieux. Meurent courageusement. 03 février 1948 27 mai 1948 Jeudi,
4h15 Nice
Alpes-Maritimes André Léon « Billy » Bloy 41 ans, chef d’orchestre. Le 21 février 1947, à l’entrée de Pégomas, abat de cinq coups de pistolet Robert Devaux, 36 ans, avoué à Grasse, et blesse gravement son épouse, qui survit uniquement en se faisant passer pour morte. Dérobe 200.000 francs : avait attiré Devaux, plongeur sous-marin accompli et photographe amateur, dans un piège en lui faisant miroiter l’achat d’appareils-photo permettant les prises de vues sous-marines. Se dit innocent, et demande à son avocat d’obtenir sa réhabilitation. Ecrit une lettre à son épouse, communie, boit un verre de rhum. Il s’adresse au gardien-chef : « Eh bien, vous voyez, je vais partir en vacances avant vous ! ». Sur la bascule, hurle : « Je suis innocent ! Maman ! » 15 novembre 1947 28 juin 1948 Lundi,
7h40 Riom
Puy-de-Dôme Charles-Marius Rigaud 34 ans, employé à l’usine Bergougnan. membre de la Gestapo au sein de la Brigade Bâtissier. Provoqué dans un restaurant de Ceyrat le 23 octobre 1943 par un groupe de jeunes clients qui lui reprochent son attitude de collabo ainsi qu’à sa famille, dégaine son arme, et tire deux balles, touchant mortellement Lucien Bonhomme et blessant gravement Marcel Vidal. Condamné à mort également par la Cour de Justice pour faits de collaboration et de trahison moins de trois mois après – et exécuté comme tel. Fusillé au terrain de manoeuvre de la Varenne. Meurt courageusement. 30 janvier 1948, 14 avril 1948 01 juillet 1948 Jeudi,
4h Saint-Mihiel
Meuse Khouyya ben Haddou ben Assou 21 ans, tirailleur marocain dans le 267e compagnie de Transports du 29e Train. Le 25 novembre 1945, en compagnie d’un autre soldat, Abd-el-Kader, quitte l’hôpital militaire où il était soigné, et sous la menace d’un couteau, entraîne dans une maison isolée de la rue Saint-Ladre Arsène Leroy, 18 ans, à Montigny-les-Metz, alors que ce dernier sortait d’un bal. Là, tandis que Khouyya surveille, le jeune homme est violé par Abd-el-Kader, puis étranglé et égorgé. Les criminels s’enfuient en dérobant sa montre. Le corps est retrouvé deux jours plus tard. Abd-el-Kader meurt le 12 mars 1947, durant l’instruction. Condamné dans la Moselle, arrêt cassé, rejugé dans la Meuse. Jure qu’il est innocent jusqu’à la dernière minute et accuse son complice décédé durant l’instruction. 16 décembre 1947, 21 avril 1948 24 août 1948 Mardi,
5h15 Rouen
Seine-Inférieure Piotr Piskorski 25 ans, ancien instituteur, Polonais. Officier dans l’armée soviétique puis sergent dans l’armée américaine, avait perdu sa famille entière en déportation. Le 25 septembre 1947, Piskorski et le Russe Basile Koutz, tuent à coups de barre de fer au Havre Mme Lesczynska et sa nièce Albina Cagavara, 8 ans. Koutz fut condamné à 12 ans de travaux forcés. Réveillé à 4h50. Meurt courageusement, ne prononce pas un mot 10 mars 1948 08 octobre 1948 Vendredi,
6h15 Moulins
Allier Albert Provence 39 ans, ouvrier agricole. Dans la nuit du 09 au 10 décembre 1947, attaque les époux Michon, âgés de 78 et 71 ans, à coups de pioche à Saint-Angel, près de Montluçon. Vole 30.000 francs et des vivres, et se prépare un sandwich de fromage et de lard, ainsi qu’une tasse de café au lait. M.Michon meurt sur le coup. Son épouse survit jusqu’au 26 décembre. Provence, soupçonné mais introuvable, est arrêté le 6 janvier 1948 par les gendarmes d’Eguzon, dans l’Indre, suite à un vol. Réveillé à 5h30. Assiste à la messe. Confie aux assistants avant d’être soulevé par les aides-exécuteurs : « J’ai fait une faute, je dois payer. » 29 avril 1948 13 octobre 1948 Mercredi,
6h50 Laon
Aisne Robert Léon Thorin 23 ans, bouvier. Le 07 avril 1947, à Vorges, blesse d’un coup de fusil au genou Joseph Bajurski, 40 ans, fermier, avant de l’assommer à coups de crosse (l’handicapant à 100 %), puis blesse grièvement son épouse Marie Mikosik, 38 ans, de trois coups de serpe dans la tête. Surpris par leur fillette, Marie-Thérèse, 5 ans, la tue à coups de serpe « ne voulant pas faire d’elle une orpheline », avant de fouiller la maison et d’empocher 1.500 francs. Prétend avoir voulu se venger du couple qui aurait refusé de lui vendre des oeufs durant la guerre. Réveillé à 6h. Se montre parfaitement indifférent à la nouvelle. Accepte de recevoir la communion de l’aumônier. Au greffe, boit un verre de rhum et fume une cigarette. Ne prononce pas la moindre parole de regret. Va à la guillotine avec ses avocats, Mes Lenain et Decottignies. 31 mai 1948 22 octobre 1948 Vendredi,
6h40 Coutances
Manche Jean-Baptiste Gustave Louis Baudain 27 ans, manoeuvre. Etrangla les vieux époux Josset à l’aide d’une cordelette le 27 octobre 1947 à Picauville, pour voler 340 francs et deux bouteilles d’alcool. Son complice, Jean Hamel, jardinier, est condamné à perpétuité. Réveillé à 5h30. Entend la messe de l’abbé Hamel. Ecrit deux lettres à ses parents. Au greffe, fume une cigarette. Va courageusement à l’échafaud. 19 mars 1948 16 novembre 1948 Mardi,
7h10, 7h15 Béziers
Hérault Joseph Prince

Henri Alphonse Lancuentro

Prince, 25 ans, tua à coups de crosse de revolver M.Archimbaud, son oncle septuagénaire, ancien maire de sa commune, le 07 juillet 1947 à Caussiniojouls, pour lui voler 55.000 francs, des cigarettes et deux revolvers. Son épouse Odette, née Steil, 29 ans, elle aussi avait été condamnée à mort, et grâciée.

Lancuentro, 37 ans, marchand de vins et indicateur de police, tua de deux coups de carrelet sur la nuque le marchand de chevaux Marius Ravaille le 08 décembre 1947 à Servian.

Réveillés à 6h15. Résignés, entendent la messe et communient. Ecrivent à leurs familles respectives. Boivent plusieurs gorgées de rhum chacun, fument une cigarette. Pendant la toilette, plaisantent : « Passez le premier. » « Après vous, je n’en ferai rien… » Prince ira le premier, clope aux lèvres. 10 mai 1948, 11 mai 1948 14 décembre 1948 Mardi,
7h20 Privas
Ardèche Georges Clément Rey 27 ans, cultivateur. En avril 1947, dans la région du Cheylard, tua d’un coup de crosse de son propre fusil Louis Monnier, 43 ans, vola 200 francs et mit le feu à la maison pour effacer les traces. Accepta d’écouter l’aumônier, refusa cigarette et rhum. 11 mai 1948 17 décembre 1948 Vendredi,
8h05, 8h07 Reims
Marne Czeslaw Zajackowski
et
Jan Kwiatkowski 28 et 25 ans, Polonais. Tuèrent le 13 avril 1946 le taximan Julien Galland à La Veuve pour lui voler son argent et sa voiture, soit une somme de 12.000 francs. Leur complice, Bronislas Bartos, est condamné à perpétuité. Réveillés à 7 heures, les deux hommes assistent à la messe célébrée par l’aumônier en compagnie d’un homologue polonais. Pluie glaciale. 09 juillet 1948 20 janvier 1949 Jeudi,
8h04 Caen
Calvados Jaime Fanjul-Arbesus 30 ans, Espagnol. Avec trois complices, allèrent voler une ferme à Saint-Désir de Lisieux le 07 décembre 1944 et tuèrent à coups de revolver les occupants, Robert Tessier, 47 ans et sa compagne, la veuve Jeanne Sorbet, 68 ans. Les complices de Fanjul, Mathias Callesja-Aguado et Salvador Orihuel-Canet sont condamnés à 20 ans de travaux forcés. Réveillé à 6h35. Très calme jusqu’au bout. 10 juillet 1948 15 février 1949 Mardi,
7h30 Saint-Brieuc
Côtes-du-Nord René François-Joseph André Le Louarn 29 ans. Etrangla la petite Paulette Besret, 13 ans, le 24 avril 1944, dans un clocher. Commit plusieurs tentatives de strangulation sur des femmes dans des églises en 1940. 29 juillet 1948 23 mars 1949 Mercredi,
6h15 Douai
Nord Herman Barden 19 ans, Allemand, ancien membre des Jeunesses Hitlériennes, arrivé en France en novembre 1947 pour travailler aux mines, licencié pour paresse. Le 09 avril 1948, à Denain, s’introduit chez Mme Lecat, 53 ans, blanchisseuse à qui il devait de l’argent, et lui fracasse le crâne de 18 coups de barre de fer. La victime survit deux heures. 21 octobre 1948 29 mars 1949 Mardi,
6h03, 6h05 Bordeaux
Gironde Emile Jean Maçon

Marcel Alphonse Heriard

Maçon, 25 ans, tua les chauffeurs de taxi Mur au stand de tir de Luchay (Gironde) le 19 septembre 1946, et Caumont à Ladevèze-Rivière (Gers) le 22 septembre, pour les voler.

Hériard, 37 ans, cultivateur, assassina à coups de barre de fer les époux Pierre et Mélina Villiers, 75 et 74 ans, à Donnezac le 23 décembre 1946, pour les voler. Son complice présumé Abel Villecroix est acquitté faute de preuves.

Les deux hommes entendent la sentence sans trembler. Ils communient, fument une cigarette et boivent un verre de rhum. Pendant la toilette, Hériard ricane : »J’aurais aimé qu’on fasse également la toilette de mes pieds. » Maçon, lui, répond à l’aumônier qui lui demande s’il a des dernières volontés : « Oui, je voudrais conserver ma tête, mon père. » 30 novembre 1948 et 10 mai 1948 21 avril 1949 Jeudi,
5h50 Angers
Maine-et-Loire Germaine Godefroy, veuve Leloy 31 ans, commerçante. Désirant refaire sa vie avec son commis et amant, Raymond Boulissière, tua à Baugé, le 10 décembre 1947 son mari Albert Leloy à coups de hache et met en scène un cambriolage qui aurait mal tourné. Avoue le crime le lendemain. Raymond sera condamné à vingt ans de travaux forcés. S’entretient avec l’aumônier, rédige une lettre, se confesse et entend la messe. Après un moment de faiblesse, se livre aux exécuteurs. Refuse cigarette et rhum, et demande à garder les images pieuses qu’elle conserve dans son corsage, chose que les bourreaux lui autorisent. Meurt avec courage. Dernière exécution capitale d’une femme en France. 27 novembre 1948 28 avril 1949 Jeudi,
5h25 Rethel
Ardennes Roger Marcel Jouart 27 ans. Tua à coups de bûche à Revin le 09 mars 1948 Marcel Devis, 47 ans, brocanteur, et lui vola 40 francs avant de jeter son corps dans la Meuse. Son complice Georges Mercier, 35 ans, est condamné à mort et grâcié. Blanche Duplessis, veuve Devis, 47 ans, maîtresse de Jouart et femme de la victime, est condamnée à vingt ans de travaux forcés. Déjà reveillé à l’entrée des officiels à 4h30. Assis sur sa couchette, fume cigarette en attendant. Calme devant la nouvelle : « Je m’y attendais. » Entend la messe de l’archiprêtre Tisseron. Consomme deux verres de rhum et une cigarette. Courageux jusqu’à la fin. 19 novembre 1948 17 mai 1949 Mardi,
4h22 Caen
Calvados Ahmed Roumani 33 ans, algérien, manoeuvre. Assomme, égorge, viole et vole dans la nuit du 23 au 24 juin 1947 à Caen, en plein « village nègre », Mme veuve Camille Julien, 59 ans, propriétaire du Bar Falaisien. Le mobile principal demeure le vol. Complices : Hadir ben Saadi Ghoul, perpétuité ; Abdallah ben Mohamed et Mohamed ben Ahmed, vingt ans de travaux forcés. Réveillé à 3h45. Se montre calme. S’entretient avec son défenseur, puis avec l’imam Bourgdallah. Après une cérémonie au cours de laquelle Roumani prend une douche de purification, il se laisse prendre en charge par les bourreaux, en ne cessant de psalmodier des prières. 19 janvier 1949 08 juillet 1949 Vendredi,
4h10 Colmar
Haut-Rhin Friedrich Ohnimus 22 ans, artiste-peintre, Allemand, délinquant juvénile. Le 18 novembre 1946, il tue à Marseille la veuve Daigre chez qui il logeait pour lui voler 5000 francs. Il s’enfuit à Mulhouse. Dans la nuit du 6 au 7 décembre 1946, à Barr, il assassine à coups de marteau au cours d’un cambriolage les vieux époux Meyer et leur dérobe 47.000 francs. Il est condamné à mort dans le Haut-Rhin, puis dans les Bouches-du-Rhône. Réveillé à 3h45. Très calme, écrit une lettre à sa mère. Ecoute la messe. Au greffe, refuse le verre de rhum : « Je ne veux rien prendre pour adoucir ma mort. Je sais que je l’ai méritée. » Il accepte néanmoins une cigarette de la part de son défenseur, qu’il fume pendant que les exécuteurs le toilettent. 23 janvier 1948, 09 février 1949 12 juillet 1949 Mardi,
4h Foix
Ariège Francisco Fernandez-Guttierez 25 ans, ouvrier agricole, Espagnol. Tua à coups de marteau son patron, Mr Fouet, le 10 janvier 1949 à Lavelanet. Le crime eut lieu en plein jour dans un champ et l’assassin vola plus de 200.000 francs à sa victime. 23 mai 1949 29 juillet 1949 Vendredi,
4h50 Rethel
Ardennes Lucien Albert Lejeune 24 ans, garagiste à Maon. Abat d’une balle dans la tête dans la côte de Bel-Air (banlieue de Charleville) Charles Martin, 63 ans, chauffeur de taxi, le 15 septembre 1948, pour lui voler son portefeuille contenant 23.000 francs et son taxi Peugeot 402. Reveillé à 3h50 par le procureur Forget. Dort bien, comprend aussitôt. « Ca va être marrant ! » Ecrit une longue lettre à son père dans laquelle il ne manifeste aucun regret de son acte. Se recueille et entend la messe de l’abbé Baudson. Au greffe, boit un verre de rhum et fume une cigarette. 23 février 1949 30 juillet 1949 Samedi,
4h45 Vesoul
Haute-Saône
Saône-et-Loire Saïd ben Mohamed 34 ans, Algérien, manoeuvre. Tua à coups de pierre sur la tête sur les remparts de Belfort le 10 juin 1948 un passant, Auguste Bernhard, 49 ans, ouvrier agricole à Mazevaux (Haut-Rhin) pour le voler. Se faisait peu d’illusions sur son sort. Fataliste en apprenant la nouvelle. Se montre courageux. 24 février 1949 21 octobre 1949 Vendredi,
6h10 Lons-le-Saunier
Jura Georges Honoré Blondey PARRICIDE, 36 ans, cultivateur. Le 07 juillet 1948, avec la complicité de son épouse, il empoisonna son père pour hériter de la ferme. Mais la mort suspecte éveilla les soupçons du vieux domestique, Emile Mignot. Tentant de l’empoisonner à son tour, le sort veut que la tasse de café à l’arsenic soit absorbée par un voisin, Mr Mouton, venu veiller le corps le 09 juillet 1948. Réveillé à 5h45. Dormait bien, espérait en sa grâce. Aucune réaction violente. Entend la messe. Au procureur Douvres et à son avocat Me Lagnien qui lui demandent s’il a une dernière déclaration, dit : « Je regrette. » Puis rajoute, paradoxalement : « Je suis innocent. » Prie l’aumônier de prendre soin de ses enfants. Voile noir du parricide sur la tête, va à l’échafaud courageusement. 28 mars 1949 24 octobre 1949 Lundi,
6h45 Poitiers
Vienne Henri Bonnin 29 ans, transporteur à Poitiers. Assassin de Jeannine Charpentier le 18 novembre 1946, à Fontaine-le-Comte. Après son travail, tente de voler des pièces détachées sur des épaves de voitures près d’un garage. Dérangé, s’enfuit, et croise Mlle Charpentier à vélo. Ayant l’intention de la violer, il la renverse, tente de la maîtriser. Face à sa résistance, il la poignarde de 29 coups de poinçon, puis lui fracasse la tête à coups de manivelle. Soupçonné, est disculpé par l’alibi fourni par sa femme… laquelle revient sur ses propos en octobre 1947, date à laquelle Bonnin est incarcéré pour vols. Réveillé à 6 heures, dit avoir des déclarations à faire qui sont enregistrées au parloir de la prison par le greffier. Après s’être entretenu avec son avocat et l’aumônier, entend la messe. 25 février 1949 08 novembre 1949 Mardi,
6h35 Auxerre
Yonne Eugène Daniel Charles Moricard 31 ans, ouvrier scieur. Tua à Pourrain son oncle Ernest Doudot, 72 ans, le 31 décembre 1946 en l’assommant d’un coup de maillet dans la nuque, puis en le jetant dans une mare. Le 16 décembre précédent, Doudot avait fait de son neveu son légataire universel à la condition que celui-ci et son épouse se chargent de lui jusqu’à son décès. Mme Moricard, complice, mais qualifiée d’attardée mentale, fut relaxée durant l’instruction. 07 juin 1949 10 novembre 1949 Jeudi,
6h30 Marseille
Bouches-du-Rhône Oreste Brillado 26 ans, laveur de vitres et dealer, Italien. Réfugié en France après un internement abusif décidé par ses parents (il était homosexuel). Lors d’un cambriolage, le 11 juin 1947, tua avec un marteau Thérèse Grumberg, 26 ans, secrétaire du marchand de tissus Vincent, rue de Rome. Il n’arrivera même pas à ouvrir le coffre-fort, et fut arrêté dès le lendemain. Première exécution aux Baumettes (et 1ère à Marseille depuis 1934). A 5h, au réveil, dit à l’aumônier : « « Il ne me reste plus qu’à me préparer. Donnez mes affaires aux nécessiteux. » Aucune parole de regret par rapport à sa victime ; offre de léguer ses yeux à la Banque des yeux. Ecrit une lettre fort longue à sa mère, refuse le rhum, fume une cigarette, reçoit l’extrême-onction avant de se diriger de lui-même vers la machine, le pas assuré. 24 juin 1949 29 novembre 1949 Mardi,
7h15 Le Mans
Sarthe André René Georges Diner 29 ans, camionneur, docker. Condamné à la réclusion perpétuelle, tente de tuer à coups de matraque un gardien de la prison du Mans, M.Ledoux, pour s’évader le 24 mai 1948. La victime survit, mais invalide à 60%. Ses complices, Marcel Jullien et Georges Damen, sont respectivement condamnés à perpétuité et à vingt ans de travaux forcés. 04 avril 1949 01 décembre 1949 Jeudi,
7h25, 7h30 Béziers
Hérault René Antoine Fournial
et
Elie Hubert Vève 29 ans tous deux, débitant de boissons et commis en publicité. Tuent le docteur Marius Bonneton, 25 ans, pour le voler, en l’entraînant dans un guet-apens et en lui enfonçant le visage dans l’étang de Thau le 25 août 1948. Réveillés à 6h15. Fournial calme, Vèvre très nerveux. Ce dernier essaie de retarder la fin en écrivant de longues lettres, puis en s’entretenant avec le juge d’instruction – et ne rien dire de constructif, en fait. L’exécution se voit ainsi retardée de 15 minutes par rapport à l’heure prévue. La double mise à mort a un spectateur clandestin, le père du docteur Bonneton, à qui la justice a refusé une autorisation spéciale pour voir la mort des assassins. Aussi, M.Bonneton a soudoyé le bedeau de la cathédrale de Béziers, dont la tour surplombe la cour de la prison, pour voir la fin des condamnés et dire, après la seconde chute du couperet : « Justice est faite. » 10 juillet 1949 13 décembre 1949 Mardi,
6h17 Paris Gaston Becker 26 ans, vannier. Le 03 septembre 1946, avec son frère aîné Pierre Becker et leur ami Michel Weis rentrent dans un café d’Ormesson, et après avoir consommé, ligotent la tenancière, Mme Morlet, et abattent Mr Morlet de deux balles. Seul Joseph est condamné par les assises de Seine-et-Oise, Pierre Becker est condamné à perpétuité et Weis à 10 ans. A la lecture de la condamnation, Gaston supplie son frère aîné de reconnaître que c’est lui le coupable, en vain. Il semble établi que c’est bien Pierre Becker l’assassin. Cependant, le 18 décembre 1948, à Tours, Gaston est condamné à mort pour la deuxième fois pour avoir poignardé le 09 octobre 1945 le marchand de chevaux Eugène Langlais devant chez lui pour lui voler 300.000 francs. Cette fois, sa culpabilité ne fait aucun doute. Son complice Louis Dorkeld, condamné à mort aussi, est gracié. Pleure, hurle qu’il est innocent. Il doit être traîné jusqu’à la guillotine. 09 mars 1948 10 janvier 1950 Mardi,
7h45 Lyon
Rhône Antoine Fernand Jacquetant 32 ans, électricien. Satyre assassin du petit Isidore Canyasse, 9 ans, le 29 septembre 1947. Après en avoir abusé chez lui, il étrangle l’enfant, dépèce le corps avec un couteau de cuisine et abandonne une partie des restes sous les remparts du fort Saint-Irénée, d’où son surnom de « Monstre de Saint-Irénée ». Avait également abattu son compagnon de guerre, le résistant Paul Antoine Lambert, suite à un parachutage dans les bois de Grandris en juin 1944. Ecrit trois lettres, se confesse, entend la messe et communie. Fume une cigarette, boit un verre de rhum. Remercie son avocat, Me Ravet. Avant d’être conduit sur la guillotine, répète à deux reprises : « Je suis innocent. » 07 mai 1949 25 janvier 1950 Mercredi,
7h30 Belley
Ain Robert Maricot 35 ans, tourneur. Le 05 juin 1947, tua à coups de massette la veuve Richebourg, châtelaine de Pisseloup, pour voler 34.000 francs, des bijoux, et de la nourriture. Ses complices, Louise et Solange Caney, sont respectivement condamnées à 20 ans de travaux forcés et cinq ans de prison. Condamné dans la Haute-Saône, verdict cassé. Re-condamné dans le Doubs, verdict cassé, puis troisième condamnation dans l’Ain. Temps de neige. Au réveil, annonce au procureur Borgey : « Je suis à vous. » S’entretient calmement avec l’aumônier puis avec Me Rémond, son avocat. Va calmement à l’échafaud. 1ère exécution à Belley depuis 1852. 25 mai 1948, 29 janvier 1949, 05 juillet 1949 21 février 1950 Mardi,
7h Beauvais
Oise Maurice Jérôme Van Landuyt 33 ans, fermier à Nogent-sur-Oise, Belge. Incita son frère Michel à tuer sa femme Rachel en la précipitant puis en la noyant dans une fosse à purin le 10 juillet 1948. Mobile : Rachel s’opposait à ce que son mari passe toutes ses soirées au bar à boire et à dépenser l’argent du ménage. Autre mobile : elle aurait été au courant d’un meurtre commis par les frères en Belgique en 1942, et menaçait de les dénoncer s’ils ne s’amendaient pas. Les deux frères furent condamnés à mort. Michel est le premier réveillé à 6 h, et extrait de la cellule pour y entendre la nouvelle de sa grâce. S’il s’enquiert du sort de son frère, c’est pour se réjouir : « Tant mieux, il l’a bien mérité. » Maurice, lui, dit que « ce n’est vraiment pas juste » car il n’a « personnellement rien fait. » Quand on lui donne ses habits, il demande que « ça aille vite ». Il discute avec le juge Grapin, puis entend la messe et communie avec l’abbé Bazelaire, avant de rejoindre le greffe. Sa tête tombe dans une clameur mécanique : celle des sirènes des usines proches annonçant le début de la journée de travail aux ouvriers. 29 septembre 1949 22 février 1950 Mercredi,
7h06 Douai
Nord Henri Louis Couture 35 ans, ouvrier aux Glaces, 34 ans, déjà condamné pour attentat à la pudeur. Satyre assassin de Danielle Duriez, 10 ans, le 12 septembre 1948 à Boussois. Après le viol, il jeta la petite encore vivante dans la Sambre. Il n’avoua jamais le crime. Avait déjà tenté de violer et poignardé une adolescente de 15 ans en 1939. 21 octobre 1949 24 février 1950 Vendredi,
7h10 Saint-Brieuc
Côtes-du-Nord Eugène Marie Bozec 23 ans, ouvrier agricole. Le 19 novembre 1948, à Saint-Clet, étrangle pour la voler la veuve Thérezier, 80 ans, et met la feu à la maison. Le crime reste insoupçonné. Début avril 1949, à Ploezal, égorge avec un couteau de poche Mlle Bothorel, 72 ans, et met le feu également. Condamné deux fois (le 24 pour meurtre de Saint-Clet, le 25 pour celui de Ploezal). 24 octobre 1949, 25 octobre 1949 15 mars 1950 Mercredi,
6h35 Riom
Puy-de-Dôme Mahmoud Tighermine 37 ans, manoeuvre. Le 24 décembre 1948, assassina les époux Cassagnes, gardes-barrières au passage à niveau de Lacluse, commune de Saint-Sauves. Déja condamné à mort par la Cour militaire d’Alger en 1946 pour trahison, il avait réussi à s’évader avant son exécution. Ses complices Messaoui et Belkadi sont condamnés à perpétuité. 30 octobre 1949 14 avril 1950 Vendredi,
5h00, 5h15 Marseille
Bouches-du-Rhône Mohamed ben Amrane ben Kaci Chabani
et
Ben Allal Amor ben Mohamed ben Moussa 27 ans, manoeuvre, 28 ans, balayeur. Le 22 juin 1947, tuent à coups de marteau la veuve Rafaëlla Sorrentino, cartomancienne à Ajaccio, pour lui voler 60.000 francs de bijoux et de liquide. Ben Allal clama toujours son innocence. Condamnés d’abord en Corse, arrêt cassé, puis re-condamné dans les Bouches-du-Rhône. Au réveil, aucune émotion chez l’un ou l’autre des condamnés. Après la messe – ils se sont convertis au catholicisme -, ils acceptent le verre de rhum et la cigarette. Mais pendant la toilette, Chabani affirme au juge d’instruction que Ben Allal n’avait pas participé au crime : « C’est un autre Arabe qui était avec moi ». L’exécution ne sera cependant pas interrompue. 09 juillet 1949, 31 octobre 1949 09 mai 1950 Mardi,
4h20 Paris Emile Edmond Berthet 47 ans, cafetier, alias « Monsieur Edmond ». Après avoir fait la connaissance d’une prostituée, Marie-Ange Dupont, 34 ans à l’époque, il devient son amant et souteneur, mais aussi le chef d’une bande de cambrioleurs, composée d’habitués de son café. Le 20 décembre 1945, au 45, boulevard de Magenta, il fait étrangler sa belle-soeur, Mme Veuillot, par un de ses hommes, « Jimmy » Conte, pour pouvoir piller son appartement. Le 29 décembre 1945, près de Puiseaux (Loiret), sur un chemin isolé, il abat lui-même « Jimmy » d’une balle dans la nuque pour éviter une dénonciation. Marie-Ange est condamnée à cinq ans de prison pour recel. 28 novembre 1949 24 mai 1950 Mercredi,
4h18, 4h20 Poitiers
Vienne Louis Eugène Balin

Raymond Louis Gui

Balin, 25 ans, tua à coups de barre à mine la vieille veuve Marguerite Boutet pour la voler le 28 novembre 1948, à la Croix-du-Bourd.

Gui, 36 ans, cultivateur à Sèvres (Deux-Sèvres). A Saint-Maixent (Deux-Sèvres), viole, étrangle et vole Léopoldine David, 27 ans, bergère, le 1er mai 1948, avec son beau-frère et complice Edouard Tognetti, 28 ans. Tous deux furent condamnés à Niort, l’arrêt cassé, et la condamnation re-prononcée à Poitiers. Tognetti mourut d’une embolie en cellule, le 07 février 1950.

25 novembre 1949, 22 juin 1949 et 24 novembre 1949 23 juin 1950 Vendredi,
3h30 Metz
Moselle François Mathias Homburger 37 ans, cultivateur. Le 14 août 1947, à Sentzick, lors d’une dispute entre sa femme Marie, 37 ans, enceinte, et son beau père Jean Immer, 71 ans, pousse le vieil homme en arrière, l’assommant mortellement contre une marche d’escalier. Les époux cachent le corps dans la paille, et vont dans la nuit le jeter dans l’étang du village. Craignant d’être dénoncé, empoisonne sa femme un mois après son accouchement en lui faisant boire du vermouth à l’arseniate de chaux. Marie décède à l’hôpital de Thionville le 26 novembre 1947. Autre mobile : hériter plus vite de la ferme de sa belle-famille. Réveillé à 2h55 par procureur Kirschner. Assiste à la messe de l’abbé Genvo. Au greffe, refuse la cigarette et le rhum. Dit en ricanant à son avocat pendant la toilette : « Je vous donne rendez-vous au ciel… ou en enfer ! » Meurt courageusement. 16 décembre 1949 12 juillet 1950 Mercredi,
3h50 Metz
Moselle Michel Emile Watrin 22 ans, sans profession. Assassin de deux chauffeurs de taxi à coups de balle dans la tête : Jean Becker le 04 décembre 1946 sur la route de Gravelotte (Moselle), et Benjamin Teyre le 11 décembre 1946 entre Crèches et Varennes-les-Macon (Saône-et-Loire). Arrêté à Paris en tentant de revendre la Citroën de Teyre. Condamné dans la Moselle, puis dans la Saône-et-Loire. Quand les officiels entrent dans sa cellule, à 2h50, Watrin est déjà debout et leur sourit. Il se montre d’un calme absolu, étonnant, et avoue qu’il savait son sort depuis la veille. Il remet à son avocat des lettres écrites durant la nuit, et signe un accord pour que ses yeux soient prélevés après sa mort. Il entend la messe. Dans les couloirs, à travers les portes, les autres détenus lui souhaitent bon courage. En voyant accidentellement la guillotine par la porte du greffe, il a un rapidement mouvement de peur très vite surmonté. Après la toilette, quand on l’entraîne vers la machine, il embrasse Me Naud : « Merci Maître ! Je vous ai aimé comme un père. Embrassez mes parents et mon petit frère ! Pardon à tous ! » Installé sur la bascule, il dit encore : « Seigneur, je vous adore. » 09 mars 1949, 27 avril 1950. 27 juillet 1950 Jeudi,

4h, 4h08, 4h15

Marseille
Bouches-du-Rhône Abdelkader Djaoui
et
Ahmed Ould Abdelkader Chaïbeddera

Ramdane « Raïs » Ould Lazrag ben Slimane

Djaoui, 29 ans, docker, et Chaibeddera, 30 ans, manoeuvre, abattent de deux balles (une au ventre, une dans la tête) Maurice Baudron, ancien de la marine, gardien du fortin de Corbières, à l’Estaque, puis assomment à coups de madrier et de crosse de revolver, avant de l’étrangler avec son écharpe son épouse, le 24 janvier 1949, sous les yeux de leur fillette Andrée, 6 ans, pour les voler.

Raïs, 27 ans, docker et son complice Mohammed Djemma, 25 ans, ouvrier, abattirent le 30 mai 1947 dans un bois près d’Aix-en-Provence le garagiste Finel. La victime était en pleine escapade amoureuse avec sa maîtresse Solange, qui réussit à s’enfuir. A leur actif, Ramdane avait déjà tiré sur un CRS aux Aygalades le 10 mai 1945, et Djemma avait tué un maçon à Allauch et tenté de violer sa compagne au cours d’un cambriolage le 17 mai 1947. Djemma et Raïs furent tous deux condamnés à mort. Seul Djemma, le plus jeune des quatre, fut grâcié.

Djemma est réveillé le premier pour l’annonce de sa grâce. Chaïbeddera et Ramdane prient en direction de la Mecque tandis qu’un imam leur lit des versets du Coran. Djaoui, converti au catholicisme – il répond désormais au prénom Pierre – entend la messe et communie. Il est le premier à partir, et quitte la cellule en chantant une version un peu transformée de « J’ai pleuré sur tes pas » pour y inclure des références religieuses. Au greffe, il refuse l’alcool et le tabac, et demande qu’on lui laisse les mains déliées avant d’ajouter : « J’aurais préféré mourir sur le front d’Italie. » En franchissant la porte, il dit « Pardon à tous. » Ramdane, en second, ne dit pas un mot de la cellule jusqu’à la bascule, et demeure plutôt hébété. Au greffe, Chaïbeddera boit une tasse de café – sa dernière volonté – en écrivant à son père, caïd dans l’Oranais, lettre dans laquelle il écrit : « Je suis une bête malfaisante. Ils ont raison de me supprimer. » On lui verse alors un verre de rhum qu’il boit après avoir dit : « C’est l’alcool qui m’a mené jusqu’ici : il était juste que cela finisse par un verre d’alcool. » Il ne finit pas sa cigarette, et est pris de faiblesse en voyant la guillotine. 03 février 1950, 28 janvier 1950 05 octobre 1950 Jeudi,
5h30 Paris Gabriel Jean Bernard PARRICIDE. 32 ans, préparateur en pharmacie. Abat son père Antonin, jardinier, de trois balles de revolver pour le voler le 13 novembre 1946 à Argenteuil. Condamné par les assises de Seine-et-Oise. Conscient qu’il n’échapperait pas à la mort, accueille la nouvelle avec calme. « Je serai courageux, je vous attendais tous les matins. » Il embrasse ses co-détenus Nedellec et Courtin, et se laisse faire jusqu’au bout. 09 décembre 1949 12 octobre 1950 Jeudi,
5h40 Nancy
Meurthe-et-Moselle Joseph Drzewiecki 30 ans, manoeuvre. Tue d’un coup de rail Etienne Husson, 77 ans, à Sommerviller, le 3 février 1949 pour voler 30000 frs. L’enquête mène d’abord à de graves suspicions envers la famille de la victime, qui n’appréciait guère le vieillard. La découverte des papiers du défunt dans la gare de Belfort met un terme à cette piste et ouvre celle du véritable coupable. Au réveil, à 5h, pas de surprise, s’y attendait. Assiste à la messe du père Baudricourt, communie. Ne fait aucune déclaration. Au greffe, prend un verre de mirabelle et fume une dernière cigarette. Comme il prend son temps, on l’incite à faire plus vite. « Oh, je suis pas pressé de la fumer, ma cigarette. Y peuvent bien me la laisser finir jusqu’au bout ! » Avant d’être basculé, embrasse le crucifix. 26 avril 1950 03 novembre 1950 Vendredi,
6h44 Douai
Nord Lucien Michel Gaston De Crop 39 ans, coiffeur à Lille. Empoisonna à compter du 18 décembre 1944 sa femme, née Marie-Madeleine « Georgette » Thibault, aux sels de thallium et à la mort-aux-rats, jusqu’à ce qu’elle meure le 09 mars 1946. Tenta par la suite, courant 1946, d’empoisonner également sa belle-mère, Madeleine Thibault de Montbois, 63 ans, qui avait été sa maîtresse quelques années auparavant, et qui avait compris qu’il avait empoisonné sa fille pour refaire sa vie avec sa dernière maîtresse en date. Jure qu’il est innocent et victime d’une machination. 26 avril 1950 12 janvier 1951 Vendredi,
6h35 Paris Jean-Louis Estingoy 42 ans, homme de ménage dans un centre d’accueil de Charenton, le 15 août 1947, jette dans la cage d’escalier depuis le troisième étage Pierre Virroy, 4 ans, fils d’une locataire qu’il courtisait et qui se refusait à lui. Fait tout pour retarder l’échéance : écrit une lettre (on doit lui retirer la plume des mains), demande à entendre deux messes successives et renverse l’autel quand on vient le chercher. Murmurant des paroles incompréhensibles, il fait sous lui pendant la toilette. Ses reins sont prélevés après l’exécution pour être greffés à une jeune femme de 22 ans qui survivra deux semaines à l’opération. 13 juin 1950 18 janvier 1951 Jeudi,
6h38, 6h40 Metz
Moselle Stanislas Svetlicic
et
Mirco « Michel » Pecar 29 et 23 ans, Yougoslaves, mineurs de fond. Voulant rentrer dans leur pays, mais sans le sou. Dans la nuit du 14 au 15 octobre 1946, sur la route de Merlebach, près de Saint-Avold, abattent d’une balle dans la tête le taximan Charles Diligent pour lui voler son argent, soit une dizaine de milliers de francs. Arrêtés après que Svetlicic ait tenté de revendre le taxi à un garagiste de Fontoy. Réveillés à 5h45, Svetlicic puis Pecar. Dormaient profondément. Svetlicic demande s’il est seul à être exécuté, ou bien si son complice va subir le même sort. Devant la réponse positive, il se montre satisfait : « Ce n’est que justice ». Pendant que l’abbé Genvo confesse Svetlicic, Pecar dicte à Me Taron une lettre destinée à ses parents. Puis quand vient le tour de Svetlicic de se confesser, Me Kedinger transcrit les dernières volontés de son client Pecar. Réunis pour la dernière fois à la chapelle où, détachés, ils entendent la messe et communient, les deux hommes s’embrassent et se pardonnent. Toilette dans le couloir. Partent successivement à l’échafaud avec calme et même assurance. 24 mars 1950 23 janvier 1951 Mardi,
5h34 Paris Roger Lesimple 33 ans, ouvrier agricole. Etrangle à Jumeauville le 15 décembre 1947 son collègue Aimé Blanchard qui refusait de lui prêter de l’argent, puis lui broye la tête au pilon avant de lui voler 6.000 francs. Le 20 décembre 1947, à Egry, tire sur Mlle Lécureuil, une vieille ermite, la blessant aux jambes, puis lui fracasse la tête avec une bêche pour voler 900 francs. Peu après, agresse un cafetier à Aulnay et le rate. Blesse gravement le 19 décembre 1947 à Trilport M.Henri Corbrion, sur qui il fait feu, lui transperçant un rein. Condamné à mort deux fois par les assises de Seine-et-Oise, d’abord pour l’affaire d’Egry, ensuite pour l’affaire de Jumeauville. Réveillé à 5h25 (cellule 71). S’entretient brièvement avec son avocat et l’aumônier, reçoit les Saints Sacrements. Toilette effectuée en moins de deux minutes. Exécution très rapide. 08 mars 1950, 09 mars 1950 14 février 1951 Mercredi,
7h Belley
Ain Charles Jean Czaikowski 23 ans, charpentier. Tue avec son frère Antoine le 1er mars 1950 un marchand de bois à Neuville-sur-Ain. Arrêté à Avignon. A Bourg, son frère tue un gendarme et en blesse un autre pour s’enfuir le 10 mars, et est abattu le lendemain. Réveillé par le gardien. Dit, calme : « Alors, c’est pour aujourd’hui… » Nerveux durant la toilette. 27 septembre 1950 15 mars 1951 Jeudi,
6h10, 6h11 Châlon-sur-Saône
Saône-et-Loire
Pierre André Chauve
et
Louis Antoine Edmond Niquet 41 ans, cafetier, et 50 ans, sans profession. Chauve engage Niquet comme tueur à gages pour assassiner Raymond Chevalier, 35 ans, boulanger à Demigny, et époux de sa maîtresse Louisette. Niquet abat d’un coup de fusil de chasse dans la nuit du 18 au 19 février 1950 le boulanger dans son fournil. Louisette est relaxée. 27 octobre 1950 24 avril 1951 Mardi,
4h56 Paris Joseph Pierre Lardon 47 ans, jardinier. Condamné à perpétuité en 1946 par les assises de Saône-et-Loire pour un assassinat commis à Romenay. Le 10 janvier 1949, tente de s’évader de l’hôpital de Poissy en compagnie de son co-détenu Charles Mercier, 42 ans, en abattant d’une balle de sa propre arme en pleine poitrine l’agent Charles Châtaignier, 40 ans, qui les surveillait. Mercier, qui purgeait à Poissy lui aussi une perpétuité pour vols à main armée commis en Saône-et-Loire, est condamné pour la seconde fois à la prison à vie. Condamné par les assises de Seine-et-Oise. 07 décembre 1950 28 avril 1951 Samedi,
5h10 Tours
Indre-et-Loire Raymond Georges Thaon 43 ans, journalier. Le 11 février 1950, assassina à Chinon son fils, Paul, 11 ans, en le battant et le jetant dans la Vienne. Comme l’enfant criait, il le récupéra, l’acheva à coups de pieds et le dépeca. Il battait son fils et le tua parce qu’il avait fugué. Sa femme, Lucienne Gabault, est condamnée à deux ans de prison. Pleure du réveil à sa mort. On doit le traîner pour le sortir de sa cellule et lui faire sa toilette. 22 décembre 1950 04 mai 1951 Vendredi,
4h52 Paris Raymond Schleich 26 ans, représentant. Fils de bourgeois aisés. Tua la nuit de Noël 1948 la prostituée Germaine Siberil, dite « Carmen », dont il était l’amant et le souteneur après que celle-ci en ait eu assez qu’il lui prenne son argent. Calme. Embrassé par son co-détenu Delrue. Refuse d’entendre la messe et s’en explique au père Devoyod : « Mon père, je vous aime beaucoup. Vous m’avez aidé à tout supporter. Je vous en remercie. S’il y a un Bon Dieu, dans quelques minutes, quand je serai devant lui, je m’expliquerai directement avec lui. Non, n’insistez pas, mon père. Au revoir. » Au greffe, dit pardonner au juge d’instruction, et demande à trinquer un verre de rhum avec le procureur Lindon, qui se garde bien d’accepter l’invitation. Puis, entraîné par les aides, dit « Regardez un homme qui va mourir ! » En voyant la guillotine, il dit : « C’est ça l’engin… » 20 décembre 1950 30 mai 1951 Mercredi,
4h Châlon-sur-Saône
Saône-et-Loire Robert Louis Forest 28 ans, chauffeur-livreur. Assassina, avec la complicité de sa femme, Pierrette Vella, 22 ans, sa bienfaitrice et mère adoptive, Mme veuve Roussel, 80 ans, cuisinière à Macon, en la noyant dans son lavoir le 10 septembre 1950, avant de lui voler 26.250 francs. Le couple espérait récupérer l’usage de la maison sans avoir à souffrir la présence de la vieille dame qui voyait d’un mauvais oeil leur union. Pierrette est condamnée à vingt ans de travaux forcés. 12 janvier 1951 27 juin 1951 Mercredi,
3h55, 3h56 Melun
Seine-et-Marne André Cornil
et
Gaston Alfred Dufrenel 31 ans et 29 ans, sans profession. Délinquants avant la guerre, anciens de la Waffen SS. Le 6 mai 1944, en uniforme allemand – ils sont déserté quelques mois plus tôt – ils agressent et volent M.Fenié, propriétaire du cinéma « Le Rigoletto » à Chelles, lui fracassent la tête à coups de crosse de mitraillette et tentent d’étrangler Mme Fenié, qui survit. Condamnés à vingt ans de travaux forcés pour leur passé de collabos. A la toilette, Dufrenel avoue enfin que c’est bien lui l’auteur du crime de Chelles, et que Cornil n’est que son complice. Néanmoins, la complicité d’assassinat étant passible de mort elle aussi, la justice suit son cours. 19 janvier 1951 29 juin 1951 Vendredi,
4h20 Saint-Brieuc
Côtes-du-Nord Gustave Maillot 29 ans, ancien artiste forain. A Prat, le 24 février 1950, tue à coups de binette, d’hachette et de couteau Auguste Iran, fermier, 52 ans, son fils François, 16 ans, et le valet de ferme François Geffroy, 55 ans, pour voler 300.000 francs. Réveillé par le procureur Macé. Entend la messe. Va courageusement à l’échafaud. Dernière exécution capitale de Jules-Henri Desfourneaux, qui décède le 1er octobre suivant. 31 janvier 1951 13 novembre 1951 Mardi,
5h50 Marseille
Bouches-du-Rhône Marcel Ythier 27 ans, bandit. Condamné à perpétuité pour agression à main armée à Troyes, évadé de la prison d’Auxerre, le 24 mars 1950, grâce au bandit Paul Grimaldi,
26 ans, qu’il avait rencontré aux Baumettes six ans plus tôt. Participe à 20 cambriolages à Nice, Montélimar, Avignon, Toulon, Salon-de-Provence, dans le but de récupérer des marchandises à vendre dans leur bazar commun d’Aix-en-Provence, « Le Chamonix », jusqu’à la nuit du 22 au 23 mai 1950. Arrêté alors qu’il visite un garage de Salon-de-Provence, il s’enfuit du commissariat en abattant l’agent Amiel qui meurt le lendemain à l’hôpital, touché au foie. Le 24, il tue à Lambesc, près de la route de Coudoux, le brigadier de gendarmerie Fauchier, et blesse l’agent Buisson à la cuisse. Il est arrêté le lendemain, après une battue effectuée par 500 hommes. Réveillé à 4h50. Pas de réaction, s’habille, parle aux avocats, et en sortant de cellule, dit : « Je vais crever, mais vous aussi, ça vous arrivera. » Refuse d’entendre le prêtre. Au greffe, boit le verre de rhum et fume une cigarette en confiant aux aides : « Je m’en fous de mourir, mais ce qui m’emmerde, c’est de mourir les couilles pleines ». La guillotine est montée au bout du couloir de sortie, innovation d’André Obrecht, le nouveau bourreau (depuis le 1er novembre). Les aides déclareront qu’ils ont rarement vu un client aussi calme. 31 janvier 1951 28 novembre 1951 Mercredi,
7h50 Nantes
Loire-Inférieure Joseph Jadeau 33 ans, ancien monteur en jouets, prisonnier de guerre. Auteur de plus de soixante-dix cambriolages et vols à main armée en Pays de Loire de 1945 à 1948. Abattit Mme Saulnier, buraliste, et blessa son époux et sa fille lors d’un cambriolage dans la nuit du 16 au 17 novembre 1947 à Angers. (Lien). Au réveil, crie « Y’a pas de justice sur terre ! ». Se reprend. Messe, pleure en pensant à sa mère, écrit deux lettres, dont une à sa mère, ce qui le fait de nouveau pleurer. Se reprend : « Je n’ai pas peur de la mort, j’en ai vu d’autres en Allemagne », rhum, cigarette. Derniers mots quand on l’entraîne : « Surtout, dites à ma mère que mes dernières pensées ont été pour elle et que je meurs courageusement ! » Un de ses reins est prélevé pour une greffe. 10 mars 1951 08 décembre 1951 Samedi,
5h35, 5h37 Marseille
Bouches-du-Rhône Léon Chaudon
et
Antoine Véruni 44 ans, ouvrier, lutteur forain, repris de justice et 31 ans, chanteur ambulant. Assomment, ligotent sur son lit et asphyxient Elysée Brès, 56 ans, tenancier du « Coin Fleuri » à Aix-en-Provence dans la nuit du 05 au 06 février 1948 pour lui voler trois revolvers, quelques bijoux sans valeur, des savons, et quelques billets de banque. Les trois hommes faisaient de la contrebande de cigarettes, et Brès les aurait « roulés ». Chaudon déjà condamné en 1948 à 15 ans de travaux forcés pour tentative de meurtre sur policier. Lors de l’exécution d’Ythier, trois semaines plus tôt, Véruni avait entendu le cortège et s’était habillé, prétextant au gardien qui lui disait que ce n’était pas pour lui : « Ce n’est pas grave. S’ils viennent, je suis prêt. » Exécution prévue normalement le 3 ou le 4 décembre, reportée en raison d’une panne du camion servant au transport des bois. Chaudon se dit innocent et demande à écrire une dernière lettre. Entend la messe, car catholique. Véruni, protestant, parle au pasteur. Sa cérémonie s’achève en premier. En attendant la fin de la messe, le juge lui demande s’il a des dernières déclarations. « Je n’en vois pas l’utilité, tout a été dit au procès. » Au greffe, Véruni reste calme et discute tranquillement. Chaudon râle et gémit pendant la toilette. Prudence des exécuteurs, car ancien catcheur. Réaction de panique face à la guillotine. Véruni, lui, meurt très courageusement. Durée de la double exécution : 48 secondes. 01 mars 1951 13 décembre 1951 Jeudi,
6h25 Paris Roger Emile Courtin 27 ans. Bat, assomme et étrangle dans son lit l’épicière Marie-Louise Roullois, 70 ans, à Maisons-Alfort le 24 juillet 1946 pour voler 120.000 francs. Avec la complicité d’Auguste Langevin, André Hergot et André Blot en février 1947, torture le docteur Landureau, un médecin de Theillay, dans le Loir-et-Cher, en lui brûlant les pieds, le dos et les parties génitales à la lampe à souder, à la manière des chauffeurs, en croyant à tort le praticien très riche. Arrêtés pour ce crime, Langevin et Courtin finissent par avouer le crime de Maisons-Alfort. Les quatre bandits sont condamnés à perpétuité le 29 novembre 1947 à Blois. A Paris, Langevin est à nouveau condamné à perpétuité. L’arrêt de Blois ayant été cassé en 1948, les quatre « chauffeurs » sont rejugés à Orléans le 23 janvier 1951 : verdict plus sévère cette fois, la mort pour Hergot et Courtin, la perpétuité pour Blot et Langevin. Pris au dépourvu, fond en larmes et résiste aux gardiens qui cherchent à le faire se lever. On l’habille, et le gardien-chef essaie de lui redonner du courage en lui disant : » Reste un homme jusqu’au bout. » Courtin demande à écrire successivement à son père, à sa mère et à sa fiancée, puis gémit qu’on lui enlève ses chaînes. Effondré, il est traîné jusqu’au greffe et se laisse toiletter en pleurant jusqu’à la chute du couperet. 04 mai 1950 14 février 1952 Jeudi,
6h30 Châlon-sur-Saône
Saône-et-Loire Nicolas Stephan 41 ans, vannier. Chef du « gang des romanis », chauffeurs des temps modernes, auteurs de plus de 80 agressions, perpétrées de nuit en ligotant les victimes, en les trempant d’eau froide et en menaçant de leur brûler les pieds. En septembre 1946, à Petitnoir (Jura), tue Mme Mairet. Le 20 décembre 1946, assassine de la même façon la veuve Guépy à Bragny. Arrêté en 1949, dénoncé par un passant, après une dispute au cours de laquelle une femme, membre de la bande, menace de tout dire aux gendarmes au sujet du crime de Bragny. 11 accusés : les neuf complices sont condamnés à des peines allant de la perpétuité à deux ans de réclusion. Bertrand Mayer, l’autre principal assassin, est condamné à mort lui aussi mais meurt de tuberculose avant la décision présidentielle. Pleure à son réveil, supplie qu’on ne lui fasse pas de mal. Entend la messe assis sur un tabouret, en larmes. Pleure jusque sur la machine. Poussé trop en avant par les aides. Température : -7°C. 21 juillet 1951 23 février 1952 Samedi,
6h50 Melun
Seine-et-Marne Stanislas Gwisdack 24 ans, Polonais, cambrioleur. Le 31 mars 1950, avec son complice Szepan Sczecocki, tente de s’évader de la maison d’arrêt de Melun. Entrent dans la cellule de surveillance des condamnés à mort et frappent à coups de latte de parquet les gardiens Marsaudon et Renaud. Dans sa cellule, le condamné à mort Alexandre Quinault donne l’alerte et parvient à soulever et guider Marsaudon pour que celui-ci déclenche la sonnette d’alarme. Le gardien Renaud ne survit pas. Sczecocki se pend en cellule le 22 avril suivant. Quinault, lui, est gracié le 12 juillet 1950 pour son geste. Réveillé à 6h. Au réveil, proteste, accuse la justice d’être mal rendue, puis redevient calme et docile. Avoue, surpris, qu’il ne pensait pas qu’il y ait autant de monde qui vienne le voir mourir. Le prêtre essaie de lui faire embrasser le crucifix, mais il répond : « Votre religion, c’est des mensonges. » Sur la bascule, dit fermement « Je suis prêt. » 05 juillet 1951 25 mars 1952 Mardi,
5h50 Paris Jean Trignac 37 ans, voleur et escroc récidiviste. Auteur de huit agressions à la redoute des Hautes-Bruyères, à Villejuif, selon une même technique dans six cas : attirer des commerçants sous prétexte de leur vendre quelque article en gros, puis les menacer pour obtenir leur argent. Le 09 janvier 1946, propose à M.Dutheil, des usines de charcuterie Géo, un lot de porcs, et lui vole 100.000 francs en le menaçant d’un revolver dans la nuque. Fin janvier, sous couvert d’une vente de camionnette, braque MM.Dubrocca et Boucher, garagistes, et vole 95.000 francs. Le 28 février, repropose lot de porcs au mandataire des Halles M.Blanc. Le 13 juin 1946, attaque le garagiste Bret, et vole également son portefeuille, sa montre et sa voiture. Le 24 décembre 1946, attaque le garagiste Giot et vole 300.000 francs. Le 13 mai 1947, attaque à Paris le boulanger Bocarelli, déguisé en policier, pour voler 120.000 francs. Agresse le 23 juillet 1947, le père Pierre de Gibergue, économe des Jésuites, mais face à sa résistance, doit l’assommer à coups de crosse sans pouvoir rien lui voler. Le 04 août 1947, abat de trois balles dans la poitrine à Villejuif le garagiste Guy Lagorce, de Malakoff, attiré dans le piège sous couvert d’une vente de voiture, et lui vole 320.000 francs, son pistolet et sa voiture. Sa maîtresse est condamnée à trois ans de prison avec sursis, son complice à cinq ans de réclusion. Temps de pluie. Au réveil, se dit innocent. Pendant la toilette, demande à connaître les derniers mots des condamnés qui l’ont précédé sur l’échafaud. Entraîné vers la machine, déclare : « Messieurs, vous avez devant vous… » Trop engagé sur la bascule, doit être repoussé en arrière. 07 mai 1951 05 avril 1952 Samedi, Paris Marcel Delrue 38 ans, repris de justice déjà condamné quatorze fois. Le 03 janvier 1947, à Grisy-les-Plâtres, abat le gendarme Méchin et en blessa gravement le gendarme Dubois d’une balle dans la main, et d’une autre dans la poitrine. Affirmera tout au long du procès que c’est un tir accidentel de Dubois qui a causé la mort de Méchin. Condamné par les assises de Seine-et-Oise. Croyait en sa grâce. La nouvelle le prend par surprise. Traite les personnes présentes de « bande d’encu… » et de « pourris, comme la Société que vous représentez ! ». Dans les couloirs, appelle les détenus à la révolte, et c’est sous les cris de près de 2000 prisonniers hurlant « Assassins ! » qu’il arrive au greffe. Refuse d’entendre le prêtre en criant « Je me fous de vos conneries », résiste aux gardiens et aux aides. Crie encore à la chute du couteau. 21 janvier 1951 26 avril 1952 Samedi,
5h26 Amiens
Somme Michel César Courtin 24 ans, ouvrier agricole. Assassine à Rieux-en-Cambrésis (Nord) le 27 septembre 1950 Mme Petit, cultivatrice, et sa fille de 12 ans. Condamné dans le Nord, arrêt cassé, rejugé dans la Somme. Dans la nuit du Nouvel An 1952, avec l’aide d’un gardien influençable, parvient à s’évader armé d’un revolver de la cellule des condamnés à mort en compagnie de son co-détenu Léon Meurant. Les deux hommes sont rattrapés le 2 janvier. Le 25 avril 1952, le gardien, Jacques Govin, est condamné à trois ans de prison. Persuadé d’être exécuté. Il baptisait la guillotine « Désirée » quand il l’évoquait. En sortant de cellule, dit « Au revoir les copains ». Artères prélevées par le docteur Servelle. 18 avril 1951, 21 octobre 1951 04 juillet 1952 Vendredi, Laon
Aisne Raymond Perat 30 ans. Chef d’une bande de bandits de grand chemin, anciens résistants qui écumèrent la région d’Albert, dans la Somme : Marcel Perat, Louis Leriche, Goerges Caron, Gabriel Chofflet, Noël Biausque, Alain Blondel, Roland Godbert, Lucien Chofflet, André Faucon, Roland Dupuis. Bilan des crimes : dans la nuit du 11 au 12 juillet 1944, à Becordel, Gourlin et Biausque abattent le fermier Vilain. Le 13 janvier 1948, les frères Perat et Godbert abattirent Georges Cauet à Vauchelle-les-Authie. Ajouter à cela des attaques de ferme et de débit de café et de tabac entre juin 1944 et avril 1948. Les frères Perat et Godbert furent condamnés à mort à Amiens, l’arrêt fut cassé, et seul Raymond fut re-condamné à Laon. Du réveil à sa mort, prononce un seul mot qu’il ne cesse de répéter : « C’est pas possible ! Je n’ai pas tué ! On ne peut pas, on n’a pas le droit de m’exécuter… » Ecrit une longue lettre à sa mère. Meurt avec calme et courage. 13 décembre 1950, 14 décembre 1951 22 juillet 1952 Mardi,
3h35 Metz
Moselle Eugenio « Migliardini » Cocchi 53 ans, Italien, repris de justice. Après s’être évadé de prison, alors qu’il purgeait une peine pour vol, assassine à coups de ciseaux Mme veuve Lambert et sa domestique Mlle Rose Ornai le 14 octobre 1950 à Metz, dans une villa du rempart Saint-Thiébault, afin de la dévaliser. Avait prévenu que « le jour de mon exécution, je ferai parler de moi. » Réveillé à 2h50. Surpris par la nouvelle – il avait joué les déments en prison pour se voir grâcié – il insulte les officiels. Prétendant s’appeler Gaëtano Galli, réclame un nouveau recours : « On aurait du me prévenir plus tôt qu’il avait été rejeté, j’en aurais fait un autre ! ». Avant de quitter la cellule, chante, écrit une lettre qu’il confie à son avocat, Me Kraemer. Quand vient le moment de rejoindre le greffe, résiste. Les gardiens doivent batailler pour le traîner. En chemin, refuse la messe, mais fait acte de contrition, embrasse le crucifix et reçoit l’absolution du père Genvo. Au greffe, fume et boit un verre de rhum. Poussé vers les aides, il hurle « Assassini ! Banditi ! » Toilette difficile, car il se débat. Doit être porté horizontalement, visage vers le sol, jusqu’à la bascule. 04 février 1952 17 février 1953 Mardi,
5h35 Metz
Moselle Ameur Messaoud 31 ans, manoeuvre, Algérien. Le 12 novembre 1949, à Rehon, avec ses complices Reggane Saïd et Iddir Nedaf, assomment à coups de tire-fond puis égorgent M. François Toussaint, 64 ans et Mlle Marguerite Toussaint, 36 ans, gérants d’une épicerie Sanal pour leur voler 140.000 francs. Condamnés à mort tous trois en première instance à Nancy, arrêt cassé, rejugés à Metz. Messaoud est le seul exécuté car déjà inculpé pour meurtre en Algérie, même si son procès s’était achevé par un acquittement. Réveillé à 5 heures par le procureur Liska. Très calme, fataliste. Entend les prières de Si Boualem, imam de la Mosquée de Paris, avec ferveur. Pendant la toilette, demande qu’on lui bande les yeux car il ne veut pas voir « ça ». Un aide lui conseille : « Baisse la tête », et Messaoud obéit, ce qui lui permit d’éviter de voir la guillotine. 26 octobre 1951, 24 juillet 1952 30 octobre 1953 Vendredi,
6h Nancy
Meurthe-et-Moselle René Peter 29 ans, ancien maçon au chômage. En état d’ébriété, abattit à coups de revolver 7.65, pour voler 3000 francs, les époux Joseph et Marie Joly, 68 et 69 ans, rentiers (le mari était son ancien instituteur), à Saint-Dié le 29 janvier 1952, et vole 3.000 francs et une montre. Condamné par les assises des Vosges. Au réveil, regarde son avocat, Me Souchal, avec stupéfaction et répond : « Ah, bon. On y va. » Ecrit une lettre à ses parents. Pendant ce temps, son avocat va houspiller les exécuteurs qui procèdent aux essais de la machine, et qui cessent alors. D’un grand calme, ferme, entend la messe. Refuse rhum et cigarette : « J’ai fait assez de bêtises comme ça ! » Pendant la toilette, se contente de demander aux exécuteurs : « Pourquoi est-ce que l’on m’attache ? » Quand on le soulève du tabouret, dit à son avocat – qui est son aîné de quelques années à peine – : « T’en fais pas, tu raconteras ça ! » 25 juin 1953 28 juillet 1955 Jeudi,
5h Douai
Nord Jules Duhameau 47 ans. Ouvrier textile à Sailly-sur-la-Lys, le 29 avril 1954, poignarda sa fille Georgette, 20 ans, jeune mariée dont il abusait depuis l’enfance, quand elle lui a annoncé son intention de partir s’installer avec son époux ailleurs que dans le domicile paternel. Condamné par les assises du Pas-de-Calais. Refuse d’écouter le prêtre, crie que son crime ne méritait au mieux que deux ans de prison, dit au bourreau qu’il n’a pas peur. Devant la machine, crie « A bas la France, vive la Russie, mort au capitalisme ! » 11 mars 1955 24 janvier 1956 Mardi,
6h02 Paris Louis Mathiau 23 ans. Tua d’une balle dans la tête à Gonesse le 07 septembre 1953 Omar Mahrouf, chauffeur de taxi, pour lui voler 1500 francs. Condamné par les assises de Seine-et-Oise. Au réveil, gémit : « Ce n’est pas possible ! Ce n’est pas possible qu’on me tue, vous voyez bien que je suis trop jeune pour qu’on me tue ! Je ne veux pas mourir, je ne veux pas… « , puis se met en position de combat pour qu’on ne vienne pas le chercher. Un gardien assez âgé, M.Fournil, habitué aux exécutions, usera de psychologie pour le calmer. En quittant la cellule, Mathiau lance à son voisin de cellule, Emile Buisson : »Je m’en vais, Mimile, je m’en vais. Je t’embrasse. Adieu ! » Buisson lui répond : « Sois courageux, petit ! Je suis avec toi, de tout mon cœur ! » A la rotonde, communion et lettre à la famille. Au greffe, Mathiau tente de résister aux aides et chercher à retarder l’exécution. 10 juillet 1955 28 février 1956 Mardi,
6h05 Paris Emile Buisson 53 ans, malfrat, considéré à la fin des années 1940 comme « ennemi public numéro 1 ». A partir de 19 ans, auteur de plusieurs dizaines de braquages et suspecté de peut-être vingt meurtres : sera condamné sa vie durant à 31 reprises. Gangster, commet des hold-ups entre 1937 et 1941, dont un avec mort d’homme, arrêté dans l’Aube, tente en 1942 de s’évader de la prison de Troyes en tentant d’égorger un gardien. Condamné à perpétuité le 13 mai 1943 par les assises de l’Aube. Feint la folie en 1947, interné à Villejuif, s’évade en septembre. Se rend coupable, à la tête d’une bande, de nombreux braquages, ainsi que de la mort d’au moins deux complices. Arrêté le 10 juin 1950. Condamné à mort à deux reprises : d’abord, pour l’attaque le 14 mars 1949 à Boulogne-sur-Seine du magasin des époux Baudet, bijoutiers, qu’il agresse avec leur employé Emile Guinot, devant leur devanture du 28, boulevard Jean-Jaurès, pour voler une sacoche contenant 500.000 francs en bijoux, et 45.000 francs en espèces. M.Baudet faisant preuve de résistance, il reçoit quatre balles, qui le laissent vivant mais avec un bras estropié. Seconde condamnation pour une attaque à main armée commise le 27 juillet 1949 rue Galliéni à Boulogne-sur-Seine contre deux livreurs de la Société des docks et alcools. Ses quatre complices écopent de peines entre 20 et 15 ans de travaux forcés. Condamné à perpétuité à deux reprises le 5 juillet 1954 et le 16 février 1955. Entrée des officiels à 5h30. Ne dormait pas – toujours réveillé la nuit depuis l’exécution de Mathiau. « Alors, ça y est, c’est pour ce matin… Ne perdez pas votre temps, Monsieur le Procureur, je serai courageux. » Se lave le visage, puis dit : « C’est pas la peine que je me fasse trop beau, puisque de toute façon, on va me couper la tête. » Ensuite, refuse de passer son veston pour d’identiques raisons : « Je sais qu’on va me l’enlever, alors… je le laisse là. » A la chapelle, écoute la messe, communie puis écrit une longue lettre avant d’annoncer. « Voilà, je suis prêt. » En passant devant un gardien, lui dit « Adieu, Santoni, tu as été un bon gardien pour moi. » Houspille un peu ses avocats, se laisse faire pendant la toilette mais affirme qu’il est innocent. Accepte rhum et cigarette, puis dit au bourreau : « Je suis prêt, monsieur. VOus pouvez y aller. » En quittant la pièce, dit à la cantonade : « La société sera contente de vous ». Exécution très rapide (six secondes entre porte et décapitation). 27 février 1954, 25 mai 1954 22 juin 1957 Samedi,
3h48 Amiens
Somme Kléber Delaire 57 ans. Le 07 juin 1955, assassine l’institutrice retraitée Adèle Berteaux, 80 ans, à Vadencourt-et-Bohéries (Aisne), vole argent et bijoux et met le feu à la maison. Dépèce le cadavre et le jette dans le canal qui relie Oise et Sambre. Ses complices, la veuve Zélia Prévost, septuagénaire et amie de la victime, et son épouse Yvonne Kléber sont condamnées respectivement à 20 ans et 5 ans de prison. Condamné dans l’Aisne, puis arrêt cassé, rejugé dans la Somme. Réveillé à 3h. Affirme être innocent. Entend la messe, reste calme tout le temps. Après la toilette, alors que les aides le soulèvent du tabouret, dit : « Je croyais qu’on avait droit à une cigarette… » 07 juin 1956, 25 octobre 1956 01 octobre 1957 Mardi,
5h30 Paris Jacques Fesch 27 ans, fils de bonne famille. Pour se payer un voilier à deux millions de francs, attaque à Paris le 18 février 1954 le changeur Alexandre Sylberstein pour le voler, rue Vivienne, qu’il tente d’assommer de deux coups de crosse sur la tête, et abat d’une balle en plein coeur l’agent Vergne qui s’était lancé à sa poursuite sur le boulevard des Italiens. Lors de son arrestation, blesse un passant venu aider les policiers. Alerté 48 heures avant l’exécution par son avocat. Debout depuis 3h15, attend les magistrats. Messe rapide. En passant le seuil, demande à embrasser le crucifix. Réaction de recul sur la bascule. 08 avril 1957 26 novembre 1957 Mardi,
5h20 Besançon
Doubs André Lods 24 ans, commis de ferme. Décapita à coups de hachette son ancienne patronne, Mme Chavey, 42 ans, le 5 février 1956 à Luze pour lui voler son argent sans qu’elle le dénonce. Commit le crime sous les yeux de la fille de sa victime, âgée de 2 ans. Vola une bicyclette et une liasse de billets de 10.000 francs, et fut arrêté en Suisse. Condamné par les assises de Haute-Saône. Déclarait quelques jours avant son exécution aux gardiens : « C’est l’automne, les feuilles tombent…Ma tête ne tardera pas à tomber aussi. » Réveillé à 4h50. S’entretient avec ses avocats, Me Rémond et Faivre, et prie avec le pasteur Bonal. Prend un verre de rhum et une cigarette. Très calme. 26 février 1957 07 décembre 1957 Samedi,
5h25 Marseille
Bouches-du-Rhône Alexandre Nickichine 28 ans, Russe, ouvrier agricole. Satyre assassin d’André Maubert, 10 ans, qu’il viole, étrangle puis jette dans un puits à argile le 28 juillet 1956 à Vallauris. Condamné par les assises des Alpes-Maritimes. Au réveil, se met à pleurer et à crier moitié en français, moitié en russe : « Non, non ! Je ne veux pas mourir ! Laissez-moi vivre ! » Il demande à parler au président de la République : « Il comprendra, et il ordonnera la révision de mon procès ! Il faut l’appeler ! » Pour retarder l’échéance, il parle d’une histoire de fausse monnaie dans laquelle il aurait été impliqué. Après un entretien avec le prêtre orthodoxe – Me Pollak prie à ses côtés, se calme un peu mais part à l’échafaud mort de peur. Aorte prélevée à fin de greffe. 23 mars 1957 06 août 1958 Mercredi,
5h Paris Jean-Claude Vivier 22 ans. Abattit avec Jacques Sermeus un couple d’amoureux de 20 ans, Nicole Depoué et Joseph Tarrago, le 21 décembre 1956, au parc de Saint-Cloud, pour leur voler leur voiture. Tous deux furent condamnés à mort par les assises de Seine-et-Oise (sur la photo, Vivier est à gauche, Sermeus à droite), et Sermeus est grâcié. Réveillé, s’enquiert du sort de son camarade. Les officiels restent évasifs. A la rotonde, entend la messe. Ecrit une lettre à sa mère sur les conseils de sa mère. Au greffe, refuse alcool et tabac et se laisse faire par les aides. Quand sa chemise est découpée, il demande à son avocat, Me Planty, de l’accompagner jusqu’au pied de l’échafaud, ce qui est fait. 21 mars 1958 08 août 1958 Vendredi,
4h52 Lyon
Rhône Jean-Marcel Guyenot 25 ans, garçon de café à Reims. Dans la nuit du 11 au 12 septembre 1956 sur la route entre Divonne et Gex, abat d’une balle en pleine tête Henri Estellon, 56 ans, chauffeur de taxi à Grenoble, puis lui broie le crâne d’un coup de talon, avant de blesser gravement de trois balles le neveu de sa victime, Yves Bernard, 15 ans. Se fait arrêter en essayant de franchir la frontière suisse à bord du taxi volé. Condamné par les assises de l’Ain. Réveillé à 4h20. Hébété. Fume une cigarette, discute avec son avocat, Me George. Se confesse, communie. Ecrit une lettre à son frère dans laquelle il lui lègue ses objets personnels. Puis il fait cadeau à son avocat d’une aquarelle de sa composition, qui représente une vache paissant dans un pré vert, un lieu qui lui rappelle, dit-il, sa région natale de Châlon-sur-Saône. Fume une deuxième cigarette, boit un verre de rhum. La toilette a lieu sans incident, et Guyenot va courageusement vers la guillotine. Première exécution capitale à la prison de Montluc. 19 mars 1958 27 septembre 1958 Samedi,
5h30 Paris Abdallah ben Bouguerea Bellil 29 ans, manoeuvre, membre du FLN, ancien militaire en Indochine de 1949 à 1953. Le 25 août 1957, entre dans un café, rue de la Goutte d’Or (Paris XVIIIe), avec l’intention de tuer un ennemi, Mohamed Moktar, abat de trois coups de pistolet un nommé Belhouad qu’il supposait faire partie de la même organisation rivale. 12 juin 1958 04 novembre 1958 Mardi,
4h45 Paris René Pierre Delville 26 ans, sans profession. Tue Mme Aron en lui fracassant la tête à coups de crosse de pistolet, puis abat le docteur Aron, médecin octogénaire en retraite, à Houilles, le 18 février 1956 pour voler 70.000 francs. Condamné par les assises de Seine-et-Oise. Ses complices principaux, Charles Brégand et Marie-Thérèse Denis, sont condamnés à perpétuité. Très calme. Sur le seuil, à deux mètres de la guillotine, dit « Au revoir, messieurs. » 13 juin 1958 14 avril 1959 Mardi,
4h37 Paris Jean Gaston Dupont 37 ans, cultivateur. Etrangla et brûla sa fille Chantal, 6 ans, le soir de Noel 1956 au Chêne-Simon (Eure-et-Loir), pour se venger de son ex-femme Geneviève. Condamné par les assises d’Eure-et-Loir. Réveillé à 3 h. Prêt avant même que les officiels n’entrent dans sa cellule. 07 décembre 1958 07 juillet 1959 Lundi,
4h Dijon
Côte-d’Or Mokrane ben Rabia Saïdani 32 ans, manoeuvre. Assomme de trente coups de masse, étrangle et jette dans la Bienne Aïdou Saï, le 14 avril 1958 à Saint-Claude (Jura), pour le voler. Mokrane prétexta que Saï était partisan du FLN et qu’il terrorisait les autres locataires du foyer de Saint-Claude. Crime commis avec la complicité de Medrag et Abrit Abdelkrim. Meurt avec courage après s’être entretenu avec un imam. 22 janvier 1959 30 juillet 1959 Jeudi,
4h47 Metz
Moselle Ahmed ben Behssa Abcha 25 ans, manoeuvre. En compagnie de quatre autres membres du FLN, enlève le 28 septembre 1958 un coreligionnaire, Mohammed Mekbourg, qu’il conduit dans les bois de Florange. Là, son complice Saïd Salah égorge Mekbourg avec un couteau. Bien qu’il n’ait été que complice, il sera le seul condamné à mort, ses acolytes recevant des peines allant de 20 ans de travaux forcés à cinq ans de prison. En rentrant dans la prison en pleine nuit, le fourgon contenant les bois de justice heurte trois voitures en stationnement, faisant un raffut qui réveille pas mal de riverains. 11 avril 1959 26 septembre 1959 Samedi,
6h05 Lyon
Rhône Mohamed ben Ahmed Benzouzou 32 ans, manoeuvre, ancien militaire dans l’armée française. Blesse gravement de deux balles de revolver, le 06 juin 1958 au camp des Essarts, à Roanne (Loire), son compatriote Saïd Mohamed Ounas. Ce dernier meurt à l’hôpital le 29 juillet suivant, non sans avoir eu le temps de dénoncer ses agresseurs. Acquitté le 15 avril 1959 pour un autre meurtre. Son complice, Abdelkader Chebaani, lui aussi condamné à mort, est gracié. Fort de son statut d’ancien combattant, demande s’il peut être passé par les armes et non guillotiné. 17 avril 1959 15 octobre 1959 Jeudi,
5h45 Dijon
Côte-d’Or Hasnaoui ben Hocine Addala 30 ans, manoeuvre. Responsable F.L.N. de la région de Belfort. En 1958, fait procéder à l’enlèvement et à l’assassinat, dans les bois d’Héricourt, de l’Algérien Yousfi, ce dernier refusant de verser une cotisation au FLN. Son complice, Guettal, condamné à mort également, est grâcié. Au réveil, pris de panique, pousse des hurlements et se débat comme un forcené. Il faut toute la force des gardiens et des aides pour le maintenir et le conduire hurlant vers la machine. Même l’imam venu assister le condamné se retrouve avec les vêtements déchirés dans la lutte. 11 juin 1959 31 octobre 1959 Samedi,
6h15 Douai
Nord Mohammed ben Lounès Mazi 26 ans, manoeuvre. Assassinat. Ignorait qu’on allait le guillotiner : en l’apprenant, pris de tremblements nerveux très forts qui ne cesseront qu’une fois le couperet tombé. 30 avril 1959 27 janvier 1960 Mercredi,
6h Douai
Nord Ahmed ben Ali Bouamrane 26 ans, manoeuvre. Le 20 septembre 1958, au Havre (Seine-Inférieure), tire une rafale de mitraillette sur un fourgon de police : un seul des quatre occupants, le sous-brigadier Roger Caumont, est blessé. Ses deux complices sont condamnés aux travaux forcés à perpétuité. 17 août 1959 23 février 1960 Mardi,
6h13, 6h15 Lyon
Rhône Ahmed ben Akli Cherchari et Ahcène ben Mohand Aït Rabah 39 ans, ouvrier spécialisé, et 33 ans, manoeuvre. Aït tua de plusieurs balles de revolver un messaliste, Slimane Nagou, le 15 février 1958 à la sortie d’un bar lyonnais fréquenté par les membres du F.L.N. Cherchari lui remit l’arme. Cherchari fait écrire une lettre à sa mère par son avocat. « Dites à ma mère que je meurs pour ma patrie, et que je mourrai courageusement. » Les deux hommes vont à l’échafaud sans faire d’histoires. 10 septembre 1959 17 mars 1960 Jeudi,
6h Lyon
Rhône Abdallah « Ahmed » ben Larbi Kabouche 42 ans, maçon, ancien de la guerre d’Indochine. Abat le 1er mai 1958 aux Brotteaux, à Lyon, Lkrichi Driz, accusé par le FLN d’être un traître à leur cause et d’avoir dénoncé plusieurs membres du parti. Se montre très calme. Dans l’antichambre menant dans la cour, il s’entretient quelques instants avec son avocat, Me François La Phuong. Le défenseur lui demande s’il veut qu’il écrive à sa mère : Kabouche répond oui en hochant la tête. Le condamné réclame ensuite une cigarette, et Me La Phuong lui donne l’une de ses Lucky Strike. Après en avoir fumé la moitié, il l’écrase, dit « On y va ! » et se laisse saisir par les aides. Sur la bascule, pousse un hurlement. 24 septembre 1959 05 avril 1960 Mardi,
5h25, 5h27 Lyon
Rhône Touïr ben Mohamed Feghoul et Menaï ben Amar Brahimi 32 et 33 ans, membres du FLN. Brahimi avait participé à la torture d’un militant du MNA, Aissani, qu’on retrouva assassiné à Caloire, dans la Loire. Il organisa le meurtre d’un nommé Daoudi,
dit « L’Indochine », un Algérien connu pour ses opinions francophiles : Daoudi fut abattu de trois balles de pistolet le 14 décembre 1957 à Firminy (Loire) par Feghoul. Feghoul se montre ferme. En quittant le quartier des condamnés, dit à l’intention de ses co-détenus : « Adieu mes frères, grâce à notre sacrifice, l’Algérie vivra. » Pris de petits frissons au greffe, se reprend. Le colonel Morel, commissaire du gouvernement, lui offre une cigarette qu’il refuse, de même que celle que lui propose son avocat. « Le FLN me paie des cigarettes jusqu’à la dernière minute. » Il sort son propre paquet, tire deux bouffées puis va vers la guillotine. « Bourreau, fais ta sale besogne, j’offre ma tête pour ma chère patrie. » L’imam intervient pour que le condamné fasse une dernière prière pour que Dieu lui pardonne. Accepte, puis se laisse guillotiner. Brahimi, calme mais nerveux, dit aux officiels pendant la toilette : « L’Algérie vivra ! Dites au général de Gaulle qu’il a oublié 1939 ! » 12 décembre 1958 (les deux), 26 janvier 1959 (Brahimi seul) 14 avril 1960 Jeudi,
5h Douai
Nord Abdelkader ben Ahmed Ould Aïssa 27 ans, mineur. Le 1er juin 1958, abat à coups de revolver Mebarek Deheri, ancien membre du F.L.N qui avait trahi la cause et s’était enfui en volant 700.000 francs à l’organisation. Son complice Amar Lounes, 22 ans, condamné à mort, voit sa peine commuée en travaux forcés à perpétuité. 23 octobre 1959 21 juin 1960 Mardi,
4h52 Bordeaux
Gironde René Charles « Raymond » Pons PARRICIDE, 54 ans, cultivateur au hameau des Coulauds, commune de Montpeyroux (Dordogne). Avec son compagne, Yvette Chabrol, épouse Reysset, de trente ans sa cadette, attaque sa mère Jeanne Guillot, veuve Pons, 78 ans, et la fait brûler vive dans la cheminée le 21 mars 1958. Condamné par les assises de Dordogne, Yvette condamnée à perpétuité. Réveil à 4h. Dort bien. S’habille et demande à écrire. La rédaction prend du temps et le juge s’impatiente. Se confesse et communie. Au greffe, boit un grand verre de rhum. Le condamné est si petit et frêle – 1m54 – que l’un des aides lui dit : « Ne t’inquiète pas, on ne va pas te faire de mal. » Exécution très rapide. 19 novembre 1959 08 juillet 1960 Vendredi,
4h Dijon
Côte-d’Or Mahmoud ben Chérif Mokrani 23 ans, Algérien, manoeuvre à Givors. Assassine à Seyssuel (Isère) avec trois complices un Algérien opposant au F.L.N. Condamné en première instance en compagnie de Tafer Boukhmis, arrêt cassé. Très courageux. Ecrit une lettre à son oncle : « Mon cher Oncle, je te prie d’écrire à ma mère et la saluer. Embrasse tous mes frères et dis-leur que Dieu dispose de toutes choses et que je ne meurs pas pour rien. » 27 avril 1959, 10 novembre 1959 09 juillet 1960 Vendredi,
4h48 Lyon
Rhône Boukhmis ben Lakhdar Tafer 24 ans, manoeuvre. Membre d’une troupe de choc FLN, assassina deux membres du FLN : l’imam Ezziane, le 13 janvier 1958, et Mohamed Douha, le 27 janvier 1958, tous les deux à Givors. A son réveil, s’adresse à ses co-détenus condamnés à mort dans les cellules voisines : « Adieu, mes frères ! Ils m’emmènent ! Saluez bien de ma part l’Algérie, ma patrie. Adieu Mahmoud… Adieu Moussa ! Bon courage, et bonne chance ! » Tout au long de ses dernières minutes, d’un calme absolu, répète : « Nous mourrons et l’Algérie vivra. » Refuse d’entendre les prières des morts. Demande à son avocat, Louis Denuelle, d’écrire à son père. Meurt courageusement. 15 juin 1959, 23 juillet 1959 26 juillet 1960 Mardi,
4h06 Paris Georges Philippe Paul « Monsieur Bill » Rapin 24 ans, gérant de café. Enfant de bonne famille, complexé par les exigences familiales et une taille modeste, se rêve grand truand. Abat le pompiste Roger Adam le 04 avril 1958 à Villejuif après une simple dispute au sujet d’essence répandue au sol. Abat puis fait brûler vive en forêt de Fontainebleau Muguette « Dominique » Thiriel, 24 ans, dont il était le souteneur, le 30 mai 1959, parce que celle-ci ne lui rapportait pas assez d’argent et n’avait donc pas pour lui le respect qu’elle lui devait. Réveil à 3h30. Déjà debout. Calme, suit ses gardiens et discute avec le père Devoyod et écrit une lettre à sa fiancée Nadine. Conduit au greffe, s’énerve, traite juges et exécuteurs de « dégueulasses ». Accepte verre de rhum et cigarette. Exécution rapide. 31 mars 1960 27 juillet 1960 Mercredi,
5h16 Paris Mohammed ben Mohammed Guelma 36 ans. Association de malfaiteurs, complicité d’enlèvement, tentative d’assassinat. Condamné par le tribunal permanent des forces armées de Paris. Hurle du réveil jusqu’au couperet, doit être porté par les aides sur la bascule. 13 janvier 1960 30 juillet 1960 Samedi,
4h Lyon
Rhône Abderrahmane ben Ammar Lakhlifi 20 ans, manoeuvre. Organise le 20 septembre 1958 un raid contre un commissariat de Lyon, place Antonin-Poncet à Bellecour, où sept personnes furent blessées. Meurt très calmement : dans la prison retentissent les cris et les protestations des autres détenus en apprenant l’imminence de son exécution. Certains condamnés de longue date procèdent, à tout hasard, à leurs dernières ablutions. Un détenu nommé Actis (Robert?), arrêté pour avoir refusé d’aller se battre en Algérie et enfermé à Montluc faute de place, l’encourage : « Courage, mon frère ! » et hurle aux officiels : « Assassins ! » Parvient à tromper quelques secondes la vigilance des gardiens pour échanger un regard et un dernier sourire avec un autre condamné, Moussa Lachtar, à travers le judas de la cellule de ce dernier. Saisi par les matons, crie : « N’ayez pas peur, mes frères ! Courage et patience ! » 12 janvier 1960 05 août 1960 Vendredi,
4h35, 4h40 Lyon
Rhône Miloud ben Larbi Bougandoura et Abdelkader ben Mohamed Makhlouf 39 ans et 29 ans, manoeuvres résidant à Villeurbanne. Surnommés « Les Etrangleurs de la Doua ». Avaient exécuté avec des complices, membres d’un groupe de choc FLN, onze coreligionnaires qui refusaient de payer leurs cotisations au FLN entre le 16 septembre 1957 et le 2 juin 1958, toujours suivant la même méthode : les victimes étaient étranglées (cordelette, foulard, cable électrique ou mains nues) dans une cabane de jardin de Villeurbanne, quartier de la Doua. Eux et deux autres assassins furent condamnés à mort. La veille au soir, Miloud affirme à tous ses co-détenus avoir repéré le bourreau dans la cour, et se prépare dès lors à mourir en rédigeant une lettre à sa femme. Réveil à 4h50. Le commissaire du gouvernement refusant que les condamnés puissent prier, Makhlouf prie en silence, mains attachées. En quittant le quartier, il crie : « Vive l’Algérie ! Salauds de Français ! » et crache au visage du commissaire du gouvernement. Miloud, conduit cinq minutes plus tard, s’arrête à la porte de trois cellules pour parler à ses co-détenus, dont Moussa Lachtar, à qui il dit : « Tu vois, frère, comme je te l’ai dit, ils m’emmènent. Dis aux frères de me pardonner. Bonne chance et courage. Ecris à mes parents. » Tous deux meurent avec courage. 24 février 1960 27 août 1960 Samedi,
5h05, 5h07 Paris Ali ben Aïssa Seddiki et Mohamed Seghir ben Ahmed Tirouche 29 ans et 28 ans. Tuèrent un anti FLN soupçonné d’être un indicateur de police, Khiari, le 05 août 1958 à St-Pierre-de-Vauvray (Eure). Malgré la volonté de l’un d’eux de mourir sans être assisté par un prêtre, Seguir et Siddiki entendent l’imam avant de mourir. Tirouche écrit à sa mère : « Chère mère, je serai guillotiné dans quelques minutes. Je meurs comme des centaines de milliers d’Algériens pour le triomphe de notre révolution. Je suis convaincu que la révolution algérienne vaincra. Je t’embrasse avec toute mon affection et exprime avant de mourir l’amour de la patrie. » 04 mai 1960 08 décembre 1960 Jeudi,
5h, 5h05 Paris Hamou Bousetta et Abderrahmane Abdelkader ben Hadj 31 ans, Algérien, ouvrier et 27 ans, Marocain, ouvrier carrossier. Condamnés pour avoir, à Paris, près de l’impasse Saumon, assassiné un certain Kaci, membre du MNA, dans la nuit du 27 au 28 octobre 1957. Ben Hadj écrit à sa mère : « Mère Chérie, dans quelques instant, je vais mourir pour l’Algérie et les Algériens qui ont tant fait pour nous. Ne pleure pas, je meurs en Combattant. J’espère que mon Gouvernement arrêtera les assassinats de De Gaulle. Vive l’A.L.N. Vive l’Afrique du Nord. » Bousetta, lui, écrit à son épouse : « Ma chère Femme, je serai mort sous peu car l’Indépendance n’est pas gratuite. Le Général de Gaulle m’exécute comme un criminel alors que je meurs Chahid. Tu peux être fière de moi, et dis autour de toi que la lutte doit continuer jusqu’à l’Indépendance totale. Vive l’A.L.N. Vive l’Algérie. » L’un des condamnés se défend tant et si bien qu’un gardien a l’arcade sourcillière ouverte. 25 mai 1960 31 janvier 1961 Mardi,
5h45 Lyon
Rhône Salah ben Laïd Dehil 33 ans. Membre d’un commando FLN qui attaque le 8 septembre 1958 le commissariat de police place Jean Macé, à Lyon (quartier de la Guillotière) et abat de plusieurs balles le sous-brigadier Armand Sudon qui quittait alors le poste. 21 juillet 1960 07 décembre 1961 Jeudi,
5h45 Marseille
Bouches-du-Rhône Pierre Louis Jalbaud 39 ans. Voleur, libéré de la centrale de Nîmes après huit ans de travaux forcés, le 19 août 1957. Achète une carabine 22 long rifle et parcourt le Sud à bord d’une voiture volée à Béziers. Le 24 août, braque une station-servie au Dramont (Var) et se fait prendre son arme par le pompiste. Abat le 27 août 1957 l’armurier Edouard Galinier à Marseille, vole une carabine, des balles, et le contenu du coffre-fort. Le 20 septembre, à Montferrand (Puy-de-Dôme), il braque l’épicier Durif, et l’ampute d’un pouce d’une balle de carabine. Le 1er octobre, à Albi, abat le comptable Georges Fagès, pour lui voler la paie des employés, soit 700.000 francs. Accueille le procureur par « Ne dites rien, je m’y attendais. » S’habille calmement, écrit à sa famille, communie avec l’aumônier et demande qu’on donne ses affaires au premier détenu libérable. Refuse qu’on découpe sa chemise, se met torse nu. Ayant eu le droit d’élever un chaton en cellule, ses derniers mots sont pour lui : « Où est mon minou ? » 28 janvier 1961 07 juin 1962 Jeudi,
4h12 Marly-le-Roi
Seine-et-Oise Albert Dovecar et Claude Piegts 24 ans, Croate, ancien légionnaire et 28 ans, agent d’assurances à Alger. Membres du commando Delta de l’Organisation Armée Secrète en Algérie, aux ordres du lieutenant Roger Degueldre, participent le 31 mai 1961 à Alger à une attaque au domicile du commissaire central adjoint Roger Gavoury, 50 ans, auquel il était reproché une trop grande dévotion envers la Ve République, lequel meurt poignardé à coups de couteau de parachutiste. Jugés par le tribunal militaire siégeant au Palais de justice de Paris. Tenne et Petri sont condamnés à la réclusion à perpétuité, Malmassari à dix ans de prison et Frappoli à cinq ans de prison avec sursis. 30 mars 1962 06 juillet 1962 Vendredi,
3h56 Ivry-sur-Seine
Seine Roger Hercule Gustave Degueldre 37 ans, lieutenant au 1er régiment étranger de parachutistes. Déserteur après le putsch des généraux en 1961, rallie l’OAS au sein de laquelle il fonde les commandos Delta. Le 15 mars 1962, dirige une opération contre le centre social de Château-Royal, à El-Biar (Algérie) au cours de laquelle six dirigeants des centres sociaux sont fusillés à l’arme automatique. 28 juin 1962 11 mars 1963 Lundi,
6h40 Ivry-sur-Seine
Seine Jean Marie Bastien-Thiry 35 ans, ingénieur militaire, lieutenant-colonel dans l’Armée de l’air. Le 22 août 1962, organise l’opération « Charlotte Corday », un attentat contre le général Charles de Gaulle, président de la République. A proximité du rond-point du Petit Clamart, douze hommes font feu sur la Citroën DS du président, à coups d’armes automatiques : quatorze balles atteignent le véhicule, crevant les pneus et brisant la glace arrière, mais sans pour autant toucher le couple présidentiel, qui se baisse à temps et peut rallier l’aérodrome militaire de Vélizy-Villacoublay. Au total, 187 balles furent tirés sur le convoi ! Le seul blessé, M.Fillon, est un père de famille conduisant dans le sens opposé et qui se retrouve, avec sa femme et leurs trois enfants, pris dans la mitraille et légèrement blessé à un doigt. Alain de la Tocnaye et Jacques Prévost, condamnés à mort, bénéficient de la grâce présidentielle. Pascal Bertin, Gérard Buisines, Alphonse Constantin, Etienne Ducasse, Pierre-Henri Magade et Laszlo Varga, les tireurs, sont condamnés à des peines de réclusion, et finissent grâciés en 1968. Cinq autres conjurés, absents, sont condamnés par contumace à mort ou à la réclusion. 04 mars 1963 17 mars 1964 Mardi,
4h50 Paris Stanislas Juhant 28 ans, yougoslave. Tue le 24 janvier 1961 l’épicière Marie-Thérèse Aupetit, rue Lantiez, pour la voler. Son complice Pawel Simsic est condamné à mort et grâcié. Calme, presque détendu. Entend la messe, rédige une lettre, et pendant la toilette, se parle tout seul en yougoslave. Seule réaction de recul sur la bascule, mais sans violence et très facile à maîtriser. 29 octobre 1963 17 juin 1964 Mercredi,
4h45 Fort-de-France
Martinique Raymond Anama 39 ans, cultivateur (né le 24 novembre 1925 au Lamentin). Condamné à 10 ans de travaux forcés le 25 juin 1952 pour viol et tentative de meurtre. Libéré en conditionnelle le 01 décembre 1959. Condamné à 5 mois de prison pour vol en juillet 1961. Satyre assassin d’une petite fille de 8 ans, qu’il viola et noya dans le Lamentin, en novembre 1962. Arrêté le 14 novembre. Le 02 janvier 1963, il s’évade avec deux autres prisonniers, et il est rattrapé le lendemain, place Stalingrad à Fort-de-France. Un des autres évadés, Germain Labarraque, est abattu par les gendarmes. Anama s’était gravement blessé aux reins en sautant du mur. Prévenu de l’arrivée du bourreau la veille ou l’avant-veille de l’exécution. Décapité en présence du juge Buhot, du père Huré et du pasteur Itty, de M. Bascon, directeur de la prison, et du médecin M. Barbe. Très calme, entend le pasteur et meurt sans prononcer un mot. La guillotine est laissée sur place au cas où. décembre 1963 27 juin 1964 Samedi,
3h45, 3h55 Lyon
Rhône Mazouz Ghaouti

Robert Actis

Ghaouti, 42 ans, surnommé « Le Gorille » : assomme le 10 octobre 1961 à Valence une mercière, Mme Schenine, pour lui voler son tiroir-caisse. Il assomme mortellement à coups de barre de fer le 13 octobre 1961 Alfred Gardien, poissonnier, dans sa boutique place Jules Guesde à Lyon.

Actis, 27 ans, ouvrier aux usines Berliet à Vénissieux : abat d’une rafale de mitraillette le 31 mai 1962 Bernard Mathieu, convoyeur de fonds chez Berliet, et lui vole la paie des ouvriers, soit 369.500 francs. Ses deux principaux complices, Sairge et Marque, sont condamnés à perpétuité et vingt ans de réclusion.

Premier réveillé, Ghaouti veut assommer les officiels avec le tabouret de la cellule, mais ce dernier est enchaîné à un tuyau pour empêcher qu’on s’en serve d’arme. Hurlant de rage, se débattant, il envoie les gardiens contre le mur. Refuse de s’habiller, reste en pyjama. Continue à s’agiter une fois ligoté en voyant la guillotine, terrifié, crie de peur. Actis, « réveillé » après la mort de son voisin de cellule, prend la nouvelle avec fermeté. Il accepte de parler au juge d’instruction qui lui demande s’il a une dernière révélation à faire, puis il tend la main au magistrat pour un shakehand. Il s’habille, pantalon gris, chemise claire, et quitte la cellule. En regardant les gens présents, il murmure : « Il ne manque que mon père » (ce dernier condamné à deux ans de prison pour recel dans la même affaire que son fils). Il entend la messe, communie, se confesse. Un surveillant lui tend un gobelet de rhum, qu’il boit sans plaisir : « Pouah, c’est pas fameux. » Quand on lui propose une cigarette, il demande si c’est obligatoire, et devant la réponse négative, dit qu’il n’en veut pas. Pendant la toilette, il demande à un aide : « Est-ce que ça fait mal ? » « Non, tu ne sentiras rien. » Après cela, il fait une remarque à Obrecht : « On ne pourra pas dire que je meurs tard. Il est bien tôt… » C’est torse nu qu’il va à la machine, calmement, sans résister. 13 novembre 1963, 31 janvier 1964 22 juin 1965 Mardi,
4h40 Fort-de-France
Martinique Landry-Lambert Gau 28 ans, marchand de bestiaux. Le 01 novembre 1963, dans le quartier Dumaine, au François, étrangle Pierre Louisy, 76 ans, et vole son portefeuille. Blessa grièvement Valentine et Gilles Daude, qui vivaient au même endroit, pour les voler. A l’instar d’Anama un an plus tôt, averti de l’arrivée du bourreau quelques jours avant l’exécution. Réveillé à 4h, demande à voir sa femme et leurs sept enfants. 12 décembre 1964 22 mars 1966 Mardi,
5h22 Lyon
Rhône Saïb Hochani 30 ans, demeurant à Chambon-Feucherolles (Loire). Prétendait être un « passeur » d’hommes vers l’Algérie. Le 16 novembre 1962, tue à coups de hachette Mohamed Hadji – qui devait s’embarquer prochainement pour Alger – pour lui voler 1450 francs et jette le corps dans une canalisation souterraine. Le 8 décembre 1962, il tue au hachoir à viande et au pique-feu chauffé au rouge Nedjaï Ahmed, 30 ans, qui devait regagner incessamment Oran, et enterre le corps au bord d’une rivière, à l’intérieur d’un sac à charbon. Le corps, retrouvé par des chiens, mettra la police sur sa trace. Le 13 février 1963, tue le chiffonnier Messaoud Bouguerry, à coups de manche de pioche avant de faire brûler le corps en l’imbibant de bouillon gras. Condamné par les assises de la Loire, siégeant à Saint-Etienne. Son complice, Arrar S., est condamné à vingt ans de prison. Meurt courageusement, indifférent à son sort. 29 octobre 1965 16 décembre 1967 Samedi,
5h Metz
Moselle Gunther Volz 29 ans, déserteur de la Légion Etrangère. Satyre assassin de Solange Kintzinger, 9 ans, à Basse-Yutz le 13 mars 1967. Sous un faux prétexte, emporte la fillette sur son cyclomoteur, et la poignarde dans un bois avant d’abuser d’elle. Se montre très calme, ne manifeste aucun remords. Se lave, s’habille et se rase. Accepte d’entendre la messe et de communier. Au greffe, refuse le verre de rhum et la cigarette. 23 juin 1967 11 mars 1969 Mardi,
5h30 Amiens
Somme Jean Laurent Olivier 25 ans, cultivateur. Tua Pierrette et Lucien Demarle (12 et 10 ans), et viola Pierrette, le 17 juin 1967 à Montlevon. Condamné par les assises de l’Aisne. Ne dit pas un mot quand on le réveille, mais pris de faiblesse, doît être soutenu par deux matons même durant la messe. Conduit à l’échafaud sans résister. Son cerveau est examiné par le docteur Sylvie Schaub. 27 septembre 1968 28 novembre 1972 Mardi,
5h13, 5h20 Paris Claude Gabriel Buffet
et
Roger Bontems
Bontems, 36 ans, condamné à Nancy à vingt ans de réclusion en 1966 pour agression à main armée d’un chauffeur de taxi. Buffet, 39 ans, condamné à perpétuité à Paris en 1970 pour avoir abattu et volé Mme Françoise Besimensky, mannequin, en 1967. Dans la nuit du 21 au 22 septembre 1971, égorgèrent au cours d’une prise d’otages une infirmière, Nicole Comte, 35 ans, et un gardien de la prison de Clairvaux, Guy Girardot, 28 ans. Condamnés par les assises de l’Aube. Bontems est réveillé le premier, à 4h55. Il accueille ses visiteurs en souriant : « Alors, c’est la grâce ? » Devant leur négation, il quitte son lit et demande : « Bien. Alors, on y va ? » Après avoir passé ses vêtements civils, il donne à Me Lemaire les lettres de ses parents, un cadre avec la photo de Sainte Thérèse de Lisieux, puis essaie de se rouler une cigarette. Le gardien-chef lui offre une cibiche toute prête de son paquet. En chemin pour le greffe, Me Lemaire parle à Bontems. A la rotonde, il écrit à ses parents, puis entend la messe du père Clavier et communie. Il embrasse le prêtre, puis ses avocats. Au greffe, un verre de rhum en main, demande « Où c’est qu’il est, le bourreau ? » avec l’envie manifeste de lui envoyer l’alcool dans la figure. Puis il boit le verre, se laisse attacher et exécuter. Buffet, réveillé au moment où Bontems quitte sa cellule, réagit assez similairement : « Ah, bon ! Très bien, très bien… » En pyjama, rédige un dernier mot sur des lettres déjà écrites à l’avance, les donne à Me Lévy, puis repasse ses vêtements de prisonnier. Refusant d’être soutenu par les gardiens, il demande au sous-directeur de donner un message à Bontems : « Au revoir et à tout à l’heure. » Il parle avec le père Clavier, communie. Au greffe, quand les officiels s’approchent de lui, il les arrête d’un geste de la main : « Foutez-moi la paix, laissez-moi tranquille, je sais ce que j’ai à faire. » Il refuse l’alcool, et fait tout pour que la « cérémonie » soit la plus brève possible. 29 juin 1972 12 mai 1973 Samedi,
4h40 Marseille
Bouches-du-Rhône Ali Ben Abdelsselen Ben Yanès 34 ans, carreleur, tunisien. A Gattières (Alpes-Maritimes), le 28 septembre 1971, égorgea la petite Danielle Marra (7 ans) lors d’une attaque à main armée, et blessa grièvement Mme Marra, qui était enceinte. Condamné par les assises des Alpes-Maritimes. Hébété, suit sans réagir les officiels. S’entretient avec un imam, refuse l’alcool à cause de sa religion, mais accepte un verre d’eau et fume une cigarette. Avant de quitter la pièce, demande pardon à la France ainsi qu’à tous ceux à qui il a pu faire du mal. 29 septembre 1972 28 juillet 1976 Mercredi,
4h13 Marseille
Bouches-du-Rhône Christian Ranucci 22 ans, représentant de commerce. Accusé d’avoir tué la petite Marie-Dolorès Rambla le 04 juin 1974 près de Marseille. Lien vers le site pour sa réhabilitation. Au réveil, se débat et demande à parler à ses avocats. Proteste de son innocence. Reste en pyjama et pieds nus. Refuse les secours de la religion en disant un simple « Négatif ! » Au greffe, refuse l’alcool et fume une cigarette. A ses avocats, dit « Vous ne voudriez tout de même pas que je vous félicite… » Apparemment, n’a pas dit, comme le veut la légende, qu’on le réhabilite. 10 mars 1976 23 juin 1977 Jeudi,
4h30 Douai
Nord Jerôme Carrein 36 ans, sans profession, père de cinq enfants, illettré (il apprendra à écrire et à compter en cellule), tuberculeux et alcoolique. Tenta de violer et noya Cathy Petit, 8 ans, le 27 octobre 1975 à Arleux. Condamné dans le Pas-de-Calais, arrêt cassé, re-condamné dans le Nord. La cour de la prison étant pavée, le montage est un peu hasardeux, et les aides se prennent de bec. Au réveil, Carrein se fâche : « Ah, alors c’est ça ? Giscard a refusé ? C’est un enculé ! Il gracie les Arabes, mais pas les Français ! » Il demande – comme il l’avait souhaité auparavant – à serrer la main de tous les gardiens qui l’ont surveillé durant sa vie de condamné, et regrette que l’un d’eux, qu’il qualifie d’ »homme qui a été le plus gentil avec lui de toute sa vie » soit de surveillance dans un mirador de la prison, et donc dans l’impossibilité de venir. Entend la messe, communie. La toilette a lieu dans le couloir qui sépare le greffe de la cour. Carrein franchit un rideau noir tendu devant la porte avant d’être basculé. Meurt courageusement. 12 juillet 1976, 01 février 1977 10 septembre 1977 Samedi,
4h40 Marseille
Bouches-du-Rhône Hamida Djandoubi 28 ans, tunisien, ancien manutentionnaire, amputé de la jambe gauche suite à un accident de motoculteur. Le 03 juillet 1974, dans son pavillon de Marseille, villa Paradis, torture et viole de longues heures Elisabeth Bousquet, son ex-compagne, 21 ans, qui avait refusé de se prostituer pour lui et qui l’avait dénoncé à la police. Après cela, il emmène la jeune femme dans un cabanon en ruines près de Lançon-en-Provence, et l’y étrangle. Au réveil, demande à mettre sa jambe artificielle. Très calme. Au greffe, fume deux cigarettes, puis en demande une troisième, une Gitane, son tabac préféré. Marcel Chevalier, l’exécuteur en chef, proteste : « Ah non, ça suffit ! On a été assez conciliants. Il fallait y penser avant. » 25 février 1977

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